Point de presse conjoint de M. Jacques CHIRAC Président de la République et de M. Gerhard SCHROEDER chancelier de la République fédérale d'Allemagne à l'issue de leur entretien

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Genshagen- Allemagne, le lundi 9 février 2004

LE CHANCELIER SCHROEDER - Mesdames et Messieurs, nous nous retrouvons, comme toujours, dans un cadre amical pour des entretiens amicaux, dans cette formation régulière, toutes les six semaines. Au centre de nos entretiens qui vont se poursuivre au cours du déjeuner, nous avons abordé pour le moment essentiellement les sujets européens. Nous pensons ensemble que le processus constitutionnel doit aboutir et nous espérons que ceci pourra se faire pendant la présidence irlandaise, qui fait un excellent travail, mais pas à n'importe quel prix. La règle de la double majorité doit rester telle que prévue. Nous espérons que l'on pourra faire des progrès quant aux décisions prises à la majorité qualifiée et enfin nous pensons qu'il faut à l'avenir améliorer l'efficacité du travail de la Commission.

En ce qui concerne les perspectives financières, nous avons réitéré notre position telle que nous l'avons énoncée dans la lettre commune que nous avons écrite, avec nos partenaires, au mois de décembre : telle reste notre ligne.

En ce qui concerne l'élargissement, nous avons là aussi confirmé les positions que nous avons prises lors du conseil européen.

Bien entendu, nous avons procédé à un échange de vues sur la situation internationale, notamment en ce qui concerne l'Afghanistan. Vous savez que nous y sommes très fortement engagés et que l'Eurocorps devrait prendre la relève à la tête de la FIAS au mois d'août. Nous sommes également en train de voir dans quelle mesure le rôle de la brigade franco-allemande pourrait apporter une contribution dans ce pays. Sur ce point, l'étude du dossier n'est pas encore tout à fait terminée. Nous avons bien sûr parlé de l'Iraq et des questions économiques.

Une fois encore, nos entretiens ont montré à quel point cette coopération franco-allemande était étroite, marquée par l'amitié, marquée par des échanges très riches sur le plan humain et que tout cela est de nature à aider nos pays à progresser et à aider l'Europe à aller de l'avant et renforcer le poids de l'Europe dans le contexte international.

LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE - Je voudrais remercier le Chancelier de son accueil et lui dire la joie qui est la mienne, et la nôtre, de le retrouver dans cette superbe institution. Et j'étais heureux ce matin de pouvoir saluer ici le ministre président du Land du Brandebourg et M. VON THADDEN qui est un vieil ami.

Sur le reste, je n'ai rien à ajouter à ce que vient de dire le Chancelier. Sur les problèmes européens que nous avons évoqués, nous partageons exactement le même sentiment, nous avons la même position. C'est ce que dira, ce soir, en notre nom à tous les deux, le Chancelier au Premier ministre irlandais, président en exercice de l'Union européenne. Notre vision de l'avenir de l'Europe, économique, financière est exactement la même, comme le Chancelier vient de le dire.

Quant à notre approche des problèmes internationaux, elle est également identique ; c'est vrai en particulier pour ce qui concerne l'Iraq où l'Allemagne et la France ont une position rigoureusement identique. Enfin, nous avons évoqué la nécessité de renforcer l'intégration de nos positions, d'aller plus loin dans ce domaine entre l'Allemagne et la France. Dans un certain nombre de domaines, nos partenaires allemands ont fait des propositions auxquelles nous sommes tout à fait favorables.

QUESTION - Ces propositions allemandes sur l'approfondissement, qui viennent d'être évoquées, est-ce que vous pourriez nous préciser de quoi il s'agit ?

D'autre part, le porte-parole du syndicat Chimie et Mines a tenu aujourd'hui des propos assez vigoureux en ce qui concerne le projet d'OPA de Sanofi. Est-ce que vous avez également eu un échange à ce sujet ?

LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE - Sur le premier point : ce soir, le Chancelier parlera aussi bien au nom de la France qu'au nom de l'Allemagne à la présidence irlandaise. Je le répète : nous sommes tout à fait d'accord. Nous souhaitons un accord dès le mois de juin, sous présidence irlandaise, pour la Constitution européenne. Mais dans l'hypothèse où cela ne serait pas possible, nous estimons qu'en tout cas, il faudra que cet accord intervienne sous présidence néerlandaise, c'est-à-dire avant la fin de cette année.

Sur les modalités, nous avons également un accord sans réserve : qu'il s'agisse de l'application proposée, souhaitée par la Convention, de la double majorité, avec le principe 50/60, qu'il s'agisse d'une Commission réduite en nombre, pour être efficace et pour être véritablement européenne le plus vite possible ou qu'il s'agisse d'empêcher le Conseil européen d'être bloqué par une règle de l'unanimité excessive. Nous souhaitons donc que les décisions à la majorité puissent couvrir un nombre plus important de sujets. Voilà pour ce qui concerne le premier point.

Pour Sanofi, ce sont des affaires privées cotées en bourse et les décisions ne dépendent pas des gouvernements. En revanche, le Chancelier et moi avons fait part de notre très grande vigilance pour ce qui concerne l'emploi et les centres de recherche. Et je me suis réjoui des déclarations officielles qu'a faites le président de Sanofi à Francfort pour confirmer qu'en aucun cas l'emploi, c'est-à-dire les quelque 9 000 emplois allemands d'Aventis ou les centres de recherche de Francfort et de sa région ne pourraient être mis en cause par l'opération en cours. C'est à nos yeux, évidemment, quelque chose d'essentiel.

LE CHANCELIER SCHROEDER - Permettez-moi de dire un mot à mon tour. Par principe, je salue la coopération entre les entreprises françaises et allemandes parce qu'ensemble elles sont plus fortes sur le marché mondial que quand elles sont seules. Je crois que ce genre d'événement devrait se faire sur le modèle amical que nous avions trouvé pour EADS et, pour le dire en anglais, sur un mode " friendly " et non pas " unfriendly ", mais tout ceci relève éminemment des forces du marché dans lesquelles la politique n'a absolument pas à s'ingérer. D'ailleurs, les responsables des deux entreprises, les deux directoires, ont souhaité expressément que les milieux politiques ne se mêlent pas de ces affaires. Mais, bien entendu, comme l'a dit le Président à l'instant, notre attention se concentre sur la protection de l'emploi, tant en ce qui concerne les lieux de production que la recherche.

QUESTION - Je crois qu'il y a encore un tout petit point de dissension entre la France et l'Allemagne en ce qui concerne la TVA, et notamment la TVA dans la restauration, qui pose un gros problème en France. Je voulais savoir si vous aviez abordé cette question, si vous l'aviez résolue surtout.

LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE - Pour des raisons que nous comprenons parfaitement dans le cadre des priorités du redressement économique et social engagé par le gouvernement allemand, cette mesure n'est pas prioritaire pour l'Allemagne. Et si nos partenaires allemands comprennent très bien la position française, nous comprenons parfaitement la position allemande. Par conséquent, nous avons décidé de poursuivre la discussion en fonction de l'évolution économique, dans les années qui viennent, dans ce secteur. Naturellement, la France maintient sa position.