Discours de Monsieur Jacques Chirac, Président de la République lors de la XIe conférence des ambassadeurs

Palais de l' ÉLysée - Vendredi 29 août 2003

(...) Consolider la paix, c'est aussi répondre au désarroi de ceux qui se sentent marginalisés par la mondialisation.

Les nations européennes ont construit, chacune à sa façon, un modèle démocratique qui cherche à concilier l'esprit de solidarité et de justice sociale, la responsabilité écologique, le respect de la diversité et l'efficacité économique pour la croissance. Et ce modèle, même s'il est imparfait, nous tient à coeur. Aussi est-il naturel qu'il inspire notre approche de la mondialisation.

Nous voulons une mondialisation qui soit plus démocratique. Cela suppose que tous les Etats se sentent partie prenante aux décisions qui les concernent. Le dialogue élargi noué à Evian entre des dirigeants venus du monde entier a illustré notre capacité à jeter les bases d'un partenariat Nord-Sud. Ce dialogue entre pairs responsables est un premier pas vers la création d'une enceinte politique de haut niveau où seraient abordés globalement les problèmes économiques, sociaux et d'environnement.

Nous voulons une mondialisation plus solidaire aussi. La lutte contre la pauvreté dans le monde nécessite des engagements réciproques des pays pauvres et des pays riches. Avec le NEPAD, cette démarche de partenariat démontre sa pertinence pour l'Afrique. A Evian, nous avons choisi de l'inscrire dans le long terme et de l'élargir à tous les grands donateurs de l'OCDE. En lançant cet automne, à Paris, les travaux de ce nouveau Forum, j'appellerai à une mobilisation sans relâche de l'ensemble des pays qui peuvent le faire en faveur du développement de l'Afrique.

La solidarité passe aussi par des financements accrus. L'aide publique au développement augmente depuis peu globalement, et la France tiendra ses engagements, mais cela ne suffira pas. Nous devons faire preuve d'imagination. Et je souhaite que les réunions du FMI et de la Banque mondiale à Dubaï fassent progresser la proposition de Facilité Financière Internationale, initiée par la Grande-Bretagne et soutenue activement par la France. J'ai en outre décidé de constituer un groupe de travail pluridisciplinaire qui me fera rapport d'ici six mois sur les perspectives d'une inévitable taxation internationale pour financer le développement durable.

La réunion de Cancun doit elle aussi servir le développement. Contrairement aux idées reçues, la démarche de l'OMC est à l'opposé d'un libéralisme sauvage et sans frein. C'est l'application de la règle de droit à des échanges croissants. C'est la conviction optimiste, mais réaliste, que l'ouverture et la liberté profitent aux sociétés humaines pourvu qu'elles soient encadrées par des lois qui protègent les plus vulnérables. Le succès de Cancun et du cycle de Doha sera bien le succès du développement.

Chacun doit aborder cette échéance dans un esprit ouvert et constructif. C'est ce qu'a fait l'Union européenne avec l'accord sur la Politique agricole commune conclu en juin dernier. Nous attendons de nos grands partenaires le même esprit d'ouverture sur les questions agricoles, mais aussi sur d'autres sujets, tel l'accès aux médicaments, dont la solution semble se dessiner.

Les pays pauvres ont besoin d'un traitement particulier. Avec l'Union européenne, la France avait présenté une initiative commerciale pour l'Afrique. A Evian, nous avons fait un premier pas sur les régimes de préférences et les matières premières. Il faut maintenir le cap. Notre proposition reste sur la table car je la crois vitale pour donner à l'Afrique, continent hélas marginalisé, sa part dans les échanges internationaux.

Enfin, face aux menaces pressantes, nous voulons une mondialisation respectueuse de l'environnement. Il manque une autorité mondiale capable d'établir un diagnostic écologique global, de garantir le respect des principes et des traités de protection de l'environnement et d'aider les pays en développement. Cette mission devrait revenir à une organisation des Nations Unies pour l'environnement. La France lancera cet automne une campagne d'explication pour rassembler les Etats décidés à faire avancer cette idée.

Grâce à la compétitivité de ses entreprises, au talent de ses hommes et de ses femmes, la France tire profit de la mondialisation. Mais ce phénomène provoque chez beaucoup de nos concitoyens un sentiment de dépossession et d'inquiétude. Les discussions qu'il suscite occupent une place croissante dans notre vie publique et le dialogue avec la société civile s'impose désormais naturellement. Pour rassembler l'expertise et mieux organiser les débats sur ce sujet, notamment avec la société civile, j'ai demandé au Premier ministre de me faire des propositions pour la mise en place d'un observatoire français de la mondialisation.

Cette instance, composée de spécialistes des questions économiques, sociales, culturelles, environnementales, aurait pour mission, par ses analyses et ses réflexions, de contribuer au débat public en prenant en compte toutes les dimensions de ce phénomène. (...)





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