Extraits de la conférence de presse conjointe du Pésident de la République et de M. Jose Maria AZNAR, président du gouvernement espagnol, à l'issue du sommet franco-espagnol

Malaga - 26 novembre 2002

LE PRESIDENT : "Naturellement, l'actualité, c'était le problème de la sécurité maritime. Nous sommes totalement solidaires du gouvernement espagnol dans l'affaire du "Prestige", cela va de soi. Nous avons totalement soutenu la proposition faite par le Président AZNAR à la Commission et à l'Union européenne pour ce qui concerne la relance de la politique de sécurité maritime que vient d'évoquer très clairement, à l'instant, le Président AZNAR. Et nous appuyons sans réserve ses propositions.

Nous avons de surcroît décidé, comme il l'a rappelé, qu'à partir de demain tous les bateaux ayant des caractéristiques douteuses, monocoques, plus de quinze ans, transport de fuel lourd ou de goudron, un danger pour l'écosystème, pourraient être vérifiés et, le cas échéant, exclus de notre zone des 200 miles. Et nous proposerons, à Copenhague, l'extension de cette mesure à l'ensemble des pays européens qui voudront bien se joindre à nous." (...)

QUESTION - En premier lieu, je voudrais vous poser une question à tous les deux. Est-ce que cet accord d'inspection immédiate dans les eaux françaises et espagnoles peut s'élargir à d'autres pays ? Est-ce que vous avez l'intention que d'autres pays de l'Union européenne puissent aussi adopter ces mesures d'inspection avant le Conseil de Copenhague ? Et je voudrais aussi avoir votre avis sur qui devrait payer, en fait, les dommages causés par le "Prestige" et tout particulièrement, Monsieur AZNAR, je voudrais savoir ce que vous pensez des critiques du Bloc nationaliste et du Parti Socialiste qui ont été proférées à l'encontre du Président de la Galice.

M. JOSE MARIA AZNAR - J'ai déjà dit au Président du Conseil européen et au Président de la Commission que, lors du Conseil européen de Copenhague, nous devons débattre de ce problème. Et l'accord que nous avons passé entre la France et l'Espagne montre que nous avons l'intention d'aborder ces choses ensemble. Nous allons communiquer aux membres de l'Union européenne les décisions et les accords que nous avons souscrits et nous allons inviter tous les membres de l'Union à adhérer à cette initiative du gouvernement français et du gouvernement espagnol.

Il est bien évident que nous attendons, et nous espérons, que le Conseil de Copenhague puisse adopter des mesures claires et définitives concernant la sécurité maritime. Il est vrai que ces mesures auraient déjà dû être adoptées mais nous allons exercer toute la pression possible pour qu'elles puissent être adoptées le plus rapidement possible. Et nous espérons que cela pourra se produire à Copenhague. De toute façon, nous sommes déjà en train d'envoyer un signal très fort en disant que, dans nos zones économiques exclusives, nous ne sommes pas disposés à assumer des risques en attendant que ces décisions soient adoptées.

En ce qui concerne la deuxième question, je respecte toutes les critiques, je respecte toutes les opinions. Certaines me paraissent plus raisonnables que d'autres. J'accepte entièrement les critiques de personnes à qui on a porté préjudice, les pêcheurs, etcà qui ont subi ce risque écologique. Et là, je comprends très bien qu'ils demandent des prises de décision extrêmement rapides. Donc, après cet événement, le premier Conseil des Ministres doit approuver des mesures extrêmement claires pour essayer de compenser les personnes les plus touchées.

Deuxièmement, je dois vous dire que je ne pense pas qu'il soit correct de profiter d'une catastrophe pour essayer de gagner du terrain sur le plan politique. C'est de la démagogie qui, en fait, ne répond pas à une ligne positive. Donc, je comprends très bien les critiques des personnes les plus touchées mais je ne partage pas les critiques de ceux qui veulent faire mal.

Face à ces critiques, je dirais la chose suivante. Si vous êtes disposés à prendre une décision par rapport à un navire qui transporte 70 000 tonnes de pétrole et qui est sur le point de se briser, si les gens pensent qu'il vaut mieux le remettre au port, eh bien, dites-le. Si vous connaissez un bateau spécialisé qui peut aspirer les nappes de pétrole et qui peut travailler avec des vagues de plus de trois mètres de haut, dites-le haut et fort. Et si quelqu'un sait qu'il y a des bateaux qui peuvent naviguer avec des vagues de quatre ou cinq mètres et des vents de cent kilomètres, faites le nous savoir.

Je comprends très bien les dommages subis mais il y a les stratégies de cafés du commerce, d'une part, et ceux qui essaient de profiter des malheurs d'autrui. Ceux-ci ne méritent pas vraiment mon respect.

QUESTION - Je voudrais savoir si vous avez parlé de la possibilité d'un déplacement du corridor réservé aux bateaux qui transportent des produits dangereux. C'est une idée qu'on aurait pu étudier avec le Portugal. Et, en ce qui concerne la lutte antiterroriste, je voudrais que vous nous expliquiez un peu en quoi consiste le protocole que vous avez signé et si cela va permettre d'avoir accès à la documentation confisquée aux terroristes détenus en France, et ceci de façon immédiate.

M. JOSE-MARIE AZNAR - Le protocole que nous avons signé en matière de coopération judiciaire signifie exactement cela. Il va y avoir une amélioration de l'information judiciaire. Et, comme ce qui est important dans la lutte antiterroriste, c'est surtout de la mener, cette lutte, plutôt que d'en parler, alors, nous nous limitons à cela et nous allons faire les choses comme il faut, c'est-à-dire en respectant la législation espagnole et la législation française. Nous sommes deux démocraties, deux Etats de droit qui sont très fiers de respecter la loi. Ce sont des pas en avant très importants dans la coopération dans la lutte antiterroriste et dans la coopération judiciaire.

Sur le premier point, nous n'excluons absolument aucune mesure, comme établir des couloirs qui soient plus éloignés des côtes pour certains bateaux qui transportent des marchandises dangereuses ou des bateaux qui nous paraissent ne pas réunir les caractéristiques. Si nous n'acceptons pas des bateaux, sans garantie, dans les zones économiques exclusives, il est bien entendu que nous pensons que ces couloirs devraient peut-être être plus éloignés du littoral.

QUESTION - Cette nouvelle proposition en ce qui concerne la sécurité maritime est-elle fondée en droit international et, si c'est le cas, pourquoi n'a-t-elle pas déjà été proposée ?

LE PRESIDENT - Tout à l'heure, le Président AZNAR a rappelé qu'elle était fondée sur l'article 56. Pourquoi n'a t-elle pas été proposée ? Je crois que c'est tout simplement parce que nous avons un droit international de la mer qui est une espèce de monument fondé sur, historiquement, construit pour assurer une liberté totale de circulation sur toutes les mers du globe et qu'on avait un peu de peine à mettre en cause ce monument. De même, les décisions se prenaient, en règle générale, au sein de l'Organisation maritime internationale où, comme vous le savez, les voix sont réparties en fonction du tonnage. Et cela donne évidemment une part essentielle de la responsabilité et de la décision aux pays qui ont des pavillons de complaisance. Tout ceci créait un ensemble.

Aujourd'hui, nous avons décidé que trop c'était trop et que, par conséquent, en tous les cas pour ce qui concernait nos deux pays, de façon parfaitement fondée en droit international, nous prenions une initiative et nous proposions à nos partenaires de la prendre également. Pour ce qui nous concerne, la décision est maintenant irrévocable.

QUESTION - Si j'ai bien compris, la mesure qui s'applique à partir de demain n'est pas une interdiction pure et simple des navires à simple coque. Cette interdiction est toujours prévue, dans les accords ERIKA I et ERIKA II, pour 2015. Je voulais donc vous demander si cette date est toujours l'horizon ou si vous l'avez avancée.

LE PRESIDENT - Cette date, nous n'avons pas la possibilité de l'avancer, c'est-à-dire de modifier une décision qui a été prise par le Conseil européen. Ce que nous avons l'intention, en revanche, et cela a été clairement exprimé par le Président du gouvernement espagnol lorsqu'il a saisi à la fois la présidence danoise et la présidence de la Commission, c'est que nous souhaitions que, sur proposition de la Commission, il y ait une décision immédiate ou très rapide du Conseil tendant à rapprocher la date en question de façon à accélérer la disparition des monocoques.

QUESTION - Cet accord va rendre difficile le passage de ces bateaux vers Gibraltar mais, en soi, ce n'est pas une mesure suffisante pour empêcher ce passage ou ce trafic. Quelle est votre opinion à cet égard pour essayer d'éviter que la baie d'Algésiras soit justement saturée par ce type de bateaux qui viennent se ravitailler pour ce type de combustible ?

M. JOSE MARIA AZNAR - En ce qui concerne les actions dans le cadre de l'Union européenne, les actions bilatérales, notre position est tout à fait claire. Comme j'ai aussi évoqué la signification des actions que nous allons entreprendre dans le cadre du droit maritime international, nous allons donc agir en conséquence dans tous les domaines, y compris celui que vous évoquez."





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