ALLOCUTION DE MONSIEUR JACQUES CHIRAC,

PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE

DEVANT LA COMMUNAUTE FRANÇAISE AU CERCLE DES OFFICIERS

AUX ÉMIRATS ARABES UNIS

ABOU DABI, le Mardi 16 décembre 1997

_________

Mes chers compatriotes,

Avec un peu de retard mais pour la bonne cause, je suis heureux de vous saluer très cordialement.

Je voudrais remercier Cheikh HAZZA qui nous a accompagnés et je suis heureux de vous dire que les entretiens que nous avons pu avoir avec les autorités émiriennes et Cheikh ZAYED ont été, comme vous l'imaginez, d'une extraordinaire cordialité et ont fait apparaître une vraie vision commune des choses.

Je voudrais saluer, à cette occasion, tous les Français d'ABOU DABI, des autres Emirats qui sont venus ici ou qui s'y trouvaient, et leur dire combien je suis heureux de les saluer ainsi, en mon nom, au nom de Monsieur RICHARD, notre Ministre de la Défense, de Monsieur PIERRET, notre Ministre de l'Industrie, et remercier notre ambassadeur, Monsieur THIBAULT d'avoir parfaitement organisé les choses dans ce beau bâtiment qui a été construit par un architecte français.

Je suis heureux de saluer également nos deux présidents de groupe, du groupe parlementaire Emirats-France : Monsieur DELIGE, Député et Monsieur BOULET, Sénateur. Je remercie enfin de sa présence, Monsieur CABANA, le Président de l'Institut du Monde Arabe et je salue particulièrement tous les chefs d'entreprises qui ont bien voulu m'accompagner et qui ont eu aujourd'hui des contacts, je crois, importants et intéressants tant dans le domaine des entreprises civiles que des entreprises militaires. J'aurai d'ailleurs l'occasion d'évoquer ce point tout à l'heure lorsque je ferai mon point de presse.

Cette visite, je crois qu'on peut le dire, c'était d'abord et avant tout la visite de l'amitié. C'est une relation confiante qui existe entre nos deux pays : les Emirats Arabes Unis et la France. Cette relation de confiance est ancienne puisqu'elle a été nouée par Cheikh ZAYED, qui était à l'époque Emir d'Abou Dabi, et le Général de GAULLE, l'un et l'autre se portant estime et amitié. J'ai personnellement le souvenir de réflexions faites dans ces années-là par le général de GAULLE et qui disait tout le respect, l'estime qu'il avait pour la sagesse de Cheikh ZAYED, pour ses analyses, sa vision des choses qui était toujours intelligente, pacifique, approfondie mais modérée. Et cette relation au fil des ans s'est confirmée, elle ne s'est jamais démentie. Au fond mon voyage d'aujourd'hui n'est qu'une étape supplémentaire dans une chaîne solide, de respect et d'amitié, je dirais même d'affection réciproque.

Les Emirats Arabes Unis sont attachés à deux valeurs qui sont également les valeurs de la France, c'est la paix et c'est l'indépendance. Et c'est peut-être en raison de l'attachement à ces valeurs que tout naturellement nous avons une vision commune des choses. Nous avons longuement parlé de tout ce qui touche aux problèmes de la région, s'agissant du processus de paix, s'agissant de l'Iran, de l'Irak, d'autres problèmes encore. Nous avons, je le répète, la même approche, la même vision des choses, nous tirons les mêmes conclusions des problèmes auxquels nous sommes confrontés.

Et je voudrais donc, en terminant sur ce point, dire tout le respect que je porte à Cheikh ZAYED, toute l'estime et toute l'affection que j'ai pour lui.

Le deuxième point que je voudrais souligner c'est que nous avons, naturellement d'excellentes relations. Nous avons une coopération civile et une coopération militaire fortes, cette coopération est fondée d'abord sur une coopération politique. J'ai dit tout à l'heure que nous avions une même vision des choses, nous avons donc un socle d'accords politiques solide. Et c'est ce qui explique que nous ayons depuis 1995 un accord de défense qui fait que nous sommes alliés, ce qui est une situation tout à fait exceptionnelle et qui pour la France n'existe qu'avec les Emirats Arabes Unis. Nous avons en quelque sorte lié nos destins, ce qui était l'accomplissement naturel de ce que je disais tout à l'heure, c'est-à-dire une vision commune des choses.

Cette coopération nous conduit à essayer de faire un pas de plus, c'est très bien de s'acheter et de se vendre des choses. C'est même l'un des objectifs de l'entreprise ou des Etats. On s'achète du pétrole, on s'achète des avions, on s'achète des usines ou des services. Mais je crois, comme en Europe d'ailleurs entre les partenaires de l'Europe, que le moment est venu entre les Emirats Arabes Unis et la France de transformer la coopération en partenariat, les conditions sont réunies. La France, vous le savez, a toujours été favorable aux transferts de technologies, alors il y a naturellement les technologies civiles et quelques technologies sensibles. Mais nous sommes d'accord pour exporter les unes et les autres, les technologies sensibles devant faire l'objet d'une certaine prudence, non pas du tout vis-à-vis des Emirats, puisque nous sommes alliés et donc susceptibles de n'avoir aucun secret pour les Emirats, mais une prudence consistant à s'assurer naturellement que les Emirats ne réexporteront pas ces technologies sensibles, cela va de soi.

Il y a la possibilité pour nous dans tous les domaines, civils ou militaires, de concevoir, de développer ensemble des technologies modernes. C'est sur ce point qu'il faut maintenant que nous mettions l'accent, pour créer les véritables liens du partenariat, qui fondés sur un accord politique, à leur tour renforcent cet accord politique. Et puis la politique économique, c'est très bien. N'oublions pas aussi ce qui justifie nos relations culturelles, je les ai également évoquées ce matin avec Cheikh ZAYED, mais aussi avec Cheikh KHALIFA, Cheikh MOHAMMED. Il y a une relation de culture qui peut s'exprimer notamment au sein de l'Institut du Monde Arabe, rénové et relancé, et auquel participent les Emirats, il y a les liens que nous pouvons créer au niveau des recherches et des fouilles archéologiques, beaucoup de choses restent à trouver dans ce pays et à utiliser. Il y a les échanges que nous pouvons faire dans les domaines de l'art contemporain, de la musique, de la culture, de la sculpture, de la peinture, pour mieux nous connaître, là aussi cela fait partie de la vision d'ensemble des choses, cela fait partie du partenariat.

Puis il y a, je me suis permis de le mentionner tout à l'heure à Cheikh Khalifa, notre souhait de voir le français mieux enseigné aujourd'hui ici, notamment d'avoir un département de français à l'Université d'Al Aïn , cela nous permettrait d'accentuer nos échanges de boursier, et donc là encore, de renforcer les liens entre nos pays.

Vous voyez que, si j'ose m'exprimer ainsi, l'avenir est devant nous. La qualité de nos relations permet aujourd'hui d'avoir pour ambition de les approfondir fortement, et dans tous les domaines, de créer un vrai partenariat. Alors cela suppose la volonté des Emirats Arabes Unis, je crois qu'elle existe, cela suppose la volonté de la France, je suis sûr qu'elle existe, et cela suppose quelque chose d'encore plus essentiel, c'est l'activité des Français, de ceux qui travaillent en France, et surtout, et essentiellement, les éclaireurs de pointe qui travaillent ici. C'est pourquoi je vous disais tout à l'heure, qu'indépendamment du plaisir que j'éprouvais à rencontrer mes compatriotes, j'ai parfaitement conscience que cet avenir, que j'ai voulu essayer de dépeindre dans ces grandes lignes, il est d'abord et avant tout ce que vous en ferez. Et si je juge par l'expérience, je constate que la communauté française ici, est une communauté jeune, dynamique, compétente, qui fait honneur à notre pays et sur qui on peut compter, et je compte beaucoup sur votre investissement.

Alors en terminant je voudrais vous dire mon sentiment de reconnaissance pour tout ce que vous avez fait, et d'espoir pour ce que vous ferez demain. Mes sentiments d'estime, mais aussi mes sentiments d'amitié et je voudrais simplement terminer en vous disant à toutes et à tous, pour vous et pour les autres, puisque l'époque s'y prête, bonne et heure année.