DISCOURS DE MONSIEUR JACQUES CHIRAC PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

À L'OCCASION DE LA CONFÉRENCE EUROPÉENNE DE PARIS "FEMMES ET HOMMES AU POUVOIR"

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PALAIS DE L'ÉLYSÉE VENDREDI 16 AVRIL 1999

Mesdames et Messieurs les Ministres, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, Mesdames, Messieurs,

Je me réjouis de votre présence à Paris pour la troisième conférence européenne consacrée à la participation équilibrée des femmes et des hommes à la prise de décision. La conférence d'Athènes en 1992 et celle de Rome en 1996 ont l'une et l'autre contribué à faire progresser l'Europe sur les chemins de la mixité. Je forme le voeu que vos travaux permettent l'adoption d'une déclaration forte, de nature à accélérer les changements nécessaires.

Je me réjouis de l'occasion que vous me donnez ainsi d'exprimer mon propre sentiment sur un sujet aussi important, je vais donc en user et peut-être même un peu en abuser.

Nos textes constitutionnels se modernisent. Dans nos pays, des lois nouvelles sont venues contrarier les pratiques inégalitaires héritées du passé. Le dialogue social a également contribué à promouvoir l'égalité entre femmes et hommes.

L'Union européenne s'est depuis longtemps engagée dans cette voie. En décembre 1996, à la suite d'une initiative française, d'ailleurs, le Conseil européen, s'inspirant des réflexions conduites à Athènes et à Rome, s'est solennellement prononcé en faveur de la parité. L'année suivante, le traité d'Amsterdam a donné une nouvelle impulsion à l'égalité de traitement entre femmes et hommes. Les lignes directrices pour l'emploi, adoptées par le Conseil extraordinaire de Luxembourg, ont inscrit au premier rang des priorités européennes la promotion de l'emploi féminin et l'égalité des chances.

Contrairement aux deux précédentes, la conférence de Paris fait débattre femmes et hommes, soulignant que c'est à nos sociétés dans leur ensemble que se pose la question de la mixité. Le symbole est important. La mixité implique en effet des transformations qui ne concernent pas seulement les femmes et qui même, dans bien des cas, ne les visent pas spécifiquement.

En quelques années, le débat sur la parité a amené nos sociétés à se poser des questions essentielles pour tous, femmes et hommes, des questions qui vont bien au-delà de la seule revendication de droits nouveaux pour les femmes. Il ne s'agit plus désormais d'effacer ou de nier la différence entre les sexes, comme aux premières heures du féminisme. Cette différence est à la racine de notre identité. Elle est au coeur même de notre humanité. Elle ne doit pas être rejetée. Au contraire, elle doit être pleinement reconnue comme force de progrès et de modernité. Loin de faire obstacle au principe d'universalité des droits, qui s'applique sans distinction d'aucune sorte, elle justifie que des dispositions soient prises pour en assurer l'effectivité.

Dans la sphère privée, dans le monde du travail, mais aussi dans la vie de la cité, les transformations que nous conduisons ne doivent pas gommer cette différence, elles doivent permettre de l'assumer autrement. Il s'agit moins que jamais de spécialiser les fonctions. Il s'agit de partager de façon plus harmonieuse l'exercice des responsabilités pour l'enrichir de nos différences. Une meilleure association entre femmes et hommes de notre temps sera, pour la société tout entière, l'assurance d'un développement plus rapide et plus équilibré, puisant créativité, force et élan dans de nouvelles synergies.

La mixité va s'inscrire au premier rang des valeurs d'avenir qui dessineront le visage de l'Europe de demain, une Europe dynamique, inventive et équilibrée. Une Europe qui ne sera plus seulement celle de l'économie, du commerce et de la monnaie. Une Europe humaine, un projet de civilisation.

Partout, la mixité est déjà à l'oeuvre, selon des modalités et à des rythmes différents dans chacun de nos pays. Elle vient modifier les équilibres les plus anciens de notre organisation sociale et politique. Elle corrige des inégalités qui faisaient partie d'un héritage multiséculaire.

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De nombreux changements ont eu lieu au cours des dernières décennies.

Le premier -et sans doute le plus important- touche à la vie privée. La maîtrise des naissances, par-delà ses implications sur l'évolution de la natalité, a provoqué des bouleversements considérables. Elle modifie le sens de la maternité, préparée et choisie. Elle transforme le regard porté sur l'enfant, souvent plus désiré, plus attendu. Elle fait évoluer la place de la femme dans le couple. Aujourd'hui, la femme peut décider, à partir de l'idée qu'elle se fait de l'avenir et de la façon dont elle veut organiser sa vie.

Le corollaire de cette liberté nouvelle, c'est bien sûr une responsabilité accrue vis-à-vis de l'enfant, une responsabilité qui devient parfois exclusive. Chacun sait que beaucoup de femmes sont conduites à assumer tant matériellement qu'affectivement l'éducation de leurs enfants.

Même si beaucoup d'hommes s'investissent davantage dans la vie familiale, le partage équilibré des responsabilités entre parents ne se fait toujours pas correctement dans nos sociétés. Il y a là un déséquilibre dont il faut tenir compte, en prenant conscience que la mixité passe aussi par une réévaluation de la fonction paternelle. Pour beaucoup d'hommes, comme pour les femmes, cela correspond à une aspiration très profonde, celle d'un meilleur partage de la responsabilité conjointe des parents à l'égard de l'enfant.

C'est un champ nouveau pour l'évolution des comportements, qui ne pourra pas rester limitée à la sphère privée. L'investissement personnel dans la réussite de la vie familiale suppose en effet de la part de la société, et notamment des entreprises, une organisation qui lui soit beaucoup plus favorable.

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Le deuxième changement affecte les structures de la vie familiale. Elles se sont diversifiées autour du pilier principal que demeure la famille traditionnelle. Les données de ce changement, que l'on observe partout en Europe, sont bien connues.

Je m'arrêterai un instant sur le cas français. Les mariages ont reculé, passant d'un peu plus de 410.000 par an au début des années 1970 à un peu moins de 270.000 de nos jours. Les divorces, en grande majorité demandés par les femmes, progressent : près d'un tiers des mariages pour la France, la moitié à Paris. L'union libre s'est beaucoup développée. Elle demeure plus précaire que le mariage. À côté des familles recomposées, qui sont moins nombreuses qu'on le croit parfois, les familles monoparentales se sont multipliées. Dans tous les cas de figure, le pôle mère-enfant émerge comme un bloc indestructible.

Il s'agit là de faits de société majeurs. Des contraintes disparaissent. Des libertés nouvelles ont été conquises. Elles ont bien sûr leur prix, parfois très lourd. La famille a subi de fortes secousses. Mais, quelle qu'en soit la forme, elle tient bon. Les enfants constituent plus que jamais le ciment de la cellule familiale. Rappelons-le, 85% d'entre eux vivent aujourd'hui avec leurs deux parents, plus encore quand il s'agit de jeunes enfants.

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Le troisième changement vient de l'engagement des femmes dans la vie professionnelle. Il s'est accompli en l'espace de quelques décennies, plus fort d'ailleurs en France et dans les pays d'Europe du Nord que dans d'autres pays de l'Union. En France, de nos jours, 80 % des femmes en âge de travailler sont engagées dans la vie professionnelle, soit qu'elles aient un emploi, soit qu'elles soient à la recherche d'un travail. Elles forment 45% de la population active alors qu'elles n'en dépassaient pas le tiers en 1960, chiffre qui était d'ailleurs équivalent à celui du début du siècle.

Bien sûr, il y a encore place pour la pluralité des modèles de vie. Beaucoup de femmes optent pour un engagement de tout leur temps au sein de la cellule familiale. C'est leur choix, un choix profondément respectable, qui doit pouvoir s'exercer librement, notamment pour s'occuper pendant quelques années de jeunes enfants avant de reprendre une activité professionnelle.

Mais l'aspiration de la très grande majorité des femmes à exercer un métier est une aspiration très profonde et elle n'est pas négociable. Elle est le plus souvent indispensable à l'équilibre des budgets familiaux. Elle sera de plus en plus nécessaire au développement de l'activité économique, notamment dans le secteur en pleine expansion des services. Elle est déjà un moteur de la croissance.

Maîtrise des naissances, diversification du cadre de la vie familiale, généralisation du travail féminin : ces grandes évolutions se confortent mutuellement. C'est de leur conjonction que le mouvement historique en faveur de la mixité tire toute sa puissance. * * *

Mais tout n'est pas accompli. La révolution de la mixité est très loin d'être achevée. La période que nous connaissons est à bien des égards transitoire. Des régressions demeurent possibles. Les changements intervenus dans nos sociétés n'ont pas toujours été à l'origine d'une amélioration des conditions de vie des femmes ou d'un meilleur équilibre des responsabilités entre les sexes. La précarité et la solitude ont gagné du terrain. La division des tâches à l'intérieur des couples n'a guère évolué. Le poids de la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle continue à reposer presque exclusivement sur les femmes. Généré par l'évolution des moeurs, le mouvement en faveur de la mixité pourrait bien marquer le pas s'il n'était accompagné, ordonné et conforté par l'engagement de tous les responsables politiques, économiques et sociaux.

L'égal accès des hommes et des femmes à la vie politique s'inscrit dans cette perspective. C'est un moyen au service de l'intérêt général plutôt qu'un objectif au service des ambitions féminines. Il ne s'agit pas d'obtenir que la représentation politique reflète exactement, comme une photographie, toutes les composantes du corps social. Les convictions qui doivent s'exprimer au sein des assemblées délibérantes transcendent naturellement les distinctions liées au sexe, mais aussi à la religion, à l'âge et aux catégories socio-professionnelles.

Cependant, quand l'écart se fait trop grand entre la réalité d'une communauté de vie et la composition de l'assemblée qui la représente, des distorsions graves peuvent apparaître. Si les femmes doivent être plus nombreuses en politique, c'est d'abord pour que la conduite des affaires publiques ne soit pas sclérosée, pour qu'elle s'enrichisse d'une confrontation nouvelle des points de vue, bref, pour que l'on fasse de la politique autrement, c'est-à-dire de façon moderne.

Comme dans la sphère privée, comme dans l'activité économique, comme dans la vie sociale aussi, ma conviction est que les progrès de la mixité en politique permettront d'apporter des solutions originales et modernes aux problèmes de nos sociétés. C'est dans cet esprit que j'ai, en 1995, créé un Observatoire national de la parité.

Il est essentiel d'installer la mixité au coeur de nos démocraties. Pour avancer sur cette voie, bien des obstacles demeurent qui ne seront pas levés sans une action volontaire. Beaucoup d'entre vous viennent de pays qui ont, depuis longtemps heureusement, résolu la question sans être passés par l'application de règles contraignantes. C'est bien mieux ainsi et j'ai longtemps espéré qu'il pourrait en aller de même en France, où nous accusons d'importants retards par rapport à la moyenne européenne.

Il y a quatre ans, j'avais indiqué aux Français que je faisais mien l'objectif de la parité pour la représentation des femmes en politique. J'avais cependant laissé ouvert le choix des moyens. J'aurais bien sûr préféré que les responsables de toutes les familles politiques secouent les pesanteurs et prennent l'initiative d'organiser librement cette évolution. Il y a en effet des inconvénients à demander que la Constitution et la loi viennent au secours de la parité : les discriminations positives montrent partout leurs limites. Elles peuvent jeter un doute sur les mérites de ceux qui en bénéficient. Elles ferment l'accès des responsabilités à d'autres qui s'estiment plus qualifiés. Elles dérogent ainsi à des principes fondamentaux dans le domaine des Droits de l'homme.

Aucun de ces arguments n'est dénué de fondement. Tous méritaient que l'on s'y arrête. Il fallait donner leur chance aux partis politiques pour qu'ils entreprennent d'eux-mêmes les changements nécessaires. Mais force est de reconnaître qu'aux élections municipales, cantonales, législatives et régionales qui se sont déroulées depuis 1995, à l'exception de quelques heureuses initiatives, l'évolution que j'appelais de mes voeux ne s'est pas produite, ou trop faiblement.

C'est la preuve que la modernisation de notre vie publique ne se fera pas toute seule, comme portée par un mouvement naturel de la société. La défense des situations acquises, une certaine inertie de la vie publique, à laquelle le cumul des mandats participe également, l'emportent depuis trop longtemps.

Tacite l'avait déjà démontré : quand un peuple ne parvient plus à faire évoluer ses moeurs, il en vient à devoir faire des lois.

Une révision constitutionnelle permettant au Parlement français de légiférer devenait indispensable. Elle est en cours. Je la soumettrai prochainement au Congrès.

Elle a déjà suscité un large débat, et même un débat parfois passionné. Au Parlement d'abord, notamment entre les deux Chambres. Chacune a joué son rôle et fait valoir son point de vue, comme il est normal dans un régime bicaméral. Mais aussi dans l'opinion, où se sont affrontés philosophes, juristes et sociologues. Au nom d'un même idéal, celui d'un féminisme moderne et dénué de tout sectarisme, des femmes de pensée et de conviction se sont opposées. Le débat a traversé toutes les familles politiques.

À ceux qui redoutent que demain des femmes soient promues en fonction de leur état et non de leur valeur, je réponds que beaucoup d'autres femmes sont aujourd'hui écartées des responsabilités en raison de ce même état et malgré leur valeur. C'est à l'aune de cette vérité que doit être appréciée l'instauration d'un pourcentage obligatoire de candidatures féminines pour les élections qui comportent un scrutin de liste.

La Constitution n'est pas tout. Bientôt, c'est la loi qui devra intervenir. Je souhaite que le législateur soit attentif à bien proportionner aux fins qu'il poursuit les moyens qu'il retiendra. La recherche de la parité ne saurait servir de prétexte à un changement des modes de scrutin. Les dérogations aux principes de la liberté de candidature et de l'égal accès de tous, hommes et femmes, aux fonctions électives devront être régulièrement réexaminées. Elles ont vocation à disparaître dès que la France aura rattrapé le retard inacceptable qui est aujourd'hui le sien.

Enfin, le Sénat a justement ouvert la possibilité d'une modulation du financement des partis politiques en fonction de la place faite aux femmes. C'est une mesure qui peut se révéler efficace. Et pour ma part, je la soutiens depuis longtemps. * * *

Une démocratie féminisée, une démocratie rénovée, renouvelée, permettra d'ouvrir plus largement la voie à d'autres changements, qui modifieront la vie professionnelle et familiale des Françaises et des Français.

J'ai déjà souligné l'importance de l'engagement des femmes dans la vie professionnelle. Je constate cependant que de nombreuses difficultés subsistent. En France, l'écart entre salaires masculins et féminins demeure de l'ordre de 25 %. Même à emploi égal, les différences atteignent encore 10 à 15 %. Les femmes continuent à être plus nombreuses que les hommes dans les emplois les moins qualifiés. Elles accèdent plus difficilement au premier emploi et connaissent plus fréquemment le chômage. Plus d'un quart d'entre elles exercent une activité à temps partiel qu'elles sont nombreuses à n'avoir pas choisi, tandis qu'à l'inverse beaucoup d'autres ne parviennent pas à réaliser leur souhait de passer du temps plein au temps partiel.

L'orientation des jeunes femmes reste très souvent guidée par l'anticipation des difficultés qu'elles rencontreront dans les carrières qui exigent une trop grande disponibilité. Pour ne pas être condamnées à devoir choisir entre famille et métier, elles acceptent très tôt des compromis qui limitent tout à la fois leurs ambitions familiales et leurs ambitions professionnelles.

Leur niveau d'études dépasse maintenant celui des hommes, ce qui donne des raisons d'espérer de nouveaux progrès, mais les femmes n'accèdent encore que rarement aux responsabilités de direction. Très peu d'entre elles deviennent chefs d'entreprise. Au contraire, elles ont réussi à investir, c'est vrai, l'enseignement, la magistrature, la fonction publique et bien d'autres domaines d'activité qui garantissent un meilleur équilibre de vie.

Il faut prendre garde cependant à ce que certaines professions, notamment celles qui s'exercent au contact de la jeunesse, conservent une représentation masculine suffisante. La mixité, c'est aussi cela !

Mais il faut surtout veiller à ce que les femmes puissent franchir ce "plafond de verre" que bien des sociologues ont décrit et qui bloque leur ascension vers les emplois de direction. Les obstacles sont multiples. Beaucoup tiennent à des préjugés tenaces qui, reconnaissons-le, sont souvent des préjugés masculins. Oui, les femmes demeurent plus impliquées que les hommes dans la prise en charge du foyer et des enfants ! Pour autant, elles témoignent dans l'exercice de leurs responsabilités professionnelles d'une motivation et d'une efficacité bien comparables aux leurs.

Il y a dans les pays latins une règle non écrite qui veut que l'exercice de responsabilités dirigeantes implique un rythme de vie et des horaires de travail que les femmes, quand elles sont mères, refusent généralement d'assumer. Pour surmonter cette difficulté, il faut bien sûr encourager les modes de garde les plus souples, notamment à domicile, afin de permettre aux femmes cadres d'approfondir leur investissement professionnel à l'âge où beaucoup de carrières peuvent se jouer.

Mais, à plus long terme, ce n'est pas en permettant aux femmes de s'accommoder à leur tour des déséquilibres de vie acceptés par les hommes que l'on favorisera le mieux leur accès aux postes de responsabilités. C'est au contraire en reconsidérant des modes de fonctionnement marqués parfois d'un profond archaïsme, et que d'autres pays ont su écarter mieux que nous. Les hommes, qui aspirent aujourd'hui à davantage de temps libéré, qui aspirent aussi à pouvoir mieux participer à l'éveil et à l'éducation de leurs enfants, y trouveront leur compte autant que les femmes. La mixité peut servir les intérêts de tous.

Les entreprises savent aussi que beaucoup de jeunes femmes sont amenées à interrompre leur activité pour s'occuper de leurs enfants aux premiers âges de la vie et cela freine leur embauche comme leur promotion. Le succès de l'allocation parentale d'éducation, accordée depuis 1994 en France à partir du deuxième enfant, et qui profite aujourd'hui à plus de 500 000 familles, témoigne d'ailleurs de la réalité et de l'importance de la demande qui s'exerce en ce sens.

La modernité ne consiste pas à brider cette demande mais à mieux y répondre. Dans un univers où la mobilité professionnelle est de règle, les interruptions de carrière devraient pouvoir se gérer. Elles ne sauraient constituer une perturbation majeure pour le fonctionnement des entreprises et des services publics. Elles ne sont jamais la marque d'un désintérêt des jeunes femmes pour l'activité professionnelle. Elles doivent être mieux acceptées, mieux préparées et mieux organisées pour que les femmes ne soient pas pénalisées.

Je regrette que les partenaires sociaux n'aient pas suffisamment investi dans le vaste domaine ouvert à la négociation collective pour améliorer la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle et faire ainsi progresser l'égalité professionnelle, je le leur ai dit souvent, mais je n'ai pas le sentiment d'avoir été entendu. Des plans visant à la promotion des femmes devraient être négociés et mis en place dans les entreprises et dans les services publics.

Mais je n'aurais garde d'oublier les progrès réalisés grâce au dialogue social européen, qu'il s'agisse du congé parental, du temps partiel ou plus récemment des emplois de courte durée.

La clé de toutes ces évolutions, c'est de cesser de regarder la vie professionnelle et la vie familiale comme deux mondes clos voués à s'ignorer. C'est d'inviter les hommes à réinvestir le champ de la famille. C'est de permettre aux femmes de choisir plus librement les activités professionnelles qui correspondent le mieux à leurs souhaits, tout en facilitant leur choix de maternité. Et c'est sans doute aussi d'infléchir le partage des rôles dans la sphère privée afin que les femmes ne subissent plus seules le poids de cette double journée de travail qui leur est trop souvent imposée.

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Mesdames et Messieurs, la mixité n'est pas une mode. Beaucoup plus qu'une simple revendication, elle constitue une force en action au coeur de nos sociétés, force de transformation et surtout force de rénovation. En l'espace de quelques générations, bien peu de temps à l'échelle de l'histoire, elle nous a introduit dans un monde nouveau. Il ne faut pas s'y tromper : les changements qu'elle imprime dans le mouvement de notre civilisation sont profonds et, je le crois, très positifs. Il s'agit à l'évidence d'une grande affaire pour les prochaines décennies. Une affaire qui nous dépasse individuellement, mais qui concerne chacun d'entre nous. Elle ouvre l'avenir à une civilisation profondément renouvelée, riche d'énergies créatrices, plus imaginative et plus favorable à l'épanouissement de l'individu. C'est une chance à saisir !

La France s'est engagée résolument sur les chemins de la mixité. Elle continuera à prendre une part active à ce combat. Il doit se poursuivre au niveau européen comme il doit se poursuivre dans chacun de nos pays.

Je vous remercie.