INTERVENTION RADIOTELEVISEE

DE MONSIEUR JACQUES CHIRAC

PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE

SUR LA SITUATION AU KOSOVO

***

Palais de l’Elysée

Lundi 29 mars 1999

Mes chers Compatriotes,

J'ai tenu à vous parler ce soir une nouvelle fois de la situation au Kosovo ; une situation qui nous préoccupe tous et sur laquelle chacun, en conscience, ne peut manquer de se poser des questions.

Chacun peut le constater, le comportement des autorités serbes n'est pas acceptable.

L'Europe ne peut pas accepter d'avoir sur son sol un homme et un régime qui, depuis près de 10 ans, ont engagé en Slovénie, en Croatie, en Bosnie et maintenant au Kosovo, des opérations d'épuration ethnique, d'assassinats et de massacres, de déstabilisation de l'ensemble de la région, avec pour conséquence plus de 200 000 morts et des millions de personnes déplacées.

Combien de familles déchirées, combien de villes martyres ?

Eh bien cela suffit.

Tout a été tenté pour mettre un terme à ces pratiques d'un autre âge. Il faut aujourd'hui arrêter l'engrenage de la barbarie et enlever à ce régime les moyens dont il s'est doté pour conduire ces opérations.

Depuis des mois, les Européens, les Américains, les Russes ont fait ensemble un effort considérable pour trouver une solution équilibrée et pacifique.

Ce fut le cas, en particulier, en France, lors des réunions de Rambouillet. Et devant le refus obstiné du Gouvernement serbe et de son Président, il a fallu se résoudre à employer la force.

Voilà la raison qui nous a conduit, le Gouvernement et moi-même, avec nos alliés unanimes, à prendre la décision d'engager une action militaire. Une action fondée sur les valeurs essentielles de la démocratie et sur le respect de la dignité de la personne humaine.

La phase actuelle comporte, bien sûr, des risques. Pour nos soldats, pour ceux de nos alliés, pour les habitants de la région elle-même. Nous en sommes conscients et nous devons les assumer ensemble. Cette action demande du temps et de la détermination. Elle doit donc être poursuivie pour atteindre son objectif qui est, je le répète, de réduire les moyens de répression du Président MILOSEVIC. Ce qui s'est passé aujourd'hui même doit renforcer notre résolution.

Mais la France, dans le même temps, veut rechercher une solution diplomatique. Nous y travaillons sans relâche. La France, qui a été à l'origine de la réunion de Rambouillet, continue à prendre des initiatives en faveur de la paix.

Sans cesse nous y travaillons en liaison avec nos partenaires européens, américains, russes. Mais une solution pacifique suppose que le Président MILOSEVIC arrête la répression et accepte les règles morales et humaines sur lesquelles reposent aujourd'hui les démocraties.

Il lui appartient maintenant de faire les gestes nécessaires.

Je voudrais rendre à nouveau hommage à nos soldats engagés dans ces opérations et qui ont besoin du soutien moral de toute la nation.

Enfin, au-delà de l'action humanitaire déjà menée par la France et par l'Union Européenne, nous devons, avec l'ensemble de nos partenaires prendre des initiatives importantes et concertées, à la mesure des problèmes posés, pour alléger les souffrances des populations chassées de leur terre au Kosovo et qui se réfugient dans les pays limitrophes.

Cette situation est complexe. Elle évolue chaque jour et, si vous le voulez bien, je referai le point avec vous chaque fois que cela sera nécessaire.