CONFERENCE DE PRESSE

DE MONSIEUR JACQUES CHIRAC, PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE FRANCAISE

A L'ISSUE DE SA VISITE D'ETAT AU MAROC

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RABAT - MAROC

SAMEDI 11 OCTOBRE 2003

LE PRESIDENT - Je voudrais saluer et remercier de leur présence les représentants de la presse marocaine, les représentants de la presse française, venus nombreux à l'occasion de cette visite et les représentants de la presse d'autres pays.

C'est pour moi un plaisir, au terme de ce voyage, un voyage auquel j'attachais beaucoup d'importance en raison des liens particuliers et anciens qui existent entre nos deux pays et un voyage où j'ai pu ressentir profondément une fois encore, la force et la nature de ces liens qui sont en réalité des liens fraternels. C'est un mot dont on abuse parfois, mais qui ici et aujourd'hui peut être utilement employé.

Je voudrais d'abord remercier chaleureusement le peuple marocain, notamment toutes celles et tous ceux que j'ai eu l'occasion de voir un peu rapidement ou parfois de loin, mais dont j'ai observé dans le comportement, dans le sourire, dans le regard, quelque chose qui m'a touché, qui m'a ému, une fois de plus.

Je voudrais remercier Sa Majesté le Roi Mohammed VI et sa famille qui nous ont réservé, à ma femme et à moi, un accueil à la fois chaleureux et agréable.

Je voudrais aussi remercier l'ensemble des autorités marocaines, le Premier ministre, les Présidents des Assemblées, l'administration qui a mis le meilleur d'elle-même pour l'organisation de ce voyage et qui m'a permis de faire trois étapes, pour moi très intéressantes.

D'abord à Fes où, je vais y revenir, j'ai eu des entretiens approfondis avec Sa Majesté, ainsi d'ailleurs par la suite qu'avec le Premier ministre et les Présidents des deux Assemblées.

Ensuite à Tanger, où j'ai été très impressionné par le projet Tanger-Méditerranée qui est un beau et grand projet qui a été voulu par le Roi et qui est sans aucun doute un élément important du développement économique du Royaume. J'ai également été très sensible à l'accueil qui m'a été réservé au Palais Marshan le soir, j'ai eu l'occasion de dire ce que je pensais de l'euro-méditerranée et de l'importance que cela représentait à la fois pour les pays européens et pour les pays du Maghreb.

Enfin, je n'ai pas besoin de vous dire l'émotion qu'a été la mienne en m'adressant ce matin -c'était la première fois pour un Président de la République française- aux deux assemblées réunies, à qui j'ai pu exprimer très simplement ma vision, à la fois de la relation entre nos deux pays et aussi de la place qui doit être celle du Maroc, une place qui ne peut être qu'éminente dans la relation euro-méditerranéenne. Et je n'ai pas besoin de vous dire que j'ai éprouvé une certaine émotion également à m'exprimer ce matin, au lendemain du discours très remarquable et qui avait été prononcé par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, hier soir, faisant un pas supplémentaire dans l'état de droit, la relation homme-femme dans le royaume et la démocratie. Ce discours m'avait beaucoup impressionné, c'était pour moi émouvant de m'exprimer, après lui, à cette tribune.

Sur le plan international, nous avons longuement évoqué, avec Sa Majesté, les problèmes de notre époque, c'est-à-dire notamment ce qui touche au sens large le Moyen-Orient, le problème israélo-palestinien avec le drame dont on n'arrive pas à sortir, la situation de l'Irak. Mais sur ces points, on dirait que pratiquement l'approche, l'analyse, la vision des choses entre le Maroc et la France sont extrêmement proches et donc justifiaient à priori un accord.

Nous avons également évoqué les problèmes bilatéraux. Ils avaient été traités longuement au mois de juillet dernier par la cinquième conférence intergouvernementale qui s'était réunie au Maroc. Les deux Premiers ministres, Monsieur RAFFARIN et Monsieur JETTOU avaient tracé les voies du développement de notre relation économique, financière et sociale, et nous avons simplement avec Sa majesté observé la bonne évolution des décisions qui avaient été prises entre les deux gouvernements.

Voilà, pour l'essentiel, ce que nous avons évoqué. J'ai été vraiment très heureux de l'occasion qui m'était donnée pour la deuxième fois de faire une visite d'Etat au Maroc et je remercie vraiment chaleureusement toutes celles et tous ceux qui y ont participé, d'abord et avant tout les Marocaines et les Marocains.

QUESTION – Monsieur le Président, permettez-moi de commencer par un autre pays du Maghreb, qui est la Libye. Aujourd'hui est l'échéance, Monsieur le Président, pour les familles françaises, du paiement par la Libye des compensations supplémentaires. Jusqu'à maintenant, les Libyens n'ont rien fait, le Président Libyen s'était engagé auprès de vous, auprès du monde qu'il allait honorer son devoir vis-à-vis de la France et il ne l'a pas fait. Quelle est la conséquence sur les relations franco-libyennes et est-ce qu'au cours du 5+5 à Tunis vous allez voir le Président KADHAFI et qu'est-ce que vous allez lui dire ?

LE PRESIDENT – Je ne crois pas me tromper, Monsieur le Ministre, en disant que c'est ce soir l'échéance. Je ne veux donc pas préjuger des choses. Ce qui est sûr, c'est que nous avons eu avec les autorités libyennes une discussion qui s'est soldée par un engagement, engagement que le Président KHADAFI m'avait clairement indiqué à l'occasion de deux conversations téléphoniques que j'avais eues avec lui, engagement qui avait été pris entre les parties concernées directement, c'est-à-dire la fondation KHADAFI, que préside M. SAYF EL ISLAM, et les représentants des familles des victimes. Je ne veux pas réellement imaginer que ces engagements pourraient ne pas être tenus. Ce n'est pas la nature du type de relations que nous avons en règle générale avec un pays étranger, en particulier avec la Libye. Donc je veux croire que ces engagements seront tenus. Si d'aventure ils ne l'étaient pas, cela ne pourrait pas ne pas avoir, bien entendu, des conséquences sur les relations entre nos deux pays.

QUESTION – Pardonnez-moi, Monsieur le Président, de vous relancer sur cette question. Vous parlez de conséquences mais de quelles conséquences s'agirait-il ?

LE PRESIDENT – Nous observerons la situation et nous en tirerons les conclusions qui s'imposeront, sans agressivité et sans faiblesse.

QUESTION – En 2001, ici-même, dans ces lieux, vous aviez évoqué le Sahara occidental et vous aviez parlé de provinces du Sud marocain. Est-ce que cette formulation reste pour vous d'actualité ?

LE PRESIDENT – Vous connaissez la position de la France dans cette affaire et c'est une position constante là où le débat a lieu, c'est-à-dire au Conseil de sécurité, à l'ONU, qui consiste à soutenir la position du Maroc. Pour toute une série de raisons sur lesquelles je ne reviens pas. J'en ai, vous l'imaginez, parlé très souvent avec les autorités algériennes et avec le Président BOUTEFLIKA. Vous savez que les relations entre l'Algérie et la France se sont considérablement renforcées et, là encore, la fraternité s'est affirmée. Nous avons voulu tourner une page et en écrire ensemble une nouvelle. J'ai tenu à rendre hommage à l'action déterminée des autorités algériennes pour faire face aux difficultés auxquelles elles sont confrontées, à la fois politiques et économiques. Et elles savent parfaitement que l'aide et la solidarité de la France ne leur fera pas défaut.

Mais dans toutes les familles, il peut y avoir un point de divergence ; là, nous avons un point de divergence, je le dis très clairement, je ne l'ai jamais caché. Ce que je veux simplement indiquer aujourd'hui, c'est que dans le cadre du processus engagé, notamment par l'envoyé spécial, enfin le représentant spécial du Secrétaire général, M. BAKER, dans ce cadre, nous estimons qu'une solution ne peut que recueillir que l'accord des parties et notamment des deux parties principales et qu'une solution ne peut pas être imposée par la communauté internationale contre le gré de l'une des parties.

QUESTION – Monsieur le Président, vous avez hier à Tanger déjeuné avec les chefs d'entreprises françaises, des grands groupes français, vous avez été sur le site du port, vous avez un peu découvert Tanger aussi. Est-ce qu'avec les chefs d'entreprises françaises vous avez parlé particulièrement du développement et de l'investissement à Tanger et dans le Nord-ouest marocain ?

LE PRESIDENT – Je note d'abord le nombre et la qualité des chefs d'entreprises françaises qui sont venus et, plus encore, qui étaient candidats pour venir et qui malheureusement n'ont pas tous pu être retenus pour des raisons, bien entendu, strictement matérielles de transport et d'accueil. Ce nombre et cette qualité exceptionnelle pour un voyage de cette nature, montrent bien l'importance que les chefs d'entreprises françaises attachent au développement du Maroc aujourd'hui et la confiance qu'ils affichent et affirment dans la capacité du Maroc à assurer un développement durable avec ses prolongements économiques et sociaux. J'observe effectivement que très nombreux sont ceux qui veulent investir et qui souhaitent pouvoir le faire dans les meilleures conditions possibles. La nature de nos relations facilite bien entendu ces choses, je souhaite qu'en particulier le Nord et notamment Tanger bénéficient de ces capacités et de ce potentiel de développement. Je l'ai dit tout à l'heure, j'ai été très impressionné par le projet de Tanger-Méditerranée. Je suis persuadé que pour le Maroc, pour la communauté euro-méditerranéenne, il y a là une chance dont je ne doute pas que les chefs d'entreprises sauront tirer toutes les conséquences.

QUESTION – On sait que dans quelques instants, vous allez rencontrer la communauté française. La presse marocaine n'est pas conviée mais si vous me le permettez, je voudrais juste que vous nous fassiez partager votre message à la communauté française qui est la plus importante ici au Maroc pour que, sur notre chaîne, on puisse l'entendre en communion. Surtout qu'après les attentats du 16 mai, on a été impressionnés par le sang-froid de la communauté française. Qu'est-ce que vous pourriez aujourd'hui dire à ces Français qui vivent ici avec nous en fraternité puisque vous-même, au Parlement tout à l'heure, vous avez parlé des Marocains et des Français, de deux peuples qui sont au-delà d'être amis, des peuples frères ?

LE PRESIDENT – Vous demandez ce que je vais dire aux Français qui habitent, ou travaillent au Maroc. Si je veux être bref et limiter le message, je dirai qu'ils ont bien de la chance d'être ici au Maroc, à tous points de vue. Dans un pays hospitalier et chaleureux, dans un pays superbe qui allie les traditions les plus éminentes avec la modernité qui s'affirme sans cesse, un sens de l'hospitalité exceptionnelle et un développement économique qui permet à toutes les initiatives de se développer utilement. Donc, je le répète, je trouve qu'ils ont beaucoup de chance. Je les saluerai naturellement amicalement et je les encouragerai.

Vous avez eu raison de dire que les dramatiques événements du 16 mai, qui ont touché la communauté française, comme la communauté marocaine, comme toutes les communautés, n'ont pas traumatisé la communauté française, consciente de la réalité des choses et que ces actes abominables n'étaient, en aucun cas, caractéristiques ou significatifs de la population marocaine. Donc leur confiance n'avait pas à en être ébranlée, même s'ils ont été comme tout le monde traumatisés et s'ils ont souffert pour le Maroc, les Marocains et leurs valeurs.

Vous aurez également observé que le Premier ministre marocain me le disait, je crois que c'est hier, que dans ce pays touristique qu'est le Maroc, où les Français sont très nombreux, les Français de métropole ou d'ailleurs sont très nombreux à venir. Il n'y a pas eu, au lendemain de ces événements, de diminution du nombre des touristes français au Maroc. Il n'y a pas eu de diminution, ce qui prouve bien qu'il y a une confiance de la France et des Français dans le Maroc, que même les pires drames ne peuvent pas affecter.

QUESTION – Permettez-moi de revenir sur la question du Sahara. En affirmant votre soutien clair à la position du Maroc, quel rôle la France compte jouer dans le rapprochement des positions des deux pays concernés, à savoir le Maroc et l'Algérie en vue de trouver une solution politique durable comme vous le souhaitez sur ce problème ?

LE PRESIDENT – Je voudrais dire que je souhaite beaucoup que les relations entre l'Algérie et le Maroc se renforcent dans un processus d'union du Maghreb qui soit un peu, si vous le voulez, de la même nature que celui que nous avons eu en Europe et qui nous a permis de surmonter des difficultés qui étaient sans aucun doute à l'origine beaucoup plus sérieuses, beaucoup plus graves que celles qui existent entre le Maroc et l'Algérie. Et dans cet esprit, j'ai salué, je me suis réjoui des derniers entretiens qui ont eu lieu entre Sa Majesté le Roi et d'une part le Président américain et d'autre part aussi à l'occasion de la réunion de l'ONU entre le Roi et le Président algérien. Vous pouvez être assurés que la France fera tout ce qui est en son pouvoir pour faciliter ces rapprochements qui sont dans la nature des choses.

QUESTION – Monsieur le Président, la situation dans les territoires palestiniens ne cesse de se dégrader, Israël a encore frappé Rafah hier, on sent qu'il y a un désintérêt de la part de la communauté internationale, malgré les réunions du quartet. Jusqu'où peut aller ce désintérêt, cette impuissance internationale ? La deuxième question concerne l'Irak, où en est-on concernant le projet de résolution au Conseil de sécurité ?

LE PRESIDENT – Sur la deuxième question, le projet de résolution, telle qu'elle avait été initialement envisagée, il y a quelques jours, par les Etats-Unis, cette résolution ne changeait pas beaucoup. Ce qui avait été antérieurement décidé et n'a pas semblé de nature à permettre un vote par le Conseil de Sécurité. Par conséquent, les Américains ont décidé de ne pas la déposer, de réfléchir à nouveau. Les contacts, bien entendu, ont été pris avec tous les membres du Conseil de sécurité dont je précise qu'ils souhaitent tous aujourd'hui, parce que c'est l'intérêt de l'Irak, que l'on trouve une solution et vous connaissez les propositions françaises.

Alors, mes dernières informations, mais elles peuvent naturellement être démenties dans les jours qui viennent, c'est que les Etats-Unis réfléchissent, après consultation, à une nouvelle formule de résolution qui pourrait être présentée dans quelques jours, nous ne la connaissons pas encore, je ne peux pas vous dire quelle sera la réaction de la France.

La France observe cette situation dans un esprit positif et constructif parce que c'est l'intérêt de l'Irak, mais elle a dit clairement comment elle voyait les choses. C'est-à-dire la nécessité de transférer la souveraineté au peuple irakien comme on a su le faire pour le peuple Afghan et un transfert progressif le plus rapidement possible dans des conditions convenables naturellement, des responsabilités aux autorités irakiennes existantes. Le tout sous le contrôle et l'impulsion de l'Organisation des Nations Unies, ça c'est la position de la France.

Alors, à partir de là, nous ne pouvons pas préjuger d'une résolution dont nous savons qu'elle va être probablement déposée, mais que nous ne connaissons pas encore.

Sur le premier point, je ne crois pas que l'on puisse parler du désintérêt croissant de la communauté internationale, en ce qui concerne le drame israélo-palestinien. On peut davantage prendre le deuxième terme que vous avez utilisé c'est-à-dire celui d'impuissance, hélas.

Pour ce qui concerne, en tous les cas, la France et l'Union européenne, pour ce qui concerne aussi les autres membres du quartet, qu'il s'agisse de la Russie ou de l'ONU, nous sommes en permanence en situation de pression pour essayer de faire avancer les choses. Vous connaissez notre position que nous défendons avec beaucoup d'ardeur et qui consiste à dire la Feuille de route doit être respectée, même si elle est, aujourd'hui, il faut bien le reconnaître, en grand danger et pour quelle soit respectée, il faut notamment que la réunion, la conférence internationale qui était prévue pour le début de la deuxième phase puisse se réunir d'urgence. Alors, je reconnais bien volontiers que dans ce processus, il n'y a pas de désintérêt, mais une certaine impuissance c'est vrai. Dans ce processus, le rôle moteur appartient de facto à nos amis américains et c'est là que le bât blesse un peu, il faut bien le reconnaître.

QUESTION – Pardonnez-moi d'insister sur la question du Sahara occidental. Est-ce qu'il y a une vraie médiation française sur le Sahara occidental auprès de l'Algérie et auprès du Maroc ? Est-ce que ce n'est pas par rapport, justement, aux interventions américaines sur ce dossier, est-ce qu'il n'y a pas une petite gué-guerre diplomatique franco-américaine sur le Sahara occidental pour l'instant ?

LE PRESIDENT – Je n'ai pas observé de guerre ou de gué-guerre franco-américaine sur le Sahara occidental, ni même maroco-américaine. Je vous ai dit ce que je pensais de cette situation, je n'ai rien à ajouter de plus. Je souhaite naturellement que petit à petit, dans le respect des situations existantes, des intérêts tels qu'ils existent, une solution puisse être trouvée et je persiste à penser que la sagesse finira par l'emporter.

QUESTION – Connaissant votre grand intérêt pour le sport et pour avoir encouragé l'équipe de France dans la dernière coupe du monde, est-ce que vous envisagez, sachant que vous avez dit : "tout ce qui concerne le Maroc, concerne la France", d'aider et d'appuyer le Maroc ? Merci Monsieur le Président.

LE PRESIDENT – Oui, parfaitement, et je vais vous dire qu'il y a à cela, et c'est ma position personnelle, beaucoup de raisons mais l'une exprime un sentiment particulier. C'est que pour la coupe du monde qui a eu lieu en France, vous vous en souvenez peut-être, il y avait une compétition entre le Maroc et la France. Et la France l'a emporté et à l'époque, ma joie pour cette victoire avait été, je dois le dire, tempérée d'une certaine tristesse. J'aurais préféré l'emporter sur un autre pays que le Maroc mais enfin, nous l'avons emporté sur le Maroc.

Alors, je me sens, en quelque sorte, une espèce de dette à l'égard du Maroc qui me conduira, bien entendu, dans la mesure de mes moyens, à ce que la France soutienne la candidature du Maroc pour la prochaine coupe du monde du football.

QUESTION – Monsieur le Président, l'Union européenne et la France continuent à demander à l'Iran une pleine collaboration avec l'Agence de l'énergie atomique. Quelle serait la position de l'Union européenne et de la France si jamais Washington décidait de mener une attaque contre l'Iran ?

LE PRESIDENT – Je n'imagine pas une chose pareille dans une région qui a déjà suffisamment souffert des actions militaires. Vous connaissez la position de la France et de l'Union européenne, une position qui est d'ailleurs portée de façon très dynamique par l'Angleterre, l'Allemagne et la France. Nous sommes en initiative permanente avec l'Iran pour essayer de faire progresser les choses. Qu'est-ce que cela veut dire ? Cela veut dire d'abord qu'il y a eu un consensus au sein de l'Agence internationale pour l'énergie atomique, de tout le monde pour demander aux Iraniens d'être transparent pour ce qui concerne le nucléaire militaire et donc d'accepter toutes les inspections, ce qui est le droit commun international. Nous avons également demandé à ce que l'Iran signe le traité d'interdiction des essais atomiques, le TICE. La France, l'Allemagne et l'Angleterre ont agi avec beaucoup de diplomatie et d'amitié pour faire progresser cette idée en Iran et elle a progressé.

En revanche, vous savez que la position de l'Union européenne est que dans l'hypothèse où l'Iran accepterait les conditions internationalement reconnues de transparence et de contrôle, alors nous ne verrions aucun inconvénient et aucune réserve à ce que l'Iran puisse développer l'électronucléaire civil. Voilà notre position et j'espère que cette position qui est une position de sagesse et pacifique l'emportera, ce qui suppose, je dirais, que chacun y mette un peu du sien.

QUESTION – Monsieur le Président, est-ce que vous avez eu l'occasion d'évoquer le sort du journaliste franco-marocain Ali LAMRABET au cours de vos entretiens ?

LE PRESIDENT – M. LAMRABET a été condamné par une justice souveraine à trois ans de prison. C'est une affaire marocaine purement intérieure et il va de soi que nous n'avons pas à intervenir dans ce domaine. J'ajoute que ce journaliste pouvait bénéficier juridiquement de possibilité de transfèrement en France. Nous avons pris toutes les dispositions, en accord avec, les autorités marocaines, pour que ce transfèrement puisse avoir lieu. Il l'a refusé. La situation est celle-là et je n'ai donc pas d'autres commentaires à faire.

QUESTION – Monsieur le Président, vous avez évoqué tout à l'heure votre intérêt pour le discours que le Roi a prononcé hier. Est-ce que vous avez le sentiment que ce projet d'une modification du statut de la femme est une véritable révolution culturelle et qu'elle peut entraîner précisément un grand changement dans la démocratie de ce pays ?

LE PRESIDENT – Il ne faut pas abuser du terme "révolution". Mais c'est une évolution considérable et déterminante et qui, une fois de plus, apporte le témoignage de la volonté du royaume, du Roi bien entendu, mais aussi du peuple marocain, on a pu le voir avec les réactions de l'Assemblée, une volonté d'aller vers la démocratie, les droits de l'Homme, l'état de droit, l'égalité homme-femme. J'ajoute que dans les décisions historiques qui ont été prises par Sa Majesté hier, rendues publiques hier, devant le Parlement, il est un élément dont je ne suis pas sûr que la presse ait ressenti toute l'importance. C'est qu'au-delà même des problèmes de statut, de tutelle, de statut de la femme, il y a eu la décision, pour la première fois, prise par Sa Majesté, de présenter au Parlement cette réforme. Et ça c'est une évolution considérable, là encore dans le sens de la démocratie. Et je voudrais dire simplement toute mon admiration pour la façon dont, avec sagesse et fermeté, Sa Majesté le Roi Mohammed VI conduit son peuple sur les voies de la modernité, dans le respect de ses traditions religieuses et culturelles.

QUESTION – Monsieur le Président, les Européens en général et les Français en particulier viennent au Maroc sans visa ou presque. Par contre le Marocain, quand il veut se rendre en Europe, c'est pas sûr de l'avoir. Ce n'est pas une question que je veux vous poser avec tout mon respect et mes égards, Monsieur le Président, mais une promesse. Est-ce que vous allez lutter contre cette forme de pollution ?

LE PRESIDENT – Quelle forme de pollution ? Le fait de ne pas donner de visa ? Je sais parfaitement le souhait exprimé par les autorités marocaines d'avoir beaucoup plus de liberté dans le domaine des visas et c'est dans ce sens que nous allons. Le nombre a déjà été très sensiblement augmenté. Cela suppose des négociations qui sont actuellement en cours, d'une part, avec la France, et d'autre part, avec l'Union européenne pour permettre, en contrepartie, de cette libéralisation en matière de visa et de transport, d'avoir les garanties nécessaires pour ce qui concerne d'éventuelles réadmissions. Et ces négociations se passent, je dirais bien, ce qui me permet d'escompter une amélioration très sensible de la situation dans les mois qui viennent ou dans le courant de l'année prochaine.

QUESTION – Monsieur le Président, la France a déjà souffert du terrorisme. Cette année, c'est le Maroc qui a payé le prix et vous avez déjà exprimé votre position sur cette question. Dans quelle mesure le Maroc peut bénéficier de l'expérience française dans la lutte contre le terrorisme qui, après tout, est un phénomène international ?

LE PRESIDENT – La France a souffert du terrorisme comme beaucoup d'autres pays. Le Maroc qui avait été jusqu'ici épargné vient de connaître également ce drame. Ce n'est pas à sens unique que peuvent se faire les choses, c'est ensemble, de façon coordonnée. Il y a aujourd'hui entre les autorités compétentes policières, judiciaires, militaires, civiles du Maroc et de la France, une coopération extrêmement forte, confiante et efficace. Et cette coopération continuera, vous pouvez en être assurés.

Je vous remercie.

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