POINT DE PRESSE CONJOINT

A L’ISSUE DE L’ENTRETIEN ACCORDE

A

MONSIEUR IBRAHIM RUGOVA, DIRIGEANT ALBANAIS DU KOSOVO,

PAR MONSIEUR JACQUES CHIRAC,

PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Palais de l’Elysée - Samedi 13 juin 1998

QUESTION -

Monsieur RUGOVA vous sentez-vous rassuré par la volonté des Occidentaux de montrer les dents, comme l’a dit Monsieur VEDRINE, à Monsieur MILOSEVIC et êtes-vous convaincu de la bonne volonté russe ?

monsieur rugova -

Premièrement, je remercie le Président CHIRAC pour cet accueil, cette réception au Palais de l’Elysée, c’est un grand jour pour les Kosovars. Malgré les derniers jours très difficiles, nous avons l’assurance que l’Occident est uni pour sauver la situation au Kosovo.

question -

Cela suffira-t-il ?

monsieur rugova -

Pour sauver et protéger le peuple du Kosovo, pour stopper l’exode du peuple qui continue encore et les déplacements à l’intérieur du Kosovo parce qu’il n’y a plus de 80 000 déplacés, et 20 000 qui sont allés en Albanie. Parce que si l’on regarde la situation au Kosovo, si on ne prend pas une décision, on ira vers une grande instabilité de l’Albanie, de la Macédoine, peut-être même de la Grèce et d’autres pays alentours.

question -

Est-ce que vous avez le sentiment que cette fois-ci la communauté internationale va aller plus vite, faire davantage pression sur la Serbie que lorsqu’il y a eu les événements en Bosnie ?

monsieur rugova -

J’espère qu’il y a une unification sur les actions pour le Kosovo.

question -

Est-ce que vous êtes prêts à reprendre le dialogue, Monsieur RUGOVA ?

monsieur rugova -

Il faut arrêter les opérations serbes et l’exode. Il faut donner un climat pour aider les négociations et pour les réussir.

Dans cette situation, c’est très difficile de vous parler aujourd’hui. C’est la question de l’existence du peuple du Kosovo.

question -

Vous croyez encore en la possibilité d’une solution négociée ?

monsieur rugova -

Je crois qu’on peut toujours trouver des solutions pour des négociations. C’est mieux de parler avant que d’être catastrophé après. Aussi nous sommes sans aucune protection, c’est pour cela que je demande la protection de l’Occident, de la France et des autres pays occidentaux.

question -

(inaudible)

le président -

Je voudrais d’abord rappeler, parce que cela a été évoqué, que dès mon élection j’ai voulu une politique de grande fermeté en Bosnie où la situation était très mauvaise. Et la détermination et la fermeté ont permis d’ouvrir les voies de la paix. La création de la Force de réaction rapide et son intervention ont permis de changer les faits.

Nous sommes aujourd’hui, avec le Kosovo, dans une situation qui, je dirais, est un peu de la même nature.

Chacun voit bien qu’il y a une intervention brutale de la part des Serbes. Elle se traduit par l’exode des Kosovars, par des conflits, par des morts, des blessés. Une volonté en vérité de purification ethnique à nouveau, ce qui n’est pas acceptable pour nous, peuples occidentaux. Par conséquent, il faut que cela cesse. J’ajoute que, si cela devait continuer, il y aurait un grand risque que cela s’étende à l’ensemble des Balkans.

Alors la France a une position simple dans cette affaire.

Premièrement, il faut utiliser tous les moyens de pression nécessaires, y compris les moyens militaires, pour rétablir la paix. C’est dans cet esprit que les premières décisions ont été prises par l’OTAN. Vous avez compris tout à l’heure ce qu’avait dit notre Ministre des Affaires étrangères qui correspond tout à fait à la position française, naturellement, et aux nécessités.

Deuxièmement, nous souhaitons que ces actions, éventuellement militaires, soient prises et décidées au sein du groupe de contact à l’unanimité et nous pensons que c’est possible.

Je me réjouis que le Président ELTSINE reçoive, lundi, Monsieur MILOSEVIC pour que celui-ci puisse comprendre à la fois la gravité de la situation et la volonté des puissances du groupe de contact que cette situation s’améliore.

Nous souhaitons également que les décisions soient prises au niveau du Conseil de Sécurité, d’où le soutien que nous avons apporté immédiatement au projet de résolution qui demande l’autorisation au Conseil de Sécurité d’agir de façon militaire en tant que de besoin.

Donc il va y avoir des premiers gestes dimanche, il va y avoir des entretiens entre Monsieur ELTSINE et Monsieur MILOSEVIC lundi, et j’espère que l’on pourra obtenir la cessation des hostilités et de l’agression des Serbes au Kosovo. Sinon, eh bien, tous les moyens - y compris militaires - devront être mis en oeuvre.