Discours prononcé par M. Jacques CHIRAC Président de la République à l'université d'Oran suivi d'un dialogue avec les étudiants.


Oran – Algérie Mardi 4 mars 2003

Monsieur le Président de la République, Mesdames et Messieurs les Ministres, Monsieur le Recteur de l'Université d'Es-Senia, Mes chers amis,

Un mot d'abord, d'excuse, au nom du Président BOUTEFLIKA et en mon nom, pour le retard que nous avons enregistré. La vérité, que jusqu'à ce matin 11 heures, nous avions tenu parfaitement dans le temps imparti. Mais alors, à Oran, l'accueil a été si chaleureux, si extraordinaire, qu'on n'a pas pu ne pas saluer celles et ceux qui, très gentiment, nous recevaient et que tout cela, inévitablement, a pris plus de temps que prévu. Croyez bien que nous le regrettons, que nous vous présentons nos excuses et que, pour ce qui nous concerne, nous venons avec d'autant plus de plaisir vous saluer et parler un peu avec vous.

Tout d'abord, j'aimerais vous adresser un grand merci, Monsieur le Recteur Derbal. Merci, bien sûr, pour vos paroles de bienvenue tout empreintes de cette amitié algéro-française à laquelle vous-même apportez beaucoup. Merci d'avoir organisé cette rencontre dans la prestigieuse Université d'Es-Senia. Merci au corps professoral, aux enseignants, que je salue, présents aujourd'hui. Et merci naturellement aux étudiantes et aux étudiants qui sont venus nous écouter. S'adresser à vous, aux étudiants, aux jeunes filles, aux jeunes hommes, s'adresser à vous pour qui tout n'est qu'avenir et aventure, c'est un moment privilégié et, je dirais, enthousiasmant. Et singulièrement ici, en Algérie, pays en pleine jeunesse et qui, sous votre impulsion, Monsieur le Président de la République et très cher ami, a ouvert de vastes et profonds chantiers dont vous, étudiantes et étudiants, êtes d'ores et déjà les acteurs.

Je salue à cette occasion la superbe ville d'Oran, métropole méditerranéenne, si proche de l'Europe par son histoire, ville de brassages humains, dont chacun sait la place qu'elle occupe dans la littérature française, notamment grâce à l'oeuvre d'Albert Camus.

A travers vous, qui êtes à la fois la force et l'avenir de votre pays, c'est à toute la jeunesse d'Algérie que je voudrais m'adresser. Une jeunesse enthousiaste, dynamique, qui, je le sais, veut mettre sa générosité, sa capacité de création au service d'un monde meilleur, plus fraternel. Un monde en paix.

Mais aussi, comme dans toutes nos sociétés, quelles qu'elles soient, une jeunesse qui se pose mille questions, une jeunesse révoltée par l'injustice, incertaine de son avenir, traversée de doutes sur sa capacité à pouvoir s'épanouir librement.

Les doutes de cette jeunesse sont également les nôtres. Cet avenir, et c'est aujourd'hui le sens de ma visite en Algérie, nous avons l'ambition de le construire la main dans la main, Algériens et Français, réunis et solidaires.

Etudiantes et étudiants qui, ensemble, incarnez l'Algérie d'aujourd'hui, vous n'étiez pas nés lors de l'Indépendance de votre pays. 1962, pour vous, c'est déjà l'histoire, mais vous l'avez vécue à travers vos parents. Les préoccupations de votre génération, vos combats, vos aspirations s'inscrivent tout naturellement dans le sillage de ceux de vos aînés. Mais ils sont également différents, par la force des choses et du temps. Ce qui vous mobilise, c'est votre avenir, ce sont les défis qu'il vous faut relever. Ces défis, certains vous sont propres et d'autres nous sont communs. Certains sont liés à l'identité algérienne, d'autres mettent en jeu la construction du Maghreb, votre relation avec l'Europe ou encore vos aspirations à l'universalité de l'Homme et de ses valeurs. * Les Français ont, avec l'Algérie, une relation très particulière, complexe, je dirai charnelle. Peu de pays et de peuples entretiennent l'un pour l'autre des sentiments aussi forts. Cette relation porte, c'est vrai, l'empreinte de la conquête et des affrontements, mais elle se nourrit aussi d'influences pacifiques, de dialogue. Certes, les pages de l'Histoire écrites après 1830 resteront celles de la colonisation, de ses ambitions, de ses rêves, de ses rendez-vous manqués, de ses violences et de ses injustices, les pages aussi d'un conflit long, cruel, pour les Algériens comme pour les Français. Les passions se sont tues, mais il arrive encore que certaines cicatrices soient douloureuses. Il faut le savoir, en tenir compte et le respecter.

Cette histoire a tissé des liens passionnants entre l'Algérie et la France, passionnants et passionnels. Deux pays unis à la fois par une fascination, une affection, le mot n'est pas trop fort, mais aussi, sûrement, une admiration réciproques. On pourrait en porter maints témoignages. Ensemble, nous devons penser à toutes celles et à tous ceux qui ont souffert, et ne pas chercher à taire ni à occulter les pages les plus sombres de cette relation. Ce travail de mémoire, nous avons choisi de le faire, avec lucidité, avec sérénité, car c'est en le menant à bien que nous construirons l'avenir sur des fondations solides.

Pendant cette période, la présence en Algérie d'une communauté originaire de France et des pays riverains de la Méditerranée a permis, par-delà les drames inhérents à toute conquête, beaucoup d'enrichissements mutuels. Et n'oublions jamais que c'est dans la totalité de ses mémoires qu'une Nation se construit. C'est le cas de l'Algérie comme de la France. L'Algérie est arabe et berbère, elle a été aussi numide, romaine, vandale, byzantine, ottomane, française. Tout comme la France a été celte, romaine, germanique, anglaise, espagnole ou italienne dans certaines de ses plus grandes provinces, avant d'être ce pays jaloux de sa culture, qui assume fièrement la précieuse diversité de ses origines et qui continue aujourd'hui encore de s'enrichir d'apports nouveaux, venus en particulier du Maghreb. Un pays conscient de ce que, loin de le dissoudre, la richesse des héritages forge et fait fructifier le sentiment national, ouvre le coeur et l'esprit à la réflexion, à la tolérance, à la connaissance.

Et je veux rendre ici un hommage particulier à ces nombreux jeunes d'origine algérienne qui tracent leur chemin au sein de notre société. Ils nous apportent, avec des centaines de milliers de vos compatriotes qui vivent en France, et à qui je souhaite rendre hommage, leur dynamisme et leur énergie chaleureuse. Devant vous, je veux saluer les très belles réussites, les magnifiques parcours individuels de beaucoup d'enfants de l'immigration algérienne, devenus Français et dont nous sommes fiers, comme nous le sommes de toutes celles et de tous ceux qui ont choisi d'entrer dans notre communauté nationale.

Aujourd'hui, dans cette belle ville d'Oran, héritière d'une longue tradition d'ouverture, je suis venu vous parler des enjeux de notre monde mais, aussi, je suis venu vous parler de notre avenir commun. Vous dire la foi que nous, Français, avons en l'Algérie. Et vous présenter les grandes lignes de ce partenariat que le Président Abdelaziz Bouteflika et moi-même souhaitons relancer entre nos deux pays. Un avenir, un partenariat qui se feront avec et pour la jeunesse, ici comme en France. * Le monde est aujourd'hui menacé d'une terrible cassure. Après la chute du mur de Berlin et la fin de la guerre froide, nous avons pu croire à l'avènement d'un univers plus calme, moins belliqueux. Avec la tragédie du 11 septembre 2001, une certaine vision du nouveau millénaire s'est effondrée. Mais pas l'espoir. C'est le sens de l'engagement de la France. Nous refusons toute fatalité. Nous récusons, d'où qu'ils viennent, les tenants d'un choc des civilisations qui serait inéluctable, ceux qui voudraient qu'aux guerres entre nations, qu'à la confrontation des idéologies, succèdent maintenant les oppositions irréductibles entre cultures et entre religions. Tout particulièrement entre l'Islam et le Christianisme, entre l'Occident et le reste du monde. Ce n'est pas la vision de la France. Ce n'est ni sa culture, ni sa tradition.

Cette théorie du choc peut apparaître convaincante à qui se contente d'une analyse simplificatrice, en vérité simpliste. En fait, il est absurde de considérer la notion de civilisation comme une notion immuable, figée, vouée à une forme d'éternité. Et envisager un "choc des civilisations", c'est croire que les groupes humains sont monolithiques. C'est nier leur capacité d'adaptation, d'ouverture aux autres, de tolérance, de synthèse. Bref, c'est méconnaître le fonctionnement des sociétés humaines depuis des millénaires, depuis qu'elles sont organisées.

Et ce sont justement les pays riverains de la Méditerranée, berceau de tant de cultures anciennes -dont sont issues et l'Algérie et la France-, ce sont eux qui peuvent démontrer que ces cultures se parlent et s'interpénètrent. Que se croisent et se décroisent les influences. Que l'on peut trouver sur un même sol les traces de bien des croyances, les marques de bien des civilisations qui ont, tour à tour, forgé l'âme de nos peuples et dont nous sommes la représentation. Nombreux sont les sites en Algérie où se juxtaposent les témoignages d'un temple romain, d'un fort byzantin, d'une église chrétienne non loin d'une nécropole antique ou d'une mosquée. Peut-on rêver plus puissant exemple ? Et j'ai à l'esprit le livre d'Assia Djebar, "Ces voix qui m'assiègent", où elle chante, depuis Apulée jusqu'à Kateb Yacine et au-delà, la multiplicité des voix et des langues de la littérature algérienne.

Voilà la vision, fondée sur le respect, sur l'égale dignité des cultures et des peuples qui inspire les engagements de la France sur la scène internationale. Et voilà pourquoi elle se bat pour que soient respectés le droit international, le principe de responsabilité collective et le rôle central des Nations Unies, qui incarnent l'idéal démocratique à l'échelle de la planète.

C'est tout cela qui est en jeu et que la France défend à l'occasion de la crise iraquienne. Son objectif est celui de la résolution 1441, c'est-à-dire le désarmement de l'Iraq dans la paix. Avec la conviction que l'usage de la force ne doit venir qu'en ultime recours, que la guerre est toujours un aveu d'échec, avec toujours des conséquences désastreuses, qui peut de surcroît allumer de nouveaux brasiers et renforcer le camp de la haine et de l'obscurantisme. Dans cette vision, l'Algérie et la France se rejoignent parfaitement. * Mes Chers Amis,

Vous voyez que, sur l'essentiel, l'Algérie et la France sont très proches l'une de l'autre. C'est ce qui nous a incités, le Président Bouteflika et moi-même, à refonder la relation qui nous unit, à conclure un pacte ambitieux pour nos deux pays. C'était l'idée du Président Bouteflika lorsqu'il est venu il y a un peu plus de deux ans en visite d'Etat en France. Et c'était évidemment l'idée forte pour les années qui viennent, permettant de créer ce mouvement de solidarité auquel, nous le savons, nos deux peuples aspirent et qui est à l'évidence dans l'intérêt de nos deux nations. Cette aventure commune, le Président Bouteflika a voulu, et j'ai souhaité l'accompagner naturellement, qu'elle marque une étape nouvelle à l'occasion de ma visite d'Etat d'aujourd'hui. Cette aventure commune repose d'abord et avant tout sur la jeunesse. Nous souhaitons qu'elle s'y engage, qu'elle y mette toute sa force. Et c'est le sens de notre présence conjointe aujourd'hui à l'Université d'Oran.

Notre ambition, c'est d'abord de renforcer notre action au service de la paix, et de relever ensemble, avec nos peuples, les défis du développement, afin de faire face aux enjeux de la mondialisation.

Notre réponse commune à la mondialisation c'est aussi le respect de la diversité culturelle, diversité culturelle qui passe notamment par la force de nos langues.

La langue arabe offre un apport tout à fait essentiel à la culture universelle. Elle exerce depuis longtemps en France un fort attrait. Des savants comme Louis Massignon ont joué, à cet égard, un rôle considérable. Et je ne sais pas si vous savez que l'arabe est, avec le chinois, d'abord l'arabe, ensuite le chinois, l'une des langues dont l'apprentissage arrive en tête, est le plus suivi par les élèves de nos grandes Ecoles en France.

Parallèlement, le français est demeuré en Algérie vivace et inventif, langue à la fois de savoir et langue populaire. Et je sais gré au Président de la République algérienne, le Président Bouteflika, d'avoir su dépassionner un débat linguistique ancien et complexe, plongeant aux sources même de l'identité de nos deux pays. Au sommet francophone de Beyrouth, vous avez dit, Monsieur le Président, et je vous cite : "le mérite d'une langue n'est pas seulement d'être l'expression d'une civilisation, mais de servir de lien entre les civilisations et d'assurer ainsi non seulement leur compréhension mutuelle, mais l'enrichissement de chacune d'elles par les autres". On ne peut pas mieux dire.

Et cette langue française, que vous avez avec nous en partage, vous permet d'entrer de plain-pied, avec d'autres, dans cet espace francophone qui se renforce chaque jour et qui constitue pour nous tous un espace de respiration. Un espace politique aussi, pour peser de tout le poids de nos pays réunis sur la scène internationale, y défendre la diversité culturelle, le respect de l'autre, notre vision d'un monde multipolaire. Quand l'Algérie et la France quand elles défendent leur pluralité linguistique et leurs héritages, elles combattent pour la richesse des cultures du monde.

C'est dans cet esprit que les centres culturels français en Algérie accomplissent aujourd'hui leur mission et doivent répondre à vos attentes. C'est dans cet esprit, que nous avons conçu l'Année de l'Algérie en France, à l'initiative du Président Bouteflika, une année destinée à sceller les retrouvailles de nos deux pays. Avec comme ambition d'instaurer le partage et la culture au coeur des relations entre nos peuples. Cette Année de l'Algérie est déjà un immense succès, projetant dans la France tout entière, par ses milliers et ses milliers de manifestations culturelles, les mille visages de votre pays. * Cette Algérie de demain, vous en êtes évidemment les architectes. Vous représentez une Algérie engagée dans la voie de réformes profondes, déterminantes pour votre avenir. Et les réformes, c'est toujours très difficile à faire. C'est très facile à écrire sur le papier et très difficile, naturellement, à mettre en oeuvre. Réformes économiques, réformes de l'enseignement, approfondissement de l'Etat de droit, meilleur accès à ce qu'il est convenu d'appeler, depuis le sommet de Johannesburg, les "services essentiels" : l'eau, les transports, l'énergie, l'habitat, toutes questions abordées désormais dans la perspective du développement durable, pour le bien-être des populations. Défis de chacune de nos nations quel que soit son niveau actuel de productivité.

Ces réformes sont l'affaire de l'Algérie, le choix des Algériens. Mais la France est prête à les accompagner et à développer avec vous une nouvelle approche de sa coopération. Et c'est pourquoi, ensemble, nous avons engagé de grands projets. Nous avons décidé de fonder un Haut Conseil franco-algérien de coopération universitaire et de recherche autour de trois piliers : la formation des futurs chercheurs, un programme massif de formation des enseignants, et la mise en place de partenariats renforcés entre grandes institutions universitaires et de recherche d'Algérie et de France. La création de ce Haut Conseil permettra de traduire en actions concrètes l'appui de la France, l'accompagnement de la France, à la rénovation par l'Algérie de son système d'enseignement supérieur, rénovation déjà bien engagée. Et vous serez tous, au premier chef, concernés par leur mise en oeuvre et leur réussite. Nous sommes convenus aussi de créer une Ecole supérieure algérienne des affaires, qui deviendra une référence pour contribuer à former les cadres d'un secteur privé algérien qui est aujourd'hui en pleine expansion.

Le lancement de ces projets me donne l'occasion d'exprimer mon estime et ma reconnaissance à celles et à ceux qui, de part et d'autre de la Méditerranée, ont maintenu, lors de la douloureuse décennie passée, les relations entre nos Universités. Et c'est grâce à l'exceptionnel maillage tissé depuis des décennies entre les enseignants, entre les chercheurs de nos deux rives que nous pouvons aujourd'hui concevoir cette nouvelle approche de notre coopération.

Ce renouveau s'appuie sur toutes les ressources de l'Algérie. Mais la première de ces richesses, c'est celle des esprits libres, la curiosité, l'intelligence, le goût du savoir. Vous toutes et tous témoignez du dynamisme de ces valeurs qui ont coûté la vie à tant de vos maîtres, de vos collègues, de vos amis. Dans ces années d'horreur, le terrorisme a détruit des écoles, massacré des élèves et des enseignants, tenté de faire obstacle à toute démarche de connaissance, de tolérance, de réflexion.

L'Algérie a mesuré l'effroyable danger d'une idéologie fondée sur la prétention à détenir une vérité unique, et la volonté de l'imposer par la force, par la négation de la pensée, par la négation de l'existence de l'autre. L'Algérie a résisté à cette vague de haine et de destruction avec une force admirable. Votre génération ne permettra pas que revienne cette époque terrible. Ici comme ailleurs, je sais que l'aspiration du peuple algérien à la paix civile, au redressement est également une aspiration à la liberté dans la justice, à la démocratie, au respect des Droits de l'Homme. * Nous appelons de nos voeux une Algérie forte et prospère, offrant à ses filles et à ses garçons de brillantes perspectives.

Je sais l'intérêt que beaucoup d'entre vous portent au modèle européen. La France, l'Europe sont des sociétés ouvertes, où les étudiants sont les bienvenus pour approfondir leur savoir. Nous avons la volonté de faciliter la circulation des hommes. Elle est au centre de la relation franco-algérienne. Nous devons travailler, entre responsables algériens et français, à en moderniser les modalités. Cela a été l'un des sujets de nos entretiens avec le Président Abdelaziz Bouteflika.

Mais, nous le savons aussi, il n'est pas de nation grande et prospère qui n'ait d'abord foi en elle-même. L'Algérie, comme la France, s'identifie à l'Histoire. Elle a traversé trop d'épreuves pour ne pas vouloir aujourd'hui réussir pleinement son entrée dans le XXIème siècle, et dans un concert des nations où elle est chaque jour davantage écoutée et respectée. Votre formidable vitalité, votre optimisme farouche, votre foi dans des lendemains meilleurs sont la marque de l'âme du peuple algérien. Puissiez-vous suivre les traces et le génie de vos aînés. L'Algérie a besoin de vous, de votre talent, de votre force, de votre enthousiasme, de votre générosité, de cette immense confiance qui habite ceux de votre âge, de ces compétences que vous êtes en train d'acquérir. Mobilisez-vous à son service !

C'est à vous, qui êtes la relève et qui incarnez l'espoir de l'Algérie, de forger un pays à la mesure de vos rêves. Dans vos études, demain dans votre travail, dans votre désir de réussite, faites vivre les idéaux de liberté, de tolérance, de solidarité, de justice, de fraternité !

Et veux exprimer ici ma confiance dans l'avenir de l'Algérie, dans sa capacité à relever les défis de son développement. Dans cette ambition que porte collectivement le peuple algérien, l'Algérie et la France seront côte à côte, avec toute l'énergie et l'engagement qu'autorisent l'estime, le respect et l'amitié que nous nous portons.

Construisons ensemble cette nouvelle relation dans la confiance et dans l'enthousiasme ! Multiplions les partenariats entre nos sociétés et nos collectivités, comme les dialogues entre nos jeunesses ! Bâtissons un nouvel espace commun d'échanges et de vie.

Une fois encore, un grand merci à toutes et à tous pour votre accueil, et tous mes voeux à chacune et à chacun d'entre vous dans l'accomplissement de ses aspirations. Je vous remercie.

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LE PRESIDENT – Nous sommes arrivés en retard, nous en parlions avec regret avec le Président BOUTEFLIKA dans la voiture, qui m'a dit : à tout le moins, ne faisons pas peser uniquement sur les étudiants la responsabilité de récupérer le retard.

Alors, je voudrais tout de même essayer d'engager un dialogue qui sera, hélas, bref compte tenu des contraintes mais qui peut tout à fait avoir tout de même lieu et c'est avec plaisir que je répondrai, si vous le souhaitez, à une ou deux questions que vous voudriez me poser. Est-ce qu'il y a un volontaire ?

QUESTION – Monsieur le Président, je suis étudiant en 6ème année à la faculté de médecine d'Oran. On a constaté, durant cette dernière décennie, une absence presque totale des échanges pédagogiques et scientifiques entre les facultés de nos deux pays, la France et l'Algérie, dont l'une des conséquences est de nous retrouver privés des bienfaits de la médecine française, dont la réputation, bien sûr, est mondialement reconnue. En plus, notre langue d'études est restée jusqu'à maintenant le français, exclusivement le français, et surtout les normes scientifiques de la pratique médicale appliquées jusqu'à maintenant sont issues de celles pratiquées en France.

Ma question est la suivante : que comptez-vous faire, Monsieur le Président, pour relancer ce courant d'échanges scientifiques, pédagogiques, entre nos deux pays, qui sera bien sûr bénéfique pour nous, pour notre formation, et qui sera un argument crucial pour la reconnaissance de nos diplômes, éventuellement en France, et ailleurs, et surtout pour nous permettre de compléter nos formations en France ?

LE PRESIDENT – Il est évident qu'il est de l'intérêt de chacun, de l'Algérie comme de la France, de multiplier les échanges et les contacts. Pour une raison simple, c'est que le dialogue est en lui-même, par définition, porteur de progrès. Quand on se connaît mieux, on se regarde autrement et de façon toujours plus sympathique. Alors, cela suppose effectivement que nous organisions cette coopération. Déjà, elle existe. J'ai dit tout à l'heure que c'est grâce aux milliers d'accords entre les universités ou les centres de recherches d'Algérie et de France, pendant des années et des années, qu'a pu être maintenu le courant minimum qui permettait cette osmose nécessaire. Il faut maintenant le développer.

Les initiatives que nous avons prises, le Président BOUTEFLIKA et moi, sont notamment indiquées dans la déclaration commune que nous avons voulu donner en préalable au traité que nous sommes en train d'élaborer entre nos deux pays, mais c'est toujours plus long un traité, ne serait-ce parce qu'il doit être ratifié par les Parlements. Elles vont précisément dans le sens du renforcement et du développement des échanges, des échanges entre les universités, entre les centres de recherche, avec une grande ambition. Alors, cela suppose des aménagements techniques dans le domaine des visas, dans le domaine des bourses, dans le domaine plus général des échanges sur le plan matériel, du logement, etc··· Nous avons de ce point de vue une grande ambition, aussi bien le Président BOUTEFLIKA que moi-même, et, à la suite de ces décisions prises à l'occasion de ce voyage, j'espère que nous ferons un progrès sensible et important dans le sens que vous souhaitez, que vous avez à juste titre défini comme nécessaire.

QUESTION – Monsieur le Président, l'image de l'Algérie a été altérée par ce qui s'est passé. Que comptez-vous faire, Monsieur le Président, pour réhabiliter cette image sur la scène mondiale ?

LE PRESIDENT – Je ne peux porter sur l'image de l'Algérie que le regard de l'extérieur, même si c'est le regard de l'ami. Il est indiscutable que le développement de la sauvagerie terroriste, à laquelle je ne vois pour ma part aucune espèce, je ne dirais pas d'excuses mais même d'explication humaine, a nui à l'image de l'Algérie, cela ne fait aucun doute. Et elle a encore beaucoup plus nui au peuple algérien, naturellement. Et c'est dommage, parce que l'Algérie, porteuse d'une longue histoire, d'une grande tradition, d'une vieille civilisation, avait tout pour compter parmi les grandes nations, celles qui font référence. Et puis, vous avez observé tout de même que les choses ont profondément changé depuis quelques années. Les toutes dernières années. Cela ne fait aucun doute. On le voit notamment dans toutes les instances internationales où, indiscutablement, l'Algérie a retrouvé son rang, sa place, parle d'une voix forte et assurée, est écoutée et sans aucun doute respectée. C'est une des choses qui est frappante pour l'observateur international, aujourd'hui, que de voir cette réhabilitation importante de l'image et de la place de l'Algérie.

Alors, cette situation est due naturellement à la qualité, cela va de soi, des hommes qui représentent et qui incarnent l'Algérie, des hommes et des femmes. C'est dû aussi tout de même, je dirais, au développement de la politique de concorde civile, de paix civile, qui doit encore être développée, approfondie, comprise par tous les Algériens comme la seule voie de l'avenir et de la dignité de la société algérienne, de l'homme algérien et de la femme algérienne. Mais, incontestablement, cette image s'est considérablement améliorée. Et, je le répète, c'est simplement un témoin présent dans les instances internationales qui peut l'affirmer. J'ajoute que, si vous lisez tout simplement la presse internationale, c'est une constatation que vous pouvez faire également.

QUESTION – Monsieur le Président, ce n'est pas une question, c'est un remerciement. Je voudrais vous dire, tout d'abord, que nous sommes très honorés de votre visite et aussi enchantés de nous trouver en face d'un grand homme. Vous faites honneur à l'Algérie et nous sommes très fiers de vous.

LE PRESIDENT – J'aurais envie de garder cela comme dernier mot dans mon coeur mais je vois qu'une autre jeune femme vient de demander la parole. Alors, je n'ai pas le coeur de la lui refuser. Merci.

QUESTION – D'abord nous remercions notre Président Abdelaziz BOUTEFLIKA de vous avoir invité et cette invitation nous a fait un très grand plaisir. Ma question est la suivante : il y a eu beaucoup de projets au niveau économique et politique, alors quels sont les nouveaux projets au niveau de l'enseignement ?

LE PRESIDENT – Nous avons décidé, et je crois que c'était la bonne démarche, il y a un peu plus de deux ans, sur proposition et à l'initiative du Président BOUTEFLIKA, de commencer par la culture. Certes, nous avions des relations économiques déjà, techniques, politiques, mais nous avons voulu mettre l'accent sur la culture. Et je crois que le Président a eu raison, c'était la bonne approche. Il m'avait dit à l'époque et cela m'avait frappé : "c'est l'approche que comprendra le mieux la jeunesse de mon pays". Et c'est vrai.

Et donc, nous avons lancé l'approfondissement de ces relations culturelles et nous avons voulu en porter un témoignage un peu brillant avec l'année de l'Algérie en France. J'étais sûr que ce serait une réussite. Je n'avais absolument pas imaginé le succès que cette initiative remporterait, qui est extraordinaire et qui montre bien, et je l'ai déjà dit plusieurs fois depuis quelque temps, qu'au-delà même de la qualité des prestations qui ont été faites par l'ensemble des créateurs algériens, au bénéfice de plus de deux cents villes françaises, des milliers de spectacle dans toutes nos régions, il y a eu quelque chose d'autre. Ils ont su faire vibrer des cordes sensibles dans le coeur et dans l'âme des Français. Ce qui explique cet engouement et cette réussite. Et nous allons poursuivre sur le plan culturel, dans tous les domaines, de la chanson au cinéma en passant par l'art, la culture sous toutes ses formes.

Deuxièmement, nous devons renforcer, et c'est ce qu'a évoqué tout à l'heure M. le Recteur DERBAL, c'est ce que nous avons évoqué longuement avec le Président, notre coopération dans le domaine de l'éducation, d'où, je ne reviendrai pas dessus, les décisions que nous avons prises et que nous avons fait connaître hier pour renforcer très sensiblement notre coopération dans le domaine de l'éducation, et ceci à tous les niveaux.

Et, naturellement, en dehors des relations politiques qui, entre l'Algérie et la France, sont excellentes et qui sont en quelque sorte maintenant institutionnalisées, il y a les relations économiques. Pour ces relations économiques, nous avons aussi une grande ambition. Cette ambition repose sur la confiance croissante, je le dis à la jeune femme qui a posé la question tout à l'heure.

Cette confiance s'est très fortement améliorée en même temps que l'image de l'Algérie depuis notamment deux ou trois ans. Et cette confiance est à la base de toutes les initiatives qui peuvent être prises. On peut prendre des mesures sur le plan technique, sur le plan gouvernemental. Mais il faut que la confiance conduise les investisseurs, qui sont en général des investisseurs privés, à venir en Algérie pour ce qui concerne la France et les investisseurs algériens pour qu'ils investissent en France. Donc nous avons pris acte de toutes les réformes, de tous les chantiers, je le répète, difficiles à mettre en oeuvre comme toutes les réformes, nous en savons quelque chose, nous, en France actuellement, mais qui sont engagées avec détermination pour moderniser l'économie algérienne et qui inspirent confiance aux investisseurs français ou étrangers.

Et nous voyons aujourd'hui l'intérêt croissant de ces investisseurs et nous les encourageons fortement à venir investir, s'implanter, travailler, former en Algérie, comme nous souhaitons d'ailleurs que les investisseurs algériens viennent également en France, ne serait-ce que pour croiser nos liens. Je pense que c'est un courant qui est bien engagé. Nos échanges commerciaux ont doublé depuis trois ans. C'est un signe. Nos investissements ont très sensiblement augmenté. Nos liens sont très forts et ils ne demandent qu'à se développer. C'est notre l'ambition et nous l'assumerons et nous la réussirons.

Je vous remercie.