SOMMET FRANCO-BRITANNIQUE

COMMUNIQUE CONJOINT

LANCASTER HOUSE, LE 24 NOVEMBRE 2003

Le Premier ministre a rencontré le Président Jacques Chirac et le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin à Lancaster House pour le 26ème Sommet franco-britannique. Le Premier ministre britannique était accompagné de Jack Straw, ministre des Affaires étrangères, de David Blunkett, ministre de l'Intérieur, de Geoff Hoon, ministre de la Défense, du Dr John Reid, ministre de la Santé, de Margaret Beckett, ministre de l'Environnement, et des ministres adjoints ("Ministers of State"), David Miliband (Ecoles), Alan Johnson (Enseignement supérieur), Lord Sainsbury (Recherche) et Dr Denis MacShane (Europe).

Le Président et le Premier ministre français étaient accompagnés de Dominique de Villepin (ministre des Affaires étrangères), de Nicolas Sarkozy (ministre de l'Intérieur), de Michèle Alliot-Marie (ministre de la Défense), de Roselyne Bachelot-Narquin (ministre de l'Environnement), de Jean-François Mattei (ministre de la Santé), et des ministres délégués Noëlle Lenoir (Europe), Xavier Darcos (Enseignement scolaire) et Claudie Haigneré (Recherche).

Suite aux épouvantables attentats terroristes d'Istanbul frappant sans discrimination, le Premier ministre britannique et le président de la République française ont réitéré leur condamnation absolue du terrorisme sous toutes ses formes et leur ferme détermination à accomplir tout ce qui est en leur pouvoir pour y faire face et le vaincre. Ils ont engagé à nouveau la France et le Royaume-Uni à collaborer le plus étroitement possible à cette fin et ont exprimé leur plus profonde sympathie à l'égard des victimes et de leurs proches.

L'année prochaine sera consacrée à célébrer le centenaire de l'Entente cordiale, événement qui a marqué le commencement d'une amitié et d'une coopération qui ont peu à peu lié nos deux pays qui, depuis, sont devenus partenaires au sein de l'Union européenne. A la veille de l'élargissement de l'Union, qui a le soutien de nos deux pays, la Grande-Bretagne et la France souhaitent approfondir leurs relations et renforcer ces liens d'amitié et ce partenariat aussi en faveur de l'Union européenne dans son ensemble. Dans ce contexte, les deux pays vont continuer à collaborer étroitement en vue d'assurer le succès de la Conférence intergouvernementale.

Le Sommet de Londres contribuera à aboutir à cette fin, à la fois à travers une coopération plus étroite entre nos deux pays sur les deux principaux sujets du moment - à savoir l'Afrique et la défense -, à travers l'application des accords signés au cours du Sommet du Touquet du 4 février 2003 sur la lutte contre l'immigration clandestine et l'éducation, et, enfin, grâce au lancement de nouvelles initiatives, notamment dans les domaines de la lutte contre le cancer et de la protection de l'environnement.

Sur la défense

Le Royaume-Uni et la France ont tous deux été au premier plan de la mise au point de la Politique européenne en matière de sécurité et de défense (PESD). Notre déclaration distincte sur le renforcement de la PESD salue les progrès considérables qui ont été accomplis depuis notre dernier Sommet qui s'est déroulé au Touquet en février, y compris le succès de deux opérations militaires de la PESD et une opération civile de la PESD. Nos deux pays réaffirment leur soutien à l'Union européenne pour l'organisation et la direction d'une mission coordonnée en Bosnie, suite au retrait de la force de stabilisation de l'OTAN (la SFOR). Une composante militaire serait instaurée dans le cadre de Berlin Plus. Nous souhaitons des débats à ce sujet dans les semaines à venir.

En continuant sur la lancée du succès de l'Opération Artémis dans la République démocratique du Congo, nous proposons une nouvelle initiative pour que l'Union européenne se focalise sur le développement de ses capacités de réaction rapide afin de renforcer son aptitude à répondre aux requêtes de l'ONU dans les situations de gestion des crises à court terme. Nous continuerons à collaborer en ce qui concerne le renforcement des capacités militaires réelles de l'Union européenne, y compris le développement d'autres objectifs en matière de capacités et l'instauration de l'Agence et en poursuivant nos travaux bilatéraux sur la coopération navale.

Sur la politique étrangère

Le Royaume-Uni et la France tiennent à préserver le rôle central que jouent les Nations unies pour relever les défis auxquels la communauté internationale se trouve confrontée. Nous collaborerons pour atteindre les aspirations exprimées dans la déclaration du Millénaire sur la paix et la sécurité, sur le développement durable (en particulier pour la santé, l'éducation et la protection de l'environnement), sur les Droits de l'Homme et sur la bonne gouvernance. Nous ferons la promotion d'objectifs européens communs au sein de l'ONU, y compris à travers notre appartenance au Conseil de sécurité. Nous apportons notre soutien aux efforts soutenus déployés pour renforcer et réformer les Nations unies. Nous nous félicitons de l'instauration par Kofi Annan d'un panel de haut niveau chargé d'examiner ces questions. Nous nous félicitons en outre des nouvelles initiatives lancées pour donner un nouvel élan à l'Assemblée générale et continuerons à demander une réforme du Conseil de sécurité pour renforcer son autorité et sa légitimité, y compris par l'intermédiaire de nouveaux membres permanents et non permanents. Nous ne ménagerons aucun effort pour renforcer l'efficacité de la Commission des Droits de l'Homme et ses mécanismes spéciaux et pour encourager une coordination plus étroite des activités de l'ONU en faveur de la paix et de la sécurité, du développement et de l'assistance humanitaire.

Nos pays sont déterminés à renforcer la capacité de l'ONU à faire face aux nouvelles menaces et aux nouveaux défis auxquels la paix et la sécurité internationales se trouvent confrontées, dont le terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive, et à obtenir une application plus efficace des décisions du Conseil de sécurité. Nous collaborerons avec nos partenaires européens pour bâtir sur la coopération entre l'Union européenne et l'ONU en matière de gestion des crises et pour aider à augmenter l'efficacité des travaux de l'ONU avec les pays en conflit ou au lendemain du conflit. Pour bâtir sur les initiatives lancées à Evian en juin concernant la portée du G7, nous avons donné pour mission à nos fonctionnaires de faire des travaux plus approfondis sur les moyens de renforcer le cadre économique et social international, y compris avec l'ONU et les institutions financières internationales, avec les pays en développement et avec d'autres partenaires. Ces travaux examineront des idées telles que la création éventuelle d'instances politiques nouvelles et le renforcement du statut du Programme des Nations unies sur l'environnement. Nous proposons que les chefs d'Etat ou de gouvernement se réunissent à New York en 2005 pour passer en revue les progrès accomplis par rapport aux objectifs fixés dans la déclaration du Millénaire et au cours d'autres sommets importants de l'ONU.

La Conférence ministérielle euro-méditerranéenne qui doit se dérouler à Naples les 2 et 3 décembre présente une occasion importante de donner un nouvel élan de vie aux travaux du Processus de Barcelone. A cet égard, la France et le Royaume-Uni, avec l'accord de l'Allemagne, de Chypre, de l'Espagne, de Malte, de la Pologne, du Portugal et de la Grèce, ont communiqué à tous les partenaires euro-méditerranéens des propositions destinées à renforcer le partenariat euro-méditerranéen. Nous continuerons à faire progresser ces propositions en vue, notamment, de renforcer le dialogue politique et de sécurité et de promouvoir une plus grande intégration économique régionale et sous-régionale.

Sur l'Afrique

Notre déclaration sur la coopération franco-britannique en Afrique, que nous avons arrêtée aujourd'hui, réitère notre conviction commune qu'en oeuvrant de concert, et au coeur de l'Union européenne, nous pouvons contribuer à la paix et à la sécurité, au développement et au renforcement de la démocratie et de la bonne gouvernance sur le continent africain. Nous continuerons à apporter notre appui au Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique et nous réaffirmons notre soutien au Cycle sur le Développement de Doha.

Dans ce contexte et en soulignant que le développement de l'Afrique est tributaire de son intégration à la mondialisation, le Royaume-Uni et la France apportent leur soutien à des initiatives ayant vocation à améliorer la situation des producteurs agricoles africains. Réaffirmant de surcroît que la paix et la sécurité sont des conditions essentielles au développement, le Royaume-Uni et la France soulignent leur engagement à renforcer leurs efforts pour prendre en compte la dimension régionale des conflits, pour soutenir la médiation africaine et les efforts déployés par l'Union africaine et les organisations régionales en vue de prévenir et de gérer les conflits.

Sur la justice et les affaires intérieures

Le Royaume-Uni et la France continuent le niveau sans précédent de coopération et de succès dans la lutte contre l'immigration clandestine vers le Royaume-Uni et la France. Ceci a inclus la fermeture de Sangatte, le déploiement à Calais d'une nouvelle technologie britannique en matière de détection ainsi qu'une coopération étroite sur le renseignement et la répression, ce qui a réussi à interrompre les activités des bandes organisées de trafiquants. Ces mesures ont contribué à empêcher plus de 6300 personnes de passer clandestinement de la France au Royaume-Uni dans les neuf premiers mois de 2003.

Se tournant vers l'avenir, les deux pays ont signé aujourd'hui un Accord administratif sur la mise en oeuvre d'une nouvelle technologie en matière de détection, qui ouvre la voie à l'élargissement de ces arrangements à d'autres ports français au-delà de Calais. Ils se sont également félicités de l'application du Traité sur les contrôles juxtaposés, qui permettra aux agents des services d'immigration britanniques d'exercer des pouvoirs juridiques divers complets à Calais et à Dunkerque, et qui permettra à la Police française des frontières de jouir d'arrangements réciproques à Douvres. Ils ont réaffirmé leur attachement à collaborer encore plus étroitement dans la lutte contre le crime organisé, tant dans le domaine de l'immigration clandestine que contre le trafic de cocaïne et d'héroïne. Les deux pays ont en outre souligné l'importance des travaux en cours à l'heure actuelle au sein de l'Union européenne pour développer la biométrie afin de renforcer la sécurité des documents de voyage de l'Union européenne. Ils sont convenus que ceci constituait un élément important de la lutte contre l'immigration clandestine, le crime organisé et le terrorisme. Ils ont pris acte de l'importance de conserver la flexibilité d'inclure à un stade ultérieur la biométrie future, telle que la reconnaissance de l'iris.

Sur l'environnement

Les changements climatiques représentent l'un des plus grands défis à relever pour la communauté internationale. Le Royaume-Uni et la France réaffirment leur attachement au Protocole de Kyoto comme étant un premier pas essentiel pour aboutir à une action au niveau mondial sur les changements climatiques. Nous souhaitons vivement sa ratification par la Russie et l'entrée en vigueur du Protocole. L'Union européenne doit faire preuve de leadership en se rapprochant des réductions nécessaires de 60 % au moins des émissions de gaz carbonique et d'autres gaz à effet de serre d'ici le milieu de ce siècle, en améliorant l'efficacité énergétique, en diffusant les technologies existantes et en stimulant l'innovation dans les technologies à faible taux de carbone.

Le Royaume-Uni et la France développeront leur coopération sur les questions ayant trait à l'environnement à travers des contacts ministériels et en instaurant un groupe franco-britannique de haut niveau de fonctionnaires.

Les deux pays ont déterminé de développer encore davantage leur bonne coopération pour mettre fin à l'appauvrissement de la biodiversité, y compris par le biais de la Conférence des parties à la Convention sur la diversité biologique qui doit se dérouler à Kuala Lumpur en février 2004. Ils sont également convenus de chercher les moyens d'améliorer la gouvernance internationale sur l'environnement.

Sur la santé et la recherche

Nos services de santé doivent relever un certain nombre de défis communs résultant d'une plus grande sensibilisation et des attentes grandissantes de la part de nos populations. Le Royaume-Uni mettra en commun l'information et travaillera en partenariat sur la qualité des services et les mesures des performances. Le Royaume-Uni et la France sont convenus de poursuivre les discussions sur la Constitution européenne et sur l'impact des directives européennes sur le fonctionnement de nos systèmes de santé. L'on a procédé à un échange de l'information sur la lutte contre la menace que posent le VIH/sida et la consommation de tabac. Dans une économie mondiale de plus en plus compétitive, il est essentiel d'accroître le soutien que nous apportons à la recherche et à l'innovation. Dans le cadre des festivités prévues pour célébrer l'Entente cordiale, les deux pays sont convenus d'encourager encore davantage la recherche transnationale sur le cancer à l'aide de liens entre des réseaux existants de recherche sur le cancer et en mettant l'accent sur les travaux scientifiques des chercheurs dans le domaine des cancers chez les jeunes. Le Royaume-Uni et la France sont convenus de mettre en place une coopération plus approfondie sur des projets ayant trait au cancer.

Sur l'éducation

Les deux pays ont passé en revue les progrès accomplis en ce qui concerne l'application du Mémorandum d'entente qui a été signé au Touquet. Ils sont convenus que, dans le cadre des célébrations de l'Entente cordiale l'année prochaine, une conférence des étudiants sur la citoyenneté européenne se déroulerait à Paris en février prochain.

Sur l'Entente cordiale

Le Premier ministre britannique et le président de la République française ont annoncé les projets des deux gouvernements de célébrer, en 2004, le Centenaire des accords de l'Entente cordiale. Ils ont pris acte que Sa Majesté la Reine et le Duc d'Edimbourg effectueraient une visite d'Etat en France du 5 au 7 avril 2004 pour marquer l'ouverture officielle des festivités commémoratives (le Traité d'Entente cordiale a été signé à Londres le 8 avril 1904). Le président de la République française a confirmé qu'il acceptait l'invitation du gouvernement de Sa Majesté d'effectuer une visite en retour au Royaume-Uni à l'automne 2004 pour marquer la clôture officielle de ces mêmes festivités.

Le Premier ministre britannique et le président de la République française ont approuvé un certain nombre d'initiatives, exposées dans les grandes lignes par les ministres lors du Sommet, propres à contribuer aux festivités. Ils se réjouissaient à l'avance d'une vaste participation dans les deux pays tant aux manifestations organisées de façon centralisée que dans celles laissées à la libre organisation du public. Ils ont en particulier salué la décision de faire de la lutte contre le cancer un thème central (y compris de lever des fonds destinés à la recherche sur le cancer). Ils se sont également félicités de la participation à ces manifestations d'entreprises françaises et britanniques importantes par le biais d'un parrainage de manifestations de haut niveau. Ces manifestations exprimeront la volonté que nous partageons de renforcer notre partenariat à l'avenir.