ALLOCUTION

DE MONSIEUR JACQUES CHIRAC PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

A L'OCCASION DE LA PRESENTATION DES VOEUX DES BUREAUX DE L'ASSEMBLEE NATIONALE, DU SENAT ET DU CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL

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PALAIS DE L'ELYSEE

VENDREDI 3 JANVIER 2003

Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, Mesdames et Messieurs les membres du Conseil économique et social,

Je vous remercie de vos voeux chaleureux, ceux que vous venez de me présenter au nom du Parlement et du Conseil économique et social. J'y suis très sensible. A mon tour, je forme des voeux de bonheur et de santé pour chacun des membres de nos trois assemblées constitutionnelles, pour leurs familles, pour leurs proches, ainsi que pour leurs collaborateurs et pour les fonctionnaires qui les assistent.

L'an passé, les Français ont affirmé leur attachement profond au pacte républicain et aux valeurs qui fondent notre Nation. Ils ont également exprimé leur attente de changement, leur exigence d'autorité et de solidarité au sein d'une France qui soit forte, généreuse et unie.

Il vous revient d'exprimer cette volonté de cohésion nationale et d'action, de la traduire dans les faits par les lois que vous votez et le contrôle que vous exercez sur l'activité gouvernementale et sur l'administration.

Vous vous êtes attelés à cette tâche avec détermination. Je rends hommage au travail des députés et des sénateurs : tous ont déjà accompli, depuis l'été, une oeuvre législative importante. Je pense notamment à la session extraordinaire, durant laquelle des textes urgents et essentiels ont été votés.

A travers vous, je salue l'ensemble des Parlementaires, notamment celles et ceux qui ont pour la première fois l'honneur de siéger à l'Assemblée nationale. 175 avez-vous dit, je crois, Monsieur le Président. Je salue tout particulièrement les femmes parlementaires, dont la présence et l'engagement sont indispensables à la vie d'une grande démocratie moderne. Elles sont un peu plus nombreuses que par le passé. Mais beaucoup, beaucoup reste à faire dans la marche vers la parité.

Dès l'élection de la nouvelle Assemblée nationale, vous avez travaillé au rétablissement de la sécurité. C'était un préalable indispensable au renouveau de l'action et à la relance du dynamisme français. La sécurité conditionne l'exercice de toutes les autres libertés. Et comme les plus modestes d'entre nos compatriotes sont aussi les plus exposés à la violence, c'est aussi un impératif de justice sociale.

Des moyens financiers et humains sans précédent ont été votés par le Parlement pour la sécurité et pour la justice. De nouvelles règles ont été posées. La mise en place de la justice de proximité et l'adaptation de notre législation pénale aux exigences de la sécurité publique compléteront bientôt ces textes.

La libération des énergies économiques et sociales et la lutte contre le chômage, en particulier celui des jeunes ont également donné lieu à un travail législatif important. Nous devrons cette année continuer à mettre tout en oeuvre pour créer les conditions de la croissance, de l'emploi et d'une plus grande justice sociale.

Conformément aux engagements pris devant les Français, la réduction des impôts et des charges a commencé. Elle sera poursuivie. Comme seront poursuivis les efforts pour éviter les contraintes si nombreuses qui pèsent sur nos entreprises, grandes et petites. C'est ainsi que nous pourrons conforter et rénover notre modèle économique et social.

Il nous faut pour cela rendre la priorité au dialogue. La concertation, la négociation collective, le contrat doivent, chaque fois que possible, être privilégiés. Mais en conservant, naturellement, à la loi son rôle de garant des règles et des principes fondamentaux.

De grandes réformes sont devant nous. La consolidation de nos régimes de retraite par répartition. La sauvegarde de notre système de santé. La protection de notre environnement, menacée de façon permanente, indépendamment même des crises que nous connaissons aujourd'hui. L'adaptation de notre système éducatif et la formation tout au long de la vie. La réforme de l'Etat et la simplification de ses relations avec les Français. Dans chacun de ces domaines, c'est en faisant toute leur place au dialogue avec les Français et à la concertation avec les partenaires sociaux que nous réussirons. Si nous partons de diagnostics partagés, si les efforts nécessaires sont équitablement répartis, alors vous verrez que les réformes dont notre pays a impérativement besoin depuis longtemps seront à notre portée.

En évoquant ces réformes, je tiens, Monsieur le Président du Conseil économique et social, à souligner l'importance des missions de votre assemblée. Laboratoire du dialogue et de la concertation, elle a pris dans notre démocratie toute la place que lui avaient assignée les fondateurs de la Ve République. Par la qualité de ses travaux, elle remplit aujourd'hui une fonction éminente de réflexion et de débat au service de notre pacte social et du dynamisme de notre économie, vous l'avez rappelé tout à l'heure.

Ce n'est pas un hasard si, ces dernières années, vous l'avez dit Monsieur le Président, des institutions comparables se sont créées partout dans le monde. Partout, elles contribuent à l'expression des forces vives d'une Nation.

Cette année, nous franchirons également une étape décisive dans l'édification d'une nouvelle architecture des pouvoirs.

Confiants dans l'unité séculaire de notre pays, une unité dont le Président de la République est le garant, nous pouvons aujourd'hui donner toute leur place aux libertés locales. La réforme constitutionnelle dont j'ai pris l'initiative, sur la proposition du Gouvernement, créera de nouveaux instruments de démocratie, comme le droit de pétition, le référendum local et le droit à l'expérimentation. Elle renforcera l'efficacité de l'action publique en permettant, par de larges transferts de compétences, que les décisions soient prises au plus près des Français. Elle consolidera notre pacte républicain, en métropole et outre-mer, et contribuera à réconcilier les Français avec leurs institutions.

Le législateur sera, avec le Gouvernement, l'artisan et le garant de cette évolution. Les Français conserveront partout, cela va de soi, les mêmes droits et les mêmes devoirs.

Au-delà du vote des lois, il revient au Parlement de contrôler l'action de l'exécutif et de veiller à l'efficacité de la dépense publique.

La présente législature verra se mettre en place une réforme importante de nos finances publiques. Dès cette année, la nouvelle loi organique ouvre au Parlement la voie d'un contrôle plus efficace des dépenses. Elle améliore l'information des assemblées et de leurs commissions, non seulement au moment du vote, mais tout au long de l'exécution du Budget.

C'est la première étape d'une réforme plus ample, qui devra être mise en oeuvre avant 2006. Au-delà des aspects techniques, cette évolution changera le sens même de la procédure budgétaire : il ne s'agira plus seulement, à travers la loi de finances, de fournir un cadre juridique à des autorisations de dépenses, mais de se doter d'un véritable instrument de contrôle et d'évaluation de la dépense publique.

En dehors de la discussion budgétaire, je souhaite également que le Parlement puisse débattre tous les ans de la modernisation des administrations de l'Etat, de leurs missions et des objectifs qu'elles se fixent pour mieux servir les Français. Nous en avons besoin. Chaque ministre devra indiquer ainsi à la représentation nationale ses priorités de réforme en s'engageant sur des résultats précis.

Le Parlement est le lieu privilégié de l'expression de la démocratie. Sur tous les grands sujets qui les préoccupent, les Français ont besoin que la discussion soit libre et ouverte au sein de la représentation nationale. Cela passe par un respect scrupuleux des droits de l'opposition. Cela passe aussi, tout simplement, par le respect de l'autre et le souci partagé de la dignité du débat parlementaire. J'y suis, vous le savez, profondément attaché et il y a encore des progrès à faire dans ce domaine.

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Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs,

Une nouvelle législature vient de s'ouvrir. Les Françaises et les Français en attendent beaucoup. Pour faire avancer la France, pour la rendre plus généreuse, plus tolérante, plus ouverte sur le monde et sur les réalités de notre temps. Pour lui permettre de jouer tout son rôle dans la défense de la paix et dans la construction d'une Europe unie, une oeuvre à laquelle, Monsieur le Président de l'Assemblée nationale, Monsieur le Président du Sénat, M. DEBRE a évoqué la question, le Parlement sera naturellement associé.

Nous devons rendre toute sa vigueur au modèle français et au pacte républicain qui nous rassemble. En assurant la pérennité de nos régimes de retraite. En renforçant le dynamisme et la compétitivité de notre économie. En donnant un élan décisif à la modernisation de l'Etat. Je sais que vous aurez à coeur de répondre à chacun de ces défis, qui sont tout simplement les défis de notre temps.

Messieurs les Présidents,

Mesdames, Messieurs,

Je vous renouvelle les voeux chaleureux que je forme pour vous-mêmes, pour ceux qui vous sont chers et bien sûr pour vos Assemblées.

Je vous remercie.