ENTRETIEN DE MONSIEUR JACQUES CHIRAC, PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE, ACCORDE AU QUOTIDIEN L'EQUIPE

"La Coupe du monde doit marquer l'histoire de notre pays"

Mercredi 28 janvier 1998

L'EQUIPE - Monsieur le Président, vous allez inaugurer ce soir ce qu'on peut appeler la dernière cathédrale de ce siècle. Quels sont vos sentiments ?

LE PRESIDENT - Je voudrais d'abord vous dire que ce stade est une réussite. On a pris l'option d'un stade de ville, et je crois que c'était une bonne option, qui s'inscrira dans l'aménagement de la Plaine Saint-Denis. Par ailleurs, je trouve qu'il est architecturalement très réussi, et je tiens à féliciter les architectes, les entrepreneurs, les ouvriers, les artisans qui ont réalisé ce grand oeuvre. Je suis donc impressionné par ce stade. J'ajoute que la notion de stade est une notion très ancienne qui n'a pratiquement pas évolué pendant deux mille ans. En revanche, depuis un demi siècle, on essaie de donner au stade une vocation plus universelle qui peut répondre à d'autres besoins que celui de la compétition sportive stricto sensu. Et ainsi ne pas être un gouffre financier, ce que l'on craint toujours pour un grand équipement de cette nature.

L'EQUIPE - N'avez-vous pas peur de ce possible gouffre financier, dont le fantôme rôde un peu autour du Stade de France ?... Aujourd'hui on en parle davantage en ces termes-là qu'en termes d'impressions superbes...

LE PRESIDENT - Vous savez, quand j'ai décidé de faire le Palais omnisports de Bercy -c'était plus modeste, mais c'était important- j'ai eu tout le monde contre moi. C'est une décision que j'ai imposée aux services de la Ville de Paris. On m'a prédit les conséquences les plus désastreuses sur le plan financier. Il n'en a rien été. Nous avons, dès le début, fait la part des spectacles par rapport aux manifestations sportives ; et dans les sports, nous avons fait en sorte qu'il y ait des équilibres permettant à ceux qui attirent moins de spectateurs d'être néanmoins présents, le déficit correspondant étant compensé par des excédents tirés, il faut bien le dire, des spectacles. Et la Ville de Paris a régulièrement engrangé des bénéfices. Je pense que le Stade de France, qui va être géré par un concessionnaire, pourra avoir un équilibre financier convenable. Dans tout projet, le plus important, au delà des difficultés de mise en route, c'est d'avoir une vision d'avenir. Lorsque j'étais Maire de Paris, j'ai souhaité que la capitale de la France entre dans le XXIe siècle avec quelques grands gestes. C'est la raison pour laquelle j'ai câblé Paris et donné le terrain pour construire la Très Grande Bibliothèque, ainsi que le terrain du Stade de France.

L'EQUIPE - Pensez-vous que c'est le dernier grand stade que l'on construit ou va-t-on continuer à en construire, dans le monde, en France...

LE PRESIDENT - Dans le monde on en fera d'autres naturellement. En France -je ne suis pas un expert, mais je crois qu'un stade de 80 000 places était nécessaire et il est suffisant. Nécessaire pour la Coupe, mais aussi dans l'hypothèse où nous aurions les Jeux Olympiques. Probablement suffisant compte tenu de l'évolution des choses... J'ai le sentiment, tout en restant prudent, que la bonne capacité d'un stade aujourd'hui est plutôt de 30 000 places. Mais il fallait un grand stade. Nous l'avons et nous en sommes fiers.

L'EQUIPE - Comment allez-vous vivre la Coupe du Monde ?

LE PRESIDENT - Je vais la vivre avec enthousiasme. Je vais être heureux et fier. Et pas seulement en raison de la compétition sportive. Vous savez, à l'origine de cette Coupe du Monde il y a eu un différend entre M. HAVELANGE et moi, lors d'une réunion du CIO à Berlin Est. M. HAVELANGE avait pris position contre la candidature de Paris pour les Jeux d'été de 1992. Nous avions eu un contact un peu difficile. La tension apaisée, j'ai dit à M. Havelange : " pourquoi ne serions-nous pas candidats pour la Coupe du Monde en 98 ? " Heureux de trouver là un terrain de confiance et d'amitié, qui ne s'est d'ailleurs jamais démenti depuis, il m'a répondu : " pourquoi pas ? ". C'est ainsi qu'est née la candidature de la France.

L'EQUIPE - C'est un petit peu votre bébé...

LE PRESIDENT - N'exagérons rien. Beaucoup de gens se sont investis. Mais j'en suis un peu à l'origine. J'en suis fier parce que ce sera un événement considérable pour tous les Français qui vont se rassembler autour de leur équipe, la supporter, la soutenir. Ils vont aussi, je l'espère, ressentir la fierté d'être sous les projecteurs du monde entier. C'est une occasion pour les Français de montrer ce qu'ils ont de meilleur, et notamment leur union face aux défis de l'avenir. Je suis également heureux que les co-présidents du Comité Français d'Organisation, Fernand SASTRE et Michel PLATINI, aient voulu mettre particulièrement l'accent sur les jeunes. Je veux parler de Cité-Foot, Scola-Foot et Allons en France, projets qui offrent à notre jeunesse la possibilité de vivre intensément cette Coupe du Monde. J'ai également voulu que la cérémonie d'ouverture ne soit pas un moment destiné à quelques privilégiés, mais que, pour la première fois, elle ait lieu dans la ville. Je suis heureux que cette fête s'adresse à tous.

L'EQUIPE - Irez-vous voir des matches ?

LE PRESIDENT - Oui. Naturellement, je ne vais pas m'installer pendant un mois au stade, mais j'irai sans aucun doute voir plusieurs matches. Je vais d'ailleurs en voir un dès ce soir, France-Espagne qui célèbre l'inauguration du Stade de France.

L'EQUIPE - Ici-même, lors d'un conseil des ministres, il n'y a pas très longtemps, vous avez regretté le manque d'implication, parfois, de certains ministres, des pouvoirs publics, dans la préparation de cette Coupe du Monde. Avez-vous davantage confiance aujourd'hui ?

LE PRESIDENT - J'ai tout à fait confiance. C'est vrai qu'à plusieurs reprises j'ai indiqué aux ministres de l'ancien gouvernement comme de l'actuel, qu'il fallait s'engager pleinement dans ce projet qui représente un grand défi pour la France et qu'à ce titre nous devions donner le meilleur de nous-mêmes. Je rappelle aussi qu'il y a un an, j'ai demandé en conseil des ministres que les bénéfices tirés de la Coupe du Monde, et je pense qu'il y en aura, soient affectés à des initiatives ou des équipements sportifs, dans les quartiers difficiles des dix villes qui accueilleront les matches du Mondial. Ainsi les jeunes, au delà même de l'événement, pourront bénéficier de retombées durables.

L'EQUIPE - Nous avons reçu il y a peu de temps M. SAMARANCH qui nous indiquait, après avoir visité le Grand Stade, que la France possédait désormais l'outil indispensable pour une candidature olympique, en nous précisant que la porte 2008 était largement ouverte, compte tenu des autres candidats possibles. Qu'en pensez-vous, que faudrait-il faire, et que pourriez-vous faire, pour que cette candidature existe ?

LE PRESIDENT - Je voudrais d'abord dire que la France a toujours été impliquée dans le mouvement sportif international. Il y eut bien sûr le baron de Coubertin. Mais il faut rappeler, et c'est moins connu, que c'est également un Français Jules Rimet, qui a été à l'origine, en tant que président de la FIFA, en 1928, de la création de la Coupe du Monde. Plus récemment, Paris a été candidate pour les Jeux de 92. Les Jeux d'Hiver ont eu lieu à Albertville. Nous avons reçu le Congrès du Centenaire en 94, grande manifestation dans laquelle la ville de Paris s'est très fortement impliquée, en particulier financièrement. J'ajouterai que nous avons eu la candidature de Lille, qui s'est battue superbement et qui n'a pas été, à mon sens, jugée comme elle aurait dû l'être. C'était un projet à dimension humaine. Alors maintenant, on nous parle de 2008. Je comprends très bien que M. Samaranch souhaite, alors qu'il quittera le CIO, qu'il y ait le maximum de candidatures prestigieuses pour ces Jeux. Mais c'est une décision qui ne sera prise qu'en 2001. Alors, faisons la Coupe du Monde, montrons ce que nous savons faire et puis nous verrons à ce moment-là la position qui doit être prise par la France. Mais je peux vous dire que je suis favorable à des Jeux Olympiques à Paris. Si la candidature a lieu, et elle ne dépend pas de l'Etat -mais du maire de la ville puisque c'est la ville qui est candidate-, je souhaiterais qu'on se lance dans cette grande et prestigieuse aventure avec un maximum de chances d'aboutir.

L'EQUIPE - Vous aviez pris l'initiative il y a quelques années sur l'aménagement des rythmes scolaires. Ne ressentez-vous pas le besoin de remettre un petit coup d'accélérateur sur ce sujet, qu'on sent un peu retombé ?

LE PRESIDENT - J'ai toujours été frappé par la difficulté du système scolaire français à donner une vraie place aux enseignements artistiques ou sportifs. Et pourtant il s'agit d'un grand sujet. En France, si tout le monde a accès aux disciplines de la connaissance, il n'en est pas de même pour les disciplines de la sensibilité. Il y a là une cause d'injustice et d'inégalité très importante. Le sport, c'est de plus en plus évident, a une vocation d'intégration irremplaçable. Il doit être développé, et développé au plus jeune âge pour que l'enfant intègre les valeurs qu'incarne le sport, qui faciliteront son intégration dans le monde des adultes et qui lui permettront de mieux affronter les réalités de la vie. Dans le monde d'aujourd'hui, ces valeurs, la rencontre, l'échange, le dépassement de soi, le respect de l'autre, l'ambition partagée, doivent être réhabilitées. D'où mon désir de voir effectivement les rythmes scolaires évoluer. Des pas, certes modestes, ont été faits dans la bonne direction. On devrait se fixer comme objectif -je sais bien que tout cela est difficile et qu'il faut bousculer les habitudes- de consacrer le matin aux disciplines de la connaissance, l'après-midi aux disciplines sportives et aux enseignements artistiques. Nous donnerions davantage de chances à nos enfants, les inégalités diminueraient et nous renforcerions la cohésion de notre société.

L'EQUIPE - Au delà de l'école, le sport agit comme élément de structuration sociale. Quand vous recevez les maires de toute sensibilité politique, comme vous l'avez fait récemment, est-ce qu'à un moment ou à un autre vous parlez du sport ?

LE PRESIDENT - Oui. Pour constater que le sport n'a pas la place qu'il mérite dans l'éducation de nos enfants et ceci dès le plus jeune âge. Nous voyons des enfants de 14,15,16 ans qui basculent du mauvais côté et qui participent à des actions qu'on ne peut que condamner. Il est beaucoup plus rare de trouver parmi ces jeunes des enfants qui ont eu la chance, dès l'âge de 4,5,6 ans de recevoir une éducation sportive.

L'EQUIPE - La faute à qui si en France le sport n'a jamais eu cette place ? A l'Etat...

LE PRESIDENT - Probablement, à l'Etat. Il y a 120 ans, nous avons eu un homme de génie en la personne de Jules Ferry qui a décidé que tous les Français devaient avoir un égal accès à la connaissance. Il faut une autre initiative, du même niveau, pour donner à tous les jeunes un égal accès aux autres disciplines qui forment, avec la connaissance, la personnalité humaine.

L'EQUIPE - Nous avons longtemps rêvé d'un budget important pour le sport, c'est un leurre ou une fausse bonne idée ?

LE PRESIDENT - Si on met de l'argent dans le sport, c'est de l'argent en général bien placé. Mais je ne crois pas que ce soit le vrai problème. Regardons les pays qui nous entourent. Nous sommes dans la bonne moyenne. Il est de toute façon très difficile de faire des comparaisons, parce qu'il y a l'argent de l'Etat, l'argent des collectivités territoriales, les grands équipements sportifs. Par ailleurs, et c'est important : il y a la formation. Vous le savez, les Fédérations disposent de cadres techniques qui ont un statut d'Etat. Vous vous souvenez que l'an dernier juste avant les Jeux d'Atlanta, j'étais intervenu très fermement pour qu'on ne remette pas en cause leur statut, leur rôle étant fondamental. Au delà, je crois qu'il est plus important de donner des moyens financiers aux associations, ces moyens n'étant pas forcément des subventions mais des incitations, par exemple de nature fiscale ou sociale, qui leur permettent de renforcer leurs capacités d'encadrement. Il y a une formidable place en France pour les associations en général, et pour les associations sportives en particulier. Il faut les encourager, comme il faut encourager le bénévolat et donner un vrai statut au bénévole. Je rappelle qu'il y en aura 12 000 pour la Coupe du Monde.

L'EQUIPE - Ça fait partie des objectifs prioritaires du ministre des Sports actuel.

LE PRESIDENT - Oui.

L'EQUIPE - On a aussi souvent pensé que le sport pouvait être un bassin d'emplois.

LE PRESIDENT - C'est évident. Nous parlions à l'instant des associations... Si l'on tient compte de tout l'emploi induit par le sport, on arrive à des chiffres très importants. Il faut bien entendu inclure toutes celles et ceux qui travaillent dans l'industrie du sport. Mais au-delà de l'emploi, ce qui me paraît le plus important, c'est le rôle du sport dans l'intégration. On a vécu ces derniers temps des exemples tout à fait spectaculaires. Il y a quelques jours tous les téléspectateurs découvraient le beau visage de Roxana MARACINEANU, notre championne du monde, qui donne une magnifique image de la France. Cette jeune fille est arrivée à neuf ans en France, dans des conditions difficiles, et voilà qu'aujourd'hui elle incarne aux yeux de tous les Français la fierté de notre pays. Quel bel exemple d'intégration ! Dans un autre domaine qui me tient particulièrement à coeur, je me suis toujours battu pour offrir une meilleure place aux handicapés dans la société. J'ai connu le temps où pratiquement ils étaient hors la cité, hors la société. Je suis à l'origine des deux grandes lois qui leur ont donné un véritable statut. Et je suis frappé de voir combien le sport peut apporter une réponse à leurs problèmes d'intégration, qu'il s'agisse d'handicapés physiques ou mentaux. Après Atlanta, j'ai décidé de marquer la reconnaissance nationale en distinguant les médaillés olympiques mais aussi nos athlètes paralympiques. Je dois dire que j'ai eu une très grande émotion en décorant, à l'Elysée, ces athlètes qui étaient à la fois réintégrés, fiers d'eux-mêmes et à qui la société reconnaissait leurs qualités. Seul le sport permet de faire cela.

L'EQUIPE - Êtes-vous un supporter de l'équipe de France ? Comment vivez-vous un match de l'équipe de France ?

LE PRESIDENT - S'agissant du sport, on me reproche d'être un peu chauvin et je ne m'en défends pas. Alors, je souhaite naturellement le meilleur à l'équipe de France. Et comme l'immense majorité des Français, je vais vibrer... Une des émotions les plus fortes de ma vie de supporter, restera ce match de 1982 entre la France et l'Allemagne où le gardien de but allemand s'est si mal conduit. On a été battu à l'issue des tirs au but. Oui, ce soir-là, j'étais vraiment très chauvin !

L'EQUIPE - Et si vous aviez pu accéder au haut niveau, ç'aurait été dans quel sport ?

LE PRESIDENT - Peut-être qu'en le pratiquant jeune, j'aurais pu faire du sumo, j'avais la taille nécessaire, et le poids, ça s'acquiert... Les circonstances ne m'ont pas permis de faire des sports d'équipe. Je l'ai regretté, mon père plus encore que moi qui était un rugbyman. J'ai donc fait surtout de l'athlétisme puis ensuite du ski, à un niveau d'amateur convenable. Si j'avais dû faire du sport de haut niveau, mais là il y a peut-être un peu d'atavisme, je me serais dirigé vers le rugby. Parce que c'est un sport auquel je suis sensible. Mon père était un ancien du CA Briviste, il a même été international militaire. Je suis donc très proche de ce club qui s'appelle maintenant le CA Brive-Corrèze et j'ai grand espoir pour samedi où les Anglais de Bath devront bien se tenir.

L'EQUIPE - Vous avez à l'Elysée près de vous un ancien champion olympique. Quelles sont les qualités de ces anciens champions et que pourrait-on dire à des employeurs pour tenir davantage compte du sport dans un cursus universitaire.

LE PRESIDENT - En tant que maire, ministre, ou premier ministre, j'ai toujours eu au moins un sportif de haut niveau auprès de moi parce qu'ils apportent quelque chose de plus : courage, force, discipline, dépassement de soi leur donnent un regard différent sur la vie. De même, j'ai toujours eu des liens d'amitié très enrichissants avec des sportifs de haut niveau. Que d'images fortes ! Le visage de Marie-José PEREC pendant son 200 mètres ; le regard, la joie de Marie-Claire RESTOUX sautant dans les bras de ses parents. Autant de moments très émouvants que peu de gens peuvent nous offrir.

L'EQUIPE - On voudrait avoir votre avis sur l'évolution du sport aujourd'hui et notamment deux grands sujets : la professionnalisation du sport et l'argent et puis le dopage qui a beaucoup agité le sport français ces dernières semaines.

LE PRESIDENT - Je crois que le professionnalisme est inévitable. Ce n'est pas la peine de disserter indéfiniment sur le fait de savoir s'il doit se développer ou non. Il est inévitable parce que les sportifs veulent de meilleures conditions d'entraînement, un meilleur encadrement, vivre décemment. Tout cela conduit naturellement au professionnalisme. Bien sûr, il y a le grand mythe de l'amateur, mais je crois que c'est un mythe un peu dépassé dans le sport de haut niveau. A condition d'être bien géré, ce qui est la responsabilité des fédérations internationales, du comité olympique français, des fédérations nationales, je ne vois pas ce qu'un développement du professionnalisme peut comporter d'inconvénients.

L'EQUIPE - Un des aspects de cette professionnalisation, c'est l'européanisation du sport. Il y a eu l'arrêt Bosman en matière de football qui permet aujourd'hui une totale libre circulation des joueurs. Est-ce que le sport préfigure ce qui se passera dans d'autres domaines ?

LE PRESIDENT - Oui, cela fait partie de l'évolution des choses. L'Europe petit à petit s'harmonise. Et la libre circulation des personnes est un des principes de cette Europe. Et je ne vois pas pourquoi cela ne s'appliquerait pas aux sportifs. Evidemment, sans aller jusqu'à voir, par exemple, le PSG sans un seul joueur français !

L'EQUIPE - Une des évolutions moins bonnes du sport, c'est l'arrivée du dopage.

LE PRESIDENT - Hélas, c'est en fait un phénomène ancien. Le dopage, c'est la triche. C'est l'anti-esprit sportif, c'est dangereux. Il est urgent de réagir. Je voudrais d'abord dire que les sportifs ne sont pas seuls responsables dans cette affaire. C'est tout un système, tous les acteurs sont concernés : les sportifs, les sponsors, les dirigeants, chacun a une part de responsabilité. Il n'est pas normal que seul le sportif paye. Ces problèmes choquent les Français. Dans le sondage que vous avez publié récemment, il ressortait que 92 % des Français condamnaient le dopage. Parce que c'est le contraire de l'idée qu'ils se font du sport.

L'EQUIPE - Alors comment faire ?

LE PRESIDENT - C'est très difficile de maîtriser ce phénomène si on n'accepte pas une vraie discipline. C'est difficile aussi pour une fédération de sanctionner. Il faudrait un organisme indépendant compétent pour juger de tous les cas, scientifiquement, techniquement. Et les sanctions doivent aller au-delà du sportif. Mais, là aussi, il faudra une harmonisation, européenne bien sûr, mais surtout mondiale.

L'EQUIPE - De qui peut venir cette initiative ?

LE PRESIDENT - D'une concertation entre le gouvernement et les fédérations.

L'EQUIPE - C'est un appel ?

LE PRESIDENT - Non, c'est une forte suggestion. Cette situation a un côté un peu misérable. Elle sème le doute. Elle choque. Un athlète nous a fait vibrer d'émotion, puis soudain, on nous dit qu'il était dopé, pour ensuite nous dire qu'on n'en est pas sûr... Ce n'est pas convenable à l'égard de l'opinion publique. Il faut impérativement arrêter cela, en n'oubliant pas que ce sont d'abord et avant tout des actions de prévention dès le plus jeune âge qui doivent être menées, à mon avis, sous l'impulsion du CNOSF.

L'EQUIPE - Votre message, en conclusion, pour la Coupe du Monde.

LE PRESIDENT - Maintenant c'est à nous de jouer, nous Français. Et c'est à nous de faire ce qu'il faut pour que cet événement marque l'histoire de notre pays et pas seulement son histoire sportive.