ALLOCUTION PRONONCÉE PAR

MONSIEUR JACQUES CHIRAC

PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

DEVANT LES PERSONNELS CIVILS ET MILITAIRES

RELEVANT DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE

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Hôtel de Brienne - Lundi 13 juillet 1998

Monsieur le Premier Ministre,

Messieurs les Ministres,

Mesdames et Messieurs,

En cette veille de Fête Nationale, j’ai tenu à rencontrer les hommes et les femmes qui représenteront la Défense de notre pays en défilant demain sur nos Champs-Elysées. La traditionnelle cérémonie du 14 juillet permet à nos concitoyens de rendre hommage aux armées françaises et de souligner la reconnaissance de la nation envers ses soldats.

L’ambitieuse réforme que nous avons lancée il y a deux ans est aujourd'hui acceptée, comprise et soutenue par les Français. Elle constitue une réponse adaptée aux évolutions des relations internationales, à l'évolution des technologies, aux nouvelles missions de nos forces armées.

La suspension de la conscription répond à la situation heureusement créée par la construction européenne, c'est-à-dire la disparition de menaces militaires directes à nos frontières.

L’adaptation des structures et moyens de commandement vise à prendre en compte les nouveaux modes de conduite des opérations liés à la fin de la guerre froide.

L’entrée en service progressive d’une nouvelle génération d’équipements doit vous donner les moyens d’accomplir ces tâches avec le maximum d'efficacité et de sécurité, en bénéficiant de la supériorité technologique.

Cette rénovation de l’outil de défense ne va pas sans difficulté, sans sacrifice, je le sais. Il vous appartient, avec l’aide de l’ensemble des autorités gouvernementales concernées, d’accompagner cette mutation par tous les moyens nécessaires.

Modernisation de l’Etat, maîtrise des dépenses publiques, la loi de programmation votée en 1996 a su prendre en compte ces exigences et ces orientations. Les ressources budgétaires ont dû être ajustées pour tenir compte des contraintes économiques, mais elles sont aujourd’hui stabilisées pour les quatre années à venir. L’effort du pays pour sa défense est maintenu.

Cette stabilisation du cadre de référence était indispensable pour permettre la réussite du mouvement de restructurations engagé l’an dernier.

Restructurations dans les armées d’abord. Les décisions annoncées dès 1996 ont été mises en oeuvre dans des conditions généralement bien acceptées grâce à un réel effort de concertation à tous les niveaux. Le ministre de la Défense, Monsieur Alain Richard, a présenté la semaine dernière le deuxième ensemble de mesures portant sur les années 2000 à 2002. Ces décisions concernent principalement les soutiens et l’environnement des forces.

Le soutien territorial, les structures de commandement, les organismes de formation, pour ne citer que ces quelques exemples, seront ainsi profondément et utilement rénovés.

Restructurations également de la Délégation Générale pour l’Armement dans ses différentes composantes. Au-delà, c’est tout notre appareil industriel qui est concerné par des mouvements en profondeur. Rétablissement de la situation des entreprises d’armement terrestre, adaptation de nos arsenaux à la compétitivité, processus de regroupement au niveau européen dans l’aéronautique, l’espace, l’électronique et les missiles : les années qui viennent verront, en même temps que la mutation de nos armées, nos entreprises de défense s’adapter aux exigences du projet européen et de l’environnement international.

Il importe de rappeler le sens des réformes qui sont ainsi conduites. Tout en assurant la protection de nos intérêts vitaux grâce à la dissuasion nucléaire, nous devons être en mesure de contribuer à la paix dans le monde. C’est aujourd’hui la meilleure façon de protéger notre pays contre le retour de menaces directes ou contre les effets d’une instabilité dans des régions essentielles pour la France ou pour l’Europe. Participer à la construction européenne en matière de défense, c’est à la fois consolider un environnement pacifié à l’ouest de l’Europe, construire progressivement un projet politique commun et affirmer une volonté d’identité qui garantisse notre souveraineté et notre liberté.

Cette vaste entreprise, c'est vous qui l'assumez. En vous saluant aujourd'hui, je salue tous ceux, militaires et civils, qui se dévouent pour assurer la sécurité de notre pays.

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L’armée professionnelle de demain devra bien entendu veiller à rester l’armée de la nation tout entière et chacun pourra y trouver sa place :

* les civils et les militaires de la défense, évidemment ;

* mais aussi les réservistes, compléments indispensables d’une armée de projection, ciment du lien armée-nation, véritables professionnels à temps partiel ;

* mais encore les jeunes gens et les jeunes filles qui, volontaires du service militaire, décideront de faire un bout de chemin avec leurs camarades d’active par civisme, par solidarité ou pour accomplir une expérience professionnelle et humaine ;

* et enfin, l’ensemble de la jeunesse française qui maintiendra le contact avec ses armées grâce à la formation civique, à l’école, et aussi à la journée d’appel de préparation à la Défense.

Armée moderne, armée opérationnelle, armée réactive mais armée de la nation et dans la nation, c’est cela notre ambition pour demain.

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Les forces armées françaises ont su mener à bien la première phase de ces restructurations tout en assurant de manière exemplaire leurs missions opérationnelles.

Nos compatriotes ont pu constater que la présence, discrète mais efficace, de militaires dans nos villes pendant la Coupe du monde de football a permis de sécuriser certains points sensibles et de dégager des effectifs spécialisés pour des missions de maintien de l’ordre. Dans ce cadre, la gendarmerie a été largement mise à contribution et chacun a pu constater sa disponibilité et son efficacité dans des conditions souvent très difficiles. J’ai, aujourd'hui -comme vous tous- une pensée particulière pour le maréchal des logis-chef Daniel Nivel lâchement agressé à Lens, le 21 juin ; que sa famille et ses proches soient assurés de notre solidarité et de notre soutien dans la cruelle épreuve qu’ils affrontent.

J’ai moi-même tenu à rendre hommage à l’ensemble de nos soldats participant à des opérations extérieures en demandant à certains de vos camarades de m’accompagner au cours des déplacements que j’ai récemment effectués à Sarajevo et à Beyrouth. J’ai pu constater sur place la gratitude et l’admiration des populations et de leurs dirigeants pour les actions de protection et de solidarité effectuées par les militaires français.

Certaines critiques se font jour, ici ou là, sur les buts réels et les conditions de l’engagement de nos forces à l’extérieur du territoire national. Mais les ressortissants étrangers évacués l’an dernier de Brazzaville, ou les populations de Sarajevo dans la tourmente, savent avec quel courage et quel dévouement nos soldats se sont portés à leur secours.

La France ne cherche pas à s’immiscer dans les affaires intérieures d'autres Etats. Elle tente de protéger les populations, de maintenir la paix, de faire respecter les règles du droit international. Nos soldats ont souvent payé le prix du sang dans l’accomplissement de ces missions difficiles. Leur dévouement est exemplaire. Ils méritent notre respect et notre admiration. En ma qualité de chef des armées, vous me trouverez toujours à vos côtés lorsque votre courage, votre sens du devoir, votre honneur, seront injustement mis en cause.

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Hommes et femmes, militaires et civils qui, chacun à sa place, participez à la défense de la France, je sais les efforts que l’on vous demande et je partage vos soucis. Mais je sais aussi quelle volonté vous anime et quel talent vous mettez au service de notre pays.

Le peuple de France, demain 14 juillet, acclamera ses forces armées. Je me fais aujourd’hui son porte-parole pour vous assurer de sa confiance et de son estime.

Mesdames et Messieurs, je vous remercie.