Paris, le 30 juillet 1998

La Chine et la France ont pour les arts une passion commune qui s’est épanouie dans des traditions très différentes. La rencontre entre ces deux cultures ne pouvait être qu’un choc, à la mesure du génie d’un artiste inclassable, ZAO Wou-ki, qui a su être, entre ces deux mondes, un " passeur " privilégié. Née d’un échange plein d’intelligence et d’harmonie entre le verbe et l’image, la peinture de ZAO Wou-ki invente des formes résolument nouvelles.

Il y a cinquante ans, le Maître a choisi de se tourner vers la France. Notre pays s’honore d’avoir été l’écrin de cette oeuvre exceptionnelle. Chacune de ses toiles est un témoignage unique du pouvoir évocateur de la couleur, de l’écho que peut éveiller un trait de pinceau et qui vient se refléter aussi loin que porte le regard, révélant des mondes de songes et de correspondances secrètes.

Parce qu’il a su saisir le génie propre à chacune de nos deux nations, ZAO Wou-ki est tout autant français que chinois. Son art est au coeur de la rencontre entre ce que nos deux cultures partagent de plus précieux : la finesse de la sensibilité, l’ouverture à l’autre, la quête toujours renouvelée de l’essentiel.

Par-delà l’émotion qu’elle suscite, l’oeuvre de ZAO Wou-ki invite la France et la Chine à resserrer davantage les liens qui les unissent. Elle engage nos deux pays à approfondir le dialogue initié par des Occidentaux fascinés par l’Orient et des Orientaux " tentés " par l’Occident. Cette exposition, j’en suis certain, amènera de nouvelles rencontres et contribuera à rapprocher les hommes.

C’est au nouveau Musée de Shanghaï que revient l’initiative d’avoir convié le Maître sur sa terre natale. Je voudrais la saluer car je la trouve exemplaire. Lors de ma dernière visite en Chine, en mai 1997, j’avais pu mesurer combien mes interlocuteurs étaient désireux d’accompagner le formidable développement économique du pays par une renaissance pleine et entière de la vie culturelle. Le choix de ZAO Wou-ki, je crois, s’imposait. Je suis heureux que cet événement permette à la France de dire son amitié à la Chine et de lui témoigner du soutien de ses artistes et de ses poètes.

Jacques CHIRAC