Rapport sur les nouvelles contributions financières internationnales

Rapport sur les " nouvelles contributions financières internationales " du Groupe de travail présidé par Jean-Pierre LANDAU


Le rapport a été rédigé à la demande du Président de la République par un groupe de personnalités indépendantes comprenant des universitaires, des responsables d'entreprises et représentants du secteurs privé, des dirigeants d'ONG, ainsi que des hauts fonctionnaires. Il leur a été demandé d'étudier de façon pragmatique et ouverte toutes les possibilités d'augmenter le financement du développement et d'améliorer la lutte contre la pauvreté.

Dans un monde de plus en plus en plus prospère, subsistent des situations de grande pauvreté (1,2 milliards de personnes avec un revenu inférieur à 1 $ par jour) qui sont moralement inacceptables et accroissent les risques globaux pesant sur la planète.

Pour lutter contre la pauvreté (et les symptômes qui lui sont associés : mortalité infantile, malnutrition, absence d'éducation), la communauté internationale a adopté en 2000 les Objectifs de Développement du Millénaire (ODM), qui fixent des cibles quantifiées à atteindre en 2015 (par exemple réduction de moitié de l'extrême pauvreté).

En l'état actuel, il manque environ 50 milliards de dollars par an pour assurer le financement des ODM. Le rapport constate aussi que, au delà de ce déficit quantitatif, se pose également un problème sur la nature des ressources transférées aux pays pauvres.

En effet, parce que les Etats donateurs sont généralement soumis à la contrainte de budgets annuels -et parce qu'ils doivent en permanence négocier entre eux le montant et l'allocation de leurs contributions- ils ne peuvent pas s'engager, sur le long terme, à fournir des ressources stables et prévisibles aux pays pauvres (même quand ceux-ci remplissent les conditions pour les utiliser efficacement). Cette instabilité et cette imprévisibilité sont très pénalisantes. Car, pour financer efficacement le développement humain et la lutte contre la pauvreté, il faut pouvoir s'engager sur le long terme (recruter, former et rémunérer des enseignants, infirmiers, médecins..) et les pays pauvres n'ont pas les ressources nécessaires.

Ainsi, on pourrait assurer l'éducation primaire de tous les enfants d'Afrique sub-saharienne avec 2,7 milliards de dollars par an, à condition de pouvoir s'engager sur dix ans ; on peut, avec 1 milliard de dollars, mettre à la disposition de tous les pauvres dans le monde une dizaine d'interventions chirurgicales de base ; avec deux milliards de dollars, financer le recherche médicale sur les grandes pandémies (paludisme, SIDA) qui affectent les pays en développement. Ces sommes sont, à l'échelle de l'économie mondiale, très faibles. Or, par un paradoxe éclatant et choquant, elles ne se matérialisent pas dans les flux d'aide publique.

Il manque donc, dans le dispositif d'aide au développement, une ressource stable, prévisible (et aussi très concessionnelle car les pays pauvres ne peuvent s'endetter pour financer le développement humain). C'est ce manque qui justifie, au delà de l'augmentation nécessaire de l'effort d'aide publique au développement (APD), la recherche de " mécanismes innovants " de financement.

Le rapport examine, sans exclusive, les divers mécanismes possibles en choisissant ceux qui répondent à trois critères : être (1) économiquement rationnels (2) techniquement faisables et (3) socialement justes.

On peut d'abord envisager de faire plus et mieux appel à la générosité privée et aux contributions volontaires. Il existe de grandes réserves (la philanthropie privée aux Etats Unis représente 220 milliards de dollars) mais les efforts s'orientent actuellement assez peu vers le développement (à l'exception de certaines grandes fondations). Des mécanismes d'incitations fiscales pourraient être mis en place, de manière coordonnée, dans tous les grands pays donateurs.

Une deuxième formule est celle de " l'International Finance Facility " proposée par le Royaume Uni et soutenue par la France. Il s'agit d'augmenter l'aide versée dès aujourd'hui par des emprunts qui seront remboursés grâce aux flux futurs d'APD. Ces flux (leur augmentation) sont ainsi anticipés dans le temps, ce qui permet de financer les ODM. Le mécanisme est souple. Comme l'effort final est reporté sur l'avenir, il est important que les programmes financés soient efficaces pour les générations futures. Il faut aussi des garanties pour que, malgré la charge des remboursements, les pays pauvres continuent à recevoir une aide suffisante dans le long terme.

Une fiscalité internationale fournirait également les ressources stables et prévisibles nécessaires à la lutte contre la pauvreté. Le rapport reconnaît que des obstacles politiques existent dans certains pays. Dans le monde d'Etats souverains qui est le notre, ce sont eux qui disposent seuls du pouvoir de taxer. Le rapport n'envisage pas de schémas radicaux, telle la création d'une organisation fiscale internationale. Il est juridiquement, financièrement et techniquement possible de créer des taxes internationales par des dispositifs nationaux coordonnés entre les Etats (de manière plus ou moins forte : déclaration conjointe, Traité international..). Des taxes internationales permettent aux Etats, s'ils coopèrent, de lever de manière plus efficace et rationnelle les ressources nécessaires au développement.

Parmi les taxes possibles, le rapport examine et discute les avantages et inconvénients de différentes formules:

- les taxes environnementales, qui procurent des recettes tout en favorisant la protection de l ‘environnement.

- des taxes sur les transactions financières (à très faible taux pour ne pas affecter l'efficacité des marchés)

- des taxes sur les achats d'armement (y compris les achats internes dans les pays producteurs

- des taxes additionnelles aux impôts existants ( en l'occurrence à l'impôt sur les sociétés)

- des droits d'utilisation de certaines ressources rares de planète (la cas des détroits est discuté en détail)

D'autres mécanismes (émission de Droits de Tirage Spéciaux ; loterie mondiale) sont également étudiés.

Enfin le rapport souligne l'importance, pour les pays en développement, d'une lutte efficace contre l'évasion fiscale. Celle-ci leur coûte, chaque année, l'équivalent de ce qui est nécessaire pour les ODM. Il est crucial que les efforts en cours dans les instances internationales aboutissent. A défaut, le rapport évoque une autre option : un plus grande régulation, voire une taxation de certains flux financiers quand les conditions de transparence ne sont pas réunies.

Rapport disponible sur www.ladocumentationfrançaise.fr

SEPTEMBRE 2004





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