3ème Congrès mondial contre la peine de mort: message du Président de la République.

Message de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, lu par M. Philippe DOUSTE-BLAZY, ministre des Affaires étrangères, à l'occasion de l'ouverture du 3ème Congrès mondial contre la peine de mort.

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Paris, le 1er février 2007


Monsieur le Président,
Monsieur le Commissaire aux droits de l'Homme,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Monsieur le Délégué Général et Porte Parole,
Madame la Déléguée générale,
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,


Lutter pour l'abolition de la peine de mort, c'est défendre le caractère inviolable et sacré de la vie humaine. C'est s'inscrire dans le sens du progrès de la civilisation, dans le sens de la justice et de l'humanisme.

Ce combat qui vous rassemble, à l'occasion de ce 3ème Congrès mondial contre la peine de mort, est pour moi un combat de toujours. C'est le combat de la France.

C'est pourquoi je suis heureux de saluer très chaleureusement l'ensemble des participants, défenseurs des droits de l'Homme, juristes, universitaires, diplomates, venus de tous les continents. Pendant trois jours, vous allez échanger, débattre, étudier les moyens de parvenir à une abolition universelle de la peine de mort en toutes circonstances.

Je salue les organisations non gouvernementales qui sont à l'origine de cet événement et qui, avec détermination et persévérance, fédèrent les initiatives pour créer un mouvement universel des consciences.

La peine de mort reste encore en vigueur dans de trop nombreux États. Mais fort heureusement, partout dans le monde, des forces se mobilisent et portent l'espoir d'une justice plus humaine.

Nous le savons : le combat contre la peine de mort est un combat de longue haleine. Elle a été abolie en France il y a un peu plus d'un quart de siècle, grâce à l'engagement courageux du Président François Mitterrand et de son garde des Sceaux, Robert Badinter. C'est dans la continuité de ce vote historique que j'ai décidé d'engager le processus de révision de la Constitution, afin que la France inscrive dans sa loi fondamentale l'interdiction de la peine de mort.

Dans le texte qui constitue la clé de voûte de nos institutions, il sera expressément indiqué que « Nul ne peut être condamné à la peine de mort ». Cette révision constitutionnelle interdira donc, quelles que soient les circonstances, de rétablir cette peine, qui ne peut en aucun cas être regardée comme un acte de justice.

Elle permettra également à la France de ratifier le deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques des Nations Unies, visant à abolir la peine de mort en toutes circonstances.

Par ces ratifications, la France achèvera donc un long processus de mise hors la loi de la peine de mort. Elle mettra ainsi son arsenal juridique en totale conformité avec le sens de l'action diplomatique qu'elle mène depuis si longtemps, que ce soit au sein du Conseil de l'Europe, de l'Union Européenne ou aux Nations Unies. Et cela notamment pour que la peine de mort soit exclue des peines prononcées par les plus hautes juridictions internationales, dont la Cour Pénale internationale, compétente pour juger des crimes les plus graves : crimes de génocide et crimes contre l'Humanité.


Comme vous tous, je me réjouis de constater que, partout, la peine capitale recule : chaque année, de nouveaux pays rejoignent la liste de plus en plus longue des nations abolitionnistes. Un peu partout autour de la planète, les peuples sont en train d'évoluer. Et la mobilisation internationale des États progresse : il y a un mois, à la 61ème Assemblée Générale des Nations Unies, quatre-vingt-cinq États rappelaient solennellement leur ferme opposition à la peine de mort et appelaient à l'établissement sans tarder d'un moratoire sur les exécutions. Avec ses partenaires de l'Union européenne, la France a activement œuvré en ce sens. Elle encourage aussi les pays concernés à commuer les peines capitales prononcées en peines d'emprisonnement, pour soustraire des centaines d'individus à ce sort inhumain qu'est l'attente, parfois durant des décennies, dans les sinistres « couloirs de la mort ».

La France continuera ce combat tant que des femmes, des hommes, parfois même des enfants seront soumis de par le monde à la peine capitale. Aujourd'hui, alors que nos sociétés sont traversées de tensions, de doutes, de peurs, et parfois de violences, se mobiliser contre la peine de mort, c'est accomplir un acte de foi dans l'humanité. C'est proclamer, à la suite de Victor Hugo, que « L'inviolabilité de la vie humaine est le droit des droits. Tous les principes découlent de celui-là. »

En apportant son soutien à votre Congrès, qu'elle est fière d'accueillir à Paris, la France veut témoigner de son entière mobilisation dans cette lutte pour l'abolition universelle de la peine de mort, conformément aux idéaux qui nous rassemblent. Ce combat exige que nous nous engagions tous, citoyens, associations, organisations non gouvernementales, responsables politiques, institutions internationales et États.

Je suis certain que vos débats pourront, par leur densité et leur richesse, renforcer cette conviction que l'idée même de justice est incompatible avec la peine capitale, et qu'il n'y a pas d'avenir pour ce châtiment indigne de l'humanité.

Je vous remercie.


Jacques CHIRAC






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