Lettre conjointe de huit chefs d'Etat ou de gouvernement européens adressée au Président de la Commission Européenne sur l'immigration illégale en Méditerranée et au sud de l'Europe

Lettre conjointe de huit chefs d'Etat ou de gouvernement européens adressée à M. José Manuel DURAO BARROSO, Président de la Commission Européenne, sur l'immigration illégale en Méditerranée et au sud de l'Europe.

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LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

Paris, le 25 septembre 2006.


Monsieur le Président,


L'urgence du problème de l'immigration illégale en Méditerranée et au Sud de l'Europe exige une forte mobilisation de l'Union européenne et un engagement conjoint de la part des pays d'origine, de transit et de destination des migrants. Ce défi excède les moyens d'action dont dispose chacun des États membres. La question doit ainsi être abordée à l'échelle européenne -en termes notamment d'aide financière et de déploiement des ressources- en appui des efforts déployés par les États les plus concernés.

Dans cette perspective, la France, l'Italie, l'Espagne, Chypre, la Grèce, Malte, le Portugal et la Slovénie accueillent favorablement votre lettre du 7 septembre dernier aux membres du Conseil européen et estiment que le Sommet informel de Lahti, le 20 octobre prochain, représente une excellente occasion de faire le point de la situation, en vue des décisions opérationnelles susceptibles d'être prises lors du Conseil européen de décembre. A cet égard nous attendons les propositions concrètes que vous nous avez annoncées.

L'Approche globale des migrations adoptée par le Conseil européen en décembre 2005, avec ses actions prioritaires centrées sur l'Afrique et la Méditerranée, constitue le cadre de référence de la politique européenne dans ce domaine. L'Union doit maintenant se doter des capacités et des ressources nécessaires à la mise en oeuvre de cette stratégie ambitieuse, qui repose sur le renforcement de la coopération opérationnelle entre les États membres et le partenariat avec les pays tiers d'origine et de transit.

Mais il faut, surtout, une volonté politique claire pour réaliser ce qui a été décidé d'un commun accord et pour développer de nouvelles initiatives devenues désormais indispensables en raison des récents afflux de migrants aux frontières méridionales de l'Union européenne.

A cet égard, il nous semble essentiel :

  • d'assurer la mise en œuvre effective des engagements pris lors de la conférence de Rabat et d'explorer la possibilité de lancer des initiatives analogues sur d'autres routes migratoires ;
  • d'accélérer la préparation de la Conférence Union européenne-Afrique de Tripoli, prévue dans l'Approche globale des migrations, avec la pleine participation de l'Union africaine ;
  • d'encourager, dans le cadre d'un dialogue global sur les migrations avec nos partenaires africains et méditerranéens, la conclusion rapide d'accords de réadmission et la bonne application des accords déjà passés, y compris l'article 13 de l'Accord de Cotonou ;
  • d'adapter l'aide financière de la Communauté aux pays tiers dans le domaine migratoire conformément aux indications du Conseil européen de décembre 2005, dans le cadre des politiques de développement et de voisinage ;
  • de renforcer la coopération opérationnelle dans la gestion de la frontière maritime méridionale de l'Union européenne. Il importe de prendre dûment en compte les spécificités de cette frontière maritime, qu'il s'agisse notamment des fonctions de patrouille et de surveillance maritime, des obligations de sauvetage et d'accueil, et des tâches d'identification et de reconduite des immigrés clandestins.

Au regard des récents événements, ce dernier objectif nous semble crucial. Il apparaît notamment indispensable d'améliorer l'organisation des opérations conjointes avec le renforcement des capacités opérationnelles, administratives et financières de l'Agence des frontières extérieures (FRONTEX) et d'obtenir une plus grande implication de l'ensemble des États membres. Chacun doit en effet apporter sa contribution à la lutte contre l'immigration clandestine qui concerne l'ensemble de l'Union et non les seuls pays gardiens de ses frontières extérieures.

Au-delà de ces actions, il nous paraît également nécessaire de :

  • fournir une assistance technique et financière aux pays tiers de transit activement engagés dans la lutte contre la migration clandestine par mer pour la gestion des situations critiques entraînées par l'afflux massif de clandestins à leurs frontières terrestres ;
  • développer une meilleure compréhension des crises migratoires, de leurs spécificités et de leurs causes, afin d'en renforcer la prévention par des actions plus ciblées et efficaces ;
  • accélérer l'élaboration d'une approche européenne commune de l'intégration, à la lumière du programme d'action sur l'immigration légale proposé par la Commission en décembre 2005 ;
  • approfondir le partenariat avec les pays d'origine les plus engagés dans la lutte contre l'immigration illégale, notamment en matière de réadmission.

Nous espérons que ces pistes de réflexion pourront être discutées plus avant lors de notre réunion du 20 octobre prochain.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de notre haute considération.

Le Président de la République Française,
M. Jacques CHIRAC
Le Président du Conseil des Ministres de la République Italienne,
M. Romano PRODI
Le Président du Gouvernement du Royaume d'Espagne,
M. José Luis Rodríguez ZAPATERO
Le Président de la République de Chypre,
M. Tassos PAPADOPOULOS
Le Premier Ministre de la République Hellénique,
M. Costas KARAMANLIS
Le Premier Ministre de la République de Malte,
M. Lawrence GONZI
Le Premier Ministre de la République du Portugal,
M. Jose SOCRATES
Le Premier Ministre de la République de Slovénie,
M. Janez JANS


Monsieur José Manuel DURAO BARROSO
Président de la Commission Européenne





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