Tribune du Président de la République parue dans l'hebdomaire "Impact Médecin"

Tribune de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, parue dans l'hebdomaire "Impact Médecin"

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Publiée le mercredi 8 mars 2000

Pour un système de responsabilité librement consentie

Le Medec 2000 sera certainement un grand succès. Information sur de nouveaux traitements. Formation médicale continue. Echanges entre confrères. Débats d'intérêt général sur l'avenir de la santé...Les médecins seront toujours intéressés par ce qui peut faire progresser leur pratique au service des malades.

Aucune activité humaine ne suscite ni ne mérite autant de confiance et d'espérance. Aucune activité n'a pris une place aussi importante dans la vie de la cité. Et pourtant, aucune activité n'est confrontée à davantage de bouleversements et de remises en cause, provoquant au sein du corps médical des interrogations, des inquiétudes, et même un certain désarroi.

Notre société est de plus en plus exigeante à l'égard des médecins, reportant sur eux une grande part des problèmes individuels ou sociaux qu'elle ne sait pas résoudre. La médecine est de plus en plus instrumentalisée. On ne demande plus seulement aux médecins de soigner et de guérir. On leur demande de partager les difficultés, de traiter les angoisses, de prendre en charge le vieillissement, de mettre leur art au service d'un confort de vie ou d'une demande sociale. Et aujourd'hui, ils sont aussi de plus en plus exposés à l'insécurité et à la violence.

Dans le même temps, l'échec médical est perçu comme intolérable, quand on ne l'attribue pas à l'erreur et à la faute. On glisse insensiblement de l'obligation de moyens à une obligation de résultats.

J'ai souvent observé combien la réalité du métier médical était accaparante. Chaque jour, elle renvoie le médecin à une responsabilité qui ne se compare à aucune autre. Dans les métiers de la santé, il faut tout donner de soi-même, l'intelligence, le savoir, l'expérience, auxquels doit s'ajouter un grand sens de l'humain. Le médecin n'est jamais en repos ; il vit en permanence avec le souci de ses patients. Et, comme vient de la montrer une récente étude, dans une France où les 35 heures sont imposées par la loi, il travaille au moins 50 heures par semaine.

Grâce à cet engagement, le lien de confiance médecin-malade reste solide. Mais les conditions d'exercice du métier médical se ressentent de la montée du consumérisme, des doutes crées par les grands scandales sanitaires de la fin des années quatre-vingt et du risque de voir la liberté médicale profondément altérée par les problèmes financiers.

La contrainte économique a fait irruption au point de devenir envahissante. La réalité financière n'est pas et ne peut pas être au coeur du métier médical, mais notre capacité collective à assurer la poursuite du progrès de la médecine et à garantir la maintien d'un égal accès aux soins repose en grande partie sur la manière dont nous saurons l'appréhender.

Il faut trouver des formules nouvelles pour permettre au monde de la santé de s'approprier cette dimension de son activité, lui éviter d'en devenir l'esclave, lui permettre au contraire de la maîtriser.

Si l'on veut pouvoir parler un peu plus de santé et un peu moins d'argent, il faut que l'horizon de l'assurance maladie s'éclaircisse. Il faut des perspectives nouvelles, lisibles, définies en partenariat avec tous les acteurs du système de soins.

Les mécanismes de responsabilité collective ont correspondu à une période de crise financière et de transition. Il faut passer aujourd'hui à un système de responsabilité librement consentie, individuelle et contractuelle, fondée sur la recherche du meilleur soin et sur l'évaluation des pratiques.





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