Intervention télévisée du Président de la République sur l'évolution de la situation au Kosovo -6 avril-

Intervention télévisée de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, sur l'évolution de la situation au Kosovo -6 avril-

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Palais de l'Élysée, le mardi 6 avril 1999

Mes Chers Compatriotes,

Comme je l'avais dit la semaine dernière, je voudrais faire à nouveau le point avec vous sur la situation au Kosovo. L'horreur voulue et organisée par Milosevic dépasse aujourd'hui tout ce que l'on peut imaginer. En accord avec le Gouvernement, je vous redis que ce n'est pas acceptable.

Des centaines de milliers de Kosovars ont été chassés vers l'Albanie, le Monténégro ou la Macédoine. Contrairement à ce que dit la propagande du dictateur, ils n'ont pas fui pour échapper aux frappes de l'OTAN. Ils ont fui, et tous en témoignent unanimement, devant les soldats et les miliciens serbes qui les chassent, sous menace de mort, après leur avoir tout pris. Il s'agit là d'une monstrueuse opération d'épuration ethnique planifiée et conduite avec le plus grand cynisme et la plus grande cruauté par le régime serbe.

L'aide humanitaire est à l'oeuvre, progressivement, dans l'ensemble de la région. La France y prend toute sa part. Je voudrais rendre hommage à tous ceux, civils, militaires, volontaires des organisations humanitaires qui se mobilisent avec coeur, avec compétence. Et je veux aussi vous rendre hommage, à vous qui, par des gestes personnels, exprimez votre générosité.

Mais nous devons faire davantage.

D'abord pour les réfugiés.

Faut-il envisager leur transfert dans les pays occidentaux ? Je ne crois pas que cela soit la solution, même si elle donne l'impression d'être celle du coeur.

Ce nouvel exode, refusé d'ailleurs par la plupart d'entre eux, conduirait à les éloigner plus encore de leur terre, des villages et des villes où ils ont le droit de revenir et de vivre librement et en paix. Nous devons, bien sûr, prendre en compte les situations exceptionnelles, les situations de plus grande détresse et sur la base d'un volontariat clairement exprimé. Mais nous ne devons rien accepter qui puisse faire le jeu de Milosevic, dont l'ambition est clairement de chasser les Kosovars définitivement et le plus loin possible de chez eux. Perspective qui est précisément combattue par les forces alliées au nom de la morale et des droits de l'Homme.

Pour être efficace, notre solidarité doit s'exprimer aussi à l'égard des pays qui accueillent ces réfugiés, l'Albanie, la Macédoine, le Monténégro. Seul un véritable plan d'urgence peut leur permettre de surmonter les difficultés économiques et financières qui les assaillent. J'ai proposé cet après-midi au Chancelier allemand Gerhard Schroeder, qui préside actuellement l'Union européenne, de faire de notre prochain Conseil européen, le 14 avril, un Conseil exceptionnel destiné à prendre les nouvelles mesures qui s'imposent.

Mais ces légitimes préoccupations humanitaires ne doivent pas nous faire oublier la nécessité de poursuivre notre effort militaire.

Je vous ai dit il y a quelques jours que cette action demanderait du temps et de la détermination. Je le répète aujourd'hui.

Les frappes engagées contre le régime serbe ont pour objectif la destruction des moyens dont il dispose pour chasser les Kosovars par la terreur et par le crime. Jour après jour, l'action des alliés conduit à l'étouffement progressif de cet appareil militaire serbe. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes attaqués aux dispositifs de commandement, aux moyens de communication, à certains ponts stratégiques ou dépôts de carburant. Nous l'avons fait en prenant soin d'éviter au maximum les dommages civils. Ces frappes doivent se poursuivre, notamment sur les forces militaires, jusqu'à ce que ce régime cesse sa répression criminelle et permette réellement le retour chez eux des réfugiés. Ou alors jusqu'à ce qu'il n'ait plus les moyens de poursuivre ses funestes desseins.

Je veux croire que le peuple serbe, pour lequel nous n'avons qu'estime et amitié, ouvrira enfin les yeux sur la réalité de son régime.

Dans le même temps, il appartient aux Européens, aux Américains, aux Russes, sous l'autorité de l'ONU je le souhaite, de rechercher les voies d'un accord politique assurant la stabilité et la paix dans une partie de l'Europe qui a vocation à rejoindre, le moment venu, notre Union européenne.

Je veux vous dire ce soir que l'action menée par Milosevic ne triomphera pas. La barbarie ne peut avoir le dernier mot. La justice doit passer et les criminels devront rendre des comptes. Les Européens unis, les alliés unis doivent poursuivre leur mission. Ils le feront jusqu'à son terme.

Notre ambition d'un Kosovo où chacun pourra vivre en paix demeure entière. Notre ambition d'une solution politique demeure le fondement de notre action.

En plein accord avec le Gouvernement, je voudrais dire aux autorités serbes que le cessez-le-feu qu'elles semblent envisager est indispensable mais insuffisant. Dans le cadre d'un accord politique, il doit impérativement s'accompagner de l'ensemble des mesures permettant un retour effectif de la paix et de la sécurité au Kosovo.

Mes Chers Compatriotes, en terminant je voudrais exprimer en notre nom à tous, au nom de la nation réunie, une pensée d'estime et de reconnaissance à nos soldats et à tous les soldats alliés qui participent aux opérations pour la paix et pour le droit dans les Balkans.





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