Discours du Président de la République au 38e Congrès de la Mutualité

Discours de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, au 38e Congrès de la Mutualité

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Palais des Congrès - Lyon, le jeudi 8 juin 2006

Monsieur le Président, cher Jean-Pierre DAVANT,
Monsieur le Maire,
Mesdames et messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs,

Le congrès de la Mutualité française est pour moi un rendez-vous particulier. C'est un rendez-vous républicain où souffle l'esprit mutualiste, c'est-à-dire un attachement profond aux valeurs de justice et de solidarité.

Je vous remercie, Monsieur le Président, pour vos propos si justes concernant la situation sanitaire des pays du Sud. Il y a là un enjeu humain et de justice, mais aussi de sécurité pour l'humanité tout entière. Nous devons renverser les conformismes et les égoïsmes pour mettre en place une nouvelle organisation fondée sur la solidarité internationale. La responsabilité et l'honneur de la France, c'est de mener ce combat. Elle portera, l'an prochain, sa contribution au Fonds mondial à 300 millions d'euros. Et, pour rompre avec la logique actuelle, elle mettra en place, dans un mois, la contribution de solidarité sur les billets d'avion, dont le principe est désormais adopté par quatorze pays. Je proposerai également au G8 de Saint-Pétersbourg le lancement d'une réflexion internationale sur des mécanismes d'assurance maladie pour les pays les plus pauvres.


Mesdames, Messieurs,

J'ai toujours tenu à être présent parmi vous, et notamment chaque fois qu'il a fallu agir pour préserver la sécurité sociale. Car, comme vous, je crois que notre modèle est un atout et une force dans l'économie et dans le monde d'aujourd'hui ; pour peu qu'il sache se moderniser. Et ensemble, nous sommes en train d'en apporter la preuve.

Parce que nous menons un combat commun, j'ai voulu que les propositions de la Mutualité sur le parcours de soins, l'élargissement de la couverture complémentaire et la création d'une Haute autorité en santé, soient placées au cœur de la réforme de l'assurance maladie. C'est aussi pour cela que je souhaite que le statut de mutuelle européenne soit rétabli à l'agenda de la Commission. Et que l'engagement de la Mutualité, à travers les contrats responsables, soit reconnu par notre législation fiscale.

Les premiers résultats de la réforme sont là. Le déficit, qui se serait élevé à 16 milliards d'euros en l'absence de réforme, a été réduit de moitié. Si nous restons fermement mobilisés, l'objectif de retour vers l'équilibre fin 2007 sera tenu. Il n'est pas acceptable de reporter nos dettes sur les générations futures.

Au-delà des chiffres, ce qui est essentiel, c'est que les comportements des patients, des médecins et des caisses ont évolué en profondeur.

Avec d'abord l'adhésion massive de nos concitoyens au parcours de soins. Près de quarante millions de Français ont choisi leur médecin traitant, et 80 % des consultations médicales ont lieu dans le parcours de soins. C'est un formidable démenti à tous ceux qui pensaient que le poids des habitudes et la force des corporatismes rendraient impossible une réorganisation en profondeur de notre système de soins. Je remercie la Mutualité pour son engagement décisif dans ce domaine.

Nos concitoyens comprennent que, pour être bien soigné, il faut un véritable suivi médical, avec de la prévention. Qu'il faut être bien orienté. Nos concitoyens ont aussi compris que le médecin généraliste devait être le pilier d'un système de soins organisé. C'est cette orientation que vous voulez approfondir en instituant un parcours de soins mutualiste.

Les médecins aussi se sont engagés. L'adhésion des médecins au parcours de soins est massive : 99,6% des généralistes sont entrés dans le dispositif. La Convention qui a été signée avec les représentants des médecins généralistes et spécialistes, a permis de redonner de l'efficacité à la maîtrise médicalisée, qui était en panne depuis des années. Cela a permis de réaliser 720 millions d'euros d'économies. L'effort sera prolongé et amplifié, avec un objectif de 1,4 milliards d'économies sur deux ans. Cet objectif doit être impérativement respecté.

Les caisses jouent désormais plus activement leur rôle de gestionnaire. Le renforcement des contrôles d'arrêts de travail a mis en lumière beaucoup d'arrêts maladie injustifiés. Cela a contribué à la baisse très significative de dépenses qui avaient connu une augmentation considérable ces dernières années.

Pour réussir dans la durée, l'effort devra être poursuivi. La généralisation du dossier médical personnel devra être engagée dès l'an prochain. Il ne saurait y avoir de retard pour mettre en place ce progrès essentiel pour la qualité des soins. Vous l'avez souligné à juste titre, Monsieur le Président, beaucoup reste à faire aussi pour instaurer, dans le domaine de la santé, une culture de résultat et de transparence. Pour généraliser la formation médicale continue et l'évaluation des pratiques professionnelles. Pour garantir partout la qualité des soins. C'est notre feuille de route commune.


La réforme de l'assurance-maladie est l'une des composantes du combat pour la défense de notre pacte social. Un combat d'aujourd'hui, un combat d'avenir.

C'est pourquoi nous avons aussi réformé les retraites, pour garantir leur pérennité. Nous l'avons fait dans le respect des principes de la répartition et en apportant des droits nouveaux aux plus modestes.

Mais il ne s'agit pas seulement de préserver, il faut améliorer notre protection sociale. Nous le faisons, et cela dans deux domaines essentiels.

D'abord, par la généralisation de la couverture maladie complémentaire, pour garantir l'égalité devant les soins. Nous avons franchi une première étape en aidant 400 000 personnes à revenus modestes à souscrire une couverture complémentaire. Je souhaite que l'aide à la complémentaire soit désormais versée à tous les Français dont les revenus ne dépassent que de 20% le plafond de la CMU. Je suis également attentif à ce que l'Etat employeur continue à garantir, y compris sur le plan législatif, la protection complémentaire de tous les fonctionnaires, actifs ou retraités, à travers un système solidaire. C'est aussi l'occasion d'enrichir le dialogue social dans la fonction publique.

Le deuxième domaine où nous faisons progresser notre modèle social, c'est pour les personnes handicapées et les personnes âgées dépendantes. Elles étaient, dans une large mesure, les oubliées de l'édifice de 1945.

C'est une nouvelle branche de la protection sociale qui se met en place avec la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. Et le plan pour les services à la personne va permettre de créer des emplois pour toutes celles et tous ceux qui ont besoin d'aide. Les départements, les partenaires sociaux, le monde associatif et mutualiste doivent s'engager pour faire de notre pays, un pays exemplaire dans ces domaines.

Nous devons aussi relever un défi essentiel pour l'avenir de notre sécurité sociale, celui de son financement.

Un système de protection sociale collective tire sa force et sa pérennité de son acceptation par tous. C'est pour cela que les pères fondateurs de la sécurité sociale ont choisi de faire reposer son financement sur un principe d'égalité. Chacun doit contribuer, et chacun doit contribuer proportionnellement à ses revenus. Prenons garde à ne pas rompre les grands équilibres. L'idée de rendre la CSG progressive, c'est-à-dire faire cotiser les Français plus que proportionnellement à partir d'un certain niveau de revenus, est une idée dangereuse. La solidarité entre tous les Français est précieuse. Mais comme toutes les choses précieuses, elle est fragile. Si trop de nos concitoyens estiment qu'ils doivent cotiser au-delà de ce qui est juste, c'est tout l'édifice qui peut s'écrouler.

Et au-delà des principes, vouloir remettre en cause la différence fondamentale entre la CSG et l'impôt sur le revenu, c'est prendre le risque de décourager le travail, de casser le dynamisme de la Nation et, à coup sûr, porter un coup sévère à l'emploi.

C'est sur le terrain des cotisations patronales qu'il nous faut progresser. Dans une économie ouverte où la concurrence est exacerbée, une assiette de cotisations patronales qui pèse seulement sur les salaires n'est pas favorable à l'emploi.

Ce débat, j'ai voulu qu'il s'ouvre. A ma demande, le Gouvernement a fait analyser différents scénarios de réforme. Le temps est maintenant à la concertation au sein du Conseil d'orientation pour l'emploi et du Conseil d'analyse économique.

Je souhaite qu'elle permette de rapprocher les analyses afin d'engager ce second volet de la modernisation du financement de notre protection sociale. Et qu'elle démontre aussi, par une politique d'ensemble, la vigueur et l'efficacité de notre protection sociale dans le monde et l'économie d'aujourd'hui.


Mesdames, Messieurs,

La Mutualité, qui a posé les fondements de notre protection sociale, a toujours été aux avant-postes de sa modernisation. Et je veux, à ce titre, saluer votre engagement et celui de votre président Jean-Pierre DAVANT.

Dans une économie mondiale moderne, dynamique et responsable, la protection sociale doit avoir une place assurée et garantie. L'assurance-maladie, la sécurité sociale sont essentielles pour notre cohésion et notre avenir. Grâce aux réformes que nous avons entreprises, grâce à votre mobilisation, nous pourrons continuer à moderniser notre pacte social et donner tout leur sens aux valeurs profondément modernes de solidarité et de fraternité.

Je vous remercie.





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