Discours du Président de la République sur la lutte contre le cancer.

Discours de M. Jacques CHIRAC, Président de la République sur la lutte contre le cancer.

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Palais de l'Elysée, le jeudi 27 avril 2006.

Monsieur le Premier ministre,
Messieurs les ministres,
Mesdames, Messieurs,

J'ai placé vous le savez au cœur de mon mandat trois chantiers essentiels : la sécurité routière, le handicap et le cancer. Des chantiers où la vie est en cause et où notre société doit accomplir des progrès décisifs.

Voici trois ans, je vous ai réunis pour engager une mobilisation nationale contre le cancer. Il fallait refuser la fatalité et mener, ensemble, le combat pour la vie. Faire reculer la peur, les souffrances, les discriminations. Rendre notre société plus humaine, plus solidaire.

En trois ans, grâce à vous -professionnels de santé, chercheurs, associations de malades- la donne a changé. Vous avez uni vos forces aux côtés des pouvoirs publics et de l'Institut national du cancer, que préside le Pr Khayat que je tiens à saluer pour son engagement, pour son action efficace, humaine et résolue. L'action qui a été conduite lui doit incontestablement beaucoup.

Les résultats sont là. Dans tous les domaines de la lutte contre le cancer nous avons marqué des points. Mais l'heure n'est évidemment pas aux bilans. Elle est à un nouvel élan pour progresser encore.

Premier domaine, celui des addictions. Je pense au tabac, à l'alcool, mais aussi au cannabis. Ces addictions sont des causes majeures de cancer. Il ne s'agit pas seulement de comportements individuels. Elles ne se réduisent pas à des règles ou à des interdits. Elles sont aussi des maladies qui doivent être traitées comme telles. Pour cela les esprits et notre système de santé doivent évoluer.

Pour lutter contre le tabagisme, j'ai voulu agir par la prévention et par les prix. La France compte un million quatre cent mille fumeurs de moins sur trois ans. C'est un réel progrès. Pour renforcer cette action et lutter contre le tabagisme passif, la question de l'interdiction de fumer dans les lieux publics se pose actuellement. Un débat et une concertation approfondie doivent avoir lieu. C'est la clé pour qu'une telle évolution soit acceptée et puisse devenir effective. Le Gouvernement et le Premier ministre ont engagé ce débat. Une mission parlementaire va être constituée. C'est sur ces bases que les décisions définitives seront prises, avant la fin de l'année.

Au-delà de la question du tabac, il faut un plan d'action global contre les addictions. Il sera présenté par le Gouvernement, et ceci, dans les mois qui viennent. Nous allons mettre en place un service d'addictologie dans chaque CHU. Nous allons organiser des consultations d'addictologie dans les hôpitaux et y affecter des postes supplémentaires de praticiens hospitaliers. L'addictologie doit également trouver toute sa place dans la formation des médecins.

Les addictions doivent également devenir un champ essentiel pour la recherche médicale et pharmaceutique. Souvenons-nous de la façon dont la dépression était prise en charge il y a encore quelques années. Mesurons l'ampleur du chemin parcouru grâce aux nouvelles molécules. Pour les addictions, nous sommes à l'aube d'une évolution de la même nature.

Notre recherche fondamentale et clinique doit en faire une priorité. L'Institut national du cancer, les organismes publics de recherche, l'Agence nationale de la recherche, l'Agence de l'innovation industrielle doivent s'y engager

résolument. C'est un enjeu humain essentiel, eu égard aux souffrances des personnes dépendantes et de leur entourage. C'est également un enjeu économique majeur pour notre industrie.

Deuxième domaine où il faut accélérer le pas : le dépistage. Le dépistage du cancer du sein, si souvent évoqué, est maintenant généralisé. Il était temps. Le nombre de mammographies a doublé en deux ans. Mais trop de femmes ne s'y prêtent pas toujours, soit par manque d'information, soit par une peur irrationnelle qui associe dépistage et maladie.

Je demande à l'Institut du cancer et à l'Assurance-maladie de s'engager pour que le dépistage du cancer du sein devienne plus qu'un droit : une réalité pour toutes les femmes.

Le dépistage du cancer de l'utérus et du cancer colorectal sont désormais engagés. C'était indispensable. Mais il y a également le cancer de la prostate, qui est le troisième le plus mortel chez l'homme. Son dépistage doit être évalué, dès l'an prochain, dans quelques régions pilotes, en vue de son éventuelle mise en place générale. Nous aurons ainsi le système de dépistage le plus complet du monde.

Je souhaite par ailleurs que le Gouvernement et les partenaires sociaux s'engagent davantage pour renforcer la prévention des cancers professionnels.

Troisième domaine, domaine d'action : la recherche, et prioritairement, sur génome et cancer. C'est la clé pour améliorer les diagnostics, pour avoir des traitements plus efficaces, ciblés et mieux tolérés. Encore impossible il y a trois ans, l'analyse à grande échelle des prédispositions génétiques au cancer peut désormais être engagée.

Je demande au Gouvernement de lancer un programme national de recherche en mobilisant, à travers les cancéropôles, les meilleurs équipes hospitalières et scientifiques. Il devra s'appuyer sur le centre d'étude du polymorphisme humain et sur le centre national du génotypage.

Nous devons également tirer parti de tous les progrès accomplis depuis trois ans pour améliorer encore la qualité des soins et pour faire mieux respecter les droits des personnes malades.

S'agissant de l'organisation des soins, nous sommes en train de franchir une étape décisive en instaurant une procédure d'autorisation des établissements qui seront habilités à prendre en charge les malades du cancer. Mais il faut, dès maintenant, travailler avec l'Institut du cancer et le Conseil de l'Ordre, à l'étape suivante : celle de la labellisation des équipes médicales. Face à une maladie aussi angoissante que le cancer, chaque malade doit être en confiance, partout sur le territoire national.

En matière d'équipements, nous avons rattrapé notre retard, nous avons réduit de presque 40 % les délais d'attente pour un examen IRM. Nous allons poursuivre notre effort d'équipement et améliorer son utilisation. Les appareils doivent pouvoir fonctionner à plein, en élargissant les plages horaires et en permettant aux médecins, exerçant en ville, d'utiliser les équipements hospitaliers.

Dans le domaine des traitements, face aux inégalités qui existaient il y a encore trois ans, nous avons fait un grand pas en assurant le financement des médicaments innovants pour tous. L'enjeu, maintenant, c'est la personnalisation des traitements. Les pôles régionaux de cancérologie doivent mettre en place des plates-formes destinées à établir la carte d'identité des tumeurs. Et je demande à l'Institut du cancer de désigner, pour chaque tumeur rare, un centre de référence, afin d'assurer l'expertise et de diffuser les bonnes pratiques.

Lutter contre le cancer, c'est également faire en sorte que la vie puisse reprendre ses droits, pendant la maladie comme après les traitements.

La généralisation du dispositif d'annonce, conçue et voulue par les associations de malades, est maintenant une réalité. Grâce à lui, l'entrée dans la maladie devient plus humaine. Il nous faut désormais mettre en place un dispositif d'accompagnement du retour à la vie quotidienne, lorsque s'achève la phase de traitements hospitaliers. Cela exige, outre une surveillance et des traitements spécifiques, un soutien psychologique et social ainsi que des mesures pour favoriser le retour à l'emploi. Je souhaite que l'expérimentation de ce nouveau dispositif, organisé avec le médecin traitant, les réseaux de soins, les associations de malades, soit conduite l'an prochain pour une généralisation en 2008. Et cela sur le modèle des expérimentations menées par la Ligue contre le cancer, sous l'impulsion de son président le Pr Henri Pujol, à qui je tiens à rendre hommage.

La vie, avec ou après le cancer, c'est aussi pouvoir faire des projets et les mener à bien. Cela renvoie évidemment à la question de l'accès à l'assurance et à l'emprunt. La convention Belorgey a marqué un très réel progrès. Mais nous devons remédier au problème de l'assurance invalidité, favoriser plus de transparence pour l'octroi des polices d'assurance, mettre en place une véritable instance de médiation pour trouver les solutions aux dossiers litigieux et rendre plus supportable le montant des surprimes qui sont liées à l'état de santé.

Je souhaite que les négociations sur une nouvelle convention aboutissent avant le 30 juin. Un projet de loi sera ensuite déposé, soit pour consacrer les avancées de la négociation, soit, le cas échéant, pour s'y substituer.

Mesdames, Messieurs,
Vous pouvez sans aucun doute être fiers du travail que vous avez accompli ensemble depuis trois ans. La France est dorénavant reconnue comme étant aux avant-postes de la lutte contre le cancer dans le monde.

Mais pour les malades, pour leurs proches, pour la société tout entière, nous avons le devoir de poursuivre et d'amplifier ce combat pour la vie. Je sais que je peux compter sur votre engagement, sur votre ambition, sur votre cœur, sur votre compétence. Et vous pouvez compter sur ma détermination à vos côtés.

Je vous remercie.





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