Propos d'intervention en séance du Président de la République lors de la réunion des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union européenne.

- Document de travail -

Propos d'intervention en séance de M. Jacques CHIRAC, Président de la République lors de la réunion des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union européenne.

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(Hampton Court, 27 octobre 2005).

Je remercie la présidence d'organiser cette discussion sur la façon dont l'Europe doit répondre aux défis de la mondialisation.

C'est un sujet essentiel car nous devons aujourd'hui réconcilier les Européens avec le projet européen, leur montrer que l'Union est activement engagée pour répondre à leurs préoccupations. Car l'Europe est la meilleure réponse à la mondialisation. Car l'Europe constitue le cadre d'action irremplaçable pour relever ses défis.

Nous y parviendrons si nous sommes rassemblés et unis. Si nous menons les nécessaires réformes tout en restant fidèles à nos valeurs humanistes et à notre modèle social. Si nous réaffirmons notre volonté de construire une Europe politique et sociale, fondée sur la solidarité, des politiques communes et une démarche d'harmonisation.
Je souhaite que nos discussions d'aujourd'hui puissent déboucher sur des orientations concrètes, montrant aux citoyens que c'est bien dans leur vie quotidienne que l'Europe apporte des solutions.

Je souhaiterais concentrer mon intervention liminaire sur 5 points.

Premier défi : la croissance et l'emploi. Il est capital de faire davantage en faveur de la recherche et de l'innovation. C'est la clé de la compétitivité et des emplois de demain.
Pour y parvenir, nous devons mobiliser davantage de moyens. C'est pourquoi la France, sur la base d'une proposition qui avait été avancée par Jean-Claude Juncker, propose la création, par la BEI, d'une nouvelle facilité de 10 milliards d'euros finançant des projets en matière de recherche et d'innovation. Il s'agit de mobiliser le capital de la Banque pour aider à la prise de risques. Grâce à un effet de levier, avec des cofinancements publics et privés, cela permettra d'investir 30 milliards d'euros supplémentaires d'ici 2013, soit presque un doublement de l'effort communautaire actuel en faveur de la recherche.

2ème défi: le déclin démographique de l'Europe. C'est un sujet capital à mes yeux : plusieurs de nos pays vont voir leur population vieillir et baisser dès les prochaines années. Cela explique en partie l'écart de croissance avec les autres grands ensembles du monde.
Nous ne pouvons pas nous contenter de gérer les conséquences du vieillissement de la population. Nous devons :
- encourager la natalité,
- mieux concilier les vies professionnelles et familiales,
- développer les équipements pour la petite enfance, etc...
Je souhaite une plus grande mobilisation non seulement de chaque pays mais aussi de l'Union pour examiner comment redynamiser la démographie en Europe. Je propose que, dans un premier temps, la Commission procède à un état des lieux de nos perspectives démographiques et de nos politiques dans ce domaine, pour aider à cette prise de conscience et, je le souhaite, nous inciter à travailler ensemble.

3ème défi: celui de l'immigration. Ce qui se passe à Ceuta et Melilla n'est pas un problème hispano-marocain mais un problème européen. Nous proposons avec l'Espagne d'aller beaucoup plus loin dans la réponse européenne à ce défi. Nous devons tous ensemble adopter une approche conciliant la fermeté, le respect de la dignité humaine et le partenariat avec les pays concernés. Nous devons :
- renforcer la protection des frontières extérieures de l'Union ;
- améliorer les conditions de la réadmission des immigrants illégaux ;
- établir une relation de partenariat global avec les pays d'origine et de transit de l'immigration clandestine.
L'Europe ne peut pas se contenter d'une réponse sécuritaire car il s'agit en réalité de s'attaquer aux écarts de richesses entre les deux rives de la Méditerranée. Il faut donc lancer une coopération globale sur les questions migratoires avec l'ensemble du continent africain. C'est dans cet esprit que nous avons, conjointement avec l'Espagne et le Maroc, lancé une initiative en vue du Sommet de Barcelone du mois prochain afin d'intégrer cette dimension dans le partenariat euro-méditerranéen. C'est dans ce même esprit que la France soutient la proposition d'une Conférence euro-africaine sur les migrations.

4ème défi : le changement climatique. Il constitue la menace la plus urgente qui pèse sur l'environnement et l'avenir même de l'humanité sur terre. La multiplication des épisodes climatiques extrêmes en constitue le signe avant-coureur. Il se pose avec d'autant plus d'acuité qu'il coïncide avec le défi énergétique du pétrole cher qui place l'Europe dans une situation de vulnérabilité.
Il faut que les institutions européennes prennent l'initiative de nous rassembler afin que nous définissions les contours de la révolution de nos modes de vie et de production qu'implique cette réalité.
La France présentera un mémorandum au début de l'an prochain et fera part de ses propositions. Pour sécuriser et diversifier nos approvisionnements. Pour lancer des nouveaux programmes de recherche. Pour définir de nouveaux objectifs internationaux contraignants de réduction des émissions de gaz à effet de serre après 2012. Pour renforcer notre coopération avec les pays en développement, afin de les aider à concevoir un modèle de croissance propre.

5ème défi : renforcer l'influence de l'Europe dans le monde. Aujourd'hui, sur tous les continents, plus de 40.000 soldats et policiers européens sont engagés au service de la paix et du développement. Ma conviction est que les Européens seront de plus en plus appelés à agir ensemble sous la bannière de l'Union. Il faut donc donner à l'Europe les moyens d'assumer pleinement ses responsabilités internationales. Donnons mandat à Javier Solana de nous faire des propositions sur trois points essentiels :
- les Balkans occidentaux, avec notamment la reprise, en 2006, de la mission de police des Nations unies au Kosovo ;
- l'Afrique, avec le soutien apporté au développement des capacités africaines de maintien de la paix ;
- face aux catastrophes de grande ampleur, comme celle que connaît le Pakistan, développons une capacité de réponse de l'Union, par exemple autour d'une force d'intervention rapide européenne (FIRE) dont la France avait proposé la création au lendemain du tsunami.

(Source : site Internet de la présidence de la République).





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