Allocution de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, devant la communauté française (Londres)

Allocution de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, devant la communauté française (Londres)

Imprimer

Londres - (Royaume-Uni) Vendredi 19 novembre 2004.

Mes chers compatriotes,

Je suis très heureux de me trouver aujourd'hui parmi vous à Londres.

Je veux tout d'abord remercier, en mon nom, au nom de mon épouse, et en notre nom à tous, l'Ambassadeur de France et Madame ERRERA qui ont si bien organisé pour nous cette rencontre. Je veux saluer aussi vos représentants au Sénat et au Conseil supérieur des Français de l'étranger qui ont à coeur de défendre vos intérêts et qui se font les interprètes vigilants de vos préoccupations auprès des pouvoirs publics.

Et bien sûr, je veux saluer chacune et chacun d'entre vous. Vous constituez tous ensemble une communauté française exceptionnelle, par son ampleur, par sa croissance, par sa diversité et par ses succès. Vos talents, vos atouts, sont ceux de la France et vous constituez ainsi un élément essentiel de la relation franco-britannique.

Cette relation vit une année forte avec le centième anniversaire de l'Entente cordiale. Des dizaines de manifestations se sont succédées, ici comme en France, des manifestations prestigieuses, chaleureuses, pleines d'imagination, avec toujours la volonté d'associer plus étroitement nos deux peuples en rappelant la profondeur réelle de ce qui les unit. C'est l'esprit de l'Entente cordiale que nous célébrons tout au long de cette année. Il est inspiré par des principes forts, simples et fondamentaux : la volonté de voir plus loin, la conviction que, au-delà de la défense légitime des intérêts nationaux, il faut nourrir, ensemble, des ambitions toujours plus hautes, la conscience d'un destin commun entre nos deux peuples, la confiance qui est à l'origine de toute entreprise durable et pacifique entre les hommes.

Après le sommet franco-britannique, j'ai rendu hier à Sa Majesté la Reine Elisabeth II la visite qu'elle avait faite elle-même au printemps dernier en France. Par cet échange, nous avons en réalité exprimé notre volonté commune de perpétuer pour les générations futures cet esprit de l'Entente cordiale.

Aujourd'hui, comme par le passé, quand Britanniques et Français s'engagent côte à côte pour défendre l'essentiel et rassemblent leurs forces, le Royaume-Uni et la France peuvent répondre à tous les défis communs qui leur sont lancés :

Comment conserver à nos sociétés unité et cohésion, assurer l'intégration de tous dans le respect de nos lois, de nos principes, de nos traditions, de nos intérêts ?

Comment concilier la cohésion sociale et l'économie de marché, la solidarité avec la compétition, l'initiative, la liberté d'entreprendre qui marquent notre temps ?

Comment lutter contre le terrorisme et toutes les formes d'extrémisme sans jamais transiger avec le socle de liberté et de droit qui fonde nos sociétés ?

Sur ces questions et sur bien d'autres, nos deux pays, en conjuguant leurs énergies et leurs efforts, peuvent mieux affirmer leurs valeurs de paix, de démocratie et de progrès.

Voilà l'esprit dans lequel nous avons préparé hier, avec le Premier ministre, M Tony BLAIR, et les membres de nos gouvernements, les échéances qui nous attendent. Et ceci dans un esprit de solidarité et d'amitié.

L'année prochaine, la Grande-Bretagne assumera la présidence du G8 et, au second semestre, celle de l'Union européenne.

Nous partageons un même sentiment d'urgence face à la détresse des plus démunis dans le monde. Le Royaume-Uni et la France ne se résignent pas à la fatalité de l'abandon. Ils n'acceptent pas que des pans entiers de l'humanité survivent en marge du développement, privés de tout espoir de partager les bénéfices de la mondialisation.

Nos deux pays ont la même conviction que la paix et la stabilité dans le monde dépendent d'abord de la réduction de la pauvreté et de la misère.

En même temps, ils militent pour un développement durable qui préserve des ressources et des équilibres naturels déjà bien compromis. Nous portons à cet égard, en tant que grandes nations industrielles, des responsabilités particulières que nous sommes bien décidés à assumer ensemble.

Enfin nos deux pays sont résolument engagés dans la construction d'une Europe forte, pacifique et démocratique. Nos deux peuples seront appelés à se prononcer par référendum sur le nouveau projet fondateur de cette Europe élargie que représente le Traité constitutionnel.

Mes chers compatriotes,

Je tenais à réaffirmer devant vous ces perspectives, vous qui avez choisi de vivre vos projets professionnels, familiaux ou personnels au sein de ce grand pays.

Vous constituez aujourd'hui l'une des communautés françaises les plus importantes et les plus vivantes hors de nos frontières. Depuis 1991, le nombre des Français établis au Royaume-Uni a crû de près de 10% par an. Vous êtes aujourd'hui près de 300 000.

Communauté en pleine croissance, vous êtes également une communauté très dynamique. Beaucoup d'entre vous ont acquis dans ce pays une grande renommée, dans tous les domaines d'activité. Nous avons tous à l'esprit bien sûr le succès de nos sportifs, en particulier dans le football, mais aussi dans le rugby. Mais des champions, nous en avons surtout dans les entreprises, qu'il s'agisse d'industrie, d'énergie, de distribution, d'édition, dans les domaines de la presse, de la création artistique, de la recherche, de l'enseignement, du luxe et, bien sûr, de la gastronomie.

Quatre mille enseignants, mille trois cents chercheurs, des dizaines de milliers d'étudiants enrichissent nos échanges culturels et scientifiques en choisissant la Grande-Bretagne comme étape de leur carrière.

Permettez-moi enfin de me réjouir que 1 400 mariages franco-britanniques soient célébrés chaque année, et que 30 000 enfants binationaux soient déjà nés. Je leur dis toute mon affection. C'est une autre réalité vivante et rayonnante de la relation franco-britannique et de votre communauté.

Cette communauté française de Grande-Bretagne, nous sommes à son écoute et nous veillons tant que faire se peut à répondre à ses besoins.

Je sais à quel point, en particulier, vous êtes attachés à ce grand établissement qu'est le Lycée français Charles de Gaulle.

Par la qualité de son enseignement, par les résultats brillants que ses élèves obtiennent, il fait notre fierté. Je félicite le proviseur, je félicite toute l'équipe, enseignants et personnels administratifs, pour l'excellente qualité de leur travail.

Le succès de cet établissement et le développement de la communauté française doivent le conduire à évoluer. Trop d'élèves français se trouvent, c'est vrai, aujourd'hui sur la liste d'attente.

L'ambassadeur a engagé une réflexion, en concertation étroite avec les parents d'élèves et les élus du Conseil supérieur des Français de l'étranger afin de répondre aux besoins et aux préoccupations des parents d'élèves d'aujourd'hui et de demain. C'est en toute transparence que la meilleure solution sera trouvée et sera mise en oeuvre.

Je sais que le Consulat général doit, lui aussi, faire face à une demande en forte expansion et que l'amélioration de l'accueil des Français comme des étrangers est pour ses agents une préoccupation constante.

Mes chers compatriotes,

Vous êtes les représentants d'un pays fier de ses traditions et de sa culture, ouvert au monde, aux échanges, à la modernité. Une France écoutée et respectée, entreprenante et performante, pleinement engagée dans la compétition mondiale tout en étant soucieuse de promouvoir une plus grande solidarité. Autant de valeurs que chacune et chacun d'entre vous apportent ici en même temps que son talent et son dynamisme.

Soyez-en chaleureusement remerciés.

Vive le Royaume Uni,
Vive la France.





.
dépêches AFPD3 rss bottomD4 | Dernière version de cette page : 2006-04-11 | Ecrire au webmestre | Informations légales et éditoriales | Accessibilité