Discours de M. Jacques CHIRAC Président de la République lors du Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de la Méditerranée occidentale

Discours d'ouverture de M. Jacques CHIRAC Président de la République lors du Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de la Méditerranée occidentale (dialogue 5+5)

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Tunis (Tunisie), le vendredi 5 décembre 2003.


Monsieur le Président de la République tunisienne, Sire, Messieurs les Chefs d'Etat et de gouvernement, Monsieur le Président de la Commission européenne, Monsieur le Secrétaire Général de l'Union du Maghreb Arabe, Mesdames et Messieurs,

Je tiens tout d'abord à remercier très chaleureusement notre hôte, le Président Ben Ali, qui a magnifiquement organisé notre rencontre. Et je veux saluer son initiative de réunir ce premier Sommet du Dialogue 5 + 5. Une initiative forte, qui traduit, Monsieur le Président, votre conviction profonde que l'avenir de nos peuples, leur développement, leur prospérité, l'enracinement de la paix dans la région, commandent que nous poursuivions ensemble la construction de notre destin méditerranéen.

Fidèle à son passé prestigieux et à son génie, la Tunisie qui, au carrefour des peuples, des civilisations, des religions, a su mêler et brasser les influences, joue ainsi une fois encore son rôle de pont entre l'Orient et l'Occident, entre l'Afrique et l'Europe. Elle a été l'un des pionniers du rapprohement euro-méditerranéen. Elle en est aujourd'hui l'un des champions les plus ardents.

C'est également le cas de la France, qui a noué dans la région, en particulier au Maghreb, des liens puissants, indestructibles, ceux de l'Histoire mais aussi ceux du coeur. Elle aussi porte l'ambition d'ancrer en Méditerranée l'esprit de coopération, la solidarité et la paix. Elle a été à l'origine de la mise en oeuvre de ce dialogue 5+5 entre les pays de la Méditerranée occidentale. Dans cet esprit, elle a accueilli cette année deux réunions de nos ministres des Affaires étrangères, qui ont permis de réfléchir aux crises régionales, et d'abord aux conséquences de la situation en Iraq, et aussi de préparer au mieux le Sommet de Tunis.

Notre message de rapprochement, je l'ai porté à Beyrouth, l'an dernier, puis cette année à Alger, à Rabat et depuis deux jours à Tunis, où je me réjouis de retrouver aussi nos amis mauritaniens, avec lesquels la France, vous le savez, entretient des relations anciennes et fortes, et de rencontrer les représentants de la Libye, avec lesquels la France a l'espoir de pouvoir établir une relation pleine et confiante.

Au sein de l'Union européenne, l'Espagne, l'Italie, le Portugal et aujourd'hui Malte partagent le même sentiment d'urgence, la même volonté de faire de la Méditerranée un espace de solidarité et de paix, la même ambition pour ce premier Sommet du Dialogue 5+5. Celle de favoriser l'intégration régionale au Maghreb et le développement économique qui l'accompagne. Celle de donner la place essentielle qui lui revient à la relation entre le Maghreb et l'Union européenne.

Ce Sommet intervient deux jours seulement après la conférence ministérielle euro-méditerranéenne de Naples où a été réaffirmée, à l'heure où l'Union européenne procède à son élargissement, la force de l'engagement méditerranéen de l'Union européenne.

Le processus de Barcelone nous concerne tous : il concerne bien sûr, au premier chef, les trois pays du Maghreb, le Maroc, l'Algérie et la Tunisie, liés à l'Europe par un Accord d'association. Mais il concerne aussi la Libye et la Mauritanie, qui étaient d'ailleurs représentées à Naples.

Comme vous le savez, la France a présenté, à l'occasion de cette Conférence, avec l'appui de huit de ses partenaires européens, des propositions pour une relance du processus de Barcelone. Parce qu'elle veut aller de l'avant, sans se laisser arrêter par les obstacles qui entravent encore la construction de l'espace euro-méditerranéen.

Nous devons en effet progresser, notamment dans le domaine économique. C'est le sens de nos propositions pour des coopérations renforcées entre l'Union européenne et les pays du Maghreb liés par un accord d'association. En encourageant et en dynamisant l'intégration économique maghrébine, en amenant le Maroc, l'Algérie et la Tunisie à travailler ensemble, avec l'Europe, dans les secteurs économiques prioritaires comme l'énergie, la gestion de l'eau, les transports ou encore les technologies de l'information, ces coopérations érigeront le Maghreb en région « pilote », dont l'exemple aura vocation à rayonner et à s'étendre à tous les pays de la rive Sud. Je pense, bien entendu, à l'initiative d'Agadir, qui prévoit l'instauration d'une zone de libre-échange entre deux pays du Maghreb, le Maroc et la Tunisie et deux pays du Mashrek l'Egypte et la Jordanie. Nous voulons montrer que l'intégration régionale est l'instrument par excellence du développement économique et de la confiance.

Je veux aussi, dans cette circonstance, lancer un appel solennel à nos partenaires maghrébins pour qu'ils approfondissent leur dialogue, en particulier dans le cadre de l'Union du Maghreb Arabe, pour qu'ils lèvent les obstacles à leur rapprochement et mettent tout en oeuvre, pour parvenir aux règlements des conflits qui peuvent encore exister.

Rassemblés, et donc plus forts, les pays membres de l'Union du Maghreb Arabe pèseront d'un poids nouveau sur la scène internationale. Ils pourront jouer pleinement leur rôle au service de la paix, dans cette région du monde encore déchirée par tant de conflits. Oui, l'intégration régionale, j'en suis convaincu, offre une chance unique à la paix en Méditerranée, cette paix qui constitue l'objectif ultime du processus de Barcelone.

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Voilà, le voeu que je forme au moment d'ouvrir nos travaux. Je veux saluer la présence parmi nous de Monsieur Romano Prodi, Président de la Commission européenne, dont la communication sur les « nouveaux voisins » a marqué, en mars dernier, une étape importante dans la redéfinition et le renforcement des relations de l'Union européenne avec les pays de la rive Sud ; celles aussi de Monsieur Javier Solana, qui illustre l'engagement méditerranéen de l'Europe, et du Commissaire Patten.

Je souhaite que notre Sommet marque le point de départ d'une mobilisation de tous nos pays, qu'il explore des voies audacieuses. Enceinte d'échanges informels, notre Dialogue jouit de la liberté, de la confiance, de la souplesse pour ouvrir des pistes inédites, réunir experts et acteurs de tous les horizons, dans tous les domaines, comme le montre la proposition de la Tunisie de créer d'un Forum annuel de l'investissement associant le secteur privé. C'est, Monsieur le Président, une heureuse initiative.

Alors, soyons imaginatifs et ambitieux. Ensemble, voyons loin et situons-nous à la hauteur des magnifiques enjeux de notre rapprochement : l'essor de nos peuples, leur rencontre dans le respect de chacun, la paix entre des pays qui n'auront plus pour dessein qu'échanger, entreprendre, coopérer et partager le progrès.

Je vous remercie.





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