Discours du Président de la République lors de la visite de la marine à Toulon.

Discours de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, lors de la visite de la marine à Toulon.

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Toulon, Var, le jeudi 8 novembre 2001

Amiral, Mesdames et Messieurs,

Je me réjouis d'être ici pour rendre visite à la Marine et pour la saluer. Et je suis heureux de le faire à bord du SIROCO, superbe bâtiment, l'un des atouts majeurs de notre flotte de surface. Je remercie son commandant et son équipage pour leur accueil et aussi pour leur disponibilité.

En tant que chef des Armées, j'ai tenu, dans une période où nos forces sont, chacun le sait, particulièrement sollicitées, à rencontrer votre chef d'état-major et ses grands subordonnés de la façade maritime méditerranéenne pour faire un point de la situation et pour évoquer les évolutions récentes et aussi les préoccupations de la Marine.

Nos forces navales, vous le savez, contribuent directement aux opérations militaires engagées par les Etats-Unis et par la coalition à la suite des attentats du 11 septembre dernier.

Une frégate, un bâtiment ravitailleur, deux chasseurs de mines et leur bâtiment de soutien mobile participent aux missions et à la sécurité des flottes alliées dans l'océan Indien et dans le Golfe.

La France a aussi déployé dans la région un important dispositif de renseignement auquel la Marine participe également. Cette contribution est la marque de la solidarité que nous devons à un pays victime d'attaques monstrueuses contre sa population civile. Elle est aussi le signe de notre détermination dans la lutte qui est engagée contre le terrorisme, et dont l'action militaire n'est évidemment que l'un des aspects, quelle que soit son importance.

Notre volonté de neutraliser les réseaux terroristes d'Afghanistan et leurs soutiens ne doit pas fléchir, même si les opérations militaires doivent s'inscrire dans le cadre d'une stratégie politique d'ensemble qui, seule, permettra l'éradication définitive de cette menace et de ce danger.

Je m'en suis entretenu, ces derniers jours, avec nos principaux partenaires et je leur ai dit que la France est déterminée et solidaire dans ce combat qui la concerne au premier chef, comme il concerne toutes les démocraties et tous les pays épris de droit et de liberté. Mais j'ai aussi insisté sur la nécessité de reprendre l'initiative dans le domaine politique pour trouver une solution au problème afghan et pour aussi faire progresser le processus de paix au Proche-Orient. J'ai avancé des propositions dans ce sens. Et surtout j'ai insisté sur l'urgence absolue de progrès très importants dans le domaine angoissant de l'aide humanitaire, non seulement aux réfugiés mais à l'ensemble de la population afghane qui est une population en grande détresse et à laquelle nous devons porter secours.




Les attentats du 11 septembre, c'est vrai, ont modifié les perspectives, ont en quelque sorte bousculé les équilibres régionaux, ont infléchi au moins provisoirement les relations entre grandes puissances et ont rendu encore plus nécessaire la réflexion sur le rôle et sur les responsabilités des grands organismes internationaux, au premier rang desquelles l'Organisation des Nations Unies.

La lutte contre le terrorisme appelle l'adaptation de notre système de sécurité intérieure et extérieure à cette menace d'une acuité nouvelle, mais cette menace et cette lutte n'appellent pas par ailleurs, contrairement à ce que certains ont parfois voulu évoquer une révision de notre appareil de défense. Les principales menaces pour la sécurité de la France et de l'Europe restent les mêmes. Elles n'ont pas changé. Elles résultent d'abord des crises qui se développent à nos portes et de la prolifération des armes de destruction massive.

Les moyens militaires utilisés aujourd'hui dans le combat contre le terrorisme font appel à des capacités de renseignement, de projection et d'action qui étaient d'ailleurs les priorités que j'avais assignées à la réforme des armées en 1996.

Ces attentats n'affectent bien entendu en rien la crédibilité de la dissuasion nucléaire. Celle-ci n'a jamais été destinée à agir contre des individus ou des groupes terroristes. Elle s'adresse à des Etats. Elle est la garantie ultime de notre indépendance et de notre sécurité dans un monde où s'accroît le nombre de pays possédant des armes nucléaires et alors que prolifèrent, hélas, les armes biologiques, bactériologiques ou chimiques.




Au sein de notre appareil de défense, la Marine, les Français le savent mais doivent en prendre conscience de plus en plus, la Marine tient une place particulière. La mer constitue par elle-même un espace stratégique qui couvre l'essentiel du globe et nos intérêts politiques et nos intérêts économiques y sont considérables.

Dans ce cadre, notre capacité d'action sur les mers s'articule autour du Groupe aéronaval, de la flotte de transport et de projection et des sous-marins nucléaires d'attaque.

Mais la Marine joue aussi un rôle éminent dans notre dissuasion. Elle participe à ses deux composantes et, à ce titre, elle est investie d'une mission fondamentale qui contribue à garantir la survie de la Nation.

Enfin, ses missions de service public ont pris, ces dernières années, une importance croissante. L'accroissement des risques liés au transport maritime de matières dangereuses et à l'immigration clandestine par voie de mer a donné aux Préfets maritimes de nouvelles responsabilités dans la surveillance des approches de nos côtes. Les Français sont particulièrement sensibles à ces sujets qui les concernent dans leur vie quotidienne et ils font confiance à la Marine Nationale pour jouer son rôle de coordination de l'action de l'Etat en mer, en étroite liaison avec tous nos partenaires européens.




La Marine, dont j'ai évoqué les principales missions, vient de connaître deux années d'intense réforme pour rationaliser ses commandements et ses soutiens et pour réorienter en partie ses capacités d'action vers l'engagement du corps aéroterrestre.

Parallèlement, elle a accru résolument sa participation à l'Europe de la défense qui constitue, pour nos armées, un objectif majeur des dix années à venir. La montée en puissance de l'Euromarfor et l'exercice franco-italien "Trident d'Or" auquel ont participé 70 bâtiments de combat de 13 Etats différents témoignent de la vitalité de ce grand projet.

On aurait tort, pour autant, de considérer que cette profonde réorganisation de la Marine a permis de régler tous les problèmes et d'assurer définitivement l'avenir.

Je suis en particulier préoccupé des difficultés de maintien en condition des bâtiments de combat et je reste très attentif au renouvellement de la flotte de surface.

La création du Service de soutien de la flotte et l'évolution envisagée par le Gouvernement du statut de la Direction des constructions navales vont dans le bon sens. Ces réformes prendront un peu de temps et nous devons veiller, dans l'intervalle, à maintenir et à améliorer le niveau de disponibilité de nos bâtiments, c'est une nécessité. Il y faudra de la détermination, il y faudra aussi des ressources financières suffisantes. C'est l'objectif.

Le renouvellement de la flotte de surface devrait être, pour sa part, largement engagé pendant la prochaine loi de programmation militaire, avec la mise en service des frégates multi-missions, des premières frégates Horizon et des NTCD.

Je souhaite, enfin, que le lancement du deuxième porte-avions puisse être accéléré pour que la France dispose en permanence, dès que possible, d'un groupe aéronaval à la mer.




La disponibilité des bâtiments et le renouvellement de la flotte sont des éléments essentiels pour le moral des équipages. Mais ce ne sont pas les seuls. L'évolution des mentalités et l'osmose naturelle avec la société civile rendent aujourd'hui plus exigeants nos jeunes officiers, officiers mariniers et marins. Il n'y a là rien de contradictoire avec leur vocation qui reste de servir leur pays sur les mers. Leur dévouement et leur disponibilité ne sont pas en cause. Ils demandent seulement que les exigences et les contraintes propres à leur métier soient reconnues pour ce qu'elles sont par la nation.

Le Chef d'état-major de la Marine s'emploie à lutter contre les contraintes inutiles. Le ministère de la Défense étudie actuellement des aménagements du temps d'activité professionnelle, en dehors des opérations.

Mais, j'ai eu l'occasion de le dire récemment, le moment est venu d'engager une vaste et profonde réflexion sur la condition militaire et sur sa nécessaire revalorisation. C'est le complément naturel de la réforme des armées engagée en 1996.




Mesdames et Messieurs, j'ai pu constater une nouvelle fois aujourd'hui que les Français pouvaient compter sur leur Marine, une des premières du monde et en être fiers.

La qualité de nos équipages est connue de tous, j'en reçois maints témoignages quand je suis à l'étranger.

La rigueur et le professionnalisme dont vous faites preuve chaque jour dans l'accomplissement de vos missions vous valent l'estime et le respect de tous nos compatriotes. Votre culture de la mer, votre ouverture et votre sens du panache vous font apprécier et respecter par l'ensemble des professions maritimes.

Je vous le dis, vous pouvez être fiers de ce que vous êtes et de ce que vous faites ce qui me permet de vous affirmer que vous avez mon estime et vous avez ma confiance.

Je vous remercie.





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