Allocution de M. Jacques CHIRAC Président de la République à l'occasion de l'ouverture du forum mondial des biotechnologies (Lyon)

Allocution de M. Jacques CHIRAC Président de la République à l'occasion de l'ouverture du forum mondial des biotechnologies


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Lyon , le jeudi 8 février 2001

Monsieur le Premier ministre, maire de Lyon, Madame la directrice générale, Messieurs les ministres, Messieurs les organisateurs, Mesdames, messieurs,

La révolution des sciences du vivant est en marche. Elle avance à travers le monde en même temps que celle des technologies de l'information et de la communication. Le forum que vous organisez, Monsieur le Premier Ministre, témoigne de l'ampleur de ce phénomène.

Aujourd'hui, réunir un congrès sur les biotechnologies, ce n'est plus seulement évoquer l'organisation et le financement de la recherche, c'est avant tout se placer à la croisée des enjeux de la médecine, de l'agriculture, de l'industrie, de l'écologie et aussi du développement.

Les découvertes dans le domaine des sciences du vivant donnent une dimension nouvelle à toutes les questions touchant à la signification de la vie, à la place de l'Homme dans la nature, à la dignité humaine. Nous devons affronter ces défis éthiques sans précédent dans l'histoire et c'est un vrai problème.

A l'échelle européenne et mondiale, il appartient à notre génération de définir une doctrine et de rechercher des instruments juridiques et économiques permettant de maîtriser les conséquences de ces évolutions qui ignorent naturellement les frontières.

Face à l'importance des enjeux et à la rapidité des progrès, il est essentiel que les avancées de la science s'accompagnent partout d'une conscience démocratique et d'une réflexion politique et morale aussi large que possible.

En regroupant à parité des scientifiques, des industriels, des représentants des institutions publiques et de la société civile, en adoptant une perspective délibérément mondiale, Biovision s'inscrit dans cette logique cruciale de questionnement, de dialogue, d'information, de coopération.

Et je suis heureux, Monsieur le Premier Ministre, répondant à votre invitation, d'ouvrir les travaux de ce congrès. *** Riche de promesses et d'espérances, le progrès des sciences de la vie nous place dans une situation largement inédite.

Sans croire évidemment que demain tout sera possible, c'est d'abord l'espoir de guérir des maladies jusqu'ici incurables. C'est la perspective nouvelle de traiter certaines formes de cancer ou d'éviter la transmission de maladies génétiques, si terribles pour les enfants qui en sont atteints et aussi si bouleversantes pour leurs parents. Les Français ont bien compris cet enjeu. Leur mobilisation ne s'est jamais relâchée, notamment à travers le Généthon. Et les faits leur donnent raison : la séquence du génome humain sera bientôt dévoilée avec plusieurs années d'avance. La première thérapie génique a vu le jour en France où l'équipe du professeur Fischer a obtenu un succès déterminant dans le traitement des "bébés bulles".

Les thérapies géniques ne donnent encore qu'une idée très partielle des champs nouveaux qui s'offrent à la recherche dans le domaine des biotechnologies. Les thérapies cellulaires ouvrent l'espoir de régénérer les tissus et organes défaillants, en permettant de pratiquer des greffes d'une nature radicalement différente ou de s'attaquer à des maladies comme celles de Parkinson ou d'Alzheimer. De nouvelles perspectives se dessinent en matière de lutte contre la stérilité ou le vieillissement. Plus généralement, en permettant de mieux comprendre le processus de développement cellulaire, la recherche nous fait espérer l'éradication de ce terrible fléau qu'est le cancer.

Les biotechnologies portent aussi l'espoir de mieux nourrir les habitants de la planète. Près d'un milliard d'hommes et de femmes, d'enfants souffrent encore d'une alimentation insuffisante ou mal équilibrée et la population mondiale devrait augmenter de moitié en deux générations. Face à des besoins gigantesques, il serait contraire aux intérêts fondamentaux de l'humanité de s'interdire a priori d'adapter les caractéristiques de certaines espèces végétales, pour en améliorer les rendements ou pour en rendre la production possible dans des régions arides ou des sols fragiles. Toute la question est de savoir comment le faire sans mettre en cause des équilibres naturels, nécessaires à l'homme.

L'essor des biotechnologies n'est pas par lui-même contraire aux exigences de l'environnement. Il peut même en améliorer la protection. En matière agricole, par exemple, les biotechnologies pourront contribuer à limiter le recours aux produits phytosanitaires et aux engrais. Dans l'industrie, elles pourront donner lieu à des applications aussi variées que la dépollution des sols, le traitement des eaux résiduaires, la mise au point de procédés respectueux de la biosphère ou le développement d'outils de détection et de surveillance des pollutions.

Les biotechnologies offrent enfin des perspectives importantes d'expansion économique. Aux Etats-Unis, elles façonnent déjà, avec les technologies de l'information, l'architecture de l'économie moderne. En France, elles progressent désormais à un rythme soutenu. En Europe, elles pourraient occuper plus de trois millions de personnes dans deux ans.

Mais au-delà de toutes ces promesses, la diffusion des biotechnologies nous place dans une situation radicalement inédite, dont nous devons absolument mesurer les enjeux.

Avec la possibilité d'intervenir sur le génome et le clonage, la technique a fait irruption dans le sanctuaire de la vie. Elle donne à l'homme les moyens de modifier non seulement les espèces végétales ou animales, mais aussi ses propres caractéristiques génétiques. C'est une responsabilité vertigineuse. Les risques d'atteinte au patrimoine génétique, de rupture des équilibres de la biodiversité ou d'asservissement de la science à une volonté de puissance ne peuvent pas être pris à la légère.

A la nouveauté de ces questions, s'ajoute le rythme sans précédent de la mise en oeuvre des découvertes biotechnologiques. Le délai qui s'écoule entre une découverte et son exploitation à grande échelle se réduit de plus en plus vite. Et quand il s'agit de sauver des vies humaines, il est compréhensible que l'on cherche à raccourcir autant que possible les phases de test et d'agrément pour rendre les nouveaux produits plus rapidement accessibles.

Mais comment ne pas comprendre le sentiment d'insécurité de nos concitoyens, confrontés à cette accélération inédite dans l'histoire de l'humanité ?

Autre facteur d'insécurité, la nature même des biotechnologies empêche d'en appréhender toutes les conséquences sur une longue période. Qu'il s'agisse, par exemple, des effets sur la descendance d'une thérapie génique, de l'impact sanitaire de certains OGM ou des risques de dissémination des espèces végétales génétiquement modifiées, nous n'avons pas de certitudes.

Les craintes qui se font jour doivent donc être comprises et respectées. Sans céder aux fantasmes ou à la peur du progrès scientifique, chacun doit non seulement écouter une opinion en alerte, mais aussi expliquer et convaincre, par une attitude de transparence, de précaution, et de responsabilité. C'est du reste l'objet de ce forum, tout à la fois acte de démocratie, de vigilance, et de confiance dans la science. *** Le développement des biotechnologies doit nous faire réfléchir à l'évolution de la responsabilité politique, une responsabilité qui va désormais devoir faire plus de place à l'information et au dialogue.

Nos sociétés et nos démocraties doivent apprendre à vivre avec le progrès des sciences, avec les connaissances qu'il implique et les questions souvent délicates qu'il pose. Nos concitoyens veulent participer aux grands choix qui engagent leur avenir. Ils ne refusent pas le risque, pourvu qu'il ait été justement évalué et géré. Mais ils ne tolèrent plus les dissimulations, ni les décisions dictées par des intérêts économiques ou prises sans que toute la portée en ait été mesurée. Ils exigent vérité et concertation. Il revient aujourd'hui aux gouvernements de répondre à cette exigence en contribuant à l'émergence d'une culture de transparence et de confiance.

Une certaine pratique du secret qui a entouré le développement des organismes génétiquement modifiés n'a pas été propice à l'instauration d'un climat de confiance. Bien des gens ont eu le sentiment que ces produits étaient introduits avant que n'aient été conduites les études nécessaires sur leurs effets sanitaires et environnementaux. Il faut en tirer les leçons. Pour tous les produits qui résultent de manipulations du vivant, je souhaite pour ma part que des procédures comparables à celles qui prévalent en matière de médicaments soient mises en oeuvre. C'est l'intérêt de tous aussi bien d'ailleurs que celui des entreprises.

Etablir la confiance suppose de nous doter des instruments permettant d'évaluer les progrès et les risques liés à l'usage de chaque technologie, et cela de façon indépendante vis-à-vis de tout intérêt privé. A ce titre, il convient d'apporter une attention toute particulière à la qualité et à l'impartialité de l'expertise scientifique tant au plan national qu'européen et international. J'attache une importance très grande aux travaux conduits sur ce thème dans le cadre de l'OCDE et du Codex Alimentarius.

Nous devons également faire en sorte que citoyens, consommateurs ou patients soient toujours en mesure de connaître la portée de leurs choix, qu'ils s'engagent dans un traitement ou qu'ils achètent un produit : c'est tout le sens de la démarche qu'a entreprise l'Union européenne pour favoriser l'identification des filières et la traçabilité des productions agricoles. C'est aussi le sens du Protocole de Carthagène sur la biosécurité.

Cette pratique d'évaluation et d'information a naturellement vocation à se prolonger dans des contrôles fiables. Il revient à l'autorité publique de les assurer. C'est pourquoi les pays de l'Union européenne ont décidé à Nice la création d'une Autorité alimentaire européenne. Elle devra être opérationnelle dès 2002.

Evaluation, transparence et contrôle doivent aller de pair avec l'affirmation de valeurs d'éthique pour guider la recherche biotechnologique. Et Le moment me semble venu de réfléchir à l'instauration d'une sorte de serment d'Hippocrate des chercheurs et à l'élaboration de chartes éthiques des entreprises et des laboratoires.

La décision publique, elle aussi, a besoin d'être éclairée par la réflexion éthique. Nous disposons en France, depuis 1983, d'un comité consultatif national d'éthique qui a trouvé toute sa place dans notre débat public. Et je souhaite, dans le même esprit, que le Groupe européen d'éthique devienne un comité d'éthique à part entière chargé d'éclairer les décisions des organes communautaires. Et je saisis l'occasion de la présence parmi nous de Mme BRUNDTLAND, que je salue, pour dire une nouvelle fois tout l'intérêt qu'il y aurait à créer auprès du Secrétaire Général des Nations Unies un tel comité consultatif à vocation universelle.

Nos concitoyens attendent de nous que les choix qui engagent leur avenir soient faits sur une base réellement démocratique, c'est-à-dire au terme d'un débat public organisé, et qui donne toute sa place au Parlement.

Ce doit être le cas lorsque le principe de précaution est mis en oeuvre, c'est-à-dire chaque fois qu'il faut trancher entre des intérêts immédiats et des risques potentiels mais difficiles à appréhender avec certitude.

L'intervention du Parlement est également indispensable pour que les arbitrages portant sur des questions d'éthique soient rendus de manière démocratique. Car la loi n'a pas vocation à entériner le fait accompli. Elle doit accompagner les progrès de la science et donner un cadre clair à leur diffusion.

La loi doit fixer des règles et savoir les faire évoluer à l'épreuve des faits et du changement des esprits. Tel a été le choix de la France qui a adopté, en juillet 1994, l'une des législations les plus complètes en matière de bioéthique et qui prévoyait son réexamen au terme d'une période de cinq ans. Ce réexamen est aujourd'hui en cours. Il doit favoriser un débat aussi ouvert que possible. Il doit permettre à la représentation nationale de trouver les équilibres les plus justes, par exemple, entre les droits des malades à voir la science avancer et les principes éthiques qui conduisent à poser les limites au champ d'action de nos chercheurs.

Le Parlement devra examiner s'il y a lieu de maintenir l'interdiction de toute recherche sur l'embryon. Les perspectives très sérieuses qu'ouvrent aujourd'hui les thérapies cellulaires en matière notamment de lutte contre les maladies dégénératives méritent un débat approfondi. Il faut l'aborder avec une grande prudence. Ce débat ne doit pas faire prévaloir une conception utilitariste de l'être humain, qui mettrait en cause les fondements mêmes de notre civilisation et porterait atteinte à la dignité de l'homme. Mais il ne peut pas non plus priver l'humanité de la possibilité de faire reculer ses souffrances. Trancher de telles questions relève de la responsabilité politique.

Après m'être beaucoup interrogé, après avoir beaucoup consulté, tout en étant conscient que le débat ne peut être définitivement clos aujourd'hui, je pense pour ma part, que les perspectives ouvertes par les thérapies cellulaires peuvent justifier une évolution, comme d'ailleurs l'ont estimé le comité consultatif national d'éthique et le Conseil d'Etat. Il faut, bien sûr, maintenir l'interdiction absolue de créer des embryons à des fins scientifiques. Les seules recherches qui pourraient être autorisées ne devraient donc porter que sur des embryons conservés depuis plusieurs années en application de la loi de 1994. Leur intérêt devrait avoir été préalablement évalué. Pour être autorisées, elles devraient respecter au moins trois conditions :

- que les couples à l'origine de ces embryons, ayant renoncé à tout projet parental, aient pris la décision de les remettre à la recherche plutôt que de les voir détruits au terme de la période de cinq ans prévue par la loi ;

- deuxièmement qu'en aucun cas ces embryons puissent être ensuite réimplantés ;

- enfin que ces recherches ne soient autorisées que pendant une période limitée au terme de laquelle le législateur devrait se prononcer à nouveau.

Il faudra mettre à profit ce délai en ouvrant au plus tôt des alternatives. Au plan national comme au plan européen, il est indispensable de lancer et de financer des programmes de recherche portant sur les cellules souches adultes. Bien qu'à leurs débuts, ces recherches permettent d'espérer qu'il sera demain possible d'éviter le recours à des cellules embryonnaires.

Par ailleurs, je ne suis pas pour ma part favorable à l'autorisation du clonage thérapeutique. Il conduit à créer des embryons à des fins de recherche et de production de cellules, et, malgré l'interdit, il rend matériellement possible le clonage reproductif et il risque de conduire à des trafics d'ovocytes. * Cette quête permanente de justes équilibres éthiques ne saurait être cantonnée au niveau national ou européen, sous peine d'être vouée à l'inefficacité.

La liberté des échanges sert le progrès. Il faut néanmoins qu'elle respecte des règles pour la protection de l'environnement et la sécurité sanitaire des aliments. Il est essentiel de faire progresser le principe de précaution dans les instances internationales, au premier rang desquelles l'OMC. C'est l'un des objets de la résolution entérinée par le Conseil européen de Nice.

Lors des Sommets du G8 de Cologne et d'Okinawa, j'ai plaidé pour que soit mis au point un organe international de dialogue, qui rassemble la société civile, les scientifiques et les responsables publics, issus des pays en développement aussi bien que des pays développés. J'ai bon espoir que nous aboutissions à Gênes dans ce domaine : nous nous doterons ainsi de l'instrument qu'il nous faut pour discuter de façon transparente de l'impact des nouveaux aliments sur l'environnement et la santé.

En novembre prochain à Rome, les Nations Unies feront le bilan des efforts de lutte contre la faim et pour la sécurité alimentaire. Je souhaite que nous saisissions cette occasion pour débattre de l'introduction des OGM, notamment dans les pays en développement. Il nous faudra évaluer de façon approfondie les avantages, les inconvénients et les conditions du recours à ce type de produits. Nous devrons nous y attacher en pensant non seulement à leurs effets sur l'environnement et sur la santé, mais aussi à l'impact politique et économique du recours à des produits dont certains craignent peut-être à juste titre qu'il aboutisse à substituer une dépendance à une autre.

La même démarche de responsabilité doit nous guider dans la mise en place de règles internationales d'éthique. La France a fortement contribué à l'élaboration de la Convention d'Oviedo du Conseil de l'Europe et à la Déclaration universelle sur le génome humain. Cette action doit être poursuivie afin de faire pleinement respecter les principes fondamentaux que sont le respect de la dignité de la personne, la non patrimonialité du corps humain ou l'interdiction du clonage reproductif.

Il faut veiller à la diffusion de ces principes éthiques, au plan européen et au plan mondial. Pour progresser dans cette voie, je me rendrai prochainement à Genève et demanderai à la Commission des Droits de l'Homme de l'ONU d'engager à son tour une réflexion sur l'élaboration d'un instrument affirmant les principes universels de la bioéthique.

Dans ce cadre, il nous reste encore à tirer toutes les conclusions de la consécration du génome humain comme patrimoine commun de l'humanité. Certes, il ne convient pas de porter atteinte à la propriété intellectuelle et industrielle qui reste un moteur très efficace du progrès. Mais trop de brevets tuent le brevet. Et les conditions d'octroi des brevets ne doivent pas avoir pour conséquence de limiter la liberté d'utiliser un gène ou une séquence de gène au seul motif qu'ils auraient été employés dans l'élaboration d'un produit ayant déjà fait l'objet d'un brevet pour une toute autre application que celle envisagée.

C'est pourquoi la France vient de saisir la Commission européenne d'une demande de réexamen, sur ce point, de la directive sur la protection juridique des inventions biotechnologiques. *** Assurés des fondements éthiques et démocratiques de leur intervention, les pouvoirs publics pourront mobiliser plus efficacement les instruments de l'action publique pour favoriser le développement des biotechnologies.

Nous devons avoir pleinement conscience que celles-ci ne sont qu'à leur début et qu'il faut les encourager. Comme pour l'informatique à l'époque des premiers circuits intégrés, on imagine à peine l'étendue de leur potentiel. Aider au développement des biotechnologies est un devoir envers les patients qui ont le droit de bénéficier des avancées les plus récentes du progrès. Cela contribuera aussi au dynamisme économique, à la croissance et à l'emploi.

Malgré les efforts entrepris ces dernières années, la France ne tire pas tous les dividendes industriels de l'activité de ses chercheurs. Mesurée par leurs publications dans les revues les plus prestigieuses, celle-ci témoigne d'un fort potentiel national qui nous permettrait de rattraper le retard qui est encore le nôtre dans le domaine des biotechnologies.

La priorité est de rapprocher recherche fondamentale et recherche appliquée et de combler le fossé qui, pour des raisons culturelles, a longtemps été maintenu entre le secteur public et le secteur privé. Des projets d'envergure comme le génopôle d'Evry ou le Génoplante s'inscrivent dans cette démarche. Je tiens à rendre aussi hommage aux efforts qui ont été consentis pour faire de Lyon un pôle de dimension internationale dans le domaine des biotechnologies, notamment sous l'impulsion de Charles Mérieux dont je voudrais, après Raymond BARRE, aujourd'hui saluer la mémoire avec reconnaissance et avec respect.

La législation française sur l'innovation et la recherche participe également de cette démarche permettant d'associer les chercheurs à la création d'entreprises qui exploiteront les résultats de leurs travaux.

Cette évolution culturelle doit s'accompagner de moyens, alloués sur l'ensemble du territoire, notamment dans le domaine des équipements qui a trop longtemps été négligé par les budgets publics. Je pense ainsi à la bio-informatique ou à la constitution de collections biologiques.

Les scientifiques de talent que nous formons doivent trouver à s'employer en France. De même, nous devons veiller à ce que notre fiscalité ne soit pas de nature à dissuader les meilleurs scientifiques ou experts étrangers de venir exercer dans notre pays. Il faut aussi agir en faveur des jeunes chercheurs qui doivent avoir accès à des contrats leur permettant de faire leurs premières armes dans les grands instituts de recherche publique.

Parallèlement à ces actions, il est évidemment indispensable d'encourager l'investissement privé. Pour cela, il convient d'abord de se doter d'un vrai statut de la jeune entreprise innovante qui doit pouvoir bénéficier, durant les premières années de son existence, d'une fiscalité adaptée à ses besoins et encourageant l'esprit d'innovation de ses créateurs.

Il faut aussi inciter nos concitoyens à investir dans ces entreprises, par exemple, en leur permettant de déduire de leur impôt sur le revenu une partie substantielle de ces sommes. Aucun pays ne devrait se priver de ce facteur de dynamisme que sont les "business angels". Il convient, par ailleurs, de conduire une réflexion globale sur la transposition dans notre pays de mécanismes de financement privé de la recherche, comme ceux des fondations anglo-saxonnes.

Il faut d'une manière plus générale encourager l'investissement dans le secteur des biotechnologies en Europe.

Dans le prolongement des programmes européens de recherche dans le domaine des biotechnologies, il conviendrait que chaque euro investi dans ce secteur puisse s'accompagner d'un prêt bonifié à long terme d'un montant égal et remboursable en cas de succès. La Banque européenne d'Investissement pourrait jouer ce rôle, comme elle le fait en matière de grands travaux européens. Ce mécanisme d'incitation à l'investissement devrait être étendu à l'aide au rachat de sociétés étrangères à fort potentiel, dont les compétences et les brevets viendraient enrichir notre secteur national et européen.

Renforcer notre présence dans le secteur des biotechnologies nécessite enfin des mesures en faveur du capital-risque. En France, la création récente du fonds national d'amorçage BIOAM, doté de capitaux publics et privés, va dans ce sens. Pour lui donner toute son efficacité, ce fonds doit être doté des moyens financiers lui permettant de remplir pleinement sa vocation. *** Monsieur le Premier ministre, Mesdames et Messieurs,

Par la révolution qu'elles engendrent, les biotechnologies fascinent et inquiètent nos concitoyens.

Nous sommes investis de la responsabilité de créer les conditions d'un développement maîtrisé et accepté des biotechnologies.

Pour cela, il nous faut donner à la recherche fondamentale et appliquée tous les moyens d'oeuvrer pour faire reculer la maladie et le handicap et pour améliorer nos conditions de vie. Mais il nous faut aussi veiller à assurer partout dans le monde le respect des principes éthiques ainsi que la sécurité des consommateurs et des citoyens.

Pour assumer cette double responsabilité, le dialogue des scientifiques, des industriels, des responsables politiques et de la société civile est indispensable.

Le Forum de Lyon y concourt d'une manière exemplaire. Car il témoigne que, par-delà la complexité des questions éthiques, scientifiques et économiques, un dialogue libre et constructif est possible.

Je souhaite que, tout au long de ces trois jours, vos travaux permettent de dégager une réflexion objective sur les priorités en matière de recherche, sur les avancées de la science et sur leurs implications éthiques.

Vous contribuerez ainsi à l'émergence du plus large consensus possible en faveur d'un développement des biotechnologies réellement au service de l'homme.

Je vous remercie.





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