Discours du Président de la République à Mitrovica devant les Forces armées.

Discours de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, devant les Forces armées à Mitrovica, au Kosovo.

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Mitrovica, Kosovo, le samedi 25 novembre 2000

Monsieur le Ministre, Mon Général, Mesdames, Messieurs,

Je voudrais vous dire, tout d'abord, le plaisir que j'éprouve à me trouver aujourd'hui parmi vous, ici à Mitrovica, au sein de la brigade multinationale nord.

Cette visite a pour moi une importance toute particulière. Parce qu'il s'agit du Kosovo et des Balkans. Parce que la France s'est engagée clairement, politiquement et militairement, depuis 1995, pour que cette région d'Europe retrouve le chemin de la paix et celui de la démocratie. Mais aussi parce que les armées françaises y accomplissent leur devoir avec courage, avec un dévouement sans faille, et notamment depuis les campagnes aériennes du printemps 99.

Mes visites, en tant que Chef des armées, à nos unités engagées en opérations extérieures, que ce soit au Liban, en Bosnie ou en Macédoine, ont toujours été pour moi des moments privilégiés.

Car je sais, d'expérience personnelle, que c'est d'abord là, sur le terrain, dans la confrontation directe aux réalités complexes des situations, que le combat pour la paix se gagne ou se perd.

Je viens donc ici pour vous remercier et pour vous apporter le soutien de l'ensemble de nos compatriotes. Je viens aussi pour vous entendre et pour tirer de votre expérience les conclusions qui s'imposent.

Mais je veux également saluer la présence, parmi vous, de représentants des unités amies et alliées qui appartiennent à la brigade multinationale nord. Le général Falzone m'a dit tout à l'heure combien cette coopération était fructueuse et je m'en réjouis, car l'expérience difficile que vous vivez ensemble contribuera aussi à renforcer les liens, la compréhension, l'amitié entre nos pays.

Le cadre multinational dans lequel vous évoluez est devenu la norme, sinon la règle, dès lors que nos armées sont engagées dans des missions décidées par la communauté internationale.

Celle qui vous est confiée s'appuie sur la résolution 1244 des Nations Unies qui a fixé le cadre général, politique et institutionnel, du retour à la paix et à la démocratie dans cette région meurtrie par plus d'une décennie de terreur et de haines.

Il s'agit en pratique, et c'est ce que vous faites chaque jour, de créer les conditions si difficiles d'une réconciliation durable, et je dirai d'une réconciliation solide entre les hommes et les femmes qui aspirent aujourd'hui à mettre un terme à cette situation de crise, à relancer l'économie du Kosovo, à confirmer le processus démocratique. Beaucoup d'espoir, beaucoup de difficultés. Mais rien qui ne doive nous décourager.

Les élections du 28 octobre dernier qui ont permis, dans un climat un peu apaisé, l'élection incontestée des conseils municipaux du Kosovo, témoignent tout de même d'un important chemin parcouru. Je salue devant vous l'engagement personnel du Représentant spécial des Nations Unies, M. Bernard Kouchner, pour le succès, qui n'était pas du tout évident, de ce processus. Chacun est bien conscient de la part aussi qui vous revient et qui est également essentielle dans le rétablissement de ce début de climat de confiance. C'est votre oeuvre et ce sera votre fierté.

Au-delà, comme je l'ai souligné hier au sommet que nous avons tenu à Zagreb, et qui est également un moment de ciel bleu, un signe d'encouragement dans cette région si marquée par la violence et les troubles, il faudra que la paix et la stabilité soient consolidées par des accords de coopération régionale fondés sur les principes du dialogue et du bon voisinage, qui sont seuls à même de régler les problèmes si lourds hérités de l'Histoire.

Je n'ignore pas, pour autant, que la réconciliation entre les communautés est bien loin d'être achevée. Les peurs, les rancoeurs accumulées au fil des années ne s'effaceront naturellement pas en quelques mois.

Ici, dans le secteur de Mitrovica, le plus sensible de la KFOR du fait de la présence de fortes minorités serbe et tzigane, la pression qui s'exerce sur les unités des armées et de la gendarmerie est une pression très lourde et parfois extrême, je le sais. Les affrontements doivent être maîtrisés sans violence, mais sans faiblesse. Et vous avez appris à le faire. C'est probablement la chose la plus difficile et je tiens à vous en féliciter.

Cette mission vous impose une connaissance parfaite du terrain et aussi des hommes, une attention permanente aux plus faibles, aux plus isolés. Tout cela est d'une ingratitude extrême. Vous l'assumez avec générosité et avec intelligence. Vous l'assumez avec panache.

Je sais, car vous l'avez démontré au cours des derniers mois, que vous êtes prêts, moralement et techniquement, à assumer, avec sang-froid, les situations les plus diverses. Et les Français le savent. Ils vous sont reconnaissants, croyez- le, de défendre ici, en terre européenne, les principes de liberté, de démocratie, du respect de l'autre, du respect des droits de l'Homme qui fondent notre société.

Et, je vous le dis, les Français sont fiers, fiers de votre courage, fiers de votre professionnalisme, heureux de savoir que vous travaillez ici la main dans la main avec des représentants des pays alliés ou amis.

En leur nom, je rends hommage devant vous à vos camarades qui, hélas, ont trouvé la mort ou ont été blessés sur cette terre kosovare.

Le retour de la paix, même si celle-ci doit être consolidée, montre que les sacrifices consentis par nos armées ne l'ont pas été en vain.

Dans quelques semaines, la plupart d'entre vous passeront ici Noël et les fêtes de fin d'année, loin de leurs familles.

Je vous le dis, là aussi, les Français auront pour vous, qui êtes les sentinelles de l'Europe aux avant-postes du droit, de la justice, de la liberté, une pensée particulière de reconnaissance, d'estime et certainement d'affection.

Et pour ma part, en tant que chef des armées, je vous exprime aussi ma reconnaissance et également toute ma confiance.

Je vous remercie.





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