Allocution du Président de la République à l'occasion du dîner d'État offert en l'honneur de Leurs Majestés le Roi ABDALLAH II et la Reine RANIA de Jordanie.

Allocution prononcée par M. Jacques CHIRAC, Président de la République, à l'occasion du dîner d'État offert en l'honneur de Leurs Majestés le Roi ABDALLAH II et la Reine RANIA de Jordanie.

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Palais de l'Elysée, le lundi 15 novembre 1999

Sire,

Madame,

Mes premiers mots seront pour saluer la mémoire de Sa Majesté le Roi Hussein -Que Dieu l'ait en Sa Sainte miséricorde-. Nous avions voulu ensemble, lui et moi, cette visite d'Etat. Le destin en décida autrement.

Sire,

J'éprouvais pour votre père, admiration, respect et amitié. Il avait bâti la Jordanie moderne et s'était engagé corps et âme en faveur de la paix. Il avait jeté ses dernières forces dans la négociation de Wye River, arrachant par son courage un accord devenu depuis réalité. Son immense voix reste aujourd'hui très présente à nos mémoires.


La paix dont vous avez, Sire, repris le flambeau, elle est aujourd'hui à portée de main, après une période de dangers et de reculs.

Je veux saluer ici l'engagement de la Jordanie et les efforts que Votre Majesté déploie pour établir définitivement la concorde entre tous les peuples du Proche-Orient. Nous partageons la même conviction que les tragédies, les obstacles, les extrémismes ne pourront entraver la marche inéluctable vers la paix.

La paix, nous la voulons juste, globale et durable, reposant sur les principes acceptés par la communauté internationale : échange de la terre contre la paix ; exercice par tous les pays de la région de leur souveraineté sur l'intégralité de leur territoire ; sécurité pour tous, et notamment pour Israël ; libre détermination du peuple palestinien qui a droit à disposer d'un Etat.

Le Premier ministre israélien, M. Ehud Barak, impressionne par sa détermination à conclure la paix avant la fin de l'an 2000. L'accord de Charm-El-Cheikh, l'ouverture le 8 novembre à Ramallah des négociations sur le statut final de la Cisjordanie et de Gaza, le dialogue des dirigeants de la région, leur volonté d'aborder sans restriction tous les problèmes, tout cela fait renaître l'espoir. Nous sommes aujourd'hui à l'heure des choix, à l'heure des décisions difficiles et courageuses, à l'heure où chacun doit prendre ses responsabilités devant l'histoire.

A ce moment décisif, sept ans déjà après la poignée de main historique de Yasser Arafat et d'Yitzhak Rabin, pas un soutien ne doit manquer aux négociateurs. La France appuiera de toutes ses forces les efforts et les progrès des parties, dans le respect de la parole donnée et des accords signés.

La France met ses liens amicaux et confiants avec Israël, le Liban, les Palestiniens et la Syrie au service des négociations. Elle est disponible pour contribuer à leur succès et aux solutions qui pourraient être retenues.

La paix, nous en mesurons toutes les implications pour la Jordanie : Jérusalem, la question des frontières et de la sécurité, celle de l'eau, le sort des réfugiés. Autant de sujets essentiels pour l'avenir de votre pays.

Nous devons tous, avec ardeur et conviction, conjuguer nos efforts pour libérer le Proche-Orient des hautes murailles érigées dans les esprits par un siècle d'affrontements. Une fois en paix, il pourra s'engager à son tour dans le grand mouvement d'intégration régionale qui marque notre temps et qui permet à tant de peuples d'accéder au progrès économique, social et politique.

La paix, la stabilité, nous devons y travailler jusqu'au Golfe. C'est le sens des efforts déployés par la France aux Nations Unies pour la reprise du contrôle des armements et la suspension de l'embargo civil qui pèse sur le peuple d'Iraq et sur lui seul.

La paix est, enfin, au coeur de ce grand partenariat euroméditerranéen que la France appelle de ses voeux. Je n'oublie pas, Sire, que la Jordanie a été le premier Etat à appuyer le projet français d'une Charte de stabilité en Méditerranée et qu'elle est aujourd'hui l'un des premiers acteurs du processus de rapprochement engagé il y a quatre ans à Barcelone. La France, qui présidera l'Union européenne au second semestre 2000, entend relancer le processus d'édification d'un seul espace de paix et de stabilité, de coopération et de développement. Si les circonstances le permettent, elle réunira, pour la première fois, l'ensemble des Chefs d'Etat et de Gouvernement de la Méditerranée.

Votre soutien à cette initiative, Sire, s'inscrit dans le droit fil de la politique d'ouverture et de réformes de votre pays. Ouverture notamment à l'Europe, à travers l'accord d'association que le Parlement jordanien vient de ratifier et que le Parlement français devrait examiner très bientôt. Réformes que Vous avez, dès votre accession au trône, lancées avec détermination : poursuite de la démocratisation et de la libéralisation politique ; modernisation de l'économie ; accélération des privatisations ; encouragement au développement écono-mique et social ; réduction de la pauvreté et du chômage.

Pour tous ces grands chantiers, Vous pouvez compter, Sire, sur le soutien de la France. Nous sommes prêts, si Vous le souhaitez, à nous engager davantage encore à Vos côtés. Dès demain, nos ministres signeront un accord ambitieux de réaménagement et de conversion de votre dette en investissements. Il permettra le financement dans votre pays de projets dans les domaines de l'environnement, de la formation et du tourisme.

Dans le même esprit, notre coopération culturelle n'a cessé de se développer, en particulier dans le domaine des langues, de l'audiovisuel et, bien sûr, de l'archéologie. En portent témoignage la semaine culturelle jordanienne qui s'ouvre demain à l'Institut du monde arabe et, aussi, le projet de grande exposition, en 2002, sur la fascinante civilisation des Nabatéens.

Il y a trente-cinq ans, jour pour jour, le général de Gaulle, recevant à Paris le Roi Hussein, saluait, je le cite, " Le jeune roi d'un jeune royaume qui est aussi le représentant d'une noble et ancienne dynastie et le souverain d'un pays assez antique pour avoir été le berceau de l'histoire ".

A mon tour, Sire, Madame, de Vous souhaiter la bienvenue et de Vous dire combien la France est heureuse et honorée d'accueillir les jeunes souverains du Royaume hachémite de Jordanie. Combien nous, Français, sommes fiers que vous ayez choisi d'effectuer en France l'une de vos toutes premières visites d'Etat à l'étranger. Cette visite illustre l'amitié entre nos deux peuples, mais aussi l'importance de notre dialogue politique pour faire progresser la paix et l'importance de notre coopération pour le développement au Proche-Orient et dans toute la région de Méditerranée.

Je vais maintenant lever mon verre. Je le lève, Sire, en votre honneur. Que votre règne soit long et fructueux ! Qu'il voie s'accomplir tous vos projets pour votre pays, pour votre peuple et pour la paix ! Je lève mon verre en l'honneur de la Reine Rania, à qui j'adresse mes très respectueux et déférents hommages. Je le lève en l'honneur des personnalités jordaniennes présentes ce soir.

Je lève mon verre en l'honneur du peuple jordanien auquel le peuple français souhaite bonheur et prospérité.





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