Discours du Président de la République lors de la remise de la galette des rois.

Discours de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, à l'occasion de la remise de la galette des rois par la Confédération nationale de la boulangerie.1

Palais de l'Elysée, le vendredi 8 janvier 1999

Monsieur le Président,

Mesdemoiselles,

Mesdames, Messieurs,

Mes Chers Amis,

Je vous remercie d'abord de vos voeux, Monsieur le Président, et je suis très heureux -une fois de plus- de vous accueillir, ici, pour vous adresser à chacune et à chacun d'entre vous les voeux que moi-même je forme pour vous-mêmes, pour vos proches et pour toutes celles et tous ceux qui vous sont chers et notamment celles et ceux qui travaillent avec vous. Ce sont des voeux, croyez-le bien, sincères, chaleureux, amicaux.

Permettez-moi, Monsieur le Président, de saluer quelques uns de nos hôtes, le président de la confédération nationale de la pâtisserie, vos adjoints de la Confédération de la Boulangerie, en particulier Gérard DELESSARD, qui est pour moi un ami de longue date.

Je voudrais saluer également le président de la Meunerie, le président de la Chambre syndicale des fabricants de levure et puis les présidents départementaux et les collaborateurs de votre fédération.

Je voudrais également saluer et féliciter, bien sûr, les lauréats du concours " les meilleurs jeunes boulangers de France " et je note qu'ils comptent parmi eux une jeune femme : Mademoiselle Aurélie PERRAIS, ainsi que " le meilleur apprenti pâtissier de France " qui est également une jeune femme : Mademoiselle Nathalie DEPONT et j'adresse à ces deux jeunes femmes et aux jeunes qui les entourent, bien entendu, mes voeux très chaleureux et très sincères, non seulement de bonheur pour l'année 1999 mais de pleine réussite dans le métier qu'ils ont choisi, qui est l'un des plus vieux et un des plus beaux métiers du monde.

Je voudrais également saluer les élèves de 6e et de 5e de la Maison de la Légion d'honneur des Loges et les jeunes filles de seconde de Saint-Denis ainsi que leurs accompagnateurs, leurs accompagnatrices et Madame la surintendante ; ces jeunes filles savent qu'elles sont chez elles dans cette maison.

C'est une cérémonie amicale qui nous réunit puisque nous célébrons une vieille tradition qui symbolise le partage du pain -vous l'avez dit- le partage du fruit du travail bien fait, le partage d'un travail noble, s'il en est, puisque dans notre pays, comme d'ailleurs dans un très grand nombre de pays du monde

-ils sont tous de tradition rurale- le pain a toujours été considéré comme quelque chose de sacré.

Nous nous réunissons autour de ces deux superbes galettes et vous me permettrez de dire à l'artiste qui les a confectionnées et à son épouse qui a dû l'aider -j'imagine- toute l'admiration que nous avons, avant de le féliciter pour le goût que nous en tirerons.

Et je voudrais, s'agissant de la tradition du pain -vous savez que je suis très attaché à cette tradition- dire que je suis toujours très frappé de voir, ici, dans les déjeuners officiels ou non officiels que je donne à des étrangers, combien ils ont tous l'oeil rivé sur le pain et prêts à en prendre et à en reprendre. Je suis frappé de les voir tous, sans exception, exprimer d'une manière polie la qualité qu'ils trouvent à la cuisine française, en général, et de manière très accentuée le plaisir qu'ils éprouvent à manger le pain français.

Et quand je vais à l'étranger, à l'occasion des déjeuners et des dîners, il m'est arrivé un nombre considérable de fois d'être l'objet d'une remarque amicale de la part de mon hôte et qui me dit naturellement : " Nous n'avons pas de pain français ! " ou au contraire, il m'est arrivé aussi, notamment au Japon ou aux Etats-Unis, que l'on me dise fièrement : " Nous avons du pain français " et je voyais arriver, effectivement, une baguette qui avait l'air tout à fait française et qui était d'ailleurs, en général, l'oeuvre d'un boulanger français qui s'était expatrié et qui d'ailleurs, de plus en plus nombreux, réussissent brillamment dans les pays étrangers, notamment aux Etats-Unis et au Japon et dans bien d'autres aussi, en Europe.

C'est un témoignage que je donne souvent, mais je crois que la France peut et doit être fière dans sa grande tradition de gastronomie, d'être le pays où on a gardé de la façon la plus parfaite la qualité de ce mets noble, s'il en est, et qui est le pain que nous partageons, d'ailleurs, volontiers avec un autre mets, également noble, qui est le vin.

Cette tradition, Monsieur le Président, qui entoure la Galette des Rois, est vraiment une tradition française, vous l'avez évoqué dans ses origines, et je m'en réjouis, car nous avons, c'est vrai, beaucoup à apprendre des valeurs que vous avez soulignées, qui sont des valeurs de travail et des valeurs de partage que cette tradition illustre.

Dans un monde où tout circule de plus en plus vite, les hommes, les richesses, l'information, la connaissance, les techniques, dans un monde où tout change, où ces évolutions constantes parfois nous inquiètent, il est agréable de retrouver certains éléments permanents, certains repères auxquels on peut se raccrocher, certaines valeurs, certaines traditions et le pain incarne un certain nombre de ces traditions et de ces valeurs.

Ce geste qui nous rassemble, nous rappelle en effet, les valeurs qui nous unissent autour d'une même ambition, celle que nous formons pour notre nation, pour notre pays, c'est une grande ambition à laquelle nous travaillons au moment où se réalise l'euro dont les boulangers n'ont pas à avoir peur et n'ont pas peur d'ailleurs, au moment où progresse notre construction européenne, au moment où le monde attend de la France une vision humaniste affirmée à laquelle chacun pourrait adhérer, au moment où nous devons trouver les solutions à l'échelle de la planète pour régler les grands problèmes modernes, qui sont ceux de l'environnement, notamment, où il faut également favoriser avec plus de générosité le développement des pays pauvres ou tout simplement sauvegarder la paix dans le monde.

Vous savez mieux que d'autres, peut-être, ce que veulent dire ces mots : travail, partage, avenir. Vous les jeunes artisans, meilleurs jeunes boulangers ou pâtissiers, encore en formation, votre maître vous a transmis son savoir-faire, son amour du travail bien fait et vous portez désormais une part de ces traditions, vous portez surtout une culture.

Vous aussi, les jeunes élèves de la Légion d'honneur qui représentez une élite de la jeunesse française, vous avez mérité par votre travail d'être ici aujourd'hui et ceci me donne l'occasion de vous adresser aussi, des voeux très chaleureux et très affectueux pour vous-mêmes et pour vos familles, et surtout pour votre réussite et votre épanouissement dans la vie.

Vous tous, vous êtes la France de demain et je suis heureux de pouvoir partager avec vous cette Galette des Rois, ce beau cadeau des artisans boulangers, cette oeuvre d'un artiste du métier. Un cadeau précieux que les présents des Mages, que vous évoquiez tout à l'heure, Monsieur le Président, si poétiquement, nous ont laissé. Vous avez aussi rappelé les soucis de votre profession et les soucis, d'ailleurs, des artisans en général face à des décisions qui toutes ne vont pas dans le sens d'un allègement de vos charges ou d'un encouragement à créer des emplois.

Et je vous ai écoutés, permettez-moi de le dire, entendus avec attention. Je me suis réjouis, vous le savez, de l'aboutissement législatif et légitime de vos préoccupations de l'année dernière : c'était une nécessité. Mais c'était alors pour le coût, véritablement, un droit que l'on ne pouvait pas ne pas vous reconnaître. Et je reste persuadé que votre dynamisme, votre détermination, votre savoir-faire, votre art -car c'est d'un art qu'il s'agit- auront raison des grains de sable que vous craignez de voir se lever en tempête sur votre chemin.

Je ferai en tout cas le maximum, Monsieur le Président, pour vous soutenir dans ce sens, soyez-en rassuré, et ce faisant j'aurai le sentiment de travailler pour la culture de notre pays.

Monsieur le Président, Mesdemoiselles, Mesdames et Messieurs, je vous invite, maintenant, si vous le voulez bien, à déguster la Galette et je vous renouvelle, une fois encore et de tout coeur, mes voeux de très bonne et de très heureuse année !





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