Allocution du Président de la République à l'occasion du dîner d'État offert en l'honneur du Président du Guatemala et Mme Alvaro ARZU IRIGOYEN.

Allocution prononcée par M. Jacques CHIRAC, Président de la République, à l'occasion du dîner d'État offert en l'honneur du Président de la République du Guatemala et Mme Alvaro ARZU IRIGOYEN.

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Palais de l'Elysée, le lundi 19 avril 1999

Monsieur le Président,

Madame,

Soyez les très bienvenus en France et dans notre capitale que vous connaissez bien. L'automne dernier, c'est moi qui étais votre invité. Pour la première fois, un chef d'Etat français foulait le sol guatémaltèque. Pour la première fois, je posais le pied en terre maya, dans cette " Egypte du Nouveau Monde ", où s'épanouit jadis la plus prestigieuse des civilisations de la Méso-Amérique. Pourrai-je jamais oublier ces instants, cette émotion poignante à chaque étape de ma visite ?

L'émotion de l'amitié. La vôtre, Monsieur le Président, et celle de vos compatriotes, alors même que votre beau pays, blessé par l'ouragan " Mitch ", s'employait avec courage et dignité à panser ses plaies. L'émotion lorsque nous avons rencontré ensemble les victimes de cette tragédie. J'ai pu mesurer toute la douleur des Guatémaltèques et combien votre pays, pour se relever, a besoin de la solidarité des nations.

L'émotion encore quand, à l'invitation de mon amie, Madame Rigoberta MENCHU, prix Nobel de la paix et ambassadeur de bonne volonté de l'UNESCO, j'ai rencontré les artistes amérindiens qui sont les héritiers de la sensibilité, de l'histoire, des savoirs du peuple maya.

L'émotion enfin de découvrir un peuple qui se rassemble après tant et tant d'années d'affrontements et de souffrances, pour qu'à la violence succède une culture de paix, une culture démocratique.

Je vous avais alors invité à faire à votre tour le voyage de la France. Et vous voilà, ce soir, l'hôte d'honneur des Français, heureux et fiers d'accueillir en vous l'ami et l'homme de paix, le démocrate qui a réconcilié son peuple.

Car vous êtes d'abord et avant tout, Monsieur le Président, l'homme de la paix. A ce titre, vous avez été honoré par la communauté des nations qui vous a remis ici même, à Paris, en juin 1997, à l'Unesco, le prix Houphouët-Boigny pour la paix, quelques mois après la signature, sous votre égide, des accords mettant fin à trente-six années de déchirements fratricides.

Depuis deux ans, votre pays a engagé un courageux processus de réconciliation nationale. Il poursuit résolument sa marche vers la démocratie. Vous et nous savons que le chemin sera long et difficile. C'est une tâche de longue haleine, qui demande l'engagement de tous les Guatémaltèques.

C'est le sens, Monsieur le Président, de l'appel au pardon que vous avez lancé le 29 décembre dernier, pour le second anniversaire de la paix. Le Guatemala, meurtri, a entrepris le douloureux mais nécessaire travail de mémoire sur ces années noires dont la Commission pour l'éclaircissement historique, par son récent rapport, vient de révéler toute l'horreur.

Il faut maintenant aller de l'avant. Ne rien oublier du passé, pour que jamais ne revienne la violence, mais aussi regarder vers l'avenir, mobiliser toutes les énergies pour bâtir le développement. Travailler sans relâche à l'affermissement de l'Etat de droit et à la patiente élaboration d'une société nouvelle, tolérante, fraternelle, qui rassemble tous ses fils, par-delà les origines ethniques et culturelles. C'est cette voie que le Guatemala a choisie sous votre impulsion. Naturellement, la France se tient à vos côtés.

Et lorsque votre pays a été victime de " Mitch ", un puissant mouvement de solidarité, venu de toute la France, a immédiatement répondu aux terribles images de désolation et de détresse humaine qui nous parvenaient.

A l'occasion de ma visite, j'ai pu vous transmettre alors le message de solidarité du peuple français. Je le renouvelle aujourd'hui : la France est avec vous pour vous aider à reconstruire.

J'avais lancé, le 15 novembre, à Guatemala, au cours de notre conférence de presse conjointe, un appel à une solidarité renforcée de la communauté internationale, en proposant la tenue d'une grande conférence pour la reconstruction de l'Amérique centrale. A côté de son aide financière immédiate, la France décidait d'annuler la totalité de ses créances d'aide publique sur les pays dévastés. Et j'en appelais aux pays créanciers du Club de Paris.

Aujourd'hui, je constate avec plaisir que la communauté internationale vous a non seulement apporté une aide importante durant la phase d'urgence, mais qu'elle entend également appuyer le Guatemala et tous les pays sinistrés dans leurs efforts de reconstruction.

Vous le savez, Monsieur le Président, mes compatriotes souhaitent qu'une solution définitive soit enfin trouvée au lancinant problème de la dette. J'ai présenté le mois dernier, devant l'assemblée générale de la Banque interaméricaine de développement, les propositions de la France. Elle les défendra, en mai prochain, à Stockholm, lors de la réunion des pays donateurs. Puis au Sommet du G7 à Cologne, en Allemagne.

Ce problème de la dette, nous l'aborderons aussi, en juin prochain, à Rio, lors du premier Sommet de l'Histoire entre les chefs d'Etat et de Gouvernement de l'Amérique latine et de l'Europe. Nous y jetterons de nouveaux ponts, économiques mais aussi politiques et culturels, entre nos deux rives de l'Atlantique. Nous y bâtirons un grand partenariat pour le siècle prochain.

En Amérique latine comme en Europe, les nations se rapprochent, nouent de nouvelles solidarités et s'organisent en ensembles régionaux puissants qui s'affirment comme des pôles de paix, de démocratie, de prospérité et de progrès. C'est en développant d'ambitieuses relations entre nos ensembles que nous construirons un monde multipolaire, équilibré et en paix.

Vous, Guatémaltèques, qui abritez le siège du Marché commun centraméricain et qui jouez un rôle actif dans ce processus d'intégration régionale, et nous, Français, qui avons été les pionniers de l'Union européenne et qui militons aujourd'hui pour une Europe forte et unie, vous et nous travaillons main dans la main pour réussir notre rendez-vous de Rio.

Monsieur le Président, c'est en vous assurant une fois encore de l'entière solidarité de la France, et c'est en pensant à l'avenir, cet avenir que nous allons partager davantage et qui fait naître de nouvelles espérances, que je vais maintenant lever mon verre.

Je le lève en l'honneur de l'homme de paix, mon ami le Président Alvaro ARZU IRIGOYEN et en l'honneur de Madame ARZU IRIGOYEN, à qui je présente mes très respectueux et très affectueux hommages. Je vous souhaite, Monsieur le Président, Madame, un heureux séjour dans notre pays.

Je lève mon verre en l'honneur des hautes personnalités guatémaltèques et françaises qui nous font l'amitié d'être des nôtres ce soir. Je lève mon verre au bonheur et à la prospérité du peuple guatémaltèque, en lui souhaitant de réussir la paix et la reconstruction. Je bois enfin à l'amitié entre le Guatemala et la France.

Vive le Guatemala !

Vive la France !

Et vive notre amitié.





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