Allocution du Président de la République prononcée à l'occasion de la remise de décorations aux champions de la Coupe du monde de football 1998.

Allocution prononcée par M. Jacques CHIRAC président de la République à l'occasion de la remise collective de décorations aux champions de la Coupe du monde de football 1998.

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Palais de l'Elysée - Mardi 1er septembre 1998


Messieurs les Champions du Monde,

Monsieur le Premier Ministre,

Madame la Ministre,

Mesdames, Messieurs,

Aujourd'hui, l'Elysée, la Maison de la République, accueille le rêve, la fierté, l'émotion partagée.

En recevant ses champions, qui ont incarné, si bien et si fort, l'ambition d'une nation unie, la Maison-France renoue avec un passé qui est toujours violemment présent dans les coeurs.

Sept semaines se sont écoulées depuis les inoubliables journées que vous nous avez fait vivre en juillet. Sept semaines pour prendre la mesure des événements qui nous ont portés sur les cimes. Sept semaines pour choisir, parmi tant d'images et de symboles, ceux que nous garderons dans notre mémoire collective.

Mais en cette rentrée, je ne souhaite pas seulement parcourir avec vous un album de souvenirs si chers soient-ils. Dans la sérénité qui a suivi l'exaltation de la victoire, je veux saluer d'abord tous ceux qui ont contribué à l'extraordinaire réussite de cette Coupe du Monde 1998.

C'est un hommage solennel que je veux adresser à chacun, pour une belle, une grande, une magnifique aventure qui a fait vibrer tout un peuple.

Une aventure commencée il y a six ans, mais qui avait pris naissance bien avant dans l'esprit d'un homme, Fernand SASTRE.

Fernand SASTRE, Michel PLATINI, le Préfet Jacques LAMBERT, tels sont les membres d'une triade d'exception qui réunissait l'expérience, l'enthousiasme, le charisme, trois qualités essentielles pour porter pendant six longues années, de façon magistrale, l'organisation de la Coupe du Monde.

C'est pourquoi, au moment où j'adresse, au nom de tous les Français, mes félicitations les plus chaleureuses au Comité d'Organisation, j'ai une pensée forte pour Fernand SASTRE, grâce à qui tout est arrivé.

A Michel PLATINI, je veux dire ma reconnaissance et les voeux que je forme pour sa nouvelle mission. Tous les passionnés du ballon rond se réjouissent de le voir, aux côtés du Président BLATTER, mettre ses qualités et ses vertus au service du football mondial.

Je tiens aussi à remercier Claude SIMONET, le Président de la Fédération et Noël LE GRAËT, le Président de la Ligue, qui, tous les deux, ont apporté leur soutien efficace et sans réserve à cette entreprise.

Je veux également saluer toutes celles et tous ceux, si nombreux, qui, par amour du sport, par amour du beau geste, par passion, ont donné leur temps, leur énergie, leur désir à la Coupe du Monde. Bénévoles, spécialistes de la sécurité, responsables et agents des collectivités locales, chacun, dans les dix villes qui ont accueilli la Coupe, s'est efforcé de donner de la France un visage dont elle soit fière.

C'est grâce aux efforts de tous que la Coupe du Monde s'est déroulée dans une ferveur maîtrisée, même si elle a pu être assombrie par quelques violences aveugles et je sais que chacun de nous se réjouit des bonnes nouvelles qui nous sont parvenues sur l'état de santé du gendarme Daniel NIVEL.

Je souhaite enfin féliciter ceux dont les images remarquables ont donné à rêver à des milliards de téléspectateurs et ont porté, au bout du monde, en même temps que les exploits des joueurs, le rayonnement de la France.

Mais au-delà d'une organisation sans faille, au-delà d'un accueil digne de notre pays, la Coupe du Monde 1998 est une extraordinaire conjonction de rêve et de réalité.

J'ai eu la chance de partager avec vous, Messieurs les Champions, des moments privilégiés où les exploits sportifs se transforment en épopée nationale et en aventure humaine.

L'un de ces moments forts a été sans conteste le 28 janvier à Saint-Denis, lors de l'inauguration du Stade de France. Dans un stade glacé, où la pelouse gelait, l'équipe de Didier DESCHAMPS jouait pour gagner. Un potentiel formidable laissait espérer, avec une température plus clémente, du spectacle, du grand jeu, du beau jeu.

En marquant ce jour-là le premier but de l'histoire du Stade, Zinédine ZIDANE assurait à la France une victoire prophétique.

Notre rencontre du 4 juin dernier a été un autre de ces moments rares. C'était quelques jours avant le début de la Coupe du Monde, dans l'intimité de Clairefontaine, une retraite hors du temps, hors du monde. Et là, en vous observant à votre entraînement, en bavardant ensuite avec vous au cours de notre dîner, j'ai vu une équipe soudée, déterminée, tendue vers la victoire, sereine. Est-il utile de vous dire que le numéro 23 que vous avez accueilli ce soir-là, a été conforté dans son espérance ?

Cher Didier DESCHAMPS, j'ai redoublé d'ardeur dans mon entraînement quotidien à vous remettre la Coupe.

Puis la compétition a commencé.

Sept matches, sept victoires. Chaque succès vous faisait plus forts, plus ardents, plus déterminés.

Cela n'a pas été facile. Il y a eu des déceptions. Des coups du sort, des contrariétés. Mais vous n'avez rien concédé. Huitièmes, quarts, demi-finale, une formidable montée en puissance vous a conduit jusqu'au face-à-face avec la Seleção. Et vous êtes devenus les premiers Tricolores à être sacrés Champions du Monde.

Un livre célèbre avait pour titre "Le hasard et la nécessité". Dans cette épopée, la nécessité l'a emporté sur le hasard. Vous êtes Champions du Monde parce que vous l'avez mérité.

Ce qui a donné la victoire, c'est le triomphe de la volonté, de la continuité dans les choix et dans l'action, un sens rare du jeu ensemble. Pas d'amateurisme. Nulle promesse. De la rigueur. Du professionnalisme. La combinaison délibérée de l'effort, de la discipline, de l'intelligence et de l'action.

Vous êtes aussi Champions du Monde parce qu'il l'a mérité. Ce bloc qui, soudé, solidaire, a parcouru les sept étapes du sacre, c'est Aimé JACQUET qui l'a révélé à lui-même.

Il vous a donné la confiance. Le goût du travail bien fait, du bonheur collectif, de l'amitié. Il a été exigeant, très exigeant. Il vous a demandé de devenir ce qu'il rêvait que vous soyez : attentifs, organisés, fraternels, audacieux. En bref, il voulait que vous soyez les meilleurs. Et vous l'êtes devenus.

Un, deux, trois-zéro : c'est la juste récompense d'une conquête entreprise à la manière patiente, discrète, intelligente, obstinée d'Aimé JACQUET et de sa garde rapprochée et conduite par 22 joueurs d'exception.

A l'issue des matches de la phase éliminatoire, Zinédine ZIDANE avait confié : " on a fait quelque chose de bien. On peut faire quelque chose de grand et on peut faire quelque chose de très grand... "

Vous avez tous tenu parole. Vous avez mené à son terme une magnifique aventure. Vous nous avez donné une belle, une superbe leçon de courage, de fierté, de persévérance, de fraternité.

Je voudrais qu'en cette rentrée, où les Français retrouvent les contraintes du quotidien et les préoccupations de chaque jour, le souffle de la Coupe du Monde soit toujours dans les coeurs. Non pour évoquer seulement un grand exploit sportif, mais pour aborder les semaines et les mois qui viennent avec un regard différent, avec un moral de vainqueur. Quand la France veut, elle peut. Quand la France prend confiance, elle avance, elle marque des points, elle gagne. Quand la France s'aime, elle est aimée et admirée du monde.

Telle est la principale leçon de la Coupe du Monde.

Au moment où d'autres aventures vous attendent autour de Roger LEMERRE, je voudrais vous dire la gratitude de la France pour l'exemple que vous avez donné.

Merci les Bleus pour ces moments uniques que vous nous avez fait vivre. Merci pour ce bonheur immense. Merci pour la leçon de tolérance et d'humanité que vous nous laissez. Merci pour l'image de la France et pour l'ambition que vous avez imprimée dans notre coeur.





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