Discours du Président de la République à Atar, Mauritanie.

Discours de M. Jacques CHIRAC, Président de la République à Atar en Mauritanie.

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Atar, Mauritanie, le samedi 6 septembre 1997

Monsieur le Président de la République islamique de Mauritanie, mais aussi parce que nous nous connaissons depuis longtemps et que nous nous voyons souvent, Cher Ami,

Messieurs les Ministres,

Monsieur le Gouverneur,

Monsieur le Maire, avec qui nous avons des relations amicales nouées au sein de l'Association internationale des maires francophones, une des associations qui pratique la solidarité. Une autre est ici aujourd'hui, représentée par Monsieur le Ministre Sapin, "Cités unies France" qui a également des relations de coopération étroite avec la ville d'Atar et bien d'autres d'ailleurs en Mauritanie et en Afrique.

Je voudrais tout d'abord, Cher Monsieur le Maire, vous remercier très chaleureusement pour vos paroles de bienvenue. Par votre intermédiaire, je tiens à exprimer toute ma gratitude, ma très grande gratitude à la population d'Atar et de cette superbe région pour un accueil aussi chaleureux, pour un accueil superbe, pour un accueil amical et fraternel qui caractérise bien la relation qui existe entre nos deux peuples mauritanien et français.

C'est avec émotion que je m'exprime ici, dans la superbe ville d'Atar, ville historique, ville phare de l'Adrar, cette ville au passé glorieux d'où partirent, il y a maintenant plus de neuf siècles, vous l'avez évoqué Monsieur le Maire, les Almoravides, un peuple de bâtisseurs qui, du désert jusqu'aux rivages de l'Espagne, imprégnèrent de leur culture ces vastes espaces.

Des peuples se sont ainsi mêlés, de part et d'autre de la Méditerranée, offrant au monde des civilisations d'une exceptionnelle richesse. Un monde qui au titre de sa culture, doit beaucoup à votre peuple et à votre région.

La France elle-aussi vous a rencontrés et vous avez conquis son coeur et sa mémoire. De nombreux Français, vous l'avez évoqué tout à l'heure, Monsieur le Maire, ont été fascinés par votre ville. L'un d'eux, Ernest Psichari, la décrivait comme une cité " où se brassent les passions ".

Depuis plus de cinquante ans qu'il parcourt votre pays au gré de ses méharées, c'est une attirance toujours intacte que Théodore Monod, ce grand Français ressent pour cette contrée dont il a dit malicieusement : " l'Adrar mauritanien est mon diocèse ". Enfin, Pierre Messmer, ancien Premier Ministre, que je suis heureux d'avoir à mes côtés, pourrait témoigner de cet attachement, lui qui a exercé dans votre ville, dans votre pays, de hautes responsabilités et qui a été si profondément marqué dans sa personnalité, dans son coeur, par la beauté de cette région et la qualité de son peuple.

C'est sans doute que la France, et c'est une singularité qu'elle revendique, a toujours été soucieuse d'assurer la pérennité des liens qu'elle a pu tracer, tisser au travers de l'histoire. C'est dans cet esprit qu'elle a mis en place une politique de coopération qui se veut active, efficace, proche des besoins des populations, en un mot vivante, et expression d'un véritable partenariat. Vous me permettrez d'exprimer ma reconnaissance au Président de la République islamique de Mauritanie, le Président Ould Taya qui, par ses conseils, par l'expérience qui est la sienne, notamment l'expérience du terrain et du développement, a compté pour beaucoup dans la réflexion des gouvernements français pour ce qui concerne l'adaptation permanente de notre coopération.

Pour que cette coopération soit vivante et elle l'est, puisqu'elle s'appuie sur un dialogue avec les populations.

Ce sont les autorités locales, vous, Monsieur le Maire, vous, Monsieur le Gouverneur, proches des femmes et des hommes du pays, qui font connaître leurs besoins et leurs aspirations en matière de santé, d'éducation, de projets de développement, de soutien aux initiatives économiques ou sociales. Et c'est dans ce dialogue noué, par votre intermédiaire, entre nos deux pays, entre des villes de nos deux nations, entre des Associations, celles que je citais tout à l'heure ou d'autres encore, c'est dans ce dialogue noué par l'intermédiaire des représentants de la population que prennent corps les projets qui sont au coeur de notre commune volonté de coopération. La décision d'agir ensemble et en confiance, en se respectant mutuellement, s'étend à de nombreux secteurs où la Mauritanie souhaite intensifier notre coopération. Ainsi, dans votre ville, à Atar, nous nous sommes attachés à la réhabilitation de l'hôpital. Notre AIMF que j'évoquais tout à l'heure, Monsieur le Maire, travaille à la rénovation du marché central qui va bientôt débuter. D'autres projets, Monsieur Sapin m'en parlait, sont actuellement en cours ou à l'étude. Nous soutenons aussi le projet qui vise à préserver l'économie des oasis. Il s'agit d'assurer le maintien des palmeraies, qui produisent ces excellentes dattes qui sont un des éléments de la réputation et de la qualité de votre culture, de votre civilisation et dont la "Guetna" vient de se terminer, qui créent de surcroît un environnement humide, favorable aux autres cultures. Enfin, notre coopération militaire prête son concours au Commandement de l'Ecole Militaire Interarmes qui a pour mission, comme l'indique sa belle devise, de " former pour servir ".

J'ai rappelé hier à Nouakchott nos efforts communs, notre coopération dans le domaine primordial de l'eau.

C'est parce qu'elles ont accès à l'eau que des familles peuvent se fixer dans leur village, y vivre, se nourrir, développer leurs cultures et ceci sans problème pour leur santé. Nous en avons longuement parlé avec le Président de la République islamique, hier, à l'occasion de longs entretiens que nous avons eus pour enrichir et poursuivre la coopération entre nos deux pays. C'est parce qu'ils savent qu'ils disposeront d'eau que les enfants, rassurés, peuvent envisager de se maintenir sur leur terre, sur leur sol qu'ils aiment et qui détient leurs racines. L'eau constitue véritablement l'un des premiers, l'un des plus grands défis qu'affronte la Mauritanie d'aujourd'hui et avec elle, on peut le dire, l'ensemble de la planète.

La France veut être présente, à vos côtés, pour relever ce défi. Hier, j'ai évoqué l'alimentation en eau potable de Nouakchott. J'ai mentionné l'important engagement de la Caisse Française de Développement pour financer, avec d'autres bailleurs de fonds, les aménagements nécessaires du barrage de Manantali sur le fleuve Sénégal ainsi que, à la fois, les précautions et le respect que l'on doit avoir pour l'eau du fleuve afin qu'elle se répartisse équitablement, et d'un commun accord, entre les pays concernés.

Dans quelques instants, le Président Ould Taya et moi-même, nos amis et collaborateurs au premier rang desquels, bien entendu, le Ministre français des Affaires étrangères, Monsieur Hubert Védrine qui est venu d'ailleurs avec son épouse marquant ainsi un attachement personnel à votre pays et je l'en remercie, visiterons la retenue d'eau de Tayaret qui a été réalisée dans le cadre de notre coopération Monsieur le Président. Cette réalisation, comme les sept autres qui ont déjà été mises en service dans le cadre toujours de notre coopération, dans cette zone, permettra l'extension des cultures vivrières et maraîchères, celles de l'orge, ou du mil.




Expression d'une solidarité, la coopération, parce qu'elle mobilise des ressources financières, a aussi ses exigences. Elle constitue un véritable contrat passé entre les partenaires et au total, dans leur intérêt commun. Il faut que ce contrat, qui porte sur la bonne utilisation des ressources, soit bien exécuté, par chacune des parties. Je peux vous dire que c'est l'esprit dans lequel la Mauritanie et la France travaillent ensemble.

Cette confiance et ce respect des engagements qui sont à la base de toute coopération, conduisent à ce partenariat que j'appelle de mes voeux, que votre Président appelle de ses voeux, que l'Europe et l'Afrique ont pour vocation de développer. Ce partenariat, actif, je le répète mutuellement utile, prend des formes très diverses. Il est technique : c'est le travail de terrain, pour que l'étude des solutions soit faite à la base, avec les populations concernées et leurs représentants élus. C'est aussi un partenariat financier, qui fournit les appuis nécessaires à la réalisation des projets définis en commun. C'est ensuite un partenariat politique, qui s'exprime par des échanges de vues réguliers par la coordination de nos positions, par notre enrichissement réciproque grâce à la réflexion et au dialogue partagés. C'est enfin un partenariat humain, qui se développe à travers les échanges multiformes que créent entre les peuples les relations amicales liées au fil du temps, les contacts d'affaires, les bourses universitaires, le tourisme. Il s'agit, en fait, de parvenir à créer, ensemble, une chaîne de solidarité, de connaissance mutuelle, d'ambition partagée.

Il s'agit enfin, de répondre à l'un des grands défis du monde moderne marqué par une mondialisation qui a ses bons et ses mauvais côtés, défi qui consiste à ne pas accepter ni dans nos nations, ni à l'échelle de la planète de citoyens ou de pays, qu'il soit marginalisé par l'histoire.

Il y a non seulement une exigence morale, mais aussi une exigence politique liée à la stabilité, à la paix qui veut que la solidarité, aujourd'hui, dans le cadre de cette mondialisation, connaisse un élan nouveau, des méthodes nouvelles et surtout une plus grande prise de conscience des réalités, et une plus grande générosité de ceux qui ont les moyens à l'égard de ceux qui ne les ont pas.

En réalité, dans le monde, ce n'est pas tellement la richesse qui manque, c'est plutôt le partage.

Dans cette chaîne, le prochain maillon pourrait être l'Alliance française qui, me dit-on, verrait le jour, ici, à Atar avant la fin de l'année. Je m'en réjouis car j'y vois, à travers une institution qui incarne, partout dans le monde et depuis plus d'un siècle, le dialogue des cultures. J'y vois un nouveau symbole de l'amitié active entre la Mauritanie et la France.

Ici, Cher Monsieur le Maire, Cher Ami, dans votre ville et devant vous. Monsieur le Président de la République islamique de Mauritanie, vous même, l'un des fils illustres de la ville d'Atar, devant vous, mon Cher Ami, je renouvelle le salut fraternel de la France au peuple mauritanien, aux femmes et aux hommes de ce pays, unis, dans leur diversité, par un même attachement à leur nation, conscients de la vieille culture dont ils sont à la fois porteurs et comptables à l'égard de l'avenir, et aussi par leur volonté d'oeuvrer pour son développement.

Monsieur le Président de la République, mon Cher Ami, Monsieur le Gouverneur, Monsieur le Maire, Mesdames, Messieurs, et surtout tous les habitants d'Atar et notamment toutes ces jeunes filles, ces jeunes garçons que j'ai entendu tout à l'heure, chanter avec tant de talent et qui évoquent bien ce pays qui, dans le monde arabe, dans le monde tout court, est aussi appelé "le pays aux millions de poètes".

Merci, du fond du coeur, pour cet accueil que vous avez bien voulu réserver à la délégation française et donc à mon pays. Merci pour l'hospitalité si amicale que vous offrez, je dois le dire, avec force, avec la noblesse et l'élégance de vos traditions.

Vive Atar

Vive la Mauritanie

Vive l'amitié entre la Mauritanie et la France.





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