Discours du Président de la République à l'occasion du sommet entre l'Alliance atlantique et la Russie.

Discours de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, à l'occasion du sommet entre l'Alliance atlantique et la Russie.

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Palais de l'Elysée, le mardi 27 mai 1997

Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement,

Monsieur le Secrétaire Général,

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,

Mesdames, Messieurs,

Il est des moments où l’Histoire marque une pause pour s’engager sur une voie nouvelle. Il est des moments où se joue le devenir des peuples, et ceci pour plusieurs générations. Ce Sommet est l’un de ces rendez-vous que l’Histoire se donne à elle-même. Aujourd’hui, nous bâtissons la paix.

Pour la première fois, les plus hauts responsables des pays de l’Alliance atlantique et de la Russie sont réunis pour porter ensemble une grande ambition : garantir en Europe une paix fondée sur nos valeurs communes et sur la conscience d’un destin partagé.

En signant tout à l’heure l’Acte fondateur d’une nouvelle organisation européenne de sécurité, dans laquelle la Russie occupera toute sa place, nous tournerons la page d’un demi-siècle d’incompréhension, de confrontation, de division sur notre continent.


Bâti sur les ruines de la seconde guerre mondiale, l’ordre issu de Yalta avait conduit à une paix injuste, préservée par l’équilibre de la terreur. La France, dès l’origine, par la voix du général de GAULLE, avait refusé cette division contre nature.

Il y a huit ans, l’effondrement du mur de Berlin créait l’espoir d’une Europe enfin réconciliée. Il s’agit aujourd’hui de tirer les ultimes conséquences de ce mouvement de l’histoire en faisant disparaître les derniers vestiges de la guerre froide. A la logique de confrontation entre adversaires d’hier, succède une ère de coopération entre partenaires égaux et respectés. Comme le souhaitait la France en lançant cette initiative, l’accord de Paris ne déplace pas la ligne de fracture de Yalta. Il l’efface définitivement.


Cet accord est possible parce que la Russie et l’OTAN ont entrepris de profondes transformations.

La Russie a confirmé, en juillet de l’année dernière, le choix de la démocratie et des réformes. Avec le Président Boris ELTSINE, elle s’est engagée dans un processus courageux de modernisation et de démocratisation.

Aujourd’hui, ce très grand pays, qui a tant apporté à notre histoire et à notre culture, devient pour l’Alliance atlantique un partenaire essentiel, comme il l’est déjà pour l’Union européenne.

L’Alliance atlantique, elle aussi, a engagé une grande réforme, la première de cette ampleur depuis sa création. L’OTAN, conçue à l’origine pour faire face à une menace précise et massive, se dote d’une organisation plus légère, plus flexible, adaptée à ses nouvelles missions de gestion des crises et de maintien de la paix. Cette Alliance qui se rénove et se rééquilibre n’est plus celle de la guerre froide. Les Européens devront pouvoir y exercer pleinement leurs responsabilités.

Instaurées par cet Acte fondateur, la concertation permanente, la transparence et la coopération à tous les niveaux entre les Alliés et la Russie, contribueront à effacer les réflexes du passé. Elles ancreront dans les habitudes et les mentalités cette confiance qui fondera notre partenariat. Elles doivent donner une nouvelle impulsion aux négociations de désarmement.


Le renforcement du rôle et des moyens de l’OSCE permettra d’inscrire l’élargissement de l’Alliance atlantique dans un cadre plus vaste, rassemblant, à égalité de droits et de devoirs, tous les pays de la " Grande Europe ". Deux priorités doivent les mobiliser : l’adaptation du Traité FCE et l’élaboration d’une Charte sur la sécurité européenne.

Le partenariat développé par l’OTAN et l’UEO avec les pays qui n’en sont pas membres concourt au même objectif : réunir enfin notre grande famille européenne.

Dans le même esprit, je renouvelle la proposition que j’avais faite il y a près d’un an : convier au prochain Sommet de l’Alliance atlantique, les 8 et 9 juillet à Madrid, l’ensemble des Etats européens qui auront un lien avec l’Alliance, à commencer, bien sûr, par la Russie.


Une organisation de sécurité capable de garantir durablement la paix en Europe suppose une coopération solide et confiante entre l’Union européenne, l’Amérique du Nord et la Russie.

Le processus de paix dans l’ancienne Yougoslavie témoigne de cette nécessité. C’est à partir du moment où Américains, Européens et Russes ont su coordonner leurs efforts que nous avons pu progresser vers le règlement du conflit et signer ici même, le 14 décembre 1995, l’accord de paix sur la Bosnie-Herzégovine. La coopération sans précédent nouée sur le terrain entre nos pays, avec nos autres partenaires, reste nécessaire pour traduire dans les faits notre volonté commune d’enraciner la paix en Bosnie.

Au-delà de notre continent, notre partenariat sera, j’en suis convaincu, un élément essentiel de la stabilité et de l’harmonie du monde multipolaire qui s’ébauche.

Une Union européenne renforcée et élargie, un lien transatlantique renouvelé avec nos amis et alliés américains, une Russie forte et démocratique sont indispensables à la paix et à l’équilibre international.


L’Acte fondateur que nous allons signer ouvre un nouveau chapitre de l’histoire de l’Europe. Un chapitre sans précédent parce qu’il exprime une même vision de l’avenir.

Je rends hommage à la hauteur de vue du Président Bill CLINTON, du Président Boris ELSTINE, du Chancelier Helmut KOHL et de tous les chefs d’Etat et de Gouvernement présents aujourd’hui. Leur engagement personnel a rendu possible cet accord. Je tiens aussi à exprimer, en notre nom à tous, notre estime et notre gratitude au secrétaire général de l’Alliance atlantique, M. Javier SOLANA.

Notre accord est un succès pour la Russie, pour l’Alliance atlantique, pour l’Europe. Mais il est d’abord et avant tout un succès pour la paix et aussi une grande espérance pour les peuples.

Je vous remercie.





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