Réponse du Président de la République à l'allocution de bienvenue du Maire d'Arras.

Réponse de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, à l'allocution de bienvenue de M. VANLERENBERGHE, Maire d'ARRAS.

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Hôtel de Ville d'Arras, le dimanche 29 septembre 1996

Monsieur le Maire,

Mesdames et Messieurs les Elus,

Je voudrais d'abord vous remercier de votre accueil auquel je suis sensible.

Vous avez dit, tout à l'heure, que les hommes du Nord, du Pas-de-Calais, que les Arrageois en particulier étaient des personnalités chaleureuses, et c'est vrai. Je suis toujours frappé lorsque je viens ici dans cette région, par la qualité du coeur des hommes et des femmes, dans le propos dans le regard, dans la manière d'aborder, même dans la manière de se disputer parfois, ou de contester. Il y a quelque chose de profondément cordial au sens authentique du terme qui se dégage de cette région, de ce département, et en particulier de cette ville bien entendu.

On a toujours un peu l'impression que le Pas-de-Calais est une région rude, profondément marquée par les épreuves, par les grandes activités traditionnelles qui ont disparues. En vérité, c'est une région qui, c'est vrai, doit surmonter des difficultés importantes, mais qui tout de même, aujourd'hui se présente avec des atouts non négligeables. C'est une région où la population est importante, où elle est jeune, ce qui naturellement peut être examiné sous l'aspect du nombre de jeunes chômeurs, aujourd'hui. Mais qui peut l'être aussi, sous l'aspect d'une réalité selon laquelle il n'y a pas de richesse autre que celle des homme et qu'un avenir se construit d'abord sur des jeunes, ils sont ici présents.

C'est une région qui a une situation géographique exceptionnelle. Quand je dis région je parle en réalité du Pas-de-Calais, qui est aussi grand qu'une région. C'est une région qui a une tradition industrielle forte, qui a un potentiel agricole important, qui a une façade maritime considérable, qui se trouve aujourd'hui à la conjonction d'équipements importants, le tunnel, les autoroutes, le TGV. C'est une région qui voit monter en puissance, les universités de l'Artois et du littoral, et c'est une région qui est loin d'être dépourvue des moyens de surmonter la crise qu'elle connaît encore aujourd'hui.

Vous disiez dans votre propos, Monsieur le Maire, qu'il y avait dans certains secteurs un potentiel de développement, -vous avez cité l'agro-alimentaire, ce qui est tout à fait évident-, très important dans cette région, pour peu que l'on sorte du marasme actuel, que l'on réussisse à surmonter les difficultés dues essentiellement à une insuffisante croissance dans notre pays.

On parle beaucoup des problèmes de croissance, on y voit l'origine d'une part importante du fléau du chômage et on a raison. Vous savez, je crois que nous ne porterons pas de coups sérieux au fléau du chômage si nous ne faisons pas en sorte que la croissance reparte. Certes, elle est conditionnée par l'environnement international et cela nous n'y pouvons pas grand chose. Mais elle est conditionnée aussi par d'autres choses.

Je suis frappé en voyageant à l'étranger, de voir l'extraordinaire capacité qui est la nôtre à exporter, que nous n'utilisons pas toujours autant qu'il le faudrait. La croissance il faut aller la chercher là où elle est. Elle se trouve notamment aujourd'hui et, puissamment dans les pays émergeants d'Asie, d'Amérique Latine.

La France, qui est le deuxième pays exportateur du monde par tête d'habitant, et le quatrième exportateur en valeur absolue, qui est le deuxième exportateur de services, a sa croissance conditionnée pour une large part, par la possibilité d'augmenter très sensiblement ses exportations.

Mais ce ne sera pas suffisant naturellement, la croissance c'est aussi le comportement de chacune et de chacun d'entre nous et ce comportement ne peut véritablement s'épanouir que sur le plan local. Je ne parle pas de la croissance internationale, mais sur le plan local. Nous voyons aujourd'hui trop de contraintes de toutes natures, qui freinent les opportunités d'épanouissement, d'engagement de projets personnels, de tout ce qui fait une croissance au plus près des gens. Je suis frappé de voir que les sondages indiquent, que plus de la moitié, -près des deux tiers- des jeunes souhaiteraient se mettre à leur compte, en créant une entreprise ou une association, tout ce qui fait l'activité. Mais au fond, ils sont découragés par des structures trop rigides, par une inadaptation de notre système à la libération des initiatives sans lesquelles rien ne peut se faire. Si bien qu'aujourd'hui, nous voyons bien que si nous voulons renouer avec la croissance, il nous faut régler deux problèmes majeurs, qui sont deux difficultés de la France : la première, c'est de redresser nos finances publiques que nous avons trop longtemps laissés dériver. Cela ne s'était pas vu du temps de la forte croissance, parce que l'inflation et la croissance effaçaient les inconvénients d'une gestion laxiste. Aujourd'hui, nous sommes au pied du mur, et nous ne retrouverons pas il faut le savoir, la croissance et donc l'emploi si nous ne redressons pas nos finances publiques, si nous ne diminuons nos déficits, si nous ne cessons pas d'augmenter nos dettes, parce que cela veut dire, lorsqu'on augmente ses dettes et ses déficits que l'on augmente les prélèvements obligatoires, fiscaux ou sociaux, pour les combler et que se faisant, un peu plus de fardeau est mis sur les épaules de ceux qui veulent travailler, investir, innover et créer la richesse et l'emploi et donc la capacité ensuite du progrès social.

La deuxième difficulté concerne l'inadaptation, il faut bien le dire de notre organisation administrative et gouvernementale. Je veux dire par là que nous avons fait et heureusement, la décentralisation, de ce point de vue l'objectif est atteint sous réserve de tel ou tel aménagement et adaptation mais nous n'avons rien fait en matière de déconcentration c'est-à-dire que nous continuons à avoir un système dans lequel l'essentiel des décisions qui devraient être prises au niveau de la ville, au niveau du département, est pris en réalité au niveau parisien avec l'incompétence évidente que cela implique et les délais que cela provoque. Là aussi, il y a une réforme de l'état qui est indispensable si l'on veut être plus efficace plus moderne plus efficient, c'est à cela que nous devons tous nous atteler et tous les élus sont directement concernés. Je parlais récemment avec des arrageois qui sont des industriels moyens, petits que j'avais rencontré et j'avais bien vu chez eux cette étonnante capacité, cette chaleureuse capacité d'initiative et cette espèce de regret de voir combien en réalité, ils étaient peut incités ou aidés à faire ce qu'ils devaient faire pour augmenter leur production, leur emploi, etc. Si je suis venu ici, Monsieur le Maire, passer ces deux jours c'est essentiellement pour étudier ou pour voir comment on pourrait alimenter ce deuxième moteur de la croissance, le premier étant celui de l'exportation. Ce deuxième moteur qu'est celui de la facilitation de l'initiative locale.

Voilà Monsieur le Maire pourquoi je suis venu dans le Pas de Calais et à Arras, je tiens à vous dire combien j'ai été à nouveau sensible à votre accueil et je vous en remercie.





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