Allocution du Président de la République lors du déjeuner offert par le Voefvode de Cracovie, Pologne.

Allocution de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, lors du déjeuner offert en son honneur par le Voefvode de Cracovie.

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Cracovie, Pologne, le vendredi 13 septembre 1996

Monsieur le Voïvode,

Mesdames et Messieurs,

Permettez-moi tout d'abord, Monsieur le Voïvode, de vous remercier pour la chaleur de votre accueil et vos paroles de bienvenue. Mon épouse et moi-même y avons été très sensibles.

En venant dans votre voïvodie, je mesure tout ce qui fait la grandeur de la Pologne.

J'y admire une ville et une région magnifiques ; une ville dont l'histoire prestigieuse se lit, comme à Paris, dans la pierre de ses bâtiments, dans son architecture et ses inestimables trésors qui constituent notre patrimoine culturel européen commun ; une ville dont la noblesse et la richesse sont un symbole de cette Pologne, soeur de la France.

Il y a quatre ans, j'étais alors Maire de Paris, je remettais à la jeune et brillante équipe de Cracovie le prix du concours " Contes et Légendes ". A travers ces récits traditionnels d'une région millénaire, s'exprime l'identité de votre nation.

Cette identité, je la retrouve aujourd'hui, ardente, inébranlable, éternelle. Comment n'être pas ému à l'écoute de cette "mélopée lente et lugubre", pour reprendre les mots de Pierre LOTI, mélopée douloureuse rappelant, du haut de l'Eglise Notre-Dame, les invasions meurtrières auxquelles, souvent, vos anciens dûrent faire face mais dont, toujours, ils surent se relever ?

Ici, dans la région de Cracovie, dans cette majestueuse Cathédrale de Wawel, veillent et reposent les grands hommes de la Pologne. Ici réside l'âme polonaise.

Oui, Monsieur le Voïvode, des vents puissants, ceux de l'Esprit et de l'Histoire, soufflent sur votre région.

Cracovie incarne cet esprit de résistance auquel nous, Français, restons profondément attachés. C'est de Cracovie que partit, en 1794, la grande insurrection patriotique de KOSCIUSZKO, héros de la liberté pour la Pologne et pour le monde, et citoyen d'honneur de la France.

A quelques lieues d'ici, Auschwitz témoigne de la souffrance, de la mémoire et de l'espérance de l'humanité. La souffrance des millions d'êtres humains, et d'abord des juifs, qui, au plus sombre de l'Histoire, disparurent dans les camps. Le devoir de mémoire qui s'impose au monde. Et l'espérance que jamais, plus jamais, nulle part, ne s'accomplisse une telle horreur. L'espérance que l'emporte, un jour, partout, l'esprit de tolérance et de paix.

C'est enfin chez vous, à Cracovie, qu'il y a mille ans, nos deux peuples tissaient leurs premiers liens d'amitié. Et en venant dans votre voïvodie, j'ai souhaité marquer l'ancienneté, la force et l'intensité de la relation qui unit la France et la Pologne.

Ici, eurent lieu les premiers échanges entre nos deux nations. Ici, dès le Xème siècle, les bénédictins de Cluny ouvrirent des monastères. Ici, en 1050, l'un de leurs prieurs, le Français Haron, fut nommé Evêque de Cracovie. Dans le même temps, de nombreux prélats polonais séjournèrent en France. La plus marquante de ces visites restera, sans doute, celle de l'Evêque Stanislas qui, pendant sept ans, fréquenta la Sorbonne.

Depuis, notre dialogue n'a cessé de s'approfondir. Aujourd'hui, grâce notamment à notre très dynamique Institut français, grâce à votre prestigieuse université jagellone au sein de laquelle, depuis toujours, s'étudient la langue et la culture françaises, penseurs, créateurs et chercheurs de nos deux pays peuvent se retrouver et nourrir leurs échanges.

Ensemble, assurons-nous que dans l'Europe qui se construit, cette Europe que nous voulons respectueuse des différences, des cultures et des valeurs propres à chaque nation, la culture polonaise et la culture française puissent dialoguer, comme elle l'ont toujours fait, et s'enrichir l'une de l'autre.

Mais notre longue fraternité s'étend bien au-delà des seuls domaines de la pensée et des arts.

Ainsi la France peut-elle vous aider à rebâtir votre administration. Mon pays s'est engagé sur la voie, longue et difficile, de la décentralisation et de l'aménagement équilibré de son territoire.

Au moment où vous-mêmes abordez votre propre réforme de l'administration territoriale, la France, par son expérience, les enseignements qu'elle a su en tirer, peut éclairer votre route.

Déjà, la France contribue à former les agents de vos collectivités territoriales. Une active coopération réunit les collectivités locales polonaises et françaises. Nous devrons, dans l'avenir, renforcer encore cette relation dont bénéficient nos concitoyens dans leur vie de tous les jours.

Enfin, Monsieur le Voïvode, je souhaite que mon pays, ses entrepreneurs, ses investisseurs s'engagent davantage dans votre région. Ce nouveau partenariat économique auquel j'appelle nos deux pays, c'est naturellement ici qu'il doit commencer de s'épanouir, dans cette voïvodie de Cracovie, berceau de notre amitié, chère au coeur des Français. Puissent les entreprises françaises y trouver les conditions favorables à leur développement et au vôtre !

Vous l'aurez compris, c'est dans tous les domaines que la France entend construire son avenir avec la Pologne. Et d'abord avec Cracovie que nous, Français, connaissons bien et aimons tant.

C'est fort de cette foi en l'avenir, notre avenir partagé, un avenir qui verra se réunir les forces vives de nos deux pays, que je vais maintenant lever mon verre.

Monsieur le Voïvode, je le lève en votre honneur et en l'honneur de nos hôtes. Je bois à la prospérité de votre région. Je bois au bonheur des Cracoviens et du peuple polonais tout entier. Je bois à l'amitié et à la coopération qui, depuis toujours, unissent la Pologne et la France !

Vive Cracovie !

Vive la Pologne !

Vive la France !





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