Toast prononcé par le Président de la République lors du déjeuner d'État offert en l'honneur du Président Nelson MANDELA.

Toast de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, prononcé lors du déjeuner d'État offert en l'honneur du Président Nelson MANDELA.

Palais de l'Élysée, le lundi 15 juillet 1996

Monsieur le Président,

La France est heureuse d'accueillir le chef de l'Etat d'Afrique du Sud, mais c'est aussi un privilège d'accueillir l'homme qui a rendu sa dignité à l'Afrique un continent pour lequel, vous le savez, la France a beaucoup d'amitié.

L'homme aussi qui s'est inscrit parmi les plus grands champions dans l'histoire de l'humanité, pour ce qui concerne la défense des droits et de la dignité des hommes. Egalement le prix Nobel de la Paix, mais aussi le jeune et nouveau Docteur honoris causa de la Sorbonne.

Monsieur le Président, la France est heureuse d'accueillir en vous l'un de ces chefs d'Etat qui ont écrit, de leur main et de leur sang, une page qui honore l'histoire de notre planète.

Hier, vous avez incarné le refus de l'infamie. Et par ce seul refus, vous avez abattu l'infamie.

A présent, vous engagez votre pays sur le chemin de la réconciliation, un chemin qui sembla longtemps impossible. Et vous réussissez.

Monsieur le Président, c'est la France aujourd'hui qui s'honore de vous accueillir. En son nom, je vous souhaite la bienvenue, dans ce que vous avez bien voulu appeler, hier, la patrie des droits de l'Homme. Les valeurs d'égalité, de liberté, de fraternité que nous avons forgées ici, il y a plus de deux siècles, vous les faites vivre aujourd'hui dans votre grand pays.

C'est dire que nous avons beaucoup de choses en commun : un héritage ancien, des idéaux, des conceptions. L'Afrique du Sud, la France : nous devons et nous pouvons faire des choses ensemble, car nos relations ne sont pas encore, c'est vrai, à la hauteur de ce qu'elles devraient être , vous l'avez souligné sur le plan de nos échanges, qu'ils soient économiques, politiques ou culturels.

La France entend être aux côtés de l'Afrique du Sud dans l'immense tâche de reconstruction que vous avez entreprise.

Reconstruction politique d'abord : lors des travaux de rédaction de votre loi fondamentale, constitutionnalistes français et sud-africains se sont rencontrés dans une coopération fructueuse qui, je l'espère, se poursuivra et s'élargira à d'autres domaines du droit et à une coopération administrative plus importante.

Reconstruction économique. L'Afrique du Sud a choisi un modèle de développement original, qui suscite l'admiration de tous par son pragmatisme, son souci de défendre l'intérêt général et aussi son respect de l'outil industriel et financier qui est le vôtre.

La France fait confiance à l'Afrique du Sud. Elle est convaincue que vos choix politiques et économiques sont les bons. Les pouvoirs publics français vous ont témoigné cette confiance en faisant un effort financier substantiel, puisque la France est devenue -et de loin- le premier contributeur européen au développement de votre pays.

Le secteur privé aussi fait et doit faire davantage le pari de la réussite de l'Afrique du Sud. Je ne doute pas que très bientôt, nous observerons un accroissement des investissements français dans votre pays. Nous ne ménagerons aucun effort pour cela. J'ai décidé de charger l'un de nos grands industriels de me faire un rapport sur les moyens les plus appropriés pour renforcer nos échanges économiques avec votre pays.

Enfin, s'il est un domaine où la France et l'Afrique du Sud peuvent se comprendre d'emblée, tant elles partagent les mêmes affinités et les mêmes ambitions, c'est bien l'Afrique.

L'Afrique du Sud et la France sont deux grands pays qui ont la passion et aussi le souci de l'Afrique. Nous savons l'un et l'autre que la stabilité est nécessaire à ce continent, et que la clé de cette stabilité c'est naturellement le développement. L'Afrique du Sud a certes ses propres difficultés, ses propres urgences, mais tôt ou tard elle aura, et elle le sait, une place prééminente dans le continent. Elle a de l'Afrique une expérience unique, qui peut lui apporter, à l'Afrique, et nous apporter à tous beaucoup.

La France aussi aime et connaît bien l'Afrique. Elle est confiante en son avenir. Elle est prête à partager avec vous son expérience et ses ambitions. Nos expériences et nos ambitions africaines sont complémentaires. Elles se rejoignent. Et je vous propose, Monsieur le Président, d'unir nos réflexions et nos efforts pour améliorer le développement de l'ensemble du continent africain qui en a besoin.




Monsieur le Président, pour exprimer en quelques mots ce que vous représentez pour nous, comme pour le monde entier, je n'ai pas trouvé mieux que cette déclaration que vous fîtes lors du procès de Rivonia le 20 avril 1964 : "J'ai chéri l'idéal d'une société démocratique et libre dans laquelle les individus vivraient ensemble dans l'harmonie et partageraient des chances égales. C'est un idéal auquel j'ai consacré ma vie et j'espère le voir se réaliser. Mais, votre Honneur, disiez-vous aux juges, si c'est nécessaire, c'est un idéal pour lequel je suis prêt à mourir".

Monsieur le Président, il n'y a pas un Chef d'Etat dans le monde qui ne serait fier d'avoir un jour prononcé ces paroles. Mais bien peu peuvent se targuer d'en avoir fait, comme vous, le principe fondateur d'une grande politique.

Mesdames et Messieurs,

Permettez-moi de lever mon verre en l'honneur de M. Nelson MANDELA, Président de la République sud-africaine, en l'honneur de la délégation qui l'accompagne.

Permettez-moi aussi, Cher Président et Cher Ami, de lever mon verre à votre grand et beau pays :

NKOSI SIKELELI AFRIKA.





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