Toast de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, à l'occasion du dîner d'Etat offert par le Président des Etats-Unis et Mme CLINTON.

Toast de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, à l'occasion du dîner d'Etat offert par M. le Président des Etats-Unis et Madame William J. CLINTON.

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Washington - Etats-Unis, jeudi 1er février 1996

Monsieur le Président,

Madame,

Mesdames et Messieurs les Membres du Congrès,

Mesdames et Messieurs,

Permettez-moi tout d'abord, Monsieur le Président, de vous remercier, du fond du coeur, de vos paroles si amicales .

Je souhaitais vous dire aussi mon émotion, ce soir, au terme, non pas de ma visite d'Etat aux Etats-Unis, mais de mon séjour dans votre capitale. Vous connaissez l'intimité, la familiarité de mes liens avec l'Amérique.

Tout a commencé à l'époque où, jeune étudiant, je fréquentais vos Universités et je m'initiais à la préparation de la junk food chez Howard Johson. Je suis revenu souvent depuis, toujours avec le même plaisir.

Nous nous connaissons bien, Monsieur le Président, pour nous être rencontrés souvent.

Mais cette visite d'Etat, j'ai voulu qu'elle soit l'occasion de resserrer encore les relations entre nos deux pays. Dans la continuité de nos deux siècles d'Histoire. Une Histoire qui, par deux fois dans ce siècle, a vu le peuple américain se battre pour la France, pour l'Europe, pour cette idée qui nous est chère et que nous partageons, la plus grande, la plus belle de toutes : la liberté. Le sacrifice consenti par le peuple américain et par ses enfants, nous ne l'oublions pas. Vous-même, Monsieur le Président, avez pu constater la force et la vitalité de ce souvenir chez les Français, lors de votre venue en Normandie et à Paris pour le 50e anniversaire du Débarquement.

La liberté ne forme-t-elle pas la trame même de notre amitié ? Monsieur le Président, savez-vous qu'à son retour d'Amérique, Lafayette avait installé au-dessus de son bureau deux cadres identiques ? L'un contenait la Constitution des Etats-Unis tandis que l'autre restait vide. A ceux qui lui demandaient pourquoi, Lafayette répondait : " Attendez et vous verrez ". L'explication vint en 1791, quand, à son tour, la France se dota d'une Constitution.

Alors nos deux lois fondamentales prirent place ensemble, au-dessus du bureau de Lafayette.

Comme nos deux pays se retrouvent ensemble pour défendre aujourd'hui les idées qui leur sont chères. Certains prétendent que nous sommes " deux peuples séparés par des valeurs communes ". L'image est assez juste. Comme le disait le général de Gaulle voici 30 ans, " le meilleur allié des Etats-Unis n'est-il pas celui qui sait parfois leur dire non ? ".

Mais nous savons, dans les moments difficiles, pouvoir compter l'un sur l'autre. Et nous savons, quand l'essentiel est en jeu, avancer de concert, exercer ensemble les responsabilités que nous confèrent l'Histoire, notre capacité à jouer un rôle à l'échelle du monde, et notre volonté d'y construire la paix. La paix, pour la France, c'est d'abord - et c'est normal - la stabilité et la sécurité en Europe.

C'est cette nouvelle architecture de défense que nous devons dessiner ensemble. C'est notre Alliance que nous devons rénover et consolider. Une alliance qui prenne en compte le poids de l'Europe, sa vocation à prendre en main son destin et à assurer pleinement sa part des responsabilités communes. La paix, c'est aujourd'hui notre action commune en Bosnie. Je veux, Monsieur le Président, rendre hommage à votre engagement personnel, à votre courage politique, à votre vision du rôle des Etats-Unis dans le monde.

Mais la paix, ce sont aussi les efforts que nous, pays riches, devons consentir pour venir en aide aux plus pauvres. La paix, c'est le développement. C'est ce chemin dans lequel se sont engagés tant de pays du Sud ; ce chemin difficile vers la démocratie, vers le progrès économique, vers le mieux-vivre pour des milliards d'hommes et de femmes qui ont besoin de nous. Je l'ai dit ce matin aux membres du Congrès : je sais combien est forte partout la tentation du repli, combien elle est puissante aujourd'hui, à mesure que s'estompe la menace d'un affrontement ; je sais combien est forte la tentation de se consacrer chez soi, à ses propres difficultés, et de se détourner ainsi de l'avenir des autres.

Mais l'avenir des autres, c'est aussi notre avenir. Leur destin, c'est notre destin. Est-il conforme à notre tradition, à l'honneur de nos grandes nations que nous n'assumions pas nos responsabilités à leur égard ? Monsieur le Président, je sais combien vous-même êtes sensible aux enjeux du développement, à l'appel de tous ceux qui, dans le monde, croient en l'Amérique. Il y va de nos valeurs. Il y va de l'intérêt de nos pays et de nos peuples. Il y va de la paix dans le monde, une paix durable et juste, une paix qui n'oublierait personne, une paix conforme à cette idée de l'homme que nous partageons.

Monsieur le Président, Demain recèle tant d'incertitudes, demain est si lourd de dangers mais demain est si riche de promesses et d'espoirs. Notre avenir, abordons-le ensemble, unis et solidaires.

C'est fort de cette pensée, de cette confiance dans notre avenir partagé, que je lève mon verre en l'honneur du Président William Clinton, Président des Etats-Unis d'Amérique, de Madame Hillary Rodham Clinton, au bonheur et à la santé que je vous souhaite, à vous-même et aux êtres qui vous sont chers. Je bois aussi au bonheur et à la prospérité des Etats-Unis d'Amérique et du grand peuple américain, notre plus ancien allié, notre seul allié de toujours.

Vive les Etats-Unis, Vive la France, Vive l'amitié franco-américaine.





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