Toast prononcé par M. Jacques CHIRAC, Président de la République, au dîner officiel offert par le Premier ministre de Singapour.

Toast prononcé par M. Jacques CHIRAC, Président de la République, au dîner officiel offert par le Premier ministre de Singapour, M. GOH CHOK TONG.

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Singapour, le mercredi 28 février 1996

Monsieur le Premier Ministre,

Mesdames, Messieurs,

Je voudrais d'abord, Monsieur le Premier ministre, vous remercier chaleureusement pour votre accueil et vous dire combien je suis heureux de faire à Singapour ma première visite en tant que Président de la République, car je suis venu bien souvent à Singapour, combien je suis heureux de faire ma première visite en Asie chez vous.

Une nouvelle fois, Singapour m'impressionne par l'ampleur permanente de ses transformations, par sa formidable vitalité. Par la qualité de ses hommes et de ses femmes, et comme toujours, je retrouve ici des amis qui sont chers à mon coeur, au premier rang desquels bien entendu avec vous, Monsieur le Premier ministre, le "Senior Ministre", Monsieur Lee Kwan Yew, avec lequel j'entretiens des relations d'amitié forte et ancienne.

J'ai souhaité, Monsieur le Premier ministre, par cette visite, à la veille du Sommet de Bangkok, premier rendez-vous "historique" entre l'Europe et l'Asie, j'ai voulu saluer aussi en Singapour l'artisan de ce premier pas accompli l'un vers l'autre.

Ce projet ambitieux, Singapour et la France en sont, vous l'avez rappelé à l'instant, les parrains.

Mais c'est vous qui en avez eu l'idée c'est vous qui en êtes les précurseurs. C'est vous qui, les premiers, en avez lancé ce projet. C'est vous qui êtes venus à Paris, il y a un an et demi, l'exposer à la France, quelques mois avant qu'elle ne prenne la présidence de l'Union européenne. C'est vous qui, les premiers, prenant acte de ce que nos régions ont vocation à échanger, sur le plan matériel comme sur le plan culturel, avez invité les Européens et les Asiatiques à franchir, sans préjugé, sans arrière-pensée, le fossé qui nous devons bien le dire continue encore à les séparer.

La France, vous l'avez rappelé, Monsieur le Premier ministre, a immédiatement fait sienne votre idée. Elle s'est engagée auprès de ses partenaires de l'Union européenne pour les convaincre de donner corps à cette grande et belle idée et nous allons maintenant cueillir les fruits de nos efforts.

A Bangkok, sachons nouer le dialogue, sachons dissiper les malentendus, sachons éliminer les doutes. Apprenons à nous connaître mieux. Développons nos complémentarités elles sont nombreuses. En un mot bâtissons ensemble le partenariat naturel entre l'Europe et l'Asie.

Cette nouvelle relation, le Sommet de Bangkok doit en marquer le point de départ. Passé cette première étape nous devrons poursuivre inlassablement nos efforts et là encore, Singapour et la France, dont les visions dans ce domaine comme dans bien d'autres se rejoignent, devront unir à la fois leurs volontés et leurs talents. Je compte sur nos deux ministres des Affaires étrangères pour faire dans ce domaine le nécessaire.

La France est la quatrième puissance économique du monde, c'est une terre de culture comme l'Asie, mais c'est aussi une terre d'innovation comme vous même et, la France vit largement de son ouverture sur l'extérieur contrairement à ce que l'on pense parfois en Asie où très curieusement la France à la réputation d'être en quelque sorte frileuse et protectionniste, ce qu'elle fut peut être dans le passé il y a fort longtemps, mais les réputations collent à la peau ce qu'elle n'est plus du tout aujourd'hui. D'abord parce que c'est un pays moderne et ensuite parce que l'Union européenne existe et ne permet pas d'avoir des politiques isolées dans le domaine des échanges extérieurs.

Comme Singapour, la France s'attache à promouvoir un système multilatéral et un système ouvert. L'implantation et le développement chez vous de très nombreuses entreprises et je voudrais saluer ici un certain nombre de leurs représentants, témoigne de cet intérêt croissant que les français porte à Singapour ce qui leur permet d'investir et de travailler.

Vous accueillerez, Monsieur le Premier ministre, au mois de décembre prochain, la première Conférence ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce. La France se félicite du choix de Singapour pour cette réunion c'est un choix hautement symbolique. Elle espère beaucoup de ce rendez-vous elle ne ménagera, vous pouvez en être assuré, aucun effort pour que le succès y intervienne. Nous en avons parlé longuement tout à l'heure tous les deux avec nos délégations.

Ne vous inquiétez pas, la France saura donner les signaux nécessaires pour être perçue pour ce qu'elle est aujourd'hui, c'est-à-dire l'une des premières puissances du monde sur le plan économique et financier et pour une puissance qui a bien l'intention d'aller de l'avant.

Enfin, bien au-delà du domaine économique, c'est aussi dans la prévention des conflits que nous devons désormais conjuguer nos efforts, notamment au sein des Nations Unies où Singapour joue un rôle très actif. Nous devons ensemble, aider l'Organisation des Nations Unies à se réformer. Nous devons faire en sorte qu'elle renforce sa vocation d'instrument de la paix de la stabilité et du développement dans le monde.

Notre collaboration pour mettre un terme au conflit cambodgien s'est avérée très fructueuse. De même, la France entend, à vos côtés, activement contribuer au dialogue politique de sécurité noué, à votre initiative, dans le cadre de l'Asean Regional Forum.

Recherchons ensemble les moyens de répondre aussi aux grands fléaux de notre temps, le crime organisé qui ne cesse de se développer, la drogue, le SIDA, la destruction de notre environnement que nous regretterons plus tard.

Je pense enfin au sous-développement. N'en sous-estimons pas les risques. J'observe avec inquiétude le désengagement d'un certain nombre de pays donateurs au titre de l'aide au développement.

L'Asie qui connaît un essor prodigieux, connaît aussi des foyers de pauvreté. En luttant aujourd'hui contre le sous-développement, nous affirmons notre vocation à respecter certaines règles de lutte contre l'exclusion et la dignité de l'homme, mais nous désamorçons aussi des risques très graves d'explosion. Nous préparons, en fait, par ce biais, l'avenir de nos enfants. Nous leur donnons, si nous poursuivons dans la voie du développement des pays qui en ont besoin, une chance de vivre en paix.

Je souhaite que Singapour et la France s'engagent dans ce domaine, également ensemble dans les grandes enceintes internationales.

Déjà, une puissante et solide communauté d'intérêts économiques nous lie l'une à l'autre. En témoignent la création et l'efficacité du Club d'affaires franco-singapourien qui doit tenir sa deuxième réunion, en juin prochain, à Lyon. En témoignent aussi la création de notre Centre français des affaires et l'accroissement constant de nos implantations industrielles, financières et commerciales chez vous.

Et, je voudrais, là encore, je l'ai dit tout à l'heure, mais je le répète, saluer et remercier les Français de plus en plus nombreux, compétents et efficaces qui investissent et qui travaillent à Singapour.

Allons plus loin. Dépassons le cadre économique et financier pour aborder aussi d'autres domaines où nous pouvons nous apporter beaucoup. Des domaines par exemple où le savoir-faire de la France est reconnu, celui de la culture et des musées. Singapour vient de décider la création de grands musées.

Parlons-en. Vous verrez, la France, pour Singapour, veut être plus qu'un partenaire économique. Jetons ensemble, nous l'avons tout à l'heure évoqué, entre nos établissements universitaires et nos instituts de recherche, de nouvelles passerelles, à caractère scientifique ou culturel.

C'est fort de cette ambition, confiant dans le succès et les suites du Sommet de Bangkok, confiant dans un avenir partagé entre l'Europe et l'Asie, que je vais maintenant lever mon verre, Monsieur le Premier ministre.

Je le lève en votre honneur, je bois en l'honneur de Monsieur Lee Kwan Yew, " Senior minister " de Singapour, mon ami. Je bois à notre amitié, Monsieur le Premier ministre. Je bois au bonheur et à la prospérité de Singapour, de ses dirigeants, clairvoyants et volontaires, et de son peuple, hommes et femmes, courageux, travailleurs, et qui, en si peu d'années, ont su forger l'extraordinaire succès de la Cité-Etat. Je bois enfin à l'amitié entre nos deux pays.





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