Discours de M. Jacques CHIRAC Président de la République à SINGAPOUR

Discours de M. Jacques CHIRAC Président de la République à SINGAPOUR

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Singapour, jeudi 29 février1996

Monsieur le Premier Ministre,

Excellences,

Mesdames et Messieurs,

Vous le savez j'aime l'Asie, ses peuples, ses nations, ses civilisations millénaires. L'Asie je l'ai découverte, avec passion, dès mon adolescence, grâce à ces savants français qui firent connaître au monde les grandes civilisations de l'Extrême-Orient. J'en ai découvert les arts fascinants dans nos musées, Guimet notamment, où je passais de longues heures dérobées au Lycée.

Dès l'âge adulte, je suis venu découvrir l'Asie. Ses campagnes, ses rizières où s'enracinent des modes de vie et des morales millénaires ; ses villes où s'incarnent la vitalité, le dynamisme, l'ingéniosité de ses peuples. Saint-John Perse, prix Nobel, diplomate et poète, avait raison de dire : "il n'y a pas de formation humaine complète sans séjour en Extrême-Orient". De très fréquents voyages au Japon, de nombreuses visites en Chine, en Corée, en Inde, au Vietnam, dans les pays de l'ASEAN, ont nourri ma passion pour votre continent.

C'est à Singapour que j'ai souhaité faire ma première visite officielle en Asie depuis mon élection à la tête de l'Etat français. Ce choix s'explique très naturellement.

Par fidélité personnelle d'abord . Je tenais à saluer le Senior Minister LEE KWAN-YEW, un ami, qui est aussi l'un des plus grands hommes d'Etat de notre temps. Un visionnaire, volontaire et créatif, qui a su forger en moins de deux générations un Etat prospère et moderne. Un sage dont les analyses lucides, la prescience continuent d'inspirer les décideurs du monde entier.

Je voulais ensuite rendre hommage à Singapour et à son peuple. Une communauté d'hommes et de femmes qui a su prendre les raccourcis du progrès. Une Cité-Etat qui est devenue aujourd'hui le laboratoire de la modernité asiatique et un creuset exemplaire des grandes civilisations de l'Asie.

Je voulais enfin exprimer un témoignage de reconnaissance. Car c'est vous, Monsieur le Premier Ministre, qui êtes venu proposer à Paris, il y a dix-huit mois, que se tienne le premier sommet de l'Histoire entre l'Asie et l'Europe. Singapour, et la France qui présidait alors l'Union européenne, ont uni leurs efforts pour donner corps à cette grande idée qui fut la vôtre.


Ce sommet répond à une nécessité. Les destins de l'Europe et de l'Asie se sont déjà croisés. Mais, reconnaissons-le, les puissances européennes n'ont pas su, pendant l'ère coloniale, l'Asie dans un rapport d'égalité et avec le respect qu'elle mérite. Lorsqu'elle a heureusement tourné cette page, l'Europe a aussi, trop souvent, tourné le dos à l'Asie.

Un demi-siècle de relative indifférence explique sans doute beaucoup d'ignorance, beaucoup de préjugés, beaucoup de distorsions d'images de part et d'autre.

Le moment est venu de se redécouvrir. De reconnaître ce que nous sommes devenus et ce que nous pouvons faire ensemble.

Je souhaite que la France et l'Europe changent de regard, surmontent l'indifférence et parfois la méfiance qui naissent de l'ignorance. Je souhaite une approche nouvelle, faite de reconnaissance mutuelle, de considération, d'adhésion commune aux grandes valeurs universelles. Je souhaite que nos cultures apprennent à mieux se comprendre, dans le respect de leurs différences. Je souhaite qu'elles puissent s'enrichir mutuellement. Je souhaite enfin qu'ensemble, nos cultures sachent faire face aux risques graves de l'uniformisation qui les menacent toutes aujourd'hui.

Dans le domaine économique aussi, notre vision de l'autre doit changer.

Trop souvent, en Europe, le formidable élan qui entraîne la croissance asiatique est perçu comme une menace. Trop souvent, en Asie, l'Europe apparaît comme une forteresse alors qu'elle est, et de loin, le principal et le plus ouvert des marchés. Je m'en entretenais encore hier, longuement avec monsieur le Premier ministre et la discussion venait sur les préjugés qui existent encore et qui sont parfois fondés sur des réalistés infimes et qui masquent la vérité des choses. Trop souvent en Asie on a le sentiment que la France est un pays protectionniste. Simplement parce que pour certains produits nous avons la tentation légitime de protéger nos propres productions. Cette réaction est naturellement en voie de disparition. Elle l'est d'abord parce que nous sommes membres de l'Union européenne et que les décisions ne sont plus prises par chaque Etat de l'Union dans le domaine économique. Les décisions sont prises par l'ensemble de l'Union et il est évidemment absurde de dire que l'un des pays de l'Union est plus ou moins protectionniste par rapport aux autres, cela n'a pas de sens. La France sait très bien, d'autre part, que pour un certain nombre de ses productions qui sont parfois menacées, ce n'est pas toujours, loin s'en faut, l'Asie qui les menace mais parfois les dévaluations compétitives qui sont faite au sein même de l'Union européenne et, sans vouloir rallonger mon propos sur ce point, j'indiquais hier au Premier ministre, qui, me faisait part de son souci que les choses soient aussi claires que possible dans nos relations et aussi dans l'esprit des uns et des autres en Asie comme en Europe, je lui indiquais ma ferme volonté de progrès dans de domaine qui, à juste titre, préoccupe les autorités de Singapour. Je voulais rappeler quelques éléments qui parfois sont ignorés.

Selon l'OCDE, en 1994, avec un produit national brut de 7300 milliards de dollars, l'Europe est équivalente à l'ensemble nord-américain Etats-unis et Canada et l'Europe devance en matière de production nationale brute l'ensemble constitué par toute l'Asie.

La croissance de l'Europe, compte-tenu du niveau de vie déjà atteint, est certes plus lente que celle de l'Asie. Mais, avec seulement 3 % de croissance, c'est pour vous donner une idées des choses, avec seulement 3% de croissance en volume en 1995, l'Europe a accru sa production d'une valeur de 200 milliards de dollars, c'est-à-dire l'équivalent de tout le Produit National Brut de la Malaisie, des Philippines et de Singapour. C'est considérable.

Savez-vous que l'Europe importe deux fois plus que l'Amérique du Nord toute entière?

Quand je parle de l'Europe je parle des quinze pays de l'Union européenne. Cette réalité devant naturellement être plus importante encore quand l'élargissement de l'Europe fera que nous serons vingt-cinq ou trente.

Savez-vous que les relations commerciales entre l'Europe et l'Asie, entre la France et l'Asie, sont actuellement équilibrées ?

Une analyse attentive fait apparaître, avec la force de l'évidence, la complémentarité de nos deux régions, Asie-europe, qu'il s'agisse du commerce, des technologies, des infrastructures, des investissements ou des services.


Pas plus que l'Europe, la France n'est sans doute perçue en Asie pour ce qu'elle est réellement.

Terre de haute culture, comme les pays de l'Asie réputée c'est vrai pour son art de vivre, la France on ne le sait pas toujours suffisamment ici, est aussi une grande puissance économique, la quatrième du monde. Le Produit National Brut de la France représente près de trois fois celui de l'ensemble des pays de l'ASEAN. Et notre ambition est d'aller toujours de l'avant.

La France est un grand pays exportateur. Ses performances sur les marchés extérieurs sont remarquables. Nos exportations représentent plus de 22 % du Produit Intérieur Brut, ce qui est très important. Et nos réussites commerciales ne se limitent pas aux produits de luxe, aux parfums et aux alcools ; l'essentiel de nos exportations concerne aujourd'hui le secteur de l'énergie, celui des biens manufacturés, des équipements, des industries agro-alimentaires, des produits pharmaceu-tiques.

La France présente aujourd'hui, après les Etats-Unis, le plus grand excédent dans le domaine des services financiers. Nous le devons aux banques françaises, aux compagnies d'assurance, à l'ensemble de nos institutions financières qui sont aussi les partenaires de votre développement.

Mon pays est aujourd'hui, le quatrième exportateur de biens dans le monde, le deuxième pour l'agriculture, le deuxième pour les services. Notre excédent commercial dépasse 20 milliards de dollars. Il reflète l'esprit de conquête et d'innovation qui anime les entreprises françaises, les grandes mais aussi les peites et les moyennes.

La forte croissance des économies de l'Asie a permis aux exportations françaises de progresser de plus de 120 % depuis 1988 et de 25 % pour la seule année 1995. Plus significatif encore, nos ventes de biens d'équipement ont augmenté de 35 % l'année dernière. Notre commerce avec l'Asie, jadis déficitaire, est aujourd'hui équilibré. Ce qui est une satisfaction pour vous comme pour nous.

Néanmoins, la France n'est pas, beaucoup s'en faut, assez présente en Asie. Notre part de marché, qui est de 6 % dans le monde, n'est que de 2 % en Asie. C'est clair, les entreprises françaises ne sont pas suffisamment représentées dans cette région du monde dont le potentiel de développement économique est considérable.

Mon objectif est simple : nous devons tripler, en dix ans, nos parts de marché en Asie. C'est une grande ambition mais, je le redis, notre avenir se joue aussi en Asie. La présence à Singapour de quatre cents entreprises et banques françaises, contre cent à peine il y a dix ans seulement, montre bien que cet objectif est parfaitement réalisable et je voudrais saluer chaleureusement les entreprises françaises installées à Singapour et pour un certain nombre d'entre elles, représentées ici aujourd'hui.

Le développement de nos échanges commerciaux doit aller de pair avec l'intensification de nos investissements directs, de France en Asie et d'Asie en France. On ne sait pas toujours que la France est le troisième pays d'accueil des investissements au monde, et qu'elle est également le deuxième ou le troisième selon les années, investisseur international à l'étranger.

La France doit devenir un partenaire économique et financier de première importance pour l'Asie, comme elle l'est pour les autres continents. Elle dispose, pour cela, de tous les atouts nécessaires : une main d'oeuvre hautement qualifiée ; une recherche scientifique qui se situe au premier rang ; une maîtrise des technologies les plus avancées ; au total, une économie compétitive et saine qui repose sur des prix stables et sur une monnaie solide. De 1992 à 1995, les prix français ont crû, on augmenté plus lentement qu'en Allemagne, grâce en particulier à une bonne maîtrise des coûts de production.

La modernisation de notre économie s'illustre parfaitement dans l'évolution de nos marchés financiers. Le marché à terme international de France, le MATIF, est le deuxième marché de produits dérivés en Europe. Le marché obligataire français est l'un des plus importants, des plus transparents, des plus efficaces et des plus liquides au monde. C'est la raison pour laquelle les investisseurs étrangers détiennent plus de 20 % de la dette publique française. Je sais que les grandes institutions financières de Singapour sont des souscripteurs particulièrement actifs et je m'en réjouis.

Bien sûr, la France a ses faiblesses, à commencer par un chômage élevé et des déficits publics que l'on a laisser croître et qui restent aujourd'hui excessifs. Mais le Gouvernement français s'est donné les moyens de l'assainissement et du rétablissement de l'équilibre des comptes publics et il y parviendra dans les déalis les plus brefs.

En 1995, nous avons réduit nos déficits publics d'un point du Produit Intéireur Brut, et tout sera mis en oeuvre pour respecter rigoureusement, l'objectif de 4% qui est le nôtre pour 1996. Comme le montre l'expérience de ces derniers mois, c'est ainsi que nous créons les conditions d'une baisse durable et continue des taux d'intérêt. Ce n'est pas parce que nous sommes le pays le moins endetté du G 7 que nous pourrions nous dispenser d'assainir nos finances.

Dans cette perspective, la France a décidé de mettre en oeuvre un ensemble de réformes structurelles qui permettra de rendre nos entreprises plus compétitives, nos services publics plus performants, notre protection sociale plus efficace et notre marché du travail mieux adapté aux besoins des entreprises, dans une économie mondiale de plus en plus concurrentielle.

Il est dans ma responsabilité, et le Gouvernement français s'y consacre pleinement, de conduire à leur terme les réformes indispensables à la modernisation de la France. C'est ainsi que mon pays pourra peser de tout son poids dans la construction européenne.

C'est en effet toute l'Europe qui doit accentuer son effort de présence en Asie. Déjà vos échanges avec l'Union européenne sont comparables à ceux que vous avez avec les Etats-Unis.

D'ici la fin du siècle, l'Union européenne doit s'affirmer comme l'autre partenaire majeur de l'Asie. Avant l'an 2000, l'Europe, entraînée par le couple franco-allemand, a l'ambition d'accomplir des progrès décisifs.

Elle le fera d'abord en se dotant d'une monnaie unique. Sa réalisation contribuera à équilibrer le système monétaire international en faisant de la monnaie européenne l'autre grande monnaie du monde.

L'Europe renforcera aussi ses institutions, qui doivent être plus efficaces et préparer l'élargissement de l'Union aux nouvelles démocraties d'Europe centrale et orientale, les pays anciennement communistes. Dans une génération, l'Europe ainsi réconciliée et rassemblée, comptera sans doute près de trente pays membres, formant un ensemble économique, culturel mais aussi politique, dans le respect de l'identité de chacune des Nations qui la compose. L'Europe constituera alors l'un des pôles les plus stables et les plus dynamiques du monde.


L'Europe contribuera ainsi à l'avènement du nouvel équilibre qui marquera le XXIème siècle. Loin du monde bipolaire que nous avons connu depuis la guerre, avec ses conflits idéologiques et ses risques d'affrontement, ce monde multipolaire offrira à chacun la possibilité de tisser librement de nouveaux liens, de nouvelles solidarités. Les chances de la paix en seront considérablement renforcées.

Devant le Congrès des Etats-Unis, j'ai décrit il y a un mois ma vision du monde transatlantique, avec une Alliance rééquilibrée autour de deux piliers, nord-américain et européen. Aujourd'hui, je souhaite, devant vous, élargir ma vision.

Parmi les pôles de demain, comment ne pas voir émerger ceux de l'Asie ? Une Asie qui prend appui sur la vitalité de ses cultures et de ses civilisations et qui triomphe économiquement. Une Asie qui, légitimement, aspire à jouer désormais un rôle politique à sa mesure dans le monde.

Cette Asie est en marche vers son nouvel équilibre. Aux côtés du Japon, qui a vocation à occuper un siège de membre permanent du Conseil de Sécurité, la Chine, dont le statut de puissance politique est reconnu, s'affirme rapidement comme l'une des principales économies du monde. L'Inde a naturellement les mêmes ambitions politiques et économiques.

L'un des principaux risques, pour l'équilibre de la région, résidait dans les divisions de l'Asie du Sud-Est. Ce fut la chance du continent d'avoir, il y a près de trente ans, des dirigeants comme le Président SUHARTO, dont l'audace et la clairvoyance ont permis la création de l'ASEAN. Votre Association, créée dans le contexte de la confrontation Est-Ouest, a su tirer très vite les conséquences de la disparition de cet affrontement idéologique.

La France s'honore d'avoir pu contribuer, avec le règlement de paix au Cambodge, à la résorption de la fracture qui, pendant cinquante années de guerre, avait séparé l'Asie du Sud-Est en deux ensembles antagonistes.

Au-delà de la paix au Cambodge, je crois souhaitable l'édification d'une ASEAN de dix Etats membres, rassemblant leurs forces économiques et politiques, capable de s'affirmer dans le domaine de la sécurité.

Je salue particulièrement l'adhésion du Viet-Nam qui, en retrouvant toute sa place dans cet ensemble régional, va pouvoir consacrer à son développement l'exceptionnel talent de ses hommes et le dynamisme remarquable de son peuple.

L'ASEAN, par la richesse de ses cultures, par la diversité de ses peuples, par sa géographie même faite de caps et d'archipels, est un peu l'Europe de l'Asie.

Comme l'Union européenne, l'ASEAN est aujourd'hui engagée dans une dynamique de rapprochement qui, en réussissant, garantira la prospérité et la sécurité de chacun de ses membres. Aux côtés de la Chine, du Japon et de l'Inde, l'ASEAN parachevée constituera ainsi le quatrième pilier de l'équilibre asiatique, contribuant de façon décisive à la stabilité du continent et à la paix dans le monde.

Je souhaite que l'Union européenne et l'ASEAN développent bien davantage leur dialogue, et s'enrichissent mutuellement de leurs expériences de rapprochement économique mais aussi politique.

Au-delà de ces perspectives asiatiques, nous devons travailler ensemble à l'équilibre du système international tout entier, en structurant les relations entre nos deux continents, qui apparaissent aujourd'hui comme le côté faible du grand triangle Amérique-Europe-Asie dont dépend largement le destin du monde. Je sais, Monsieur le Premier Ministre, nous en parlions hier, que cette vision rejoint la vôtre.


Telle est, Mesdames et Messieurs, la signification du premier sommet entre l'Europe et l'Asie, qui s'ouvrira demain à Bangkok. Sachons ensemble en faire le point de départ d'une nouvelle relation, forte et féconde.

Sur le plan culturel et scientifique d'abord. Multiplions les échanges d'étudiants et de chercheurs ; renforçons les coopérations entre nos universités et nos laboratoires. Pourquoi ne pas créer une véritable Bourse d'échanges de formations et de technologies entre l'Europe et l'Asie ? Pourquoi ne pas mettre en réseau nos centres de prospective ?

Dans le domaine économique ensuite. Prenons toute la mesure de nos intérêts communs et de nos complémentarités.

Sans occulter nos inévitables divergences d'intérêts, sachons souligner que nous représentons, les uns pour les autres, les marchés les plus prometteurs. Ayons le courage d'éliminer progressivement les obstacles à nos échanges, dans le cadre d'un régionalisme ouvert, garant de nos prospérités. Préparons ensemble la première conférence ministérielle de l'Organisation Mondiale du Commerce, en décembre, ici-même à Singapour, en conservant toujours à l'esprit que le commerce est le moteur de la croissance dans le monde.

Développons, dans les deux sens, des investissements créateurs de richesse et d'emploi, en harmonisant les cadres juridique, règlementaire et fiscal qui doivent favoriser le dynamisme de nos entreprises. Encourageons nos sociétés à multiplier leurs alliances, pour être plus fortes ensemble sur nos marchés et partout dans le monde.

Sachons rechercher nos synergies, en combinant nos capitaux et en partageant nos technologies. La France y est prête. Elle est sans doute le pays le plus ouvert aux transferts de savoir, comme en témoignent le Train à Grande Vitesse en Corée, les usines d'automobiles que nos groupes ont créées en Chine et en Malaisie, les centrales nucléaires que nous construisons près de Canton.

Je souhaite la création d'un forum d'hommes d'affaires euro-asiatique permettant, dans un cadre informel, ces nécessaires rapprochements.

Mais la relation entre nos deux continents ne peut se limiter au renforcement de la coopération économique. Nous devons ensemble traiter les grands problèmes de notre temps.

La France préside cette année le G7, dont le sommet aura lieu en juin, à Lyon.

Je souhaite que nous engagions à Bangkok, avec les dirigeants de l'Asie, un dialogue sur ces sujets qui permettra de mieux prendre en compte leurs préoccupations. Je pense en particulier à la préservation de notre environnement, ou à la lutte contre les grands fléaux que sont la criminalité organisée, la drogue et le sida.

Mais je pense aussi à l'aide au développement. Je rends hommage au Japon qui, en quelques années, est devenu le premier donateur mondial, et à la Corée qui, depuis peu, figure au nombre des pays contributeurs. Le moment n'est-il pas venu d'élargir ce cercle, à mesure que vos pays accèdent à la prospérité ? Notre intérêt commun est de voir le monde entier accéder à un développement dont nous serons tous les bénéficiaires.

A Bangkok, nous devons enfin parler des défis qu'il nous appartient de relever ensemble pour contribuer à la stabilité et à la sécurité du monde.

La fin de la guerre froide a mis l'Europe et l'Asie face à leurs responsabilités. Aucun rideau de fer, aucune " théorie des dominos " ne justifie plus une délégation de nos responsabilités de défense. L'Asie orientale ne constitue plus une alliance de revers du " Monde libre " face à l'Union soviétique. L'Europe n'est plus paralysée et divisée par l'implacable logique du bloc à bloc.

Cette nouvelle marge de manoeuvre stratégique doit nous encourager à développer considérablement notre dialogue sur la sécurité. Echangeons nos analyses et nos prévisions. Travaillons, ensemble, à l'émergence d'un monde plus sûr et plus stable.

Membre permanent du Conseil de Sécurité, la France s'associera à toutes les initiatives multilatérales qui iront dans ce sens, comme elle l'a fait hier au Cambodge, comme elle le fait aujourd'hui, avec le KEDO, en Corée du Nord. Dans cet esprit, mon pays souhaite pouvoir participer pleinement au Forum régional de sécurité de l'ASEAN.

Puissance nucléaire, ayant achevé son ultime série d'essais qui garantit la fiabilité et la sécurité de sa capacité de dissuasion, la France est prête à signer, dès cette année, le traité d'interdiction totale des essais sur la base de l' "option zéro " qu'elle a été, je le rappelle, la première à proposer. Elle signera, avant la fin du mois de mars, les protocoles du traité de Rarotonga instaurant une zone dénucléarisée dans le Pacifique Sud. Elle adoptera une attitude de principe constructive à l'égard du traité de dénucléarisation en Asie du Sud-Est qui vient d'être signé à Bangkok.

Ensemble, l'Europe et l'Asie peuvent ainsi contribuer à promouvoir de nouveaux progrès vers la sécurité et le désarmement dans le monde.

Monsieur le Premier Ministre,

Mesdames, et Messieurs,

Vous l'aurez compris, la France nourrit de grandes ambitions pour le sommet de Bangkok. Sans précédent dans l'histoire, il doit être la première étape d'un processus novateur, informel et pragmatique, mais aussi ambitieux dans sa vision à long terme. Tout nous y pousse : les perspectives offertes à notre dialogue culturel ; les complémentarités de nos économies ; les convergences de nos intérêts de sécurité.

Sachons faire de ce sommet l'acte fondateur de notre partenariat, porteur d'espoirs pour la prospérité de nos peuples et l'avenir du monde ! L'Europe a besoin de l'Asie. L'Asie a besoin de l'Europe. Sachons ensemble réussir ce grand rendez-vous !

Je vous remercie.





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