Discours de M. Jacques CHIRAC président de la République lors de la visite des locaux du SAMU Social.

Discours de M. Jacques CHIRAC président de la République lors de la visite des nouveaux locaux du SAMU SOCIAL (Paris)

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Paris, le 19 décembre 1996

Je voudrais dire un premier mot pour remercier toutes celles et tous ceux qui ont été, avec beaucoup d'intelligence, de générosité et de dynamisme, à l'origine de cette institution, et également aux partenaires sans lesquels elle n'aurait pas pu fonctionner. Les partenaires nous les connaissons. Ils sont ici. Je ne les citerai pas tous, je craindrais d'en oublier. Mais, je tiens à leur dire que leur geste de participation, notamment par la mise à disposition soit de personnel, soit de moyens matériels, a été déterminant pour la création du Samu Social, d'autant qu'au départ c'était une opération qu'ils avaient pensé être temporaire et limité à la période d'hiver. Ils ont dû ensuite intégrer le fait que cela devenait permanent, et donc plus lourd pour eux.

Alors, je voudrais que tous les partenaires sachent que le Maire de Paris et moi-même nous leurs sommes très reconnaissant de leur participation.

Il y a ceux qui ont été à l'origine des choses : "Il faut toujours rendre à César ce qui est à César". A l'origine des choses, un ami commun, m'a un jour téléphoné pour me demander de recevoir le Dr. Emmanuelli en me disant : "il a quelque chose à dire". J'ai reçu le Dr. Emmanuelli, naturellement, immédiatement. Il m'a dit des choses dans la compétence qui était la sienne avec la sensibilité qui était la sienne. Puis, pour être sûr que je comprendrais, il m'a laissé un document court, et de surcroît surligné, de façon à ce que je puisse rapidement intégrer ce qu'il avait voulu me dire. Je dois dire que j'ai été très frappé. J'ai tout de suite vu avec Jean Tibéri, l'importance qu'il y avait à engager cette action pour essayer de répondre aux besoins des plus évidents, les plus légitimes, les plus déshérités d'entre nous.

Nous avons donc lancé, dans des temps records, ce Samu Social. Je dirais d'abord un peu "sur le genou", c'est-à-dire avec les moyens du bord. Quelques voitures, des bénévoles sous l'impulsion du Dr. Emmanuelli, avec l'aide de la ville de ses partenaires et l'action très dynamique de Mme Versini. Puis les choses se sont mises en place petit à petit.

Nous avions un souci, aussi bien M. Tibéri, le Dr. Emmanuelli et Mme Versini, ceux qui les entouraient et moi-même, qui était de faire une action qui ne consistait pas à apporter simplement une aide matérielle qui était immédiate à ceux qui en avaient besoin, mais de le faire dans un cadre qui soit convenable. Trop souvent on a vu les meilleures intentions charitables, au sens étymologique du terme, se manifester dans le cadre de moyens médiocres. C'est la raison pour laquelle, avec Jean Tibéri, nous avons décidé de retenir un lieu qui pourrait être un lieu convenable, et nous avons choisi cet hôpital Saint-Michel. Nous avons décidé, le Dr. Emmanuelli et Mme Versini l'ont approuvé, de le restaurer de façon propre. Nous avons insisté pour que le jardin, qui n'est pas tout à fait terminé, soit également un jardin agréable. Bref, que la personne qui vient ou qui est amenée ici par nos équipes se trouve normalement dans un endroit digne d'une personne et non dans un endroit plus ou moins "au rabais". Alors, il fallait naturellement mettre en place un réseau qui nous permette à la fois de recevoir les appels de ceux qui ont besoin. Cela a marché plus qu'on ne l'imaginait marquant ainsi que l'exclusion et la misère sont plus fortes qu'on ne le pensait.

Il nous fallait aussi un réseau nous permettant d'aller chercher ceux qui en avaient besoin mais qui n'avaient pas les moyens psychologiques ou matériels d'appeler ce numéro vert. Nous avons fait un appel aux parisiennes et aux parisiens. Un appel que je voudrais renouveler, parce que si nos voitures, dans le cadre de leurs maraudes, trouvent un certain nombre de gens, beaucoup encore échappent à cela parce dans des endroits reculés. Parce qu'aussi, souvent les gens qui voient une personne en détresse, surtout si celle-ci a un chien -ce qui est fréquemment le cas pour une raison simple, c'est la seule affectivité, affection qu'elle peut avoir-, se détournent. Ce n'est pas bien.

Mais, enfin je veux bien comprendre les choses : entre simplement se détourner et ne rien faire, il y a une marge que l'on peut exploiter, c'est-à-dire rentrer chez soi ou se rendre dans une cabine publique et appeler le numéro vert en disant : "à tel endroit il y a une personne qui a vraiment besoin de quelque chose". Si l'on ne veut pas soi-même s'impliquer, à tout le moins, peut-on prévenir. J'observe que le nombre des appels de cette nature est peu important. Ce n'est pas normal. Je le répète, si vous estimez ne pas pouvoir vous-même tendre la main, parce que vous n'en avez pas la compétence ou le goût, au moins faites le geste qui consiste à appeler et à prévenir le Samu Social.

Alors ici, naturellement, il y a l'ensemble des soins qu'on peut imaginer dans ce genre de cas et en particulier tout ce qui touche les soins infirmiers qui avaient pratiquement disparus. Si bien que beaucoup de gens se sont trouvés confrontés essentiellement à des problèmes de traumatologie et surtout de dermatologie, indépendamment des petites maladies. Ils ne pouvaient naturellement pas recevoir de soins à l'hôpital. Ils ne relevaient pas de la structure hospitalière et sombraient dans une espèce de dérive, y compris psychologique, notamment à la suite des maladies dermatologiques. Quand la peau d'un homme est attaquée, c'est un peu, en vérité, sa personne, sa personnalité, en tous les cas qui est attaquée et la dérive s'accélère.

Le soin infirmier et c'est un signe de notre société et de ses faiblesses, est redevenu quelque chose d'indispensable. C'est une chose que font les responsables du Samu Social, et je crois que c'est très important. Il y a aussi, naturellement, la nécessité d'envoyer à l'hôpital de façon justifiée -d'où la présence des infirmiers ou infirmières-, des gens qui relèvent de la compétence de l'hôpital, mais qui spontanément n'iraient pas ou n'y seraient pas reçus par manque de capacité de communication.

Voilà ce que fait, "en gros" et bien d'autres choses, le Samu Social.

Je voudrais remercier très vivement le Maire de Paris qui, lorsqu'il était mon adjoint, était l'une des chevilles ouvrières de cette affaire. Il en assume aujourd'hui la responsabilité. Il n'a pas ménagé, ni ses efforts, ni ses moyens, notamment dans une période financière difficile, pour que le Samu Social puisse fonctionner le mieux possible. Il continuera, je le sais, à le soutenir.

Et encore un grand merci à Madame Versini et à toute son équipe, et bien entendu, au Docteur Emmanuelli, sans lequel rien de tout cela n'existerait.

J'observe, Cher Docteur, que vous pouvez avoir une légitime fierté, puisque aujourd'hui je crois qu'une quarantaine de villes en France ont été inspirées par l'exemple de Paris -par votre exemple- et se sont dotées d'un Samu Social.

Voilà. Pour le reste, la presse a vu comment les choses fonctionnaient et, je veux bien répondre à une ou deux questions s'il y a lieu, mais exclusivement sur notre visite d'aujourd'hui.

Question -

Les villes qui ont pris l'exemple sur la ville de Paris vont-elles se multiplier ?

Le Président -

Je le souhaite, et d'ailleurs le Gouvernement a donné une forte impulsion et quelques moyens pour inciter les villes à le faire. Cela ne peut se faire que dans une ville d'une certaine importance, pour toutes les raisons que vous imaginez. Mais tout de même, une quarantaine de villes déjà, ce n'est pas mal. On peut dire que ce n'est pas assez,vous avez raison, mais on peut aussi dire que ce n'est pas mal. Il n'y avait rien il y a peu de temps.





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