Discours du Président de la République à l'occasion de la réception des ambassadeurs.

Discours de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, à l'occasion de la réception des ambassadeurs.1

Palais de l'Elysée, le jeudi 29 août 1996

Monsieur le Premier Ministre, Monsieur le Président de l'Assemblée nationale, Messieurs les présidents, Mesdames et messieurs les ministres, Mesdames et messieurs les ambassadeurs,

Nous vivons, chacun le sait, un vrai changement d'époque. Deux phénomènes majeurs, cumulant leurs effets déstabilisants, ont en effet privé le monde de ses références et pour partie de ses certitudes.

Avec l'implosion de l'Union Soviétique, c'est d'abord un demi-siècle d'un ordre bipolaire, critiquable mais lisible, qui s'est effondré, effaçant une architecture politique rigide, des règles du jeu simples, des repères familiers.

C'est ensuite une mondialisation irréversible des technologies et des marchés, qui ouvre sans aucun doute la perspective d'une croissance durable, mais qui impose des contraintes pesant sur nos vies quotidiennes, sur nos emplois, sur l'organisation même de nos sociétés.

Ces deux phénomènes conjugués expliquent un sentiment largement répandu d'inquiétude devant les incertitudes d'une double transition encore mal maîtrisée.


Si nous ne parvenions pas à mesurer pleinement l'ampleur de la mutation engagée, si nous n'avions pas assez de détermination pour en tirer toutes les conséquences et conduire une politique d'adaptation volontariste, nous serions condamnés à subir les événements. Ce qui est en cause, c'est la grandeur de la France, c'est l'avenir des Français et c'est aussi leur prospérité.

Car jamais la vie de chacun d'entre nous n'a dépendu à ce point de la place de la France dans le monde et de sa capacité à exporter ses biens et aussi ses idées.

Dans le domaine économique d'abord. Un Français sur quatre travaille pour l'exportation. Et ce chiffre devrait augmenter avec les perspectives de forte croissance en Asie, en Amérique latine, en Europe de l'Est. N'oubliez jamais qu'un milliard de francs d'exportations permet la création ou la consolidation de 1000 emplois pendant trois ans.

Essentiel pour l'emploi, ce combat de tous les jours pour l'exportation, combat dans lequel je m'investis personnellement, est aussi votre combat. C'est pourquoi j'ai souhaité que votre conférence y soit largement consacrée. Je vous demande d'en faire une très forte priorité de votre action. D'être les avocats efficaces de nos entreprises auprès des autorités locales. De prendre, lors de vos séjours en France, à Paris et en province, tous les contacts appropriés pour alerter nos grands groupes, mais aussi nos PME, sur les possibilités que peuvent offrir vos pays de résidence. De proposer toutes les initiatives susceptibles d'accroître les chances de nos produits sur les marchés mondiaux.

Ambassadeurs de la France, vous êtes aussi les Ambassadeurs de l'économie française. C'est ainsi que doivent vous percevoir nos chefs d'entreprise. Et c'est d'abord sur ce terrain que votre action sera jugée. A mes yeux, il n'y a pas de grands ou de petits postes. Mobilisez tous votre expérience, votre talent, votre énergie, votre imagination au service de nos entreprises et donc de l'emploi dans notre pays.

Mais ce combat, nous ne le gagnerons que si nous parvenons aussi à faire prévaloir durablement, avec nos partenaires européens, un cadre commercial multilatéral équitable et un ordre financier stable, permettant à nos entreprises de valoriser tous leurs atouts.

Le succès de la France, grâce à la détermination d'Alain Juppé dans la négociation du cycle de l'Uruguay, nous a rappelé deux réalités : rien ne nous est donné, dans ce domaine comme dans les autres ; mais quand la France sait ce qu'elle veut et qu'elle mobilise l'Europe pour obtenir ce qu'elle souhaite, alors elle gagne.


Sur le plan économique, mais aussi sur le plan politique et stratégique, et même si les Français en sont moins conscients, les enjeux sont tout aussi importants. Parce qu'il s'agit de la paix, qui n'est jamais garantie et qui doit se construire chaque jour ; la Bosnie suffit à nous le rappeler. Parce qu'il s'agit aussi de l'indispensable édification d'un nouvel ordre mondial, qui ne soit pas soumis à la loi du plus fort.

La France et l'Europe doivent donc saisir l'occasion que leur offre cette période de transition incertaine pour affirmer leur vision, défendre leurs intérêts, assurer leur place dans le monde qui s'ébauche et qu'elles doivent contribuer à façonner.

C'est cette conviction qui renforce ma volonté de développer pas à pas, jour après jour, une politique étrangère ambitieuse et cohérente.

C'est cette même conviction qui explique ma détermination à mener à son terme une rénovation profonde de notre politique de défense ; à conduire une adaptation progressive de notre outil économique ; à garantir notre modèle social. Alain Juppé vous en a parlé avec toute sa compétence.

L'action internationale et la réforme interne ne peuvent pas être séparées. L'une et l'autre sont indispensables. L'une et l'autre doivent donner aux Français l'assurance qu'ils peuvent regarder l'avenir avec confiance.

" L'espoir est le rêve de l'homme éveillé " selon Aristote. Mon ambition est de donner aux Français de vraies raisons d'espérer, et de les mobiliser en leur montrant que la France a tout pour réussir, quand elle sait où elle va, qu'elle peut entraîner l'Europe, qu'elle doit contribuer à l'émergence d'un monde plus sûr et plus équitable.


Devant vous, il y a un an, j'ai esquissé les contours d'une politique étrangère prolongeant l'héritage du général de Gaulle, tout en cherchant à répondre, avec pragmatisme, aux exigences de notre temps.

Depuis notre première rencontre, de Washington au Caire en passant par Singapour, j'en ai précisé le dessin, autour de quatre axes que je vous rappelle en quelques mots :

- Premier axe : défendre, rénover, renforcer un ordre international plus stable et plus juste.

De Genève à New-York, j'ai souligné notre détermination face aux dangers de l'unilatéralisme. Il s'agit de défendre, mais aussi de réformer des organisations internationales souvent cinquantenaires. D'en accroître l'efficacité. D'encourager une meilleure concertation entre elles.

- Deuxième axe : contribuer à l'émergence d'un monde multipolaire.

La France peut et doit aider les puissances émergentes mais aussi les organisations régionales comme le Mercosur, l'ASEAN ou le Conseil de coopération des Etats Arabes du Golfe, à occuper sur la scène internationale la place qui leur revient.

Il faut inscrire dans cette même perspective le rééquilibrage du " grand triangle " de la croissance formé par l'Amérique du Nord, l'Europe et l'Asie Orientale. A Singapour, j'avais souligné la faiblesse, anormale et dommageable pour les deux ensembles, des liens de tous ordres entre l'Union Européenne et l'espace économique le plus dynamique du monde. Le Sommet de Bangkok a constitué un excellent point de départ. La France devra, avec constance, agir en faveur d'une mise en oeuvre ambitieuse de toutes les décisions qui ont été prises à ce moment.

- Troisième axe : faire de l'Union Européenne un acteur majeur de ce monde multipolaire, en rénovant ses solidarités naturelles.

L'Alliance Atlantique d'abord, où doit s'affirmer concrètement l'identité européenne. L'espace européen ensuite, où l'élargissement nécessaire de l'Union doit s'accompagner de l'élaboration d'une architecture de sécurité ne laissant aucun pays à l'écart ; l'Afrique, la Méditerranée et le Proche-Orient enfin, où l'Histoire nous a légué des responsabilités que la morale et l'intérêt nous commandent d'assumer pleinement.

- Quatrième axe, qui est au coeur de notre démarche parce qu'il est, en quelque sorte, la condition de tout le reste: construire l'Union Européenne.

En la dotant d'une monnaie, qui sera l'autre grande monnaie du monde et nous voyons bien aujourd'hui à quel point cette ambition est nécessaire à notre développement futur, en lui donnant des institutions rénovées, une politique étrangère, une identité de défense ; en complétant enfin cette " Europe puissance ", par une Europe des hommes, forte de sa culture, forte de son modèle social qu'il faut préserver et améliorer sans cesse.


C'est à partir de cette vision claire de nos objectifs, de ces orientations nettement tracées pour les années à venir que nous pourrons poursuivre l'oeuvre que nous avons engagé.

L'année qui s'ouvre sera décisive, notamment pour l'Europe. J'attends de vous un effort constant pour faire progresser nos idées, leur donner corps. Au-delà de la défense opiniâtre de nos intérêts, de ceux de nos entreprises, de nos compatriotes, de notre langue, votre mission est aussi de faire partager une certaine idée du monde de demain, d'en faire l'ambition commune du plus grand nombre.




Sur chacune de ces grandes orientations, je ne chercherai pas à être exhaustif. Hervé de Charette a développé devant vous, avec talent, plusieurs dossiers importants. Je souhaite néanmoins préciser certains traits de ce dessein global.


L'Union Européenne d'abord.

Depuis la réunion de Formentor il y a un an, nous disposons d'un calendrier qui nous mènera jusqu'à l'an 2000 : conférence intergouvernementale, union monétaire, engagement des négociations d'élargissement, révision du financement communautaire.

Mais nous ne pourrons donner à l'Europe ses nouvelles dimensions, par l'approfondissement et l'élargissement, que si nous parvenons, dans le même temps, à combattre efficacement les désillusions et les frustrations que l'idée européenne suscite dans l'opinion publique, en France comme dans la plupart des autres états européens.

C'est pourquoi je vous demande, comme je demande au gouvernement, de souligner en chaque occasion la portée concrète de nos initiatives européennes pour la vie quotidienne de chaque citoyen de l'Union.

Il faut convaincre. Convaincre que l'Europe est nécessaire et qu'elle sera bénéfique.

Sur le plan politique, elle nous apporte l'essentiel, même s'il nous paraît aujourd'hui naturel : la réconciliation entre les peuples et la construction d'un avenir de paix sur notre continent.

Sur le plan économique, elle permet aux Européens de défendre ensemble leurs intérêts commerciaux, lorsque l'unilatéralisme d'un grand pays menace l'état de droit international incarné par l'Organisation Mondiale du Commerce. Qui ne voit que séparés, nous serions impuissants ? Il en va de même à l'intérieur de l'Union. Un seul exemple : la crise de la filière bovine. Qui ne comprend qu'elle ne pourra être réglée qu'en faisant jouer la solidarité européenne ?

Sur le plan social enfin, l'Union doit nous aider à exploiter la dimension du grand marché pour mieux promouvoir le développement et lutter contre le chômage.


Pour ce faire, nous devons réussir la monnaie unique.

La France sera au rendez-vous, elle respectera naturellement les échéances. Elle le fera parce que cela correspond à l'intérêt de tous les Français, c'est cela la raison essentielle. La monnaie unique permettra des taux d'intérêt bas, et donc plus de croissance et plus d'emplois. Elle mettra fin aux dévaluations compétitives, à condition que des règles strictes soient fixées, comme nous le demandons, pendant la période transitoire, pour les relations entre l'euro et les autres monnaies européennes.

La monnaie unique permettra enfin à l'Europe de peser, à égalité avec les Etats-Unis, dans les grands débats financiers. Elle contribuera à la reconstruction d'un ordre monétaire plus stable et plus juste.


Réussir la Conférence Intergouvernementale n'est pas moins important. Je compte dans ce domaine sur l'action déterminée d'Hervé de Charette et de Michel Barnier.

Car comment peut-on imaginer que l'Europe, qui fonctionne mal à 15 avec des institutions conçues pour 6, pourrait éviter la paralysie lorsqu'elle comptera 25 ou 30 membres ? Comment cette Europe menacée d'impotence pourrait-elle susciter l'adhésion des citoyens ?

Réussir la Conférence, c'est désormais aller vite. Nous devons conclure la négociation au Conseil Européen d'Amsterdam, en juin prochain. Pour cela, il faut que le Conseil Européen de Dublin, en décembre, enregistre des progrès décisifs. Nous n'avons donc que trois mois pour avancer vers les quatre objectifs qui sont pour nous essentiels.

Premier objectif : renforcer la politique étrangère et de sécurité commune. La France, vous le savez, a proposé de créer une nouvelle fonction, celle d'un haut représentant. Cette idée se heurte encore, chez certains de nos partenaires, à la crainte qu'une telle innovation affaiblisse les compétences de la Commission et de la Présidence. Qui ne voit pourtant qu'il s'agit de remplir une mission aujourd'hui non assurée, comme l'a montré l'absence regrettable de l'Europe dans plusieurs crises récentes, en mer Egée, au Liban, ou ailleurs ?

Deuxième objectif : accroître l'efficacité des institutions et leur caractère démocratique. Là encore, un effort d'explication est nécessaire car nos positions sur la repondération des voix au Conseil, sur la composition de la Commission ou sur le rôle accru des Parlements nationaux, ne sont pas suffisamment comprises.

Troisième objectif : instituer des coopérations renforcées, qui permettraient aux Etats qui le veulent et le peuvent de mener ensemble, au sein de l'Union Européenne et avec l'approbation du Conseil, des actions communes plus ambitieuses.

Dernier objectif : développer la coopération pour les affaires intérieures et de justice, c'est à dire le troisième pilier. Sécurité intérieure, lutte contre la criminalité, le terrorisme, la drogue : voilà de grands enjeux sur lesquels l'Europe est attendue. De récentes tragédies nous montrent l'urgence d'une action concertée contre tous ceux qui exploitent ou martyrisent l'enfance, où qu'ils soient.

Si, sur l'ensemble des thèmes que je viens d'évoquer, nous ne faisions pas des progrès essentiels d'ici Dublin, le risque d'un échec de la Conférence ne pourrait être écarté. Tout doit être fait pour l'éviter, car un tel échec pourrait ouvrir une très grave crise européenne.


Au delà de la Conférence, la France entend affirmer la dimension sociale et humaine de l'Europe. Le bon accueil réservé à notre mémorandum doit nous encourager à développer nos propositions dans plusieurs domaines : l'avenir de la protection sociale ; l'adoption de programmes sociaux communautaires, comme celui, qui est encore en panne et qui concerne la lutte contre l'exclusion ; la lutte contre l'illettrisme ; la dimension sociale de l'élargissement.

Mais l'Europe humaine, ce doit être aussi une réflexion commune sur les questions d'éthique. Ce doit être, pour les jeunes, le développement de la mobilité dans toute l'Union, et d'abord l'apprentissage dans chacun des pays qui la compose de trois langues vivantes européennes.

Ce doit être, enfin, une coopération renforcée dans la lutte contre le fléau de la drogue. Sans attendre la fin de la CIG, nous devons travailler à l'harmonisation des législations européennes, conduisant à l'interdiction, dans toute l'Union Européenne, de toute forme de promotion, de commerce, de trafic ou d'usage de tous les stupéfiants, de production aussi.


Ainsi renforcée, l'Union Européenne doit s'élargir. Je n'ai, sur ce sujet, aucune hésitation : l'élargissement doit être l'un des grands objectifs de la diplomatie française.

Cette perspective n'est ni vague, ni lointaine: si la Conférence intergouvernementale réussit, c'est dans un peu plus d'un an que s'engagera le processus. Il faut que toutes les administrations, tous les Ambassadeurs concernés s'y préparent activement.

L'élargissement prendra du temps. Les négociations avec chacun des pays candidats progresseront à leur rythme propre, en tenant compte des critères à respecter.

Pour conserver la cohérence de ce processus, la France a fait une proposition, que je vous demande de bien expliquer. Il s'agit de convoquer une Conférence qui rassemblerait les Quinze et tous les pays candidats. Cette Conférence ne constituerait pas un acte ou un cadre de négociation, mais elle offrirait un forum de concertation et de dialogue politique où pourraient être traités tous les sujets d'intérêt commun.




Cette Europe démocratique, progressivement élargie, réconciliée dans son histoire et dans sa géographie, peut aujourd'hui construire, pour la première fois depuis quatre générations, un espace de paix et de sécurité accepté par tous les Etats du continent, parce que bâti par tous.

Voilà l'autre enjeu diplomatique majeur des prochains mois, sur lequel les dirigeants européens seront jugés par les générations à venir. Et là nous n'avons pas le droit à l'erreur.

Dans ce domaine, comme dans tant d'autres, la concertation franco-allemande est fondamentale. L'entente parfaite qui existe entre Bonn et Paris offre les meilleures chances d'une démarche globale, équilibrée, cohérente.

Plus encore que dans d'autres domaines, la France devra rester en initiative. Imaginer. Proposer. Convaincre.


Ceci vaut d'abord pour la réforme de l'Alliance Atlantique qui, enfin, et sous notre impulsion, est engagée. Assurer la mise en oeuvre de l'ensemble des décisions prises à Berlin en juin dernier ne sera pas facile, je le sais. Parce qu'il s'agit de transformer profondément les structures de l'OTAN, de les adapter aux nouvelles missions qu'appelle le bouleversement du contexte stratégique. Parce qu'il s'agit surtout de préciser les modalités d'un nouveau partage des responsabilités entre Européens et Américains. De permettre aux Européens notamment d'assurer, à travers l'UEO, la conduite effective d'opérations auxquelles les Américains ne souhaiteraient pas s'associer, et ceci en faisant appel aux moyens de l'Alliance.

Le succès de cette réforme sera le meilleur gage de la solidité et de la vitalité du lien transatlantique. Il exprimera la solidarité croissante qui s'exerce entre les pays européens, et la qualité de la relation que nous avons établie avec les Etats-Unis. Il permettra de préciser les contours de ce nouveau partenariat transatlantique dont j'ai souligné la nécessité devant le Congrès des Etats-Unis en février dernier.

Dès lors que les décisions adoptées à Berlin, je dis bien, dès lors que ces décisions auront été pleinement mises en oeuvre, alors la France, je l'ai dit, sera prête à prendre toute sa place dans cette Alliance profondément rénovée.


La réforme de l'OTAN doit s'accompagner de nouvelles étapes vers la construction d'une véritable défense européenne.

Cette ambition suppose d'abord l'affirmation d'une volonté politique commune de la part des pays concernés. Tel est le sens des propositions présentées par la France dans le cadre de la CIG, qui visent notamment à faire du Conseil européen l'instance suprême de décision en ce domaine.

Mais la France doit aussi engager sans tarder, avec ses partenaires, une réflexion au niveau politique sur le développement indispensable du rôle et des moyens de l'UEO. La présidence française de cette organisation, au premier semestre de l'année 1997, devra être l'occasion de donner une impulsion forte au renforcement et à la réforme de cette institution.

La construction d'une défense européenne crédible passe enfin par la multiplication des coopérations concrètes entre pays européens, et la constitution d'une base industrielle compétitive. La restructuration engagée de notre industrie de défense lui permettra de participer dans les meilleures conditions à l'édification de cette capacité européenne. La création de la structure franco-allemande de l'armement, élargie à la Grande-Bretagne et à l'Italie, l'accord entre la France et l'Allemagne sur les satellites militaires d'observation, la coopération engagée avec la Grande-Bretagne dans le domaine des missiles : autant de réalisations qui nous montrent la voie à suivre.


Si la perspective est nettement tracée pour la réforme de l'Alliance Atlantique et la construction d'une défense européenne, la vision devient beaucoup plus floue dès que le regard se porte plus loin et couvre la " Grande Europe ". Ne nous laissons pas enfermer dans une approche que je qualifierai de myope, en ne proposant pour seule réponse à ce problème global qu'un élargissement limité de l'OTAN.

Une telle approche pourrait provoquer une nouvelle cassure de notre continent, excluant la Russie et laissant dans un vide dangereux une partie de l'Europe centrale, orientale et balte.

Il nous faut donc réfléchir, avec l'ensemble des Etats concernés, à une solution plus ambitieuse et acceptée par tous.

Partons d'un constat d'évidence. Le continent européen a besoin d'une organisation où puissent se retrouver tous les Etats qui le composent et qui, aujourd'hui, affirment leur volonté d'enracinement démocratique. L'OSCE est actuellement la seule esquisse d'institution où tous les Etats européens sont représentés sur un pied d'égalité. Son renforcement doit constituer l'une des priorités de notre action au cours des prochains mois.

Je souhaite que l'idée française d'un traité ou d'une charte consacrant l'OSCE en tant qu'organisation de plein exercice, et codifiant les principes régissant les relations de sécurité entre tous les Etats du continent, puisse prendre corps lors du sommet de l'OSCE qui se tiendra à Lisbonne au début décembre.

L'affirmation de ce cadre pan-européen doit nous permettre de situer l'élargissement de l' OTAN dans une perspective plus favorable.

Pour réussir cet élargissement, que la France aborde naturellement dans l'esprit le plus positif, deux questions devront être traitées simultanément : quelles seront les modalités d'adhésion des pays candidats ? Et quelles seront les relations entre l'Alliance et les pays non-candidats ?

La France a des idées et fera des propositions sur ces deux questions. Je compte m'en entretenir avec nos principaux alliés, avec le Président Boris Eltsine, ainsi qu'avec les dirigeants d'Europe Centrale et Orientale, que j'aurai l'occasion de rencontrer cette année ou au début de l'année prochaine.

Les réponses à ces deux questions, qui revêtent, je le répète, une égale importance, concernent, en effet, tous les Etats qui veulent, légitimement, participer à l'édification de la nouvelle architecture de sécurité en Europe.

Dès lors, ne serait-il pas souhaitable d'associer au Sommet de l'Alliance Atlantique qui devra entériner la réforme de l'OTAN, tous les Etats qui, à l'Est de l'Europe, auront un lien avec cette organisation profondément rénovée ?

Je pense naturellement aux pays qui sont candidats à l'adhésion, mais aussi aux autres, qui établiraient ainsi avec l'Alliance des liens de partenariat - accord, charte ou traité - que le Sommet pourrait enregistrer solennellement. Parmi eux, bien sûr, devrait figurer la Russie, qui a fait en juillet le choix de la démocratie et des réformes et qui doit être pleinement associée à l'édification de la paix en Europe.

Si cette perspective était retenue par nos partenaires, ce Sommet serait, le moment venu, le rendez-vous le plus important depuis la fracture de Yalta, dont il effacerait en quelques sortes les derniers vestiges.


L'ancienne Yougoslavie, que ses haines avaient transformée en symbole des risques nés de l'effondrement de l'ordre bipolaire, était aussi devenue le symbole de notre impuissance collective. Elle est, depuis un an, le lieu où s'expérimente une coopération sans précédent entre l'Alliance, la Russie et plusieurs pays d'Europe centrale et orientale, ainsi que des pays membres de l'Organisation de la Conférence Islamique.

Sur le plan militaire, la démonstration est réussie. Mais tout le reste est encore à faire. En permettant la mise en place de nouvelles institutions, les élections du 14 septembre offrent aux Bosniaques l'occasion de passer d'une logique de séparation des forces à une logique de coopération entre communautés.

Nul ne pourra se substituer aux parties pour atteindre cet objectif. Mais chaque jour nous constatons combien le soutien résolu de l'ensemble de la communauté internationale demeure indispensable.

C'est pourquoi la France a proposé à ses partenaires la mise en oeuvre d'un " plan de consolidation " civil de deux ans. Ce plan pourrait être adopté, après les élections du 14 septembre, lors d'une réunion à Paris de la future Présidence bosniaque et du Comité directeur sur la Bosnie-Herzégovine au niveau ministériel. Au-delà de la Bosnie, il devrait contribuer à une stabilisation de l'ensemble de la région, préparant ainsi un rapprochement progressif des pays de l'ancienne Yougoslavie avec l'Union Européenne.

La solidarité entre les principaux pays engagés en Bosnie devra être maintenue lorsque s'engagera, à l'automne, une concertation sur l'opportunité et, éventuellement, la nature du dispositif militaire qui pourrait succéder à l'IFOR. Pour la France, un principe simple devra s'appliquer : les pays qui se sont engagés ensemble se retireront ensemble. Le reste sera affaire d'appréciation, le moment venu et la France abordera cette discussion dans un esprit naturellement positif.




Construire l'Europe, édifier un pilier européen au sein de l'Alliance Atlantique, bâtir une nouvelle architecture de sécurité continentale, ne suffira pas à faire de l'Union Européenne un acteur majeur du monde de demain. Il faut y ajouter une vraie politique étrangère de l'Union.

Les Quinze consacrent déjà des moyens financiers considérables à l'aide au développement. A richesse comparable, leur effort est quatre fois - je dis bien, quatre fois ! - supérieur à celui des Etats-Unis. Mais cet effort manque de visibilité.

Au-delà des améliorations institutionnelles que devrait apporter la Conférence Intergouvernementale, ce dont les Quinze ont besoin, c'est de volonté, de détermination. La France est convaincue que de nombreux partenaires européens partagent cette ambition.

Avec eux, et avec tous ceux qui le souhaitent, l'Europe doit renforcer les liens que l'Histoire lui a légués dans le monde entier.

En Afrique, d'abord.

La France a multiplié les initiatives pour défendre l'aide au développement et l'orienter en priorité vers l'Afrique. Du Conseil européen de Cannes, avec le VIIIè FED, au Sommet du G7 de Lyon, où ont été entérinés la XIè reconstitution de l'AID de la Banque Mondiale et celle du Fonds Africain de la BAD, la pérennisation de la Facilité d'Ajustement Structurel Renforcée du FMI et un nouvel effort de réduction des dettes, les résultats sont là .

Ils sont justifiés. Vous le savez, je combats sans me lasser l'afro-pessimisme, qui masque le plus souvent une volonté de désengagement. Mais les faits me confortent dans cette conviction. Je vous demande de faire connaître les chiffres du Fonds Monétaire International : en 1991, 20 pays africains, il y a cinq ans, seulement enregistraient une croissance positive par habitant. Ils sont aujourd'hui 40. Ces deux dernières années, l'Afrique, dans son ensemble, a connu une croissance de l'ordre de 5 % qui devrait, selon les experts du Fonds Monétaire International, se poursuivre. Plus important encore : ces progrès ne sont pas dus à une hausse des cours des matières premières ; ils sont le fruit des d'années d'efforts et de réformes.

Dans l'ordre politique, malgré les rechutes, et à sa manière, l'Afrique progresse sur le chemin de la démocratie, de l'Etat de droit, de cette " bonne gouvernance " à laquelle sera consacré le prochain Sommet des Chefs d'Etat de France et d'Afrique, début décembre à Ouagadougou, Sommet que prépare activement Jacques GODFRAIN.

Pourtant l'Afrique demeure fragile. Elle n'est pas encore en mesure, comme le font les pays d'Asie ou d'Amérique latine, de tirer tous les bénéfices de la mondialisation. Sans aide, et malgré ses progrès qui conforte la confiance, sans laquelle il n'y a pas de développement, elle risquerait d'être définitivement marginalisée.

Ce message de solidarité avec un continent qui progresse, je vous demande de le relayer, avec toute l'autorité que vous donne notre rang de deuxième donneur d'aide publique dans le monde, en valeur absolue, certes derrière le Japon, mais loin devant l'Allemagne, les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne. Le cercle des contributeurs doit s'élargir, c'est aussi un élément de notre diplomatie et je souhaite qu'à l'exemple de la Corée, les pays qui ont réussi leur développement tendent la main à tous ceux qui, en Afrique notamment, aspirent à les rejoindre. L'exclusion, au sein de chaque nation, comme au niveau international, est moralement inacceptable et politiquement dangereuse.


Un ensemble a une vocation toute naturelle à marquer une solidarité particulière en direction de l'Afrique : c'est l'espace francophone, qui progresse et qui s'organise.

Le Sommet de Cotonou a permis, après des années de piétinement et pour une large part grâce à l'action de Margie Sudre, une percée décisive vers un espace politique francophone. Il sera doté notamment d'un Secrétaire Général, qui sera à la fois son porte-parole politique et le coordinnateur de ses différents opérateurs. Ces nouvelles institutions seront adoptées lors du Sommet de Hanoï, dans un peu plus d'un an. Elles permettront aux quelque cinquante pays membres d'exprimer mieux leurs convergences politiques et culturelles et de contribuer plus efficacement au développement économique et culturel des moins favorisés.

Quant à l'Europe, qui s'honore en maintenant un effort financier considérable en direction de l'Afrique, je souhaite qu'elle renforce peu à peu son dialogue politique avec ce continent. Qu'elle y encourage l'intégration régionale. Qu'elle y aide concrètement les actions de diplomatie préventive. Qu'elle y apporte sa contribution au règlement des différends. La France et la Grande-Bretagne, vous le savez, y réfléchissent ensemble. Il faut que d'autres partenaires les rejoignent pour bâtir entre l'Europe et l'Afrique une relation politique que justifient leur passé commun et l'intensité de leurs liens de coopération.


Les mêmes raisons appellent à un engagement déterminé de l'Union Européenne en Méditerranée et au Proche-Orient.

Première rencontre de l'Histoire entre tous les pays de l'Europe et de la Méditerranée, la Conférence de Barcelone doit tenir ses promesses. Je compte sur vous, les Ambassadeurs concernés pour contribuer avec dynamisme à la mise en oeuvre de la coopération économique et du dialogue culturel qui a été engagés. Considérez la liste des mesures agréées à Barcelone comme un point de départ. N'hésitez pas à proposer de nouvelles idées, de nouveaux projets. Les financements existent avec, notamment, le programme MEDA. Je souhaite qu'à travers votre action, la France apparaisse comme le principal artisan de ce " pont " entre les deux rives de la Méditerranée que j'évoquais dans un discours au Caire.

Dans le domaine politique, l'enjeu n'est pas moins important. La France a proposé une Charte de stabilité dans cette région, Charte également de développement et de paix. Elle doit rapidement en présenter les contours à ses partenaires, afin que la prochaine Conférence, qui se tiendra dans un pays du Sud de la Méditerranée, et si possible je le souhaite au niveau des Chefs d'Etat et de gouvernement, puisse l'adopter solennellement.

Pour pouvoir assumer au mieux ses responsabilités régionales, la France devait rétablir avec les pays du Maghreb une relation exemplaire. C'est chose faite avec le Maroc et la Tunisie. Quant à l'Algérie, qui aspire à la paix, aux réformes, au développement, elle trouvera dans la France, si elle le souhaite, un partenaire disponible pour une coopération forte amicale, sereine et ambitieuse.


Présente en Méditerranée, l'Union Européenne ne saurait être absente du Proche-Orient. Des intérêts partagés, des prises de position constantes et équilibrées, une aide économique considérable justifient pleinement que soit enfin reconnu à l'Union Européenne un rôle politique majeur, notamment comme co-parrain du processus de paix. Encore faut-il que l'Europe le souhaite.

La France n'imagine pas de borner son rôle à des financements et à des communiqués. Notre engagement au Liban et la co-présidence franco-américaine du Comité de Surveillance en portent témoignage.

Dans la période de tension que connaît le processus de paix, la France, au sein de l'Union Européenne, entend contribuer, aux côtés des Etats-Unis, à la relance des négociations, sur la base des accords de Madrid, d'Oslo et de Taba. Il convient de respecter les engagements pris mais aussi de progresser sur tous les volets du processus afin de rendre la paix irréversible. Il faudra, enfin, réfléchir ensemble à la construction du Proche-Orient de demain, qui doit être, ce Proche-Orient, un espace de paix, de prospérité et de coopération. Et c'est possible, c'est engagé, c'est dans cet esprit que je me rendrai fin octobre dans la région, confirmant ainsi le retour de la France au Proche-Orient.


Au-delà de ces espaces si proches de l'Europe, il est deux continents que beaucoup de pays européens ont trop longtemps négligés: l'Asie et l'Amérique latine. Cette remarque, sur la négligence, vaut en particulier pour la France.

Présente pendant un siècle en Extrême- Orient, disposant alors des meilleurs spécialistes européens de ces grandes et prestigieuses civilisations, la France a, dans les années 50, tourné le dos à l'Asie en y tournant sa page coloniale, au moment même où les pays de cette région amorçaient les uns après les autres un décollage économique exemplaire.

Il faut, aujourd'hui, reprendre notre place, et dans tous les domaines : économique, bien sûr ; mais aussi culturel et politique. Hervé de Charette a raison de dire que l'Asie doit être " la nouvelle frontière " de la diplomatie française. Une stratégie cohérente doit être mise en oeuvre, avec cette constance qui nous a trop souvent fait défaut. Les visites ministérielles doivent se multiplier, en appui aux efforts d'implantation de nos entreprises et vous le savez, je compte m'y investir personnellement.

En Amérique latine, c'est un capital de sympathie exceptionnel que nous avons laissé dépérir. Ce capital, j'en suis convaincu, ne demande qu'à s'épanouir à nouveau, pour peu que nous sachions le cultiver, en marquant attention et considération à ces pays. Renouer les fils d'une proximité culturelle, développer un vrai dialogue politique dans la durée, y est aussi important que d'encourager nos groupes à participer pleinement à l'essor d'un continent transformé par la démocratie et par les réformes économiques.

Je demande à tous les Ambassadeurs concernés de réfléchir aux gestes d'amitié qui pourraient précéder, accompagner, prolonger les visites que j'effectuerai en Amérique latine au printemps prochain.

Ce retour de la France sur deux continents en pleine expansion n'aura toute sa signification que s'il coïncide avec un développement significatif de leurs relations avec l'Union Européenne. L'Europe y est espérée, attendue comme un contrepoids nécessaire dans le jeu multipolaire qui s'esquisse. Les accords qu'elle a signés avec les deux ensembles régionaux majeurs que sont l'ASEAN et le MERCOSUR montrent la voie. Nous devons encourager l'Union à y progresser avec détermination !

C'est aussi l'un des rôle de la diplomatie francaise, l'une des plus importante aujourd'hui dans le monde.




L'une des leçons les plus stimulantes que je tire de cette première année du septennat sur le plan diplomatique réside dans le constat de notre capacité d'entraînement bien au delà des deux " cercles de famille " que sont l'Union Européenne et la Francophonie.

Les dossiers du désarmement en offrent une première illustration.

Que n'a-t-on entendu lorsque j'ai dû annoncer que la France achèverait son ultime et indispensable série d'essais nucléaires ! Dans ce tohu-bohu, vous avez, sans relâche, exposé nos raisons et nos intentions. Je vous en félicite et je n'oublierai pas les Etats de tous les continents qui ont su témoigner à notre pays, dans un moment difficile et malgré d'intenses pressions, amitié et compréhension.

La vague est retombée, aussi vite qu'elle était montée, naturellement. Et le monde a compris que la France, comme elle l'avait annoncé d'emblée, était aussi déterminée dans sa contribution au succès des négociations de Genève qu'elle l'avait été pour assurer la sécurité et la fiabilité de sa force de dissuasion.

La première, et à ce jour la seule, la France a fermé son site d'expérimentation. La première, elle a proposé que le traité d'interdiction complète des essais nucléaires repose sur l'" option zéro ". La première, elle a annoncé, le 27 juin dernier, qu'elle était prête à accepter le traité en l'état. La coopération étroite développée avec les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, mais aussi le dialogue confiant que notre pays a noué sur ce dossier avec la Russie et la Chine, ont joué un rôle important dans l'évolution de cette négociation capitale.

La signature de ce traité, à l'automne, devra être suivie de nouvelles étapes dans la mise en oeuvre du programme d'action adopté en mai 1995 par la Conférence de prorogation du TNP. Ces étapes, la France les aborde dans l'esprit le plus positif. Après avoir mis un terme à sa production de matières fissiles à des fins militaires, elle souhaite l'ouverture rapide de négociations pour la conclusion d'une convention internationale dans ce domaine. Après avoir signé les protocoles des traités de Tlatelolco, de Rarotonga et de Pelindaba, elle est favorable à l'institution de nouvelles zones dénucléarisées recueillant l'accord de tous les Etats concernés.

La France doit aussi être exemplaire dans sa lutte contre le fléau des mines antipersonnel. Nos initiatives ont permis certains progrès, trop limités. Je souhaite que notre pays mobilise davantage la communauté internationale pour progresser vers une interdiction totale et générale de ce type d'armes.


Les dossiers traités par le G7 témoignent également de la capacité d'entraînement de notre pays.

A l'origine de la création de cette instance informelle de concertation, la France a d'abord mis à profit la présidence qu'elle exerce cette année pour faire évoluer le G7 lui-même. En y associant mieux la Russie. En ouvrant un dialogue nécessaire avec les grandes organisations mondiales et les pays en développement. En recentrant enfin les travaux sur les seuls dossiers où le rôle d'impulsion du G7 est irremplaçable.

Mais l'essentiel concerne naturellement le fond. En provoquant un débat d'idées sans précédent sur la mondialisation, la France a obtenu que les pays du G7 adoptent une attitude beaucoup plus équilibrée que celle qui était jusque là commune à plusieurs de ces pays. Tout en valorisant ses aspects positifs, les pays du G7 se sont notamment engagés, comme nous l'avons proposé et comme nous le souhaitions, à corriger les risques d'exclusion des plus faibles, dans nos pays et dans le monde en développement.

Ils se sont également engagés, les pays du G7, sur notre demande, à une concertation accrue sur les monnaies et à un examen approfondi des risques que la mondialisation représente pour la gestion des marchés financiers.


Cette capacité de la France à influer quand elle le veut, sur l'évolution des grands dossiers mondiaux doit nous encourager à être plus actifs encore dans la recherche de solutions aux principales menaces qui pèsent sur nos sociétés. Je vous demande d'entretenir sur ces sujets un dialogue nourri avec tous les milieux concernés, de m'informer, de me présenter le cas échéant vos propositions et vos réflexions. Je pense en particulier à cinq domaines où la France doit garder l'initiative :

Le terrorisme, contre lequel nous avons pu faire prévaloir, lors de la réunion de Paris, fin juillet, une approche pragmatique, fondée sur 25 mesures concrètes, mises en oeuvre dans le cadre d'une concertation étroite entre services compétents. Je souhaite que ces mesures puissent être adoptées par le plus grand nombre possible d'Etats.

La drogue ensuite, qui doit, au delà de l'Union Européenne, mobiliser la communauté internationale tout entière. La France y travaille. Elle présentera de nouvelles propositions dans les prochains mois.

Mais aussi le crime organisé, contre lequel, à notre initiative, 40 mesures ont été adoptées lors du Sommet du G7, en même temps qu'était créée une instance spécialisée, le " groupe de Lyon ", placée auprès d'Interpol.

Mais encore les grandes endémies, dont la résurgence actuelle ne pourra être vaincue que grâce à un effort considérable et concerté des chercheurs du monde entier.

L'illettrisme enfin, qui atteint de plus en plus durement nos sociétés modernes et accroît considérablement les risque et les phénomènes d'exclusion. La lutte contre ce fléau exige des initiatives novatrices, associant l'éducation dès les premières années et l'action sociale à l'égard des adultes.

Vouloir traiter tous ces fléaux, et quelques autres qui ne connaissent pas les frontières, c'est nécessairement plaider pour un rôle accru des organisations mondiales, pour le renforcement de leur efficacité, pour l'attribution des ressources budgétaires dont elles ont besoin.




Monsieur le Premier Ministre,

Monsieur le Président de l'Assemblée Nationale,

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,

Vous l'avez compris : tout se tient, car la force d'une politique étrangère réside d'abord dans sa cohérence, sa capacité à exprimer une vision globale du monde, sa volonté de placer chaque initiative dans une perspective d'ensemble.

C'est cette vision et cette perspective que je vous demande d'exposer à vos interlocuteurs, lorsque vous regagnerez vos postes, avant de détailler les éléments de notre politique qui les concernent le plus directement.

Je souhaite qu'ils comprennent, en vous écoutant, que la France est fidèle à ses valeurs. Qu'elle entend les incarner avec imagination, détermination et générosité. Qu'elle est à l'écoute des autres, qu'elle pratique le dialogue, qu'elle donne tout son sens au beau mot de solidarité.

Je souhaite que, grâce à vos interventions, ils mesurent le dynamisme, la capacité de réforme et l'esprit de conquête de la quatrième puissance économique du monde, et s'ouvrent davantage à nos entreprises.

Je souhaite qu'à travers votre action, votre comportement, ils reconnaissent ce grand pays que vous avez l'honneur de représenter et de servir : la France.

Je vous remercie.





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