Allocution de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, devant la communauté française à Madrid.

Allocution de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, devant la communauté française à Madrid.

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Madrid (Espagne), le mardi 10 octobre 1995.


Excusez ce retard mais nos relations cordiales et chaleureuses nous ont conduits à des propos un peu plus longs que prévu.

Monsieur l'Ambassadeur, merci pour votre accueil,

Mesdames et messieurs les délégués au Conseil supérieur des Français de l'étranger,

Mesdames, messieurs, mes chers compatriotes,

C'est évidemment pour moi un plaisir que de rencontrer aujourd'hui une représentation éminente de la communauté française en Espagne, je voudrais la saluer amicalement, et ceci au terme d'un sommet franco-espagnol qui a été une fois de plus agréable, sans problème, utile, fructueux.

J'ai été sensible d'abord à l'accueil de nos hôtes, accueil de Sa Majesté le Roi hier, et j'ai été heureux de pouvoir inviter le Prince des Asturies à effectuer son premier voyage officiel en notre pays, ce qui a été accepté, l'accueil de la Reine, l'accueil du président du Gouvernement et de l'ensemble du Gouvernement.

Tout ceci marque les relations très étroites qui existent entre nos deux pays, et qui, au fil des ans, n'ont fait que se renforcer au point d'être, je crois que le mot n'est pas excessif, tout à fait exemplaires dans l'ensemble européen.

Quelques dix ans après que l'Espagne ait rejoint la famille européenne et atlantique, la maîtrise dont font preuve les autorités espagnoles dans l'exercice de la présidence qu'elles assument actuellement, est tout à fait remarquable et doit être saluée. J'ajoute que l'Espagne et la France partagent une vision commune sur la plupart des problèmes, sur les problèmes européens d'abord et la construction de notre continent s'agissant de ses institutions, s'agissant des progrès à faire dans le domaine de l'économie et de la monnaie, s'agissant de l'élargissement, s'agissant aussi de nos relations avec nos voisins, nos voisins de l'Europe du nord, de l'Europe centrale et orientale, nos voisins Russes également, s'agissant enfin de nos relations avec l'ensemble méditerranéen qui auront l'occasion d'être mises particulièrement en exergue lors de la conférence de Barcelone, qui sera, je crois qu'on peut le dire, un événement historique, dans la mesure où il manifestera concrètement cette solidarité que nous voulons voir s'établir et se renforcer entre l'ensemble des pays méditerranéens pour créer une zone de stabilité, de paix et de développement complémentaire de l'élargissement européen au nord et à l'est.

Sur tous ces points il n'y a pas de divergences de vues, ni d'appréciation entre l'Espagne et la France et je m'en suis une fois de plus beaucoup réjoui.

Nous voulons, en effet, une Europe plus efficace, une Europe plus démocratique, une Europe plus proche des problèmes qui concernent l'ensemble des Européens, notamment ceux qui touchent au travail, c'est-à-dire à l'emploi, ceux qui touchent à la sécurité extérieure, mais aussi intérieure, et je pense à la lutte nécessaire contre le terrorisme et pour lesquels nos deux Gouvernements sont en parfaite harmonie. Sur tous ces points, je le répète, nous avons une vision et une approche qui est tout à fait identique.

Nous avons également évoqué nos problèmes bilatéraux. Cette évocation a été, je dois dire assez brève, dans la mesure où ils ne posent pas beaucoup de problèmes. Nous avons signé quelques accords. Nous avons définitivement adopté le projet de liaison Barcelone-Montpellier. Nous avons progressé dans le domaine des achats mutuels, notamment en ce qui concerne les hélicoptères, bref, les problèmes bilatéraux ont été rapidement traités.

Je rappelle que la France est le premier partenaire économique de l'Espagne et elle entend bien conserver cette place amicale et privilégiée. Une place qui est bien entendu pour une large part due aux efforts de la communauté française nombreuse et efficace dans ce pays et qu'à travers vous, je voudrais tout particulièrement saluer. Saluer le rôle exemplaire que jouent les Français dans ces échanges commerciaux bilatéraux qui ne cessent de s'intensifier, qui s'améliorent d'année en année.

La France est aussi le premier investisseur en Espagne, pour une large part, grâce au dynamisme d'un certain nombre des entreprises que vous représentez, présente également dans tous les domaines de la coopération, de l'éducation, de la culture sur lesquels nous devons poursuivre et intensifier notamment en ce qui concerne notre langue, nos efforts.

Mais naturellement rien n'est jamais définitivement acquis, et l'importance de votre rôle dans ce domaine est essentiel, je pense à la place de notre industrie automobile PSA, Renault qui se distinguent par leurs capacités d'investissements, de production, d'exportation, je pense au rôle que jouent les filiales d'entreprises françaises dans la production d'équipements pour le TGV espagnol et les TGV étrangers, sans oublier naturellement la place très importante qu'occupent d'autres entreprises dans le secteur agro-alimentaire, les industries de pointe, les services financiers, la distribution, d'autres domaines encore.

Mais il est un domaine où nous devons poursuivre un effort vigoureux, et que je viens d'évoquer à l'instant, qui est celui de la place de notre langue dans ce pays, qui a une culture ancienne, une culture forte, une langue qui l'unit à d'autres continents et qui longtemps a été un pays assez largement francophone. Il y a aujourd'hui des évolutions qui doivent être prises par nous en considération, quelque soit la facilité d'insertion qu'offre la société espagnole, les Français expatriés sont naturellement conscients que notre langue reste le facteur primordial de notre identité et l'expression même de notre culture.

Nous devons avoir deux objectifs : renforcer le statut de langue vivante du français, et développer encore notre coopération culturelle, qui est riche, qui est diversifiée, c'est vrai, mais nous devons en permanence amplifier le rayonnement de notre culture. Une Europe où le français ne serait pas une langue forte, vivante, parlée, serait une Europe culturellement appauvrie.

Chers compatriotes, je sais que vous êtes conscients, comme je le suis moi-même, du capital de sympathie dont nous disposons dans ce grand et beau pays. Les relations entre voisins sont des relations parfois un peu délicates. Entre la France et l'Espagne, dans notre longue histoire, elles ont connu des périodes difficiles et même tragiques. Aujourd'hui, et je termine par où j'ai commencé, nous avons des relations d'étroite coopération entre les Etats, et une amitié solide entre les peuples, indiscutable.

Le défi de la construction européenne, les dangers du monde dans lequel nous vivons, qu'il s'agisse des perturbations que nous connaissons ici ou là, notamment en Europe avec l'affaire bosniaque où soldats espagnols et français ont été ensemble présents et côte à côte, ou qu'il s'agisse du terrorisme, dont nous sommes les uns et les autres à la fois les victimes, tout ceci ne peut que nous renforcer dans nos liens.

Les quelques contentieux bilatéraux qui nous ont opposés dans un passé récent se sont effacés ou sont en voie d'effacement. Je sais que pour l'Espagne, la France demeure une référence et que notre amitié lui est précieuse, c'est réciproque. Et je tiens à vous redire ici que vous êtes naturellement les premiers artisans, les premiers responsables de l'amitié qui unit le peuple espagnol et le peuple français. Il nous appartient, il vous appartient, de faire vivre cette amitié. C'est naturellement ce que vous faites et compte tenu des résultats, je tenais à vous exprimer mes sentiments de reconnaissance, de gratitude au nom de l'ensemble du peuple français

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