Allocution prononcée par M. Jacques CHIRAC président de la République lors de la réception de la communauté française à la Résidence de France (Libreville)

Allocution prononcée par M. Jacques CHIRAC, Président de la République, lors de la réception de la communauté française à Libreville.

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Libreville - (Gabon) - Samedi 22 juillet 1995.


Mes Chers Compatriotes,

Je voudrais tout d'abord, en votre nom à tous, saluer et remercier Monsieur l'ambassadeur et son épouse pour leur accueil cordial et chaleureux dans tous les sens du terme. Je voudrais également saluer la présence ici d'un vieil africain, il faut dire d'un africain d'ancienne tradition et qui a été longtemps avec le Général de Gaulle, puis avec Georges Pompidou, puis avec moi, c'est Jacques Foccart et je suis heureux qu'il ait pu faire ce premier voyage en Afrique pour moi, comme il l'avait accompagné le Général et Georges Pompidou pour leur premier voyage en Afrique.

Je voudrais également saluer toutes celles et tous ceux qui, à un titre ou à un autre, sont installés dans ce beau pays, où ils travaillent, où ils donnent le meilleur d'eux-mêmes dans des conditions parfois difficiles, pour une certaine idée de la France, mais aussi pour une certaine vision de ses responsabilités sur le continent africain.

Je voudrais enfin, ici, dire combien j'ai été sensible à l'accueil du président Omar Bongo, qui est pour moi un ami de longue date et qui, une fois de plus aujourd'hui, a témoigné de sa fidélité à nos idéaux communs et à notre engagement commun pour une certaine idée franco-africaine.

Je salue avec plaisir les cinq autres présidents de la région, venus ici à son invitation, avec lesquels j'ai eu des entretiens toute cette après-midi. Car, en effet, j'ai voulu faire mon premier voyage à l'étranger -je ne parle pas naturellement des obligations multilatérales du type du sommet du G7 à Halifax- en terre d'Afrique et j'ai souhaité symboliquement m'arreter d'abord à Yamoussoukro. Chacun en comprend les raisons : il s'agissait de rendre hommage à la mémoire de ce très grand humaniste, de ce très grand africain que fût le président Félix Houphouët-Boigny. J'ai voulu ensuite venir ici, à Libreville, et saluer le doyen des chefs d'Etat africains, le président Bongo, et, à travers lui, indiquer ma volonté de poursuivre, d'amplifier, de moderniser les relations entre la France et les pays de cette région.

Puis, je vais, dans quelques instants, reprendre l'avion et gagner Dakar, pour y rencontrer le président Abdou Diouf, dans cette région qui est la plus ancienne région francophone de l'Afrique et rencontrer aussi les présidents des pays environnants.

Pourquoi j'ai tenu à ce voyage, au-delà des sentiments que j'ai toujours portés à l'Afrique et qui sont des sentiments d'estime, de respect, d'affection ?

C'est pour marquer d'une part, que la France à l'intention, dans la tradition gaulliste qui a toujours été la sienne, de maintenir et d'amplifier les relations qui sont les siennes avec les pays africains en général, avec les pays africains francophones en particulier. Ce qui donne à notre pays cette structure ministérielle particulière qu'est le ministère de la coopération. Je voudrais, ici, saluer notre ministre de la coopération, Jacques Godfrain, ancien Président, lorsqu'il était député, du groupe France-Gabon, ce qui témoigne de l'intérêt qu'il a toujours porté au Gabon et qui, de plus, est pour moi un ami de longue date. Je lui fais toute confiance pour conduire une politique de coopération franco-africaine dynamique, hardie, novatrice et conforme à ce que nous pouvons souhaiter.

La deuxième raison, c'est que, je voulais affirmer que la France ne partage pas les sentiments pessimistes qui sont aujourd'hui développés chez beaucoup d'hommes politiques, d'intellectuels, de médias dans le monde et veulent nous dépeindre l'Afrique comme un continent au bord du désespoir, marqué par la maladie, la famine ou les conflits et qui serait, en quelque sorte, à la dérive et qui n'intéresserait plus personne. Ce jugement est à la fois pervers, il ne correspond à aucune réalité et il contredit surtout les efforts importants que l'on voit engager dans chacun des pays africains, en tout cas plus particulièrement en Afrique francophone, efforts pour assurer une meilleure gestion. Il est tout de même frappant de voir que maintenant, presque tous ces pays ont accepté de conduire des politiques d'ajustement structurel avec les institutions internationales, donc efforts de bonne gestion, de meilleure gestion des efforts pour, petit à petit, instituer des Etats de droit, tant qu'il est vrai qu'il n'y a pas vraiment de démocratie sans développement, pour autant que l'on veuille comprendre que chacun doit selon sa culture, son histoire, sa tradition, conduire le mouvement vers la démocratie à son rythme et à sa façon. Nous n'avons pas de leçons à donner comme trop souvent nous sommes tentés de le faire, mais nous avons un mouvement à encourager.

Je suis de ceux qui croient que l'Afrique a son avenir devant elle. Je me souviens de ceux qu'il y a trente ans, il y a quarante ans, je parle de ceux qui se croient experts, parlaient avec mépris des états asiatiques qui aujourd'hui connaissent des taux de croissance à deux chiffres.

Les choses changent plus vite qu'on ne le pense et je crois que nous pouvons faire confiance à l'Afrique qui, aujourd'hui, a emprunté le bon chemin, qui fait des efforts, et que nous devons encourager. C'est la responsabilité des grandes puissances, des Etats qui ont les moyens de le faire, et la France ne peut que condamner ceux qui se désengagent de l'effort de développement et encourager ceux qui veulent le renforcer, au premier rang desquels elle se trouve. Et la France doit rendre hommage à tous nos compatriotes, qui par leur présence, dans tous les domaines d'activités civiles, militaires, religieux sont au premier rang de ces forces de mouvement au service des pays d'Afrique.

Vous êtes ici, toutes et tous, les témoins de cet effort et je voudrais vous exprimer toute ma reconnaissance et surtout mes sentiments d'estime. Alors, je sais, je l'évoque en terminant les problèmes auxquels vous êtes confrontés. Je sais parfaitement que les conditions dans lesquelles est intervenue la dévaluation n'ont pas été sans provoquer des effets pervers et que nombreux sont celles ou ceux d'entre vous qui dans le domaine de l'éducation, dans le domaine de la protection sociale, dans celui de la gestion des entreprises, qui connaissent des arriérés, qui connaissent des difficultés de transferts ou des difficultés de réévaluation de bilan. Je sais que vous êtes confrontés à ces difficultés. Je voudrais simplement vous dire que nous le savons et que notre gouvernement fera tout ce qui est en son pouvoir pour essayer de faciliter les choses et surtout de corriger les injustices ou de desserrer les freins qui ont pu être créés par cette opération monétaire.

Je voudrais enfin vous remercier personnellement d'être si nombreuses et nombreux ce soir ici car j'y vois aussi un geste d'amitié, auquel je suis particulièrement sensible, dans l'effort que j'ai voulu engager au service de notre nation et de toutes les dimensions de son action notamment, bien entendu, sa dimension extérieure et en particulier sa dimension africaine. Alors de tout coeur, je vous dis merci.





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