Dialogue à l'occasion de la table ronde concernant le Xème anniversaire de la zone franche de la ville d'Amiens.

Dialogue à l'occasion de la table ronde concernant le Xème anniversaire de la zone franche de la ville d'Amiens.

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Amiens (Somme) le mardi 14 novembre 2006.

INTERVENANT - Je vous remercie, Monsieur le Président, Messieurs les Ministres, je dis Messieurs les Ministres, parce que tous les deux sont un peu les parrains qui ont permis le développement de cette entreprise. D'abord, bien sûr, Gilles de ROBIEN.

Nous nous sommes installés dans le bâtiment qui est derrière. En 1998, nous avons créé 50 emplois dans la zone franche urbaine, non pas pour venir chercher, j'insiste bien là-dessus, uniquement des aides et un accompagnement mais, bien évidemment, des talents et des compétences qui nous ont permis d'exercer au mieux notre métier. Notre métier sont les centres d'appels. Un secteur décrié mais qui est aujourd'hui reconnu. Nous représentons 250 000 emplois.

Je salue également Jean-Louis BORLOO, puisqu'il nous a reconnu, il y a deux ans. Il nous a aidé à structurer notre marché, à créer des labels social. On a fait beaucoup de choses ensemble.

Au-delà de la zone franche, nous nous sommes développés avec 200 emplois et nous avons respecté les 50 que nous sommes venus chercher dans les quartiers. Nous sommes, aujourd'hui, mille. Je tiens à souligner que nous avons dû quitter la zone franche au bout de 2-3 ans, parce que nous avions besoin de places.

Mais qu'est-ce qui s'est passé ? Il s'est passé que l'ensemble des gens que nous avions trouvé dans les quartiers, que nous sommes venus chercher pour travailler dans nos services de hotline technique, de multimédias, d'annuaires téléphoniques, nous ont suivis. Aujourd'hui, on se retrouve au centre d'Amiens avec 200 personnes qui viennent de ces quartiers sur les mille qui continuent à travailler avec nous, qui sont heureux de travailler. Ce sont des talents que nous sommes venus chercher, mais eux-mêmes sont devenus des experts de la relation clients.

Nous avons une chance extraordinaire, c'est que nos métiers de la relation clients, vous l'avez bien compris, permettent de faire travailler des jeunes, des moins jeunes, toutes les couleurs que l'on peut imaginer, on s'en fiche pas mal, puisqu'on n'a pas besoin de diplômes, nous avons besoin de compétences, avant tout. Je salue aussi, puisque c'est la semaine du handicap -nous prenons énormément d'handicapés-, Gilles de ROBIEN, qui était venu voir les non-voyants que nous avions intégrés. Ce métier s'y prête. Nous avons fait le pari. C'est gagnant-gagnant pour tout le monde et nous sommes ravis aujourd'hui de venir témoigner devant vous. Merci, Monsieur le Président.

LE PRESIDENT - Merci, Monsieur DADIAN, vous avez fait une superbe réussite à laquelle chacun se doit de rendre hommage et qui va se poursuivre, j'en suis persuadé et je le souhaite pour vous-même et la région. Au total, vous avez commencé dans la zone ?

INTERVENANT - Oui, nous avons créé dans la zone.

LE PRESIDENT - Au fond, vous me dîtes, la priorité pour nous, n'était pas la recherche d'avantages matériels, nous avions une autre ambition. Mais, s'il n'y avait pas eu de zone, qu'est-ce que vous auriez fait ?

INTERVENANT - S'il n'y avait pas eu la zone franche, notre développement ne se serait pas accéléré aussi vite. Je salue également, au-delà de la zone franche qui est un outil comme un autre, un dispositif qu'a créé Amiens, qui est excessivement porté vers l'entreprise, puisqu'il nous a permis d'avoir des locaux réhabilités. Il nous a permis d'avoir évidemment aussi des réseaux, mais, avant tout, des hommes et des femmes. Notre métier de services qui est composé d'hommes et de femmes -80% des charges sont des hommes-, a pu se développer grâce à des guichets de recrutement. Nous avons utilisé des ateliers du multimédia. Nous avons utilisé aussi, bien sûr, un guichet qui est une somme de ressources avec les ANPE, avec les PLI, donc les hommes et les femmes. Tout ce dispositif d'accompagnement de notre croissance nous a rendu indispensable. Je dirais que la zone franche a été un accélérateur pour nous permettre -sociétés en création ayant peu de fonds-, de nous développer plus vite.

LE PRESIDENT - Quand vous avez commencé, vous étiez, vous m'avez dit combien ?

INTERVENANT - 2 au début, 50 dans la zone franche et ensuite, petit à petit, nous avons grossi.

JEAN-YVES BOURGOIS - Merci, M. DADIAN. Votre voisin, Monsieur Jean-Luc DEMANGE-BRINON, je ne veux pas dire que c'est le dernier, car cela serait trop court, mais je peux dire qu'il est, en tout cas, sur le premier dispositif de zone franche, le tout dernier à s'être inscrit, justement parce qu'il a senti que, pour le métier qu'il veut développer, qui est un métier de traitement du courrier, il y avait une opportunité dans la zone franche. Pouvez-vous nous expliquer ce pas que vous avez franchi ?

INTERVENANT - Oui, effectivement. Il nous était apparu que certaines dispositions européennes ouvrant la concurrence des services de La Poste, notamment certains services de remise de collecte et d'affranchissement pour le compte de tiers, laissaient entrevoir une opportunité de développement commercial. C'était un marché sur lequel il n'y avait aucune visibilité puisque l'ouverture était au 1er janvier 2002 et la zone franche s'arrêtait au 31 décembre 2001 sans, à l'époque, d'opportunités.

S'il n'y avait pas eu la zone franche, c'est clair que nous nous ne serions pas lancés. L'aspect facilitant la zone franche a été déterminant dans le fait de déposer les statuts le 23 décembre. Cela, c'était quelque chose d'évident.

On est parti plus serein. On est parti avec des contraintes, avec des lourdeurs allégées par le dispositif. On a commencé à 2. On est aujourd'hui 20. L'ensemble des salariés sont embauchés en CDI. Plus de 50% sont issus de la zone franche. On a eu un aspect un peu facilitant, c'est que l'on a besoin justement de compétences, comme vous, et non pas de diplômes, ce qui nous a aidé à les trouver dans la zone franche et à faire des gens qui ont, aujourd'hui, un CDI, qui ont un retour au travail, qui ont une rupture, avec des fois, des problèmes de déscolarisation, et qui sont revenus des vrais acteurs avec un contrat de travail, avec un logement, avec un véhicule, ce qui leur a permis d'avoir une existence normale, une existence décente et de rentrer le soir chez eux en disant simplement qu'ils sont allés travailler pour quelque chose, pour une entreprise et pour le développement d'une entreprise.

Cela, c'est l'aspect humain et social de la démarche que l'on a pu avoir et que l'on a découvert au fur et à mesure de la zone franche. L'autre aspect de la zone franche qui a été pour nous fondamental, au-delà des éléments déclenchants, est, non pas que l'on est fait des bénéfices immédiatement, cela n'existe pas sur des créations, mais tout ce que l'on a pu gagner, que chaque centime, on a pu le réinvestir dans l'intégralité. On est arrivé avec 7 500 000 euros de capital. On fait une augmentation la semaine prochaine à 150 000 euros juste par le réinvestissement des bénéfices qui n'ont pas été fiscalisés. Ces 150 000 euros, que l'on a certes gagnés sur la zone franche -on n'est pas philanthrope-, on les a totalement réinvestis dans l'outil de travail. On va continuer, au-delà des 50, à pérenniser notre activité sur un terrain que la Métropole nous cède pour que l'on puisse construire.

C'est pour cela que je vais revenir sur ce que vous avez dit. On ne vient pas en zone franche pour gagner. On vient en zone franche pour trouver là une espèce de catalyseur de toutes les autres aides qui peuvent exister : sur les aides des collectivités territoriales qui nous ont permis de déménager trois fois en cinq ans, c'est-à-dire de suivre notre progression, aucun bailleur privé n'aurait accepté ce genre de chose. Ce sont les aides de la région que l'on a pu avoir à l'époque en terme d'investissements machines. Ce sont les aides logistiques que l'on trouve autour. Et puis, il y a certes cette fiscalité qui permet de réinvestir l'intégralité du gain. Cela est vraiment le discours que j'ai sur la zone franche.

Et expliquer une dernière chose, c'est que la zone franche doit vivre, non pas en autarcie, mais doit vivre, bien sûr, implantée en zone franche avec des salariés de la zone franche, cela ne pose aucun problème, mais surtout démontrer qu'il y a une excellence en zone franche et qu'elle est au service de la Métropole, de la ville, du département, puisque c'est notre secteur d'activité, et qu'il y a ici des excellences qui savent se montrer, qui savent se vendre ailleurs et qui savent pérenniser nos emplois par elles-mêmes. C'est vraiment le message le plus important que j'ai voulu vous délivrer aujourd'hui.

LE PRESIDENT - Et de votre point de vue, la perception qu'ont les habitants de l'agglomération de la zone franche a-t-elle évolué ?

INTERVENANT - Excessivement. Parce que pour moi, le premier, les quartiers Nord étaient des endroits que je connaissais simplement pour aller à Doullans -parce que c'est la route-, je n'en savais pas beaucoup plus en ayant toujours habité Amiens. Il y avait une scission entre deux villes : la ville nord et la ville sud. Il n'y avait pas de secret. Aujourd'hui, j'y suis tous les jours. J'y vais faire mes courses, au marché le dimanche, mais c'est mon expérience de chef d'entreprise. J'ai remarqué surtout que nos clients qui nous disaient au début : "Mais attendez, vous êtes en zone franche, qui va venir récupérer le courrier chez nous ?". Parce qu'on l'a eu très clairement cette question là. On nous a dit : ""On ne veut pas n'importe qui dans nos bureaux !". Aujourd'hui, ils se sont rendus compte qu'il y avait cette excellence, qu'elle existait et qu'ils pouvaient avoir une qualité de service qui était même très supérieure à leurs prestataires habituels avec un prestataire implanté en zone franche. Je crois que, effectivement, cela traduit complètement le changement d'image qu'il y a eu.

LE PRESIDENT - On m'a dit que vous aviez mis en place un plan épargne entreprise pour vos salariés. Comment cela se passe-t-il ? Combien avez-vous actuellement de salariés ?

INTERVENANT - Aujourd'hui, on est 20. On n'est pas du tout légalement obligé de le faire. On l'a fait de façon tout à fait volontaire et cela s'incrit dans le même schéma que celui que nous avons d'embaucher uniquement en CDI. Parce que nous considérons que le salarié doit, à la fois, comprendre que son travail apporte un profit à l'entreprise et que l'entreprise peut le partager avec lui et, d'autre part, que l'inscription dans la vie, elle se fait aussi avec une entreprise qui va l'accompagner au quotidien avec un CDI pour avoir un logement, etc., mais aussi avec une épargne sur laquelle l'entreprise va abonder. Cela veut dire deux choses. Premièrement, que je participe au bénéfice. Deuxièmement, que l'entreprise veut me garder en mettant un dispositif complémentaire non obligatoire. Cela veut dire que si jamais je m'en vais un jour, parce que je vais évoluer, parce que mon profil va changer, parce que je vais avoir d'autres aspirations dans la vie. Je vais partir avec, des fois, de quoi faire un apport pour acheter une maison. Je vais partir en faisant face à un changement de vie, l'achat d'une voiture, l'arrivée d'un enfant. C'est cette volonté que l'on a ouverte.

On a mis en place, ici, ce système. Trois mois après, 38% des salariés y ont adhéré. Certains, tout petit, 10 € par mois. A la fin de l'année, cela fait un peu d'argent de ranger. Cela sur cinq ans, avec des intérêts, cela fait un petit capital. Cela montre que l'entreprise n'est pas simplement une machine à gagner de l'argent sur le dos des salariés. C'est aussi une machine à faire profiter du fruit du travail et à montrer que l'on travaille tous pour le même objectif.

LE PRESIDENT - C'est une forme d'intéressement.

INTERVENANT - C'est comme cela qu'on l'envisage.

JEAN-YVES BOURGOIS - Monsieur DEMANGE-BRINON est très modeste puisqu'il ne signale pas qu'il a gagné un concours national qui est le grand Prix de l'Entreprise située en zone franche. Grand Prix, qui lui a été remis, l'an passé, par Jean-Louis BORLOO.

LE PRESIDENT - Si Jean-Louis BORLOO ou Gilles de ROBIEN ont des questions à poser, bien entendu, ···C'est un débat.

MAXIME GREMETZ - Monsieur le Président, je voudrais savoir si dans cette assistance, il y a des salariés de chez nous.

INTERVENANT - Pour cette manifestation, en ce qui me concerne, on n'a pas eu d'autres invitations. Je pense qu'il y a beaucoup d'autres représentants dans la zone franche. Il y a beaucoup d'acteurs de la zone franche qui sont là aujourd'hui. Par contre, à l'Assemblée nationale, lorsqu'on nous a remis le Prix, les salariés étaient invités et ils ont pu voir que la République savait aussi honorer le travail que l'on faisait.

JEAN-YVES BOURGOIS - Il s'agit effectivement d'une table qui fait parler les acteurs qui, réellement, ont créé de l'activité. Une partie des salariés···

MAXIME GREMETZ - Ce sont les salariés qui produisent les richesses. Vous devez avoir une belle entreprise !

INTERVENANT - Vous avez parfaitement raison, Monsieur GREMETZ. Ils ne sont pas là, mais ils sont là dans notre cœur, puisqu'ils savent très bien que grâce au dispositif de validation des acquis de l'expérience, ils ont pu obtenir un certain nombre de diplômes qu'ils n'avaient pas évidemment dans leur quartier. Nous avons des conventions collectives, nous nous sommes inscrits avec des minima salariaux. Ils ont des minima salariaux. Ils ont des diplômes grâce à l'entreprise. Donc, l'entreprise s'est engagée aujourd'hui pour les accompagner dans leur développement. Ils sont là, avec nous, croyez-moi.

MAXIME GREMETZ - ···mais ils auraient pu être là.

INTERVENANT - Ils sont là avec nous et c'est eux les premiers qui m'ont annoncé votre visite. C'est une fierté exceptionnelle pour eux de savoir que vous veniez les rencontrer à Amiens. Vous veniez suivre la zone franche. Eux, le savaient avant moi, puisqu'ils connaissent leur quartier par cœur et qu'ils avaient vu vos ambassadeurs.

JEAN-YVES BOURGOIS - Justement on parle des gens du quartier. Parfois, on a aussi le sentiment que, effectivement, cela ne résout pas tout dans la zone franche, mais que l'on a quand même quelques moyens d'accéder un peu plus facilement à l'emploi. La question que j'ai envie de poser à Christelle NORMAND, qui est en charge de l'accueil des jeunes pour les aider dans la formation, dans l'orientation, dans l'accompagnement vers l'emploi, est : "Est-ce que la zone franche apporte quelque chose et est-ce que cela vous a semblé être un outil facilitateur ? Est-ce réellement une chance de plus, puisque c'est la question du jour, pour les jeunes du quartier, pour s'insérer dans le milieu professionnel ? ".

INTERVENANT - Oui. Effectivement, la zone franche c'est une chance supplémentaire. Cela a permis, en parallèle du lancement de la zone franche, le lancement d'une antenne de proximité sur le quartier où on a une équipe de professionnels qui agit en direction, à la fois des publics, jeunes et adultes, et des entreprises. Cela a permis surtout d'amener l'entreprise sur le quartier, en tout cas, de façon bien plus importante qu'elle ne l'était auparavant. Cela donne aussi une image différente de l'entreprise. Elle est là, elle est proche. On y travaille et on peut aussi aller à la rencontre de cette entreprise.

Ce qui est important, lorsqu'on travaille dans l'accompagnement de public, comme on le fait dans le cadre du civisme pour les jeunes, ou dans le cadre du PLI pour les adultes, c'est la possibilité de travailler avec ces entreprises pour organiser les visites d'entreprises notamment, organiser des parrainages. Aujourd'hui, ce qui manque à nos publics, c'est surtout la connaissance de l'entreprise. Cette proximité, forcément, est un atout formidable puisqu'on peut le faire sur la zone franche, bien sûr -à l'extérieur-, mais vraiment sur la zone franche. C'est vrai qu'il y a toute une équipe de professionnels qui ont un outil aussi pour eux. C'est à la fois bénéfique pour les demandeurs d'emplois, jeunes ou adultes, mais aussi pour les professionnels qui ont des outils supplémentaires.

On travaille aussi pour ces publics sur la qualification. Tout à l'heure, tous les deux, effectivement vous avez dit : on a pas forcément besoin de diplômes mais de compétences. C'est vrai que, aujourd'hui, on est sur un territoire qui souffre d'un déficit de qualification. Ces qualifications ne sont pas forcément un diplôme d'Etat mais cela peut être aussi des diplômes spécifiques proposés, organisés, je veux dire, créés avec les entreprises comme on a pu le faire sur la filière des technologies de l'information et de la communication.

LE PRESIDENT - Avant de venir ici, j'ai eu l'occasion d'interroger quelques chefs d'entreprise installés et se développant dans des zones franches, dans d'autres zones franches en France. J'ai entendu, naturellement, beaucoup d'appréciations, mais j'ai entendu aussi des réserves, et notamment celles selon lesquelles on avait du mal à trouver les gens formés pour être dans l'entreprise elle-même, dans une zone franche. Autrement dit, un certain nombre de chefs d'entreprise disaient : "mais je ne trouve pas de gens formés". Quelle est votre réflexion sur ce sujet et comment est-ce que l'on peut essayer de remédier à cette situation ?

INTERVENANT - Comme je vous le disais effectivement, on part d'assez loin puisque l'on a des taux de qualification qui sont quand même très faibles sur le territoire. Il y a un certain nombre d'entreprises qui proposent des postes qualifiés et qui ont des difficultés puisque nous sommes sur un territoire qui est restreint, la ZFU. Ensuite dans le deuxième dispositif, on a eu la possibilité d'ouvrir aux habitants des ZUS. Cela nous a permis d'ouvrir un peu le potentiel de demandeurs d'emplois.

C'est vrai que l'on doit qualifier aujourd'hui. On le fait. On a la chance sur le territoire de travailler avec un ensemble d'acteurs et de partenaires qui travaillent avec nous et avec les entreprises pour mettre en place des formations, alors généralistes. Cela peut être des formations qui sont organisées avec le Conseil régional sur des métiers, des diplômes, des choses comme cela. On travaille aussi, en direct, avec les entreprises sur un dispositif qui s'appelle "parcours vers l'emploi" qui, en fait, est la rencontre d'entreprises qui ont des besoins spécifiques et qui élaborent un plan de formation qui est spécifique à leur entreprise, et les partenaires que sont le Conseil régional et l'Assedic qui cofinancent ces actions de formation avec les entreprises. L'entreprise élabore son plan de formation et s'engage à embaucher, à l'issue de cette formation. 80% des personnes ont suivi la formation. Ce sont des outils que l'on positionne ponctuellement en complément, je dirais, de l'offre de formation classique pour répondre, un peu plus souplement aussi et plus rapidement, aux besoins des entreprises.

LE PRESIDENT - Donc, ce problème de la formation peut être améliorée.

INTERVENANT - On l'améliore. Et il ne faut pas oublier, naturellement, tous les dispositifs : apprentissage etc...

LE PRESIDENT - ··· Oui, naturellement. Ce qui m'avait impressionné, ce sont ces quelques réflexions sur l'incapacité à trouver des gens aptes à se former ou voulant se former.

INTERVENANT - Cela aussi, c'est une difficulté que l'on rencontre aussi bien avec les jeunes qui veulent travailler tout de suite. On doit les confronter à l'entreprise. Parfois, on les met en situation d'observation dans une entreprise et ils se rendent compte qu'effectivement ils ne sont pas prêts. Là, on peut travailler dans le cadre de l'accompagnement à l'entrée en formation.

Sur les adultes, c'est vrai, qu'un certain nombre d'adultes ont rencontré des difficultés dans leurs parcours et, pour eux, reprendre une formation cela semble difficile. Je pense qu'ils ont peur aussi de reprendre une formation et de se dire : "Est-ce que je vais y arriver ? Je n'ai pas été à l'école depuis longtemps, comment vais-je faire ?".

On a tout ce travail là à faire, sur le savoir être et la connaissance de l'entreprise, puis d'adapter et aussi de se dire que la formation, ce n'est pas de la formation théorique pour simplement apprendre. Non ! C'est une formation qui est ensuite adaptée à un métier que vous allez pouvoir développer des compétences···, et ensuite vous investir et vous épanouir dans votre travail. On a tout ce travail là à faire, effectivement.

JEAN-YVES BOURGOIS - Très bien. On voit que vous y mettez beaucoup de cœur et de dynamisme dans l'action. Chaque jour, il y a des jeunes qui sortent du système scolaire et, chaque jour, il y a de nouveaux jeunes à prendre en charge. Continuez à être aussi dynamique et énergique.

Maki MERAOUMIA est notre intervenant suivant. Il faut beaucoup de sport et c'est pour cela qu'il est blessé, aucun autre symbole dans cette blessure. Maki est peut-être un des symboles de la zone franche. Il y a dix ans, Monsieur le Président, vous aviez déjeuné avec lui. Il était, à l'époque, un jeune militant associatif plein d'énergie. On le retrouve dix ans plus tard à la tête d'une entreprise, Ecotoner, entreprise spécialisée dans le recyclage de consommable, informatique et de bureautique.

Maki MERAOUMIA est un enfant du quartier tout simplement. Il va nous parler un petit peu de son expérience et surtout de la zone franche avec ce qui convient et ce qu'il débusque aussi comme point négatif. Comme il est extrêmement dynamique, l'ensemble des autres chefs d'entreprise de la zone franche l'a élu Président de l'Association des entreprises en zone franche.

INTERVENANT - Monsieur le Président, Messieurs les Ministres. Effectivement, en 1996, lorsque vous étiez venu à Amiens. J'ai eu l'honneur de déjeuner avec vous en tant que militant associatif. On s'était donné rendez-vous dans dix ans.

Cette fois, en tant que chef d'entreprise, je suis effectivement très heureux. Une société que j'ai créée en 2000, spécialisée dans la vente de produits informatiques et non pas uniquement de cartouches recyclées. On a un dispositif de négoce, de tout ce qui est produit informatique. Nous sommes en train de vivre une période de mutation de la TPE vers une PME, c'est-à-dire que l'on est en train de bouleverser notre structure, notre organisation. Nous allons changer de nom. On va élargir notre catalogue. On se développe aussi dans le service informatique et l'infogérance.

LE PRESIDENT - Actuellement, vous avez combien de salariés ?

INTERVENANT - J'ai 9 salariés. C'est un cap que les entreprises franchissent au bout d'un certain temps et nous sommes un peu dans cette période. Lorsque j'ai créé cette entreprise, c'était en zone de droit commun, nous n'étions pas en zone franche. Je l'ai créée dans une autre zone à Amiens. Je me suis installé, en 2001, avec le bâtiment Ecopolice numéro 2 qui est de l'immobilier public.

La zone franche a permis effectivement d'embaucher facilement. Lorsqu'on crée une entreprise, on a très peu de moyens. Et, en plus, quand on est abattu par les charges -vous avez dit : "1 €-, on n'a pas encore gagné 1 € que l'on en a dépensé 3 000". Vous voyez bien que c'est difficile de créer une entreprise. Le dispositif de zone franche nous aide justement. Quand on vient d'un milieu défavorisé, on n'a pas beaucoup de moyens. On essaie de prendre toutes les aides qui peuvent se présenter pour créer et pérenniser déjà son emploi et en créer d'autres. C'est ce que je suis parvenu à faire, mais il y a encore plein de choses à dire.

Sur le dispositif de zone franche, je pense que j'en suis très heureux. Il faut savoir qu'il y a dix ans, on ne venait pas dans le quartier, ou peu, ou bien avec des craintes. On avait peur de se faire piquer sa voiture. Aujourd'hui, non seulement les gens viennent, mais en plus, ils y travaillent. Là, le challenge est réussi quand même. Aujourd'hui, on a plein de gens qui viennent de l'extérieur des quartiers, qui avaient, sans doute, des a priori négatifs sur le quartier, mais ils y viennent et participent à la vie économique. Ils voient les commerces approximatifs mais, en plus, ils y travaillent. Ils passent une grande partie de leur vie maintenant sur le quartier. Cela, c'est le côté positif des choses. C'était des terrains vagues. On a vu pousser des entreprises. Les gens se sont tenus dans leur quartier. En tant qu'habitant du quartier, puisque j'y suis né, j'y ai grandi, j'y vis et j'y travaille, j'ai vu mon quartier se transformer dans le bon sens du terme.

On ne peut pas parler des zones franches, sans parler des quartiers qui accueillent ces zones franches. Et là, c'est un dispositif, je pense, qui est à perfectionner. Je profite de votre venue pour vous le dire. Les éléments à perfectionner :

Le premier qui me vient à l'esprit, ce sont les jeunes eux-mêmes. Comme vous le savez, vous avez lancé les zones franches dans des quartiers qui avaient avec un taux de chômage élevé, avec une population jeune, avec des catégories sociaux professionnelles défavorisées. C'était en direction de ces jeunes gens là, d'où les 20%, au départ, d'habitants issus du quartier Nord en 1997, pour que les entreprises bénéficient du dispositif exonération zone franche. En 2003, la loi de Finances a été modifiée à 33%. Il y a une nette amélioration. Mais si je peux vous recommander d'augmenter un peu le quota -je sais bien que l'on ne pourra pas faire 100%, c'est quasiment impossible-, mais essayez de continuer ce progrès en ce sens, et notamment en ce qui concerne les tributs d'entreprises.

Deuxième point négatif dans le dispositif, mais qui est à améliorer, je suis sûr que vous allez y porter un intérêt-, les entreprises doivent embaucher les jeunes des quartiers, au quatrième salarié et on voit certaines entreprises s'arrêter à 3. Cela est un problème. Il y a des gens qui sont encore au chômage.

Pour parler de la formation. Il y a beaucoup de gens qui sont formés dans le quartier. Il y a plein de gens qui ont le Bac. Demain, je peux vous apporter 50 personnes qui sont diplômées mais qui sont au chômage. Je ne peux pas laisser dire qu'elles sont sous formées, ce ne sont pas des ânes. J'en viens. Si vous avez réussi à créer une boîte et à créer un emploi, c'est donc que c'est possible ! C'est dans les mentalités qu'il faut peut-être changer les choses. Alors, c'est vrai, c'est une belle mesure qui incite à embaucher les gens des quartiers. Mais, il ne faut pas dire qu'ils ne sont pas formés.

Un des points à améliorer, c'est effectivement l'accompagnement dans la formation dans l'entreprise, et avant. Dans tous les secteurs on se forme, pas uniquement dans les quartiers. On n'est pas la Silicon Valley dans le Nord, mais, il y a quand même des compétences. Je vous le dis du fonds du cœur, cela existe.

Un autre point. On voit aussi -c'est très minoritaire, je le consens, mais je suis obligé de vous le dire, Monsieur le Président-, les chasseurs de prime. Je m'explique. Des gens qui viennent dans le quartier, alors qu'ils avaient une image très négative de ce quartier, implanter leur entreprise et qui ne jouent pas le jeu. Cela, je le condamne fermement.

LE PRESIDENT - Qu'est-ce que vous entendez par : "ils ne jouent pas le jeu"?

INTERVENANT- Ils ne jouent pas le jeu. Leur activité n'est pas forcément implantée dans le quartier. Cela, ce n'est pas trop important. On ne va pas demander aux transports ou aux entreprises qu'ils louent une boîte aux lettres, les fameuses boîtes aux lettres. Cela est un vrai problème, Monsieur le Président. Ils sont minoritaires, je le rappelle, mais c'est à Amiens que c'est minoritaire. On va peut-être parler de la zone franche en France. Je pense qu'elles sont aussi importantes et qu'elles méritent qu'on les évoque ces entreprises boîtes aux lettres, entreprises fantômes, "chasseurs de primes", pour trois raisons, je voudrais m'élever contre.

La première, c'est l'argent public, donc c'est l'argent de tout le monde. Deuxième point à relever. En ne jouant pas le jeu, elles ne contribuent pas à l'embauche des gens et, qui plus est, des jeunes du quartier. Cela est aussi une faille. Et enfin, le troisième point qui me hérisse, c'est l'image de marque. Vous avez dit, tout à l'heure : "Quelle perception la communauté a-t-elle sur les zones franches "? Il m'arrive de fréquenter les milieux de chefs d'entreprise et, en général, ils disent : "Ce sont des profiteurs, ils veulent profiter du système, ils viennent récupérer des charges sociales, etc". Ce que j'ai envie de dire aussi pour le troisième point, c'est que qu'il vous faut dénoncer cela. Nous, entreprises honnêtes qui jouons le jeu, qui embauchons les fameux quotas avec lesquels je ne suis pas trop d'accord. Nous traînons une mauvaise image. Le fait de vous le dire montre une certaine honnêteté de la part des entreprises qui sont, elles, installées en zones franches et qui jouent le jeu.

LE PRESIDENT - Le phénomène est-il important ?

JEAN-YVES BOURGOIS - Monsieur MERAOUMIA a bien dit que c'était un phénomène qui était extrêmement minoritaire à Amiens, en tout cas. C'est effectivement 3, 4. Combien diriez- vous sur 150 ?

INTERVENANT - Vous savez ce sont des boîtes aux lettres. On ne les voit pas. On les évalue à 10, 15 sur le territoire national. A Amiens, il s'agit que de quelques-unes.

LE PRESIDENT - Dites-nous également un mot sur les problèmes de discriminations dans l'emploi qui sont des questions qui se posent.

INTERVENANT - C'est courageux de l'évoquer. Effectivement, cela existe. Personne ne pourra dire, ici, qu'il n'existe pas de discrimination à l'embauche. C'est évident que tout cela existe. C'est dans les mentalités que les choses doivent évoluer. On pourrait faire 1 500 lois, cela aiderait, c'est sûr, mais c'est surtout dans les mentalités que cela doit changer. Monsieur BORLOO n'a pas l'air tellement d'accord, mais je pense que c'est dans les mentalités.

JEAN-YVES BOURGOIS - Il n'a encore rien dit.

INTERVENANT - Alors, il est d'accord. La discrimination existe. Il est évident que lorsque l'on vient des quartiers, on est majoritairement d'origine étrangère. La première barrière se crée. On a peur parce que l'on ne connaît pas l'autre. Et les "deux parties", sans vouloir les opposer, ne se connaissent pas, y compris dans les quartiers. Les gens des quartiers, eux-mêmes, me disent : "Ils ne nous embaucheront pas parce qu'on est comme cela, parce qu'on a des origines étrangères". Cela va dans les deux sens. D'où la nécessité et le rôle que nous devons avoir, nous, en tant qu'entreprises installées dans un dispositif plutôt social, à dimension sociale, qui est d'aller à la rencontre des habitants, de mieux les connaître et que les habitants, eux aussi, viennent vers nous, qu'ils nous connaissent. C'est un cas extraordinaire de mettre en liaison le monde de l'entreprise avec le monde des quartiers. Cela a l'air tellement opposé que poussons le courage jusqu'au bout. Rencontrons-nous, entreprises et habitants de quartiers. Apprenons-nous à nous connaître, à se fréquenter et la peur va s'estomper.

Et les discriminations, pour répondre à votre question, Monsieur le Président, vont forcément s'estomper et, par la même occasion, la sécurité et la délinquance. Les jeunes qui travaillent n'ont pas envie d'aller brûler des voitures. Ils n'ont pas envie de casser leur quotidien, leur rue. Je pense que la discrimination, si l'on veut l'estomper, passe par l'emploi et la zone franche y contribue.

LE PRESIDENT - Peut-être que Monsieur BORLOO voulait dire quelque chose sur ce point ?

JEAN-LOUIS BORLOO - Sur le débat formation recrutement, on s'est rendu compte qu'il y avait, c'est vrai des gens formés, mais il y a la formation au poste de travail lui-même. Je voudrais savoir si vous utilisez, ce que le Premier ministre a voulu que l'on mette en place, l'action préparatoire au recrutement. Le fait que sur un poste donné et pour un jeune donné, pendant trois mois, la formation est payée par l'Etat. L'Etat paye à l'entreprise cette espèce de "tests et de fiançailles". Est-ce que l'APR qui, vraiment, semble-t-il, est en train d'exploser -on en a fait 55 000 en un mois et demi-, vous l'utilisez ?

JEAN-YVES BOURGOIS - Peut-être Madame NORMAND ?

INTERVENANT - Je n'ai pas d'exemple précis à vous donner, mais c'est effectivement une nouvelle mesure que l'ANPE propose. L'APR va permettre, pendant maximum trois mois, à des entreprises et à des demandeurs d'emploi, jeunes ou adultes, de se rencontrer et de se tester sur le poste de travail. Oui, cela est mis en place, localement, par l'ANPE.

JEAN-LOUIS BORLOO - Deuxième question. Est-ce que les opérations de coaching ont eu lieu, ici ? Et si oui, quel est le résultat ?

INTERVENANT - A ma connaissance, il y a une opération de coaching de l'ANPE qui s'appelle "objectif placement" qui, effectivement, est à destination des jeunes diplômés des ZUS, on va jusqu'à 30 ans. Il y a une première opération qui a eu lieu avant les vacances d'été, qui comprenait 12 jeunes, et à ma connaissance, il y en a 6 qui ont retrouvé une activité d'emplois divers. Certains ont repris une orientation formation puisque leur diplôme n'était pas adapté au marché du travail. Des réunions s'organisent dans les prochains jours pour recréer un nouveau groupe et nous avons, aussi, localement le club "Face Grand Amiens" qui a mis en place, à titre expérimental -je pense que c'est la deuxième ville en France qui mène une opération qui s'appelle "Job académie"- qui, en fait, est une promotion, effectivement, d'une vingtaine, pas forcément des jeunes mais des habitants des ZUS qualifiés, c'est-à-dire qui ont un métier, qui ont des gestes professionnels à proposer aux entreprises. Il y a eu une première promotion d'une vingtaine de personnes et je pense qu'il y en a 18 ou 19 qui ont retrouvé une activité soit d'intérim, soit d'un CDI, soit des contrats de qualif, soit d'un CDD.

JEAN-LOUIS BORLOO - La troisième question, (je suis là pour faire mes courses, pour vérifier si cela fonctionne, Monsieur le Président) ce que vous évoquiez, c'est formidable que l'économie et le jeune et le quartier et le discriminé apparent se rencontrent ! Cela peut se faire grâce aux zones franches. Cela peut se faire aussi par des rencontres. La SNCF, par exemple, l'autre jour aux Pyramides, est venue rencontrer 600 jeunes. Il n'y en avait pas un qui était du VIIe arrondissement de Paris, c'était clair, mais ils avaient mis 25 recruteurs toute la journée pour aller au dialogue. C'était vraiment un truc très émouvant. Est-ce que les chartes de la diversité prennent, ici, aussi ? Est-ce que le formidable Azouz BEGAG a pu venir, ici, pour réunir les chefs d'entreprise ? Est-ce que ceux-ci viennent directement au contact des quartiers, oui ou c'est non ?

INTERVENANT - Oui, c'est plutôt oui.

JEAN-LOUIS BORLOO - C'est plutôt oui ? Cela fonctionne, les chartes de la diversité···

INTERVENANT - ···Azouz BEGAG, on n'a pas eu la chance de le voir.

JEAN-LOUIS BORLOO - ···Mais les charges de la diversité fonctionnent. Oui, parce qu'il fait le tour de France. C'est un sujet crucial, bien entendu.

INTERVENANT - Effectivement, les services de l'Etat travaillent avec nous. Les acteurs de l'emploi et de la formation sur cet aspect là, les professionnels, c'est-à-dire les conseillers emploi formation ont pu être formés à toutes ces spécificités : sensibilisation d'élus, lutte contre les discriminations de façon générale. Et dans le cadre du festival du film international qui a lieu cette semaine sur Amiens, encore une fois, le club "Face Grand Amiens", en partenariat avec Amiens Métropole, va signer jeudi soir avec 15 entreprises locales une charte de la diversité.

LE PRESIDENT - Monsieur MERAOUMIA, vous ne m'avez pas tout à fait répondu à ma question. Je vous demandais comment vous appréciez les problèmes et, notamment, êtes-vous plutôt optimiste ou plutôt pessimiste ou n'y a-t-il pas de changement de discriminations à l'embauche en fonction de l'adresse, de l'origine sociale, de l'origine ethnique etc. ? Comment ressentez-vous cela dans votre quartier, et plus généralement dans la vie ?

INTERVENANT - Je me répète cette situation existe de quelque nature que ce soit, effectivement à l'adresse, à l'ethnie etc. Mais il faut être optimiste quand même, parce que si on est pessimiste, on ne fait rien et on devient fataliste. Restons optimistes ! Je crois que les mentalités sont en train de changer. Dans mon quartier, en l'occurrence, les gens commencent à vouloir gagner leur place dans la société et ont compris que ce n'est pas dans l'assistanat, qu'ils la gagneront, qu'ils se prennent aussi en charge et qu'ils se battent pour essayer de trouver leur place dans la société. Cela, je le ressens vraiment au quotidien. Cela s'améliore mais il y a encore toujours des bâtons dans les roues qui sont mis, d'origines diverses. Qu'elles sont ces origines ? Eh bien, c'est le manque de motivation, c'est l'extrémisme en tout genre. Il y en a qui n'y croît plus. L'espoir s'estompe; mais cela reste minoritaire. La majorité des jeunes, en tout cas, croit en l'avenir, vraiment. Donc, cela s'améliore.

JEAN-YVES BOURGOIS - Merci beaucoup de vos témoignages et d'avoir repris également les petits aspects liés à ce que le Président avait appelé "l'employabilité des gens". En fait, c'est un peu cela la question. Il y a effectivement des gens diplômés dans le secteur, ici comme partout ailleurs. Il y a même une association des diplômés de l'enseignement supérieur d'Amiens Nord qui s'est créée pour montrer que, de cette manière-ci, on peut aussi faire avancer les mentalités. L'association a été reçue par Madame le Maire et moi-même, il y a quelque temps.

Cédric DESCAMPS est le patron de CFC Finances, plus connu sous le nom de "Solutis". Vous pouvez nous expliquer votre activité, votre métier et votre expérience de la zone ?

INTERVENANT - Monsieur le Président, Messieurs les Ministres. Pour résumer en quelques lignes. L'activité principale de ma société est de combattre, efficacement, l'endettement des ménages des particuliers, c'est-à-dire sous un vocable plus communément appelé "rachat de crédits". J'ai créé ma société en 1998 et j'ai rejoins le quartier Nord non, sans a priori au départ, avouons-le. De 2001 à 2005, pendant quatre ans, j'y ai vécu une aventure extraordinaire. Pour compléter les propos de Maki, mon ami, et pour vous répondre, Monsieur le Président, par rapport à la discrimination, j'en suis -je pense-, un bel exemple. J'invite Monsieur GREMETZ qui se soucie de la santé de nos salariés à venir un jour dans l'entreprise. Vous découvrirez dans quelles conditions ils évoluent. Parlez-leur un peu du taux de rémunération et je pense que vous serez rassuré.

MAXIME GREMETZ - J'irai.

INTERVENANT - J'y compte bien, merci. Et en plus, Monsieur le Ministre, Monsieur de ROBIEN, est venu et il peut en témoigner. Madame le Maire aussi.

MAXIME GREMETZ - Il n'y a que moi qui ne suis pas venu.

INTERVENANT - Je pense que vous étiez occupé···

MAXIME GREMETZ - ··· par des mondanités. C'est de la discrimination !

INTERVENANT - ···La prochaine fois, j'y penserai. Le phénomène "Blacks blancs beurs", cela fait partie de mon quotidien, Monsieur le Président. Les personnes que j'ai recrutées sont d'origine africaine -noire africaine-. Elles font aujourd'hui partie de mon équipe, effectivement. Je le voyais sur leur CV. Je voyais leur parcours : un CDD de 9 mois, un CDD de 6 mois, un CDD de 8 mois, etc. Cela transpire. Cela signifie quelque chose derrière tout cela. Effectivement, je leur ai donné la chance, puisque je crois aux capacités, aux compétences de l'hHomme et peu importe sa couleur. Ce que je recherche, c'est l'efficacité au travers de notre collaboration, de quelque origine qu'ils soient. Cela m'importe peu. En fait, heureusement qu'il y a des entrepreneurs quelque part qui jouent le jeu.

Je déplacerai un petit peu le débat sur ce que vous évoquiez aussi, tout à l'heure, Monsieur le Président, par rapport aux difficultés en tant que chef d'entreprise à recruter sur le quartier. La première personne que j'ai dû recruter et qui, aujourd'hui, occupe un poste à responsabilités au sein de mon entreprise, est d'origine maghrébine. En plus -n'interprétez pas mal mes propos, mais elle est du quartier et, en plus, maghrébine- française. C'est un plus, effectivement. Je n'ai eu guère le choix, en fait, une seule candidate s'est présentée à moi. Par défaut, j'étais obligé de l'embaucher, mais il s'est révélé que c'était une très belle opportunité, puisque je vous dis, aujourd'hui, elle fait partie intégrante de l'équipe et elle fait partie de l'encadrement.

A un moment donné, lorsque je suis arrivé dans la zone, je suis effectivement venu chercher un dispositif, des locaux, une infrastructure que j'ai trouvés vraiment très motivante de par son aspect, puisque le quartier Nord, comme le disait Maki, on n'y venait pas forcément naturellement. J'ai découvert, à ma grande surprise, la qualité de l'environnement et du projet qui était prévu, puisqu'au moment où les entrepreneurs se portaient candidats à l'obtention d'un bureau, il leur était présenté aussi toute l'évolution du quartier. Cela aussi m'a séduit parce que je trouvais que, au travers de l'implantation des entreprises nouvelles, cette volonté de créer ce dynamisme était pour moi un challenge qui est gagnant-gagnant. Gagnant, parce que ce dispositif a eu comme conséquence de pouvoir optimiser mon développement, parce que tous les gains -et, là, je rejoins mon confrère de tout à l'heure-, générés par ce dispositif, je les ai aussi réinvestis dans un pôle informatique. Je les ai réinvestis dans un pôle de qualité puisque, aujourd'hui, nous sommes le premier, seul intermédiaire en opérations de banques à être certifié ISO 9 000, pardon, version 2000. J'ai mis en place un pôle relation clients. J'ai pu organiser et structurer ma société, grâce à ces économies engendrées, puisque réinvesties au centime près.

Le dynamisme, dont je parlais à l'instant, c'est vis-à-vis des habitants du quartier. Effectivement, Maki parlait de rencontres et d'échanges, c'est ce que l'on a un petit peu essayé de faire au travers de notre association, dont j'étais le Vice-président et au travers des échanges que j'ai pu avoir. Je n'étais pas très à l'aise au départ, il faut le dire franchement. La première fois que je suis arrivé dans le quartier pour m'acheter un sandwich, avec un col blanc et une cravate, c'est vrai qu'on m'a regardé comme un étranger. Durant ces quatre années d'existence qui, pour moi, sont assimilées à un tremplin vers une réussite et que j'espère grandissante encore c'est, en tous les cas, le souvenir d'une vie de quartier complètement dynamique. Cela a changé ma vision des choses par rapport à tout ce qui pouvait se dire et tout ce qui pouvait, je dirais, être interprété de manière négative.

JEAN-YVES BOURGOIS - Merci, Monsieur DESCAMPS. Vous expliquez très bien. Dans une grande panoplie pour redynamiser le quartier, effectivement, il y a la zone franche au même titre qu'il y a le renouvellement urbain autour du logement···

LE PRESIDENT - ···Au bilan, on peut dire que vous êtes satisfait des recrutements.

INTERVENANT - Complètement. Les recrutements dont le premier était···

LE PRESIDENT - ···C'est un élément tout à fait essentiel parce que c'est une question qui se pose dans d'autres zones franches. Vous, vous êtes parfaitement satisfait des recrutements que vous avez faits ?

INTERVENANT - Complètement satisfait. La manière dont cela s'est déroulé est assez étrange puisque j'ai vraiment eu des difficultés à recruter au départ. Mais ensuite, je pense que l'effet de notoriété ainsi que la société et l'intérêt des habitants ont joué. Les phénomènes se rejoignant, j'ai disposé et je dispose toujours actuellement de candidatures spontanées qui viennent enrichir le potentiel en terme de recrutement et des gens qui viennent du quartier aussi. Donc, c'est très bien.

JEAN-YVES BOURGOIS - Allez-vous embaucher des gens qualifiés également ?

INTERVENANT - Oui. Que qualifiés, en tous les cas.

JEAN-YVES BOURGOIS - Assimilés à la zone franche. Il y avait les bâtiments hôtels d'entreprises, portés par les acteurs publics : la Chambre de commerce, Amiens métropole, et puis vraiment le désir que d'autres intervenants viennent agir sur le quartier, et notamment des intervenants privés.

M. Jean-Louis GUINOISEAU, vous êtes le chargé d'opération de la Société Roche et Dubar (?) qui est une société immobilière qui vient de construire l'hôtel d'entreprises -on ne dit pas hôtel d'entreprises, mais, en tous les cas, un bâtiment pour accueillir les entreprises qui s'appellera Septentrion et donc qui sera à l'angle de···-

LE PRESIDENT - ···C'est le premier investissement privé.

INTERVENANT - C'est le premier investissement privé et c'est un investissement qui a été décidé sur la base du constat que la zone franche ne faisait pas d'offre immobilière en direction des entreprises qui y étaient implantées, et qui avaient besoin de s'y développer. C'est pour répondre à cette problématique. Mon voisin, par exemple, est aujourd'hui établi à l'extérieur de la zone franche parce qu'il n'a pas trouvé au moment où il avait besoin de locaux pour assurer son développement, et a dû ainsi aller s'installer en dehors de la zone franche. Nous avons voulu répondre à cette problématique en nous intéressant à la réalisation et à l'investissement d'un immeuble qui pourrait accueillir des entreprises implantées en zone franche et qui veulent continuer de s'y développer en utilisant le dispositif qui est mis à leur disposition.

JEAN-YVES BOURGOIS - Et cela marche ?

INTERVENANT - Cela marche puisque, aujourd'hui, notre opération sort juste de terre. La construction a démarré mais nous sommes en train de travailler à la consolidation du sol dans ce secteur. D'ores et déjà, nous avons déjà vendu environ le tiers, voire la moitié du programme, à des entreprises,qui, pour certaines, sont implantées en zone franche et qui vont pouvoir s'y développer, et pour d'autres, des entreprises qui ne sont pas dans la zone franche et qui ont décidé de venir s'y implanter pour pouvoir y développer leurs activités, avoir accès à l'emploi des gens qui travaillent sur le secteur, et donc cela marche.

LE PRESIDENT - C'est évidemment le meilleur test de la réussite des zones franches, si cela se généralise. Quand l'investissement privé s'engage, cela veut dire que cela marche. Je vous souhaite d'avoir fait une bonne prévision.

INTERVENANT - Il faut rajouter que l'investissement privé s'engage parce que la collectivité s'est engagée···

LE PRESIDENT - ···Oui, naturellement. Mais enfin, pour le moment, vous êtes encore le premier. Jusque là, c'était tout de même uniquement les investissements publics.

INTERVENANT - Tout a fait.

LE PRESIDENT - C'est tout de même une marque de confiance, une marque positive que j'observe d'ailleurs dans quelques zones franches, d'autres zones franches en France, où l'on voit maintenant l'investissement privé commencer à se doper. Ce qui est le meilleur gage de réussite. Et je vous souhaite cette réussite.

JEAN-YVES BOURGOIS - Des profils un petit peu différents, on se tourne maintenant vers le Docteur RINGARD qui est médecin. Il représente "SOS médecins" qui est une association de médecins qui est implantée ici, en zone franche, et qui assure un service au public. Je ne sais pas si l'on peut appeler cela une forme de service public mais, en tout cas, un service à la population.

INTERVENANT - Je pense que l'on peut parler effectivement de service public. Je voudrais dire que je suis ravi d'être à côté du ministre chargé de la Cohésion sociale. Je pense que la cohésion sociale, c'est notre travail au quotidien. "SOS médecins Amiens" a été créé en 1988 par trois de mes associés. Deux ne sont plus là maintenant, mais enfin il en reste toujours un. Nous sommes passés, en 1997, à 10 médecins et nous étions implantés plus sur le centre ville dans une zone···

LE PRESIDENT - ···Je m'excuse de vous interrompre, Docteur. Vous dites qu'en 1988 vous avez créé avec deux collègues à vous "SOS médecins" à Amiens ?

INTERVENANT - Tout a fait. En 1997, nous étions en centre ville dans une zone piétonne. Il faut dire que nous bougeons beaucoup. Cela nous posait des problèmes de circulation et puis on avait une activité qui grandissait. On avait rencontré, à l'époque, les membres de la mairie, notamment Monsieur de ROBIEN, parce que, effectivement, on nous avait parlé du quartier Nord qui était une zone où nous avions une activité déjà considérable puisque l'on peut dire qu'en 1996-1997, 40% de notre activité se concentrait sur des patients qui habitaient dans le quartier Nord et qui était une zone sous-médicalisée. Nous sommes arrivés sur le quartier Nord dans un appartement de 65 m²···

LE PRESIDENT - ···Pas tous les 3 ?

INTERVENANT - Non. On était 10 médecins en 1997. Nous sommes arrivés à 10 médecins dans un appartement de 65 m². Tous des "SOS médecins". Comme la plupart des "SOS", notre activité était essentiellement une activité de visites à domicile. Mais arrivant dans un quartier qui était sous-médicalisé, on s'est vite rendu compte que les gens souhaitaient se rendre dans un Cabinet. On avait, au départ, créé une salle de consultations et on s'est installés le 30 juin 1997. Entre le 30 juin 1997 et le 31 décembre, on a vu 30 patients au cabinet pour environ 50 000 patients vus sur l'année. Mais, petit à petit, les gens sont venus de plus en plus. On peut dire que l'on est passé entre 1997 et 2005, de 30 consultations sur un semestre à 35 000 consultations pour l'année 2005. Le cabinet a bien sûr dû s'agrandir. Maintenant nous avons 180 m² et 4 salles de consultations sur Amiens Nord.

LE PRESIDENT - Et combien de médecins maintenant ?

INTERVENANT - Nous sommes 15 médecins avec 10 membres d'équipes qui sont les standardistes et une secrétaire administrative. Cela fait une équipe de près de 25 personnes. Nous assurons la permanence de soins de la globalité de la ville d'Amiens et des communes environnantes, puisque nous sommes les seuls à gérer les gardes sur Amiens, nuits et week-ends. On gère effectivement à 15 la permanence de soins d'Amiens. A la fois en visite, mais aussi au cabinet de consultations.

LE PRESIDENT - Vous êtes ouvert 24 heures sur 24 ?

INTERVENANT - 24 heures sur 24. On fait office de Maison médicale de garde, 24 heures sur 24.

LE PRESIDENT - Monsieur BORLOO, vous voulez faire un commentaire ?

JEAN-LOUIS BORLOO - Oui. Je voudrais faire un commentaire, Monsieur le Président, parce que···

LE PRESIDENT - ···Admiratif !

JEAN-LOUIS BORLOO - Plus que cela. Pendant longtemps, il a fallu définir qui y avait droit. Je peux répondre à la question. Aujourd'hui, on connaît nationalement le taux des cas discutables, on est à 2%, très inférieur au taux de tous les dispositifs. Mais le cas, là, est symptomatique des difficultés que l'on a eues au départ. Monsieur le Président, l'idée c'était : comment un médecin, donc un bourgeois, a des avantages dans les zones franches ? Il y a eu des querelles. Et puis, en même temps, vous aviez des émissions de télé où on voyait les médecins se barraient des quartiers ! On était dans un truc complètement dingue. Je suis heureux et content parce que c'est du service public. C'est une vraie délégation de service public. Il est indispensable que cette action de santé publique, santé publique dans les quartiers, soit là, à proximité, c'est pas si facile et c'est vraiment génial !

LE PRESIDENT - Votre activité doit, sans doute, soulager un petit peu les urgences du SAMU ?

INTERVENANT - Je pense que Monsieur NIMITE, qui est dans la salle et qui est Chef de Service des urgences et du SAMU, ne me contredira pas puisque je suis également médecin au SAMU. Je crois que l'augmentation entre 2000 et 2005, c'est à peu près 1% d'augmentation d'activités, alors que cela a flambé dans les villes, style Abbeville. Je crois qu'à Abbeville, ils sont à 6% d'augmentation d'activités par an entre 2000 et 2005. A Amiens, ce devait être 1%. Effectivement, on a pu faire venir au Cabinet des petites sutures, par exemple, qui n'avaient rien à faire aux urgences, et pour permettre aux médecins qui sont aux urgences de vraiment se cantonner aux vraies urgences.

LE PRESIDENT - Et au fond, vous recevez en consultations des gens qui viennent d'autres quartiers ? Donc, il y a aussi un···

INTERVENANT - Un brassage. Tout a fait. Dans les salles de consultations, le dimanche, il y a un vrai brassage, on peut le dire. Je pense que d'ailleurs···

LE PRESIDENT - ···C'est également un élément très positif···

INTERVENANT - On n'a pas de salariés dans la salle, mais il y a quelques patients qui pourraient vous le dire.

LE PRESIDENT - Enfin, en tous les cas, c'est une réussite sociale···

INTERVENANT - ···Ce que l'on peut dire, c'est que l'on n'a pas de problèmes à faire venir maintenant des gens qui n'habitent pas dans le quartier, parce que l'on a même des gens qui viennent des villages environnants dans le quartier Nord. Il y a quelques années, il y avait une certaine réticence. Nous ne l'avons plus du tout. Je pense que les gens sont habitués et ont bien vu que cela avait beaucoup changé dans le quartier Nord, et puis tout à l'heure, vous posiez une question à Monsieur DEMANGE à laquelle, je peux répondre. Vous lui demandiez quels sentiments avaient les gens dans leur secteur ? Il y a 10 ans, ce n'était pas rare d'entendre tous les jours des gens qui voulaient quitter le quartier. Tout le monde voulait se sauver du quartier. C'est exceptionnel, maintenant. C'est vraiment exceptionnel···

LE PRESIDENT - ···Vous êtes vous-même originaire du quartier ?

INTERVENANT - Non, du tout, mais cela fait quinze ans que j'y travaille, donc j'en fais partie. Et je suis fier de travailler dans le quartier.

LE PRESIDENT - Merci, Docteur.

JEAN-YVES BOURGOIS - Registre différent, mais également pour le mieux-être des gens, Emmanuel BODOULE-SOSO est opticien. Il s'est implanté, il y a quelques mois···

INTERVENANT - Oui, cela fait six mois maintenant que nous sommes dans le quartier, depuis le mois de mai. Nous sommes deux opticiens qui avons créé une société en cogérance. On cherchait à travailler ensemble sur une création. Au niveau des centres-villes aujourd'hui, le marché est à maturité, ce qui veut dire que la stratégie des opticiens est plutôt de garder des parts de marché en maintenant un marketing assez agressif. On voulait faire un petit peu différemment en recentrant notre métier sur le service au client afin de mettre en avant notre savoir-faire. L'intérêt pour nous de venir sur Amiens Nord est qu'il n'y avait pas d'opticiens sur la zone. Il y avait une population assez importante, une densité forte. Il y avait des contraintes liées au fait que les gens n'ont pas un pouvoir d'achat énorme. Le dispositif de la zone franche permettait d'avoir un point de départ assez modeste. Voilà, pourquoi.

LE PRESIDENT - On dit que les opticiens réalisent leurs profits, au bon sens du terme, essentiellement sur la vente de matériels sophistiqués, des lunettes de classe, de qualité, de marque. Théoriquement, cela semble incompatible avec la nature de la clientèle que l'on peut imaginer dans un quartier de ce genre···

INTERVENANT - Aujourd'hui, c'est un peu différent. On peut recentrer nos achats sur un fournisseur qui peut avoir des produits très bien placés en prix, notamment depuis la création de la CMU. Aujourd'hui les opticiens ont l'obligation de répondre à des demandes spécifiques avec des produits adaptés. Dans notre cas, on a fait un prévisionnel qui prend en compte le pallier moyen, assez faible dans le quartier, et le fait que l'on soit en zone franche était très rassurant pour le banquier puisque, aujourd'hui, on arrive à équilibrer notre structure au bout de six mois d'activité. Il faudrait ajouter aussi que, dans l'élan, un ophtalmologiste est venu s'installer ce qui a renforcé la crédibilité du projet.

LE PRESIDENT - Un ophtalmo qui est venu s'installer après vous ?

L'INTERVENANT - Oui, après nous. Les choses s'entraînent. Au niveau des clients du quartier, je pense qu'il y avait vraiment une demande parce qu'il y a pas mal de gens qui n'ont pas forcément la possibilité de se déplacer en centre-ville, et c'était une fierté pour eux que de pouvoir avoir, à la fois dans leur quartier, un ophtalmologiste et un opticien.

LE PRESIDENT - L'ophtalmo est venu s'installer dans le quartier aussi ?

INTERVENANT - Tout à fait.

JEAN-YVES BOURGOIS - On a très envie de visiter la boutique de Monsieur SOSO qui est quasiment un artisan opticien !

INTERVENANT - C'est à deux pas d'ici. Le magasin s'appelle la boutique "Safran". Safran, en hommage à la rénovation du quartier qui était à l'initiative de la ville. Je pense que le safran, dans le quartier, a une image assez forte, c'est l'image du renouveau. On s'est dit que plutôt que de l'appeler " Optique Guynemer ", "Optique Safran", paraissait un petit peu mieux.

JEAN-YVES BOURGOIS - Merci beaucoup. Là encore, une des clefs de la réussite, c'est l'enthousiasme, le sourire, la volonté de bien faire.

Madame ROCHA dirige la société Polygone, un métier intéressant. Elle construit des maisons écologiques avec des bâtis et des structures en bois. Pouvez-vous nous en dire un petit mot ?

INTERVENANT - Nous faisons des maisons à ossature de bois, écologiques. C'est un métier assez particulier, notamment pour trouver des personnes qualifiées en menuiserie charpentier qui, au niveau national, se font rares. Mais si nous concentrons nos efforts sur la zone franche, c'est très difficile de trouver ce type de profils. Nous avons donc un peu détourné le problème. Lorsque nous souhaitons embaucher, nous disséquons un peu les postes de manière à pouvoir permettre aux personnes non qualifiées d'intégrer nos équipes et de suivre au fur et à mesure des formations et selon l'envie des personnes, selon leurs capacités, elles évoluent dans l'entreprise. Voilà un peu l'objectif que nous nous sommes fixé.

JEAN-YVES BOURGOIS - Merci beaucoup. On a quelquefois en tête l'idée que c'est très difficile d'embaucher des gens qui correspondent aux postes, mais vous, vous avez choisi de réaménager les postes de sorte à pouvoir élargir les offres d'emploi.

LE PRESIDENT - Vous êtes, en principe, sur un marché porteur. Actuellement, vous avez combien de personnes ?

INTERVENANT - Nous sommes actuellement 33 personnes. J'ai débuté en janvier 2005. Nous étions une petite dizaine. Fin décembre 2005, nous étions 19. Je suis en recrutement quasi-permanent···

LE PRESIDENT - ···Et vous n'avez pas de problèmes de recrutement, en particulier pour la partie nécessairement issue du quartier ?

INTERVENANT - Nous rencontrons des problèmes pour trouver essentiellement le coeur de métier menuisier-charpentier. Par contre, à côté de cela, vous avez plein d'autres métiers : tout le côté administratif. Vous avez le côté entretien, vous avez le côté manœuvre. Jje n'aime pas trop ce terme, mais "aides aux menuisiers" pour qu'ils puissent évoluer et là, vous n'avez pas de problèmes à pouvoir obtenir···

LE PRESIDENT - Qu'est-ce que c'est que l'aide au menuisier pour qu'il puisse évoluer ?

INTERVENANT - Manœuvre. Au fur et à mesure, ces personnes se forment avec le menuisier.

JEAN-YVES BOURGOIS - Merci beaucoup. On a la possibilité de donner la parole à Rachid SALLALI, Directeur adjoint du CAJ : Centre d'animation jeunesse. C'est la maison des jeunes d'Amiens Nord. On la voit, c'est "l'Odyssée" qui est ici. Rachid SALLALI connaît bien le quartier, il peut nous en parler, notamment quand on parle de la zone franche. On sait que c'est une vitrine un peu nouvelle pour parler du quartier Amiens Nord. On parle d'Amiens Nord pas uniquement sur le logement qui a fait l'objet de pas mal de réhabilitation et qui va continuer. On parle d'Amiens Nord pour parler de la sécurité, mais aussi, maintenant, on peut donner des perspectives d'emploi.

INTERVENANT - Effectivement, j'habite le quartier depuis 31 ans. J'exerce actuellement la fonction de Directeur adjoint au Centre animation jeunesse auprès des jeunes du secteur. J'ai en charge la mise en place de projets d'activités pour les jeunes du secteur. Je travaille dans une structure municipale qui s'appelle "l'Odyssée". Depuis ces dix dernières années, avec la création de la zone franche urbaine, j'y ai vu un réel changement, une réelle dynamique avec les entreprises qui se sont créées, un quotidien nouveau pour les habitants du quartier, avec une piscine, une structure pour les jeunes. On peut parler aussi de démolition de vieux bâtiments et la construction de zones pavillonnaires. Je peux vous parler aussi des deux collèges, notamment le collège Arthur Rimbaud. A travers nos actions, on essaye de mettre en place des projets pour que les jeunes aient une perspective d'emploi, et notamment de vie. Ce que l'on essaye de mettre en place, c'est que cet hôtel entreprise, cette zone franche ne soit pas, comme Monsieur BOURGOIS l'a dit, forcément qu'une vitrine, mais que l'on puisse y accéder, que l'on ait la possibilité d'aller rencontrer ces chefs d'entreprise. Cela fait partie de nos objectifs : amener les jeunes à avoir une perspective d'emploi et à pouvoir couper, casser cette barrière qu'il y a entre les chefs d'entreprise. Il y a un an de cela, en novembre 2005 - on ne peut pas passer à côté des émeutes qui se sont passées dans les différents quartiers d'Amiens-, j'ai eu la chance, grâce à Monsieur Hervé DEILLY, Directeur adjoint à la politique de la ville, Monsieur BOURGOIS, Monsieur Gilles de ROBIEN aussi, de rencontrer un club entreprises qui s'appelle le "Club entreprises Jules". Ce sont en fait différents clubs entreprises qui sont situés dans la zone franche et qui se soucient de la problématique et du malaise social auprès des jeunes. Suite à cela, avec l'envie de ces différents chefs d'entreprise, j'ai créé une association qui s'appelle "Ensemble". Cela m'avait donné l'espoir. Cela m'a donné envie de créer cette association. On est 6 habitants du quartier, cette association a pour but d'accompagner, d'aider les jeunes, c'est un service de proximité, vers l'emploi et aussi vers la formation.

LE PRESIDENT - Est-ce que vous estimez qu'il y a eu, chez les jeunes, globalement une évolution positive dans leur appréciation de leur quartier depuis dix ans ?

INTERVENANT - Bien sûr, avec les services de proximité. Je n'ai pas parlé effectivement de l'Atrium. C'est une mairie de secteur. On le voit, on le remarque, différents bâtiments, je parle une fois de plus de l'Odyssée et de l'Atrium, d'un stade de football aussi. Maki y a joué. J'y joue encore. On joue en championnat de France amateur, en CFA 2, on est encore qualifié au septième tour de France. Un nouveau stade et on le remarque bien, parce que ces lieux ne sont pas dégradés. On les respecte. On les apprécie, et voilà ! On apprécie et on aime notre quartier, aussi.

LE PRESIDENT - Globalement, comment est-ce que vous sentez l'évolution de ces jeunes, notamment, je dirais, quinze, dix-sept ou dix-huit ans ?

INTERVENANT - A cet âge-là, il y a beaucoup d'échec scolaire. On est une structure d'accueil et dans les différents projets que l'on met en place, on essaye de travailler avec un réseau de partenaires, avec l'antenne emloi-formation qui se trouve aussi à l'Atrium. C'est vraiment un boulot qui n'est pas du tout évident. Nous, une fois de plus, ce que j'essaie de vous expliquer c'est que dans les différents projets qu'on essaie de mettre en place,est d'amener les gens à ce qu'ils aient une démarche, à ce qu'ils aient effectivement une réflexion sur leur avenir professionnel, sur les différents corps de métier qui peuvent aussi être présents, notamment dans la zone franche. Pour nous, c'est vraiment la petite cerise sur le gâteau.

LE PRESIDENT - Considérez-vous que, au total, il y a tout de même une tendance positive à l'égard d'une meilleure intégration ?

INTERVENANT - Bien sûr, je reste positif. Avec tous les partenaires qui sont ici présents, j'e n'ai pas envie d'avoir un discours négatif···

LE PRESIDENT - ···Mais soyez franc !

INTERVENANT - Je suis franc. Je reste positif dans les différentes actions que l'on essaie de mettre en place, et dans le discours qu'on essaie de véhiculer. Oui, j'ai envie de dire que tout est positif··· Ce qu'il faut savoir, c'est une réalité aussi, Amiens Nord, c'est 20 000 habitants. C'est 20% de chômage, c'est 40% de chômeurs de 18 à 25 ans. Ce sont des chiffres qui reflètent le malaise, mais voilà.

LE PRESIDENT - Monsieur ABDELATIF.

INTERVENANT - Je voulais dire tout simplement que d'abord Amiens, c'est spécial parce que Monsieur de ROBIEN a beaucoup fait pour les minorités, énormément. Je voulais le dire. Mais ce que je ressens, en vieillissant, c'est différent des Etats-Unis. Les Etats-Unis, c'est une immigration voulue. J'ai beaucoup aimé le discours de Jean-François COPE, la dernière fois, lorsque Maki, tu étais invité à Paris. Je trouvais que c'était le plus sincère de tous. C'est celui qui disait que le colonialisme a créé chez certains autochtones un complexe de supériorité, et cela a créé en nous des complexes d'infériorité qui nous poussent à la violence. Ne peut pas dire, ne peut pas installer, celui qui n'a pas accès à la parole. Ce n'est pas le Français moyen qui est raciste, ce sont les intellectuels. Je le pense, je suis dans le théâtre, je suis auteur, metteur en scène et quand un journaliste me demande : qu'est-ce que tu faisais avant d'être auteur de théâtre ? Je dis que je suis Conseiller d'éducation. Il me dit : ah quand même ! Je veux dire, il y a un esprit, prenez les institutions culturelles, bien sûr qu'il y a une diversité culturelle. C'est normal. Les noirs ou les arabes qui travaillent là-dedans sont soit balayeurs soit videurs mais jamais à des postes-clefs. Je ne suis pas quelqu'un qui joue et qui triche avec la sensibilité. Ce pays, je l'aime au plus profond de moi-même. On m'appelle "un beur", j'appelle mon fils "un jambon beurre" ! J'en ris de tout cela. J'aime ce pays et puis j'aime la vie, surtout. Mais je voulais dire tout simplement que je crois, c'est pourquoi j'ai aimé le discours de Jean-François COPE qui disait qu'il fallait balayer des deux côtés de sa porte. Bien sûr, qu'on entend des propos : "On ne sera jamais comme eux". Mais qui peut dire ici : " tu es minorité", parce qu'il y a le poids du colonialisme et on n'est jamais dans l'échange, on est dans cette espèce de culpabilité permanente. Or, dans la vie, il ne faut jamais donner, il faut toujours échanger. Bien sûr, que je suis pour un quota, j'en suis désolé. Quand en médecine, il y en a 1 000 qui présentent un examen et qu'ils en prennent 200, ce sont les 200 meilleurs. Ce sont les valeurs du travail qui sont toujours là ! Ce sont les valeurs du travail qui foutent le camp, aujourd'hui ! Je voulais le dire. Il faut être avec les minorités, avec les quartiers, etc. C'est très bien les opérations comme les zones franches, etc. Ici, à Amiens, je suis celui qui fait le plus de spectateurs, mais je n'arrive pas à tourner mes spectacles. Pourquoi ? Parce que je ne rentre pas dans le cadre des scènes conventionnées, etc. Tous les acteurs qui y arrivent, viennent du privé. On ne rentre pas dans le cadre des centres dramatiques nationaux, etc, parce que c'est la bonne conscience, parce qu'il y a une espèce de mépris à notre égard qui est inconscient. C'est terrible, c'est cela le plus dangereux des racismes. Voilà, c'est tout ce que je voulais dire. Merci.

LE PRESIDENT - Merci, Monsieur ABDELATIF.

JEAN-YVES BOURGOIS - Merci, Monsieur ABDELATIF de ce témoignage qui était imprévu.

Je vous présente, Monsieur le Président, M. Eric ALEXANDRE qui est le Principal du collège Arthur Rimbaud, qui est un collège "ambition-réussite". Ce qualificatif colle vraiment bien au collège parce que, au-delà du dispositif qui s'est mis en place, on sent vraiment une volonté très, très forte de toute l'équipe, qu'il s'agisse des enseignants, bien entendu, mais également des agents simplement qui travaillent au sein du collège Arthur Rimbaud qui se trouve à deux pas d'ici.

Je vous laisse en dire un petit mot. On ne peut par parler de l'emploi et des jeunes, sans parler de leur formation et de la manière dont vous les aider à s'insérer encore mieux.

INTERVENANT - Tout d'abord, Monsieur le Président de la République, le Collège Arthur Rimbaud a été construit là où il est aujourd'hui, dans le quartier Nord, il y a trois ans. C'est un pari politique de maintenir l'implantation de cet établissement dans le quartier. L'idée a été controversée, à l'époque, et on s'est doté d'un établissement décent pour le lieu d'éducation. C'est même une architecture exceptionnelle. Cela, c'est le préalable de se doter d'un établissement digne de ce nom pour l'enseignement de nos jeunes.

J'allais dire que cela ne suffit pas d'avoir un établissement comme celui là, mais c'est indispensable. Le pari aussi qui a été fait, était de changer la zone de recrutement de cet établissement et de mordre sur le quartier Saint-Pierre···

LE PRESIDENT - ···Le quartier Saint-Pierre, c'est···

JEAN-YVES BOURGOIS - ··· Le quartier Saint-Pierre, c'est juste au sud, et donc la mixité sociale est mieux assurée par l'élargissement, on va dire, du recrutement.

INTERVENANT - C'était le pari de maintenir l'établissement dans le quartier, mais de changer sa zone de recrutement. A mon arrivée, il y a un an et demi dans l'établissement, le quartier Saint-Pierre, l'école Vincent Sini n'envoyait aucun élève dans notre établissement. On avait un potentiel d'une vingtaine d'élèves de CM2 et nous n'accueillions aucun élève. On a réfléchi avec toute la communauté éducative sur l'attractivité de l'établissement, sur son projet, et sur le fait de faire venir ces élèves du quartier Saint-Pierre. La priorité de l'an dernier a été de donner clairement une priorité aux aspects vie scolaire, à la réduction de l'absentéisme, puisque l'établissement collectait 13% d'absentéisme sur une année scolaire, donc de se donner cette priorité et aussi de définir un socle d'exigences très fort pour l'accueil de nos élèves.

Cela a été la priorité l'an dernier, mais cela ne suffit pas à développer un véritable projet. On a continué à réfléchir avec les enseignants pour, véritablement là, définir un projet pédagogique de réussite et d'excellence pour nos élèves. On a commencé à y réfléchir à partir du mois de novembre, l'an dernier. L'établissement était classé "ambition-réussite" au mois de février de cette année. On a eu une conjonction de calendrier entre la définition d'un projet et ses moyens "ambition-réussite" qui sont arrivés, qui se traduisent dans l'établissement par quatre postes d'enseignants supplémentaires, dix assistants pédagogiques et une infirmière supplémentaire qui nous permet de couvrir le pôle médico-social à plein temps.

Le projet pédagogique que nous avons défini, vise véritablement à donner une priorité au socle commun de connaissances et de compétences et, volontairement, on a fixé nos objectifs là-dessus. Tous les personnels, tous les enseignants de l'établissement, aujourd'hui, se sont lancés dans une innovation pédagogique. Cela a été possible parce que nous avons été accompagnés par les corps d'inspection, par l'inspecteur d'Académie, par Mme le Recteur également. Il y a eu véritablement un éclairage de notre hiérarchie pour nous accompagner et pour aider les enseignants à définir ce projet.

Il y a eu, j'allais dire, un changement entre les enseignants et leur inspecteur, qui ne venait plus pour inspecter, mais véritablement pour définir les projets que nous allions mettre en place. Aujourd'hui, on a fait le pari de se lancer pour chaque discipline dans une innovation pédagogique. Chaque matière innove pédagogiquement cette année sur l'établissement. Et même si nous avons eu des moyens supplémentaires, nous avons réduit notre nombre de classes. Ce qui fait que, aujourd'hui, nous accueillons une moyenne d'une petite vingtaine d'élèves par classe, alors qu'au préalable nous étions à peu près à 12 ou 13 élèves par classe.

12 ou 13 élèves par classe, cela ne permet pas du tout une énergie, une dynamique dans une classe, cela, au contraire, focalise les personnalités, les plus -j'allais dire-, néfastes pour un groupe. On a fait le pari d'assurer ces aspects "vie scolaire" et de réduire notre nombre de classes et on a donc augmenté le nombre d'élèves.

Ce qui permet aujourd'hui d'avoir des moyens d'aligner des enseignants de français et de mathématiques, ensemble, pour l'accueil des 6e. On est capable, aujourd'hui, sur un créneau horaire de présenter sur tout le niveau sixième, 13 enseignants. 13 enseignants de français et de mathématiques qui travaillent ensemble et qui développent cette excellence.

Parallèlement, on a aussi développé des partenariats pour l'attractivité de l'établissement. Il y a un partenariat avec cet établissement qu'est le Safran où chaque coordinateur de discipline a développé également un projet. Nous avons un partenariat avec l'historial de Pérone et un partenariat avec l'IEP Sciences Pô Paris où des étudiants de 4e année de Sciences Pô viennent avec des élèves de 3e sur des projets éducatifs.

L'attractivité de l'établissement, c'est aussi d'ouvrir d'autres filières. On ouvre une section européenne en anglais. On ouvre une section sportive tennis. L'attractivité permet, aujourd'hui, d'accueillir 6 élèves cette année de l'école "Vincent Sini" du quartier Saint-Pierre, et l'an prochain les prévisions sont de dix élèves. L'école "Vincent Sini" qui est celle du quartier Saint-Pierre.

JEAN-YVES BOURGOIS - Voilà. Vous êtes en train de réussir la mixité par l'origine des élèves, parce que le collège est plus dynamique et parce que l'image change et évolue.

INTERVENANT - On réussit la mixité, mais il faut du temps et c'est pourquoi j'insiste sur le fait, sur la pérennisation de ces moyens, parce qu'il faudra les évaluer dans trois ou quatre ans, et les équipes se sont engagées sur le moyen terme. Je finis juste, Monsieur le Président, en me faisant l'interlocuteur des délégués de classes du Collège Arthur Rimbaud, qui ont reçu une formation à leurs fonctions, il y a quelques temps, et qui ont souhaité visiter le Palais de l'Elysée dans leur formation. Je me suis promis de me faire leur interlocuteur. Merci.

LE PRESIDENT - Cela va de soi et ce sera un plaisir pour moi de les y accueillir.

INTERVENANT - Merci.

LE PRESIDENT - Tout à l'heure, j'ai dans un propos cru comprendre qu'il y avait deux collèges ?

JEAN-YVES BOURGOIS - Oui. Collèges "ambition-réussite" tous les deux.

LE PRESIDENT - Ils sont tous les deux "ambition-réussite" ! Ah oui ! Ils sont tous les deux dans la zone···Et donc vous considérez qu'il y a tout de même un progrès substantiel, un meilleur amalgame des élèves, vous dites que cinq ou six élèves du quartier Saint-Pierre se sont inscrits dans votre collège ?

INTERVENANT - Depuis cette année, oui.

LE PRESIDENT - Depuis cette année. Cela, c'est un évènement nouveau.

INTERVENANT - C'est un évènement nouveau et encourageant. Et on est vraiment sur cette dynamique puisque l'an prochain le prévisionnel est de dix élèves. Ce qui montre bien que quand un ···

LE PRESIDENT - ···Vous avez combien d'élèves au total dans le···

INTERVENANT - ···On est à 362, aujourd'hui. Ce qui est aussi très appréciable, c'est ce petit nombre d'élèves qui permet véritablement aussi de travailler. On est vraiment à dimension humaine.

LE PRESIDENT - On nous dit que le temps passe et que nous sommes attendus à la mairie. Je voudrais simplement, sans vouloir couper la parole à personne naturellement, si quelqu'un a autre chose à dire, notamment, Monsieur de ROBIEN ou Monsieur BORLOO ?

Je voudrais dire que je suis tout de même très impressionné et, au fond de moi-même, très heureux. Très impressionné, parce que je trouve que l'effort qui a été fait par les responsables politiques, associatifs, acteurs économiques etc., est, ici, tout à fait encourageant, et a manifestement, au total, amélioré la situation. Rien n'est parfait et rien n'intervient très rapidement. Mais enfin, cela a manifestement amélioré la situation, tant sur le plan économique que sur le plan social. Prouvant que la procédure, à laquelle les élus ont fait confiance dès le départ, c'est-à-dire il y a dix ans, s'est avérée justifiée et donc encourageante pour les phases suivantes. Nous allons passer maintenant à 100 zones franches, sous le contrôle de Jean-Louis BORLOO, 100 zones franches, dont nous attendons la création au total de 100 000 emplois, ce qui n'est pas négligeable. Surtout, si j'ose dire, il s'agit d'emploi de qualité puisqu'il vient un peu de loin. Ce n'est pas de l'emploi spontané, car il a été tout de même incité, et mobilise beaucoup d'acteurs économiques et sociaux. Et donc cela, est un élément encourageant.

J'ajoute que je suis heureux de savoir que cela se passe à Amiens, qui a fait confiance dès le départ -ce qui n'était pas du tout évident-, qui a fait un effort considérable au niveau de ses élus, de ses associations, de ses travailleurs sociaux, de ses acteurs économiques, enfin, de tous ceux qui participent à l'action sur terrain, qui se mobilisent et pour lesquels, pour ma part, j'ai beaucoup de respect. Parce que c'est un travail qui est certainement enthousiasmant, puisque c'est un travail du cœur et au profit des autres. Mais c'est un travail ingrat, car ce n'est pas facile de mobiliser des hommes, des femmes, des jeunes pour s'associer à une action collective, mais au total réussie.

Je trouve tout cela très impressionnant. Je voulais simplement vous féliciter, féliciter celles et ceux qui ont témoigné, bien entendu, et souhaiter au Docteur beaucoup de succès pour le développement de son activité, ce qui ne veut pas dire que je souhaite qu'il ait beaucoup de clients, n'est-ce pas, naturellement. Mais je voulais simplement vous dire, très simplement mais du fond du cœur toutes mes félicitations et tous mes encouragements.

Les expériences que vous avez faites permettront, je l'espère, au gouvernement de poursuivre sa réflexion. Il y a eu, à juste titre, des réserves ou des critiques qui ont pu être faites sur tel ou tel aspect des choses, et c'est tout à fait normal et légitime, d'améliorer encore les choses qui méritent de l'être, bien entendu. Et je souhaite au quartier Nord d'Amiens, beaucoup, beaucoup de succès et aux jeunes de ce quartier beaucoup de bonheur.

Je vous remercie.





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