Réunion informelle franco-allemande - conférence de presse conjointe - Blomberg

Conférence de presse conjointe de M. Jacques CHIRAC, Président de la République et de M. Gerhard SCHROEDER, Chancelier de la République fédérale d'Allemagne, à l'occasion de leur rencontre informelle.

Blomberg - (Allemagne) - lundi 7 mars 2005.

LE CHANCELIER SCHROEDER – Mesdames, Messieurs, j'ai le plaisir de vous accueillir dans ma ville natale, et je remercie vivement le Président de la République d'être venu ici. Ce n'est pas exactement dans cette commune, mais dans un petit village qui fait partie de ce groupement de communes, que je suis né, il y a longtemps déjà. Et je me réjouis de l'accueil chaleureux que les citoyens de la région de Lip ont réservé au Président de la République française. Depuis plusieurs semaines, l'ambiance est très positive, tout le monde se réjouit d'accueillir Jacques CHIRAC, un ami de l'Allemagne et un ami personnel.

C'est dans cet environnement à la fois inhabituel et très joli que nous avons conduit nos entretiens. Comme toujours depuis plusieurs années, nous constatons un accord parfait aussi bien sur les questions européennes que sur les questions internationales. Je ne pourrai donc faire état ici d'aucune divergence ou différence, mais seulement vous parler d'accord entre nous.

Nous avons plus particulièrement abordé les questions européennes, et j'en citerai trois. Premièrement, nous considérons que le Président en exercice de l'Union européenne, le Président luxembourgeois, réussira à réformer le pacte de stabilité et de croissance, en mettant davantage l'accent sur la croissance que cela n'était le cas par le passé. En ce qui concerne les différents détails, nous sommes du même avis, et nous allons en faire part ensemble à la présidence luxembourgeoise. Moi-même mardi soir, je serai chez M. JUNCKER, et je présenterai et expliquerai la position franco-allemande.

Par ailleurs, nous avons beaucoup parlé des perspectives financières pour les années 2007 à 2013, et là encore, nous avons constaté un large accord : nous voulons nous en tenir au plafond budgétaire de 1% pour l'Union européenne. Il ne faut pas toucher à ce qui a été convenu à Bruxelles avant Copenhague, à savoir le compromis sur la Politique agricole commune, qui était la condition pour l'élargissement de l'Union européenne. Tous ceux qui ont participé à ces délibérations sont liés par ces décisions, et ceux qui nous ont rejoints sont également liés par ces décisions, parce que c'est cela qui, à Copenhague, a rendu possible l'élargissement.

Nous avons constaté un large accord dans le jugement que nous portons sur la directive sur les services. Bien sûr, ni le Président de la République ni moi-même n'estimons que, dans le marché intérieur, nous n'ayons pas besoin d'une liberté des services. Nul n'en conteste le principe, et je le dis à ceux qui critiquent régulièrement la France et l'Allemagne. Nous avons besoin non-seulement de la liberté pour les marchandises, pour les marchés des produits, mais également pour les marchés des services.

Toutefois, il faut organiser les choses pour que l'on ne soit pas confronté à des risques de dumping salarial. Il ne faut pas courir le risque de perdre tous les repères sociaux dans le domaine de la santé, dans le domaine des services publics, il ne faut pas brader tout cela. Nos citoyens sont très attachés à cela. Et dans nos discussions avec la Commission, nous défendrons ce point de vue. Nous considérons que la directive sur les services, dans la forme sous laquelle elle a été élaborée par M. Bolkenstein, le prédécesseur du commissaire actuel, ne peut en aucun cas être mise en œuvre dans son libellé actuel. Ce que nous souhaitons, c'est non-seulement que l'on en change la formulation, mais il faudrait aussi remettre à plat tout ce texte, ou formuler un nouveau texte pour que l'on retire en tous cas du projet d'origine les éléments qui touchaient tout particulièrement les hommes et les femmes de nos pays, et qui étaient source de craintes tout à fait réelles.

Par ailleurs, en ce qui concerne les thèmes internationaux, le Proche-Orient, l'Iran, la Russie, sur tous ces thèmes, je vais laisser la parole au Président de la République. Merci Monsieur le Président, Cher Jacques.

LE PRESIDENT - Monsieur le Chancelier, Messieurs les ministres, Mesdames, Messieurs, tout d'abord je voudrais exprimer ma reconnaissance au Chancelier qui nous invite dans cette superbe ville qui est aussi sa ville d'origine, où il est né, et pour moi c'est une idée un peu émouvante. Donc je le remercie, très chaleureusement.

Je voudrais également exprimer mon amical remerciement au Ministre-Président de Rhénanie-du-nord Westphalie, M. STEINBRUCK, qui est aujourd'hui, et c'est tout à fait normal, aux obsèques de M. WICHNIEWSKY. Je connais M. STEINBRUCK et je sais toute l'estime dont il est entouré, tout le travail qu'il a fait au profit de ses contemporains, et je voudrais lui dire que je m'associe tout à fait à l'hommage qui est, en ce moment même, rendu au ministre WICHNIEWSKY.

Je voudrais également remercier chaleureusement Monsieur le Maire de Blomberg, d'abord pour son accueil si sympathique, mais aussi pour l'accueil de sa population. Nous avons été accueillis avec beaucoup de chaleur, beaucoup de générosité et beaucoup de sourires, et je vous demande de bien vouloir transmettre à l'ensemble de la population et aux services de votre ville qui se sont mobilisés pour rendre notre réunion active et agréable, notre cordiale reconnaissance.

Le Chancelier vient de rappeler que nous sommes à deux semaines du prochain conseil européen. Dans ce conseil, effectivement, nous voulons agir pour la croissance et l'emploi, et dans ce domaine, nous souhaitons un accord sur la stratégie de Lisbonne qui tienne compte, bien sûr, des exigences économiques, mais aussi des exigences sociales et environnementales, dont l'importance doit probablement être un peu confirmée.

Nous voulons donner toutes ses chances à la jeunesse en Europe. Vous savez qu'à l'origine, le Chancelier et moi avions conçu une initiative, constatant un certain vieillissement de l'Europe, vieillissement naturel contre lequel d'ailleurs, il faudra réagir par une action démographique plus substantielle, à l'avenir. Nous avons constaté que les charges qu'implique forcément et naturellement, au nom de la solidarité, la prise en compte de ce vieillissement, sont un peu au détriment de la jeunesse. Nous voudrions renforcer notre politique d'intégration, de lutte pour l'emploi, pour ce qui concerne les jeunes et améliorer leur situation matérielle.

C'est l'objet d'un pacte européen pour la jeunesse que nous avons élaboré et fait approuver à l'origine par le Premier ministre espagnol ZAPATERO, le Premier ministre suédois Göran PERSSON, et qui a ensuite été adopté par l'ensemble du Conseil. La Commission, je crois, a l'intention de l'intégrer dans la réforme prévue pour l'ensemble de la stratégie de Lisbonne lors du prochain Conseil européen.

Enfin, nous voulons soutenir notre industrie, et c'est pourquoi nous proposons une relance des grands programmes d'innovation industrielle et technologique, à partir notamment d'un groupe d'industriels allemands et français sous l'impulsion de M. BEFFA et de M. CROMME, à qui je tiens à exprimer mes remerciements.

Nous avons également parlé de la réforme du pacte de stabilité et de croissance. Nous avons toute confiance dans la présidence luxembourgeoise qui va s'en entretenir demain avec le Chancelier. Il est indispensable d'améliorer, d'assouplir, d'adapter aux exigences du progrès économique et du progrès social les règles parfois trop strictes du pacte de stabilité dont on a trop oublié qu'il était un pacte de stabilité et de croissance, de façon à permettre une meilleure adaptation de nos économies. Sur tous ces sujets, nous sommes arrivés à des conclusions communes et nous aurons ensemble des positions dynamiques sur tous les sujets de ce Conseil.

Le Chancelier a engagé en Allemagne, et ceci a suscité l'estime internationale unanime, une politique très ferme et très dynamique de lutte contre le chômage, contre la désindustrialisation, contre les délocalisations, contre l'exclusion. Nous avons, en France, exactement les mêmes objectifs, et nos politiques, compte tenu des caractéristiques propres à chacun de nos pays, sont parfaitement cohérentes.

S'agissant de politique étrangère, comme le Chancelier vient de l'évoquer, nous partageons la même volonté d'un partenariat fort, stable, équilibré entre l'Union européenne et la Russie. Nous aurons très prochainement, le 18 mars prochain, à Paris, une réunion avec le Président POUTINE, le Premier ministre ZAPATERO et nous deux, dans cet esprit de partenariat fort, stable et équilibré avec la Russie pour l'Union européenne.

S'agissant des questions d'actualité internationale, nous avons tout à fait la même position, qu'il s'agisse de la Conférence de Londres, à l'occasion de laquelle nous avons apporté notre soutien, et celui de la communauté internationale à l'Autorité palestinienne. Qu'il s'agisse de la crise que connaît actuellement le Liban, pour lequel nous apportons un soutien qui est d'ailleurs le soutien de l'ensemble de la communauté internationale à l'application de la résolution 1559, et notamment à l'enquête internationale pour connaître les conditions dans lesquelles l'ancien Premier ministre Rafic HARIRI a été assassiné et qui suppose aussi le retrait de l'armée mais également des services de sécurité syriens du Liban pour permettre l'expression démocratique, prévue dans peu de temps, du peuple libanais.

Nos deux pays ont également à cœur de mener une négociation avec nos amis britanniques pour obtenir de l'Iran les garanties nécessaires et objectives sur le caractère pacifique de son programme nucléaire.

Enfin, nous avons une convergence de vues complète sur les problèmes qui seront examinés à l'occasion du G8 sous présidence britannique à Gleneagles. Concernant les changements climatiques, nous sommes tout à fait sur la même ligne, et concernant le financement du développement, nous sommes également sur la même ligne. Enfin, je me réjouis de pouvoir accueillir à nouveau le Chancelier à Paris, pour le prochain Conseil des ministres franco-allemand, le 26 avril prochain.

QUESTION – Une question, Monsieur le Chancelier, sur le pacte de stabilité et de croissance. Est-ce que la flexibilité que vous attendez du Conseil européen pourrait offrir à votre gouvernement des marges financières pour la lutte contre le chômage ? Deuxième question, comment jugez-vous la décision de la Deutsche Börze de retirer son OPA sur le London Stock Exchange ?

LE CHANCELIER SCHROEDER – Tout d'abord, en ce qui concerne le pacte de stabilité, il s'agit de mettre davantage l'accent sur l'axe croissance. L'Europe a, derrière elle, maintenant, une phase de stagnation, mais les forces de croissance dans l'Europe tout entière ne sont pas encore suffisamment marquées pour que l'on puisse s'en satisfaire. C'est évident, en ce qui concerne l'Allemagne. Donc, il s'agit de créer les conditions pour plus de croissance. Il s'agit d'interpréter le pacte de stabilité et de croissance de telle façon que nous puissions mettre en œuvre des moyens matériels pour renforcer les objectifs de croissance. Les détails seront l'objet de discussions avec la Présidence et cela ne sera pas sur la place publique. Au demeurant, je m'abstiendrai de commenter publiquement la politique commerciale et financière de telle ou telle entreprise.

QUESTION – Sur le pacte de stabilité, est-ce que la question de l'automatisme a été prise en compte ?

LE PRESIDENT – Je tiens à vous dire que je ne souhaite pas entrer dans le détail technique. D'abord, nous sommes tout à fait sur la même ligne et nous défendons la même position. Deuxièmement, nous ne sommes pas favorables à l'automaticité. Nous considérons qu'il faut, s'agissant d'un pacte de croissance, intégrer dans la réflexion, avant de prendre une décision, un certain nombre de données. La situation n'est pas la même si nous sommes en forte croissance ou au contraire en période de stagnation. Bien entendu, il faut en tenir compte. Chaque pays a des caractéristiques particulières, je pense par exemple à l'importance et au coût pour l'Allemagne du développement des Länder de l'Est, qui est une charge très spécifique, très particulière, qui doit être aussi comprise et intégrée dans une équation d'ensemble, si on veut qu'elle soit économiquement justifiée, ou bien l'importance de l'excédent allemand dans sa contribution à l'Europe.

Chacun a des caractéristiques un peu particulières qui ne permettent pas de les peser exactement avec la même balance. Il y a également dépense et dépense : il y a des gens qui dépensent énormément pour les dépenses courantes, de fonctionnement, d'autres qui sont plus sérieux ; et puis il y a les dépenses d'investissement qui, elles permettent la richesse de demain ; il s'agit par exemple de l'investissement ou bien de la recherche. Est-ce qu'il faut permettre que l'on donne la priorité, parce que c'est le plus facile, aux dépenses de fonctionnement, ou est-ce qu'il faut prendre en considération le fait qu'il y a des pays qui font un effort particulier pour l'avenir, c'est-à-dire l'investissement et la recherche ?

Il y a aussi les dépenses qui sont engagées pour le bien commun de l'Europe, par exemple les dépenses pour la défense ou l'aide publique au développement, ce qui est important pour l'ensemble de l'Europe. Est-ce que l'on peut considérer que ceux qui font des dépenses importantes dans ces domaines seront maltraités par rapport à ceux qui n'en font pas et qui n'apportent pas la même contribution à la sécurité globale de l'Europe ? Donc, il ne faut pas d'automatisme. Il faut qu'il y ait une capacité de jugement.

Autrement dit, l'application d'un tel pacte ne peut pas être purement technocratique. Elle doit être politique. C'est-à-dire qu'elle doit intégrer un certain nombre de réalités qui sont des réalités économiques et des réalités humaines. Naturellement, il ne s'agit pas, ni de près, ni de loin, d'accepter un quelconque laxisme. Quand on est ensemble pour défendre une monnaie commune, il faut accepter des règles et les appliquer strictement. Le laxisme est une chose. La brutalité technocratique en est une autre. Et donc, il faut trouver la bonne voie pour définir la politique dans ce domaine. Nous n'avons aucune divergence avec le Chancelier sur notre position.

QUESTION – Sur le Liban, ne pensez-vous pas qu'un départ rapide des troupes syriennes risque de mettre à mal l'équilibre dans ce pays ? Je fais notamment allusion à la déclaration de M. NASRALLAH, hier soir, qui demandait le maintien des troupes syriennes.

LE PRESIDENT – Je ne veux pas faire d'ingérence dans les affaires intérieures du Liban. Je constate simplement que la communauté internationale est unanime pour demander que le Liban puisse s'exprimer librement et démocratiquement, que cela suppose naturellement le retrait des forces étrangères et surtout des services de sécurité, je fais allusion aux services de sécurité syriens.

A partir de là, la démocratie pourra, je l'espère, s'exprimer normalement. On ne peut pas exclure, c'est vrai, -j'ai écouté attentivement la déclaration du Cheikh NASRALLAH hier-, que chacun exprime sa position. Et je n'ai aucune critique à formuler à l'égard de la position exprimée par le Hezbollah, à condition qu'elle soit exprimée de façon naturelle, démocratique, c'est-à-dire pacifique et qu'il ne s'agisse pas là d'une incitation à des excès que l'on ne pourrait que réprouver au nom de la démocratie.

LE CHANCELIER SCHROEDER – Il n'y a aucune raison de s'écarter de cette position qui a été décrite par le Président, qui est une position franco-allemande commune et qui est aussi la position de la communauté internationale. Il n'y a pas lieu de s'en écarter, fut-ce d'un iota.

QUESTION - Monsieur Le Chancelier, vous avez parlé avec Monsieur le Président de la République de la situation du marché de l'emploi dans les deux pays, et en Europe. Est-ce que cette semaine, vous agirez encore dans ce domaine ?

LE CHANCELIER SCHROEDER - Vous comprendrez que cette conférence de presse ne sera pas utilisée pour répondre à vos questions somme toute légitimes sur des rendez-vous avec l'opposition allemande. La question est légitime mais ce n'est pas le lieu d'y apporter une réponse. Je le ferai à Berlin et bien volontiers.

QUESTION - Monsieur le Chancelier, Monsieur le Président, comment voyez-vous les échanges de jeunes, entre l'Allemagne et la France et quelles sont les aides qui pourraient y être apportées ?

LE CHANCELIER SCHROEDER - Je pense qu'il faut saluer le travail de l'Office franco-allemand pour la jeunesse. Et au centre de cette action de l'Office franco-allemand pour la jeunesse, il y a précisément l'échange d'élèves, d'écoliers, d'étudiants mais, de plus en plus aussi, l'échange de jeunes qui suivent des formations professionnelles. Au mois d'avril, nous allons de nouveau parler de cette question, et cela fait suite à une proposition française à laquelle nous nous associons volontiers, parce que l'un et l'autre nous souhaitions qu'il y ait une concertation meilleure en ce qui concerne les diplômes des jeunes dans tous domaines, mais également dans le domaine de la mobilité des jeunes. Nous souhaitons des améliorations qui aillent encore plus loin et, bien entendu, l'aide apportée à l'Office franco-allemand pour la jeunesse se poursuivra au niveau actuel.

LE PRESIDENT – Il est prévu, au prochain Conseil des ministres qui aura lieu le 26 avril prochain à Paris, toute une action pour favoriser, entre la France et l'Allemagne, la mobilité des étudiants, des chercheurs, des professeurs, des créateurs de toutes sortes. En d'autres termes, ce qu'a proposé le Chancelier et auquel nous nous sommes tout à fait ralliés, c'est de permettre la mobilité de l'intelligence. Je crois que c'est très important. Cela va au-delà des étudiants et ce sera un point important de notre prochain Conseil des ministres franco-allemand.

QUESTION – Monsieur le Président, Monsieur le Chancelier, prévoyez-vous des actions communes pour la campagne sur la Constitution européenne ?

LE CHANCELIER SCHROEDER - En Allemagne, la Constitution européenne sera ratifiée dans le cadre de la procédure parlementaire, puisque c'est ce que prévoit la Constitution allemande. Je ne peux pas anticiper sur les prérogatives du Parlement, mais nous espérons le faire d'ici fin mai, au plus tard début juin. Je pense que, dans la deuxième quinzaine de mai, nous réunirons la nécessaire majorité des deux tiers. Cela pourra ainsi servir d'exemple pour illustrer l'importance, le poids de cette Constitution pour l'Europe, pour tous les Etats-membres de l'Union européenne. Et nous souhaitons bien sûr -mais il nous appartient de respecter le choix du peuple français- que sa décision aura aussi une valeur d'exemple. Mon espoir, c'est que dans l'Europe tout entière; l'importance de cette Constitution soit pleinement reconnue. J'espère que des majorités pourront être trouvées dans les procédures parlementaires comme dans les référendums pour l'approbation de cette Constitution. Ce n'est pas seulement un espoir, je dirais que c'est l'expression de ce que nous jugeons nécessaire.

QUESTION - Monsieur le Chancelier, avez-vous parlé de l'Iran ? Si oui, quelles sont les concessions que les Européens pourraient accepter, Européens qui sont représentés par vous deux ?

LE CHANCELIER SCHROEDER - Notre position est parfaitement identique en ce qui concerne la question iranienne. Nous souhaitons que les dirigeants iraniens acceptent de renoncer à la production et à la diffusion d'armes nucléaires, c'est-à-dire d'avoir une utilisation purement pacifique du programme nucléaire. Dans les négociations, il s'agira d'obtenir des garanties objectives pour une telle procédure. Voilà la position franco-allemande commune, qui est d'ailleurs également celle des Britanniques qui participent aux négociations. Nous avons le sentiment, suite aux discussions de Bruxelles et suite aux entretiens en Allemagne, que l'administration américaine partage cette approche. Nous espérons donc pouvoir afficher suffisamment de forces de conviction dans les négociations pour obtenir des dirigeants iraniens une réponse constructive.

LE PRESIDENT – Cette question sur l'Iran -et j'aurais fait, évidemment, la même réponse que le Chancelier après une question sur l'Europe faisant clairement apparaître la parfaite concordance des positions allemandes et françaises sur les problèmes européens-, conduit à une réflexion plus générale, très courte, très brève.

L'accord qui existe entre nos deux pays est fondé sur une volonté politique commune, sur une vision commune de l'Europe de demain et du monde de demain. Mais il est aussi fondé sur des intérêts économiques, sur une vision sociale, qui est commune. Enfin, il est fondé sur une vision du monde qui est commune. C'est tout à fait important car il est très difficile de s'entendre de façon bilatérale quand on est deux puissances importantes du monde et que l'on n'a pas la même vision du monde et la même action dans le monde, le même respect des mêmes principes s'agissant notamment de la paix, de la démocratie, du respect des droits de l'Homme, du respect de l'état de droit et, à partir de là, un jugement commun sur les grands problèmes.

Je suis très frappé parce que, depuis des années que nous travaillons ensemble, je constate que le Chancelier a redonné toute son influence à la diplomatie allemande. Et cela est un point très important pour l'Allemagne, sans aucun doute, mais également pour l'Europe et donc pour la France. Qu'il s'agisse de la présence de l'Allemagne dans les missions de paix dans le monde et de ses responsabilités au premier rang des missions de paix, par exemple en Afghanistan ou dans les Balkans. Qu'il s'agisse de l'action de l'Allemagne et de la diplomatie allemande en ce qui concerne la réforme de l'ONU ou l'actualisation, qui a été parfaitement définie récemment par le Chancelier, du lien transatlantique qui doit être naturellement renforcé, respecté, modernisé et adapté. Qu'il s'agisse du traitement des grands dossiers de crise en Afrique mais aussi en Iraq, en Iran et dans le problème syro-libanais auxquels nous sommes confrontés, non pas seulement nous, mais la démocratie, l'état de droit, le respect des droits de l'Homme qui sont mis en cause. Qu'il s'agisse de la présence économique de l'Allemagne sur tous les grands marchés émergents, et nous nous en réjouissons car les succès successifs remportés par le Chancelier sur les grands marchés émergents, en Chine, dans les pays du Golfe, sont essentiels pour l'ensemble de l'Europe et pour une stratégie de développement européenne.

Qu'il s'agisse enfin de l'action qui est celle de la diplomatie du Chancelier en faveur de la construction européenne et sur laquelle nous sommes entièrement d'accord, c'est-à-dire son rôle dans l'élaboration puis la mise en oeuvre du traité constitutionnel, son rôle dans la révision raisonnable du pacte de stabilité, non pas pour remettre en cause la sûreté et le sérieux de la gestion financière, mais pour tenir compte de la vie et de ses exigences en matière économique et sociale. Qu'il s'agisse de sa volonté d'une politique de concurrence en Europe plus flexible, mieux adaptée au développement de l'économie européenne, qu'il s'agisse de donner à l'Europe toute sa force, de valoriser ses atouts.

Sur tous ces points, qu'il s'agisse de l'Europe ou du monde, nous sommes en pleine convergence ce qui permet de constater que nous n'avons aucun motif de divergence et, si par hasard, nous en avons, nous le réglons a priori, de façon à ce que l'ensemble du système de nos relations soit un système fort, cohérent et donc qui puisse donner une impulsion.

Sur tous ces points, nos actions sont parfaitement convergentes et je voulais le souligner.

Je vous remercie

LE CHANCELIER SCHROEDER – Je vous remercie.





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