Sommet franco-polonais : conférence de presse conjointe

- SOMMET FRANCO-POLONAIS -

Conférence de presse conjointe de M. Jacques CHIRAC, Président de la République et de M. Aleksander KWASNIEWSKI, Président de la République de Pologne.

Arras (Pas-de-Calais) - lundi 28 février 2005.

LE PRESIDENT - Mesdames, Messieurs, je voudrais dire d'abord combien je suis heureux, et cela n'est pas une formule diplomatique, c'est l'expression d'un sentiment du cœur, d'accueillir aujourd'hui le Président Aleksander KWASNIEWSKI, ainsi qu'un certain nombre des membres de son gouvernement, pour ce premier sommet bilatéral polono-français.

Vous me permettrez également de remercier chaleureusement la ville d'Arras, ses habitants pour leur accueil, malgré le froid, qui a été particulièrement cordial et qui s'adressait à l'évidence à nos hôtes polonais. Je présente mes remerciements au sénateur-maire d'Arras, M. Jean-Marie VANLERENBERGHE. Nous sommes heureux d'être dans cette ville et dans cette région dont, le Président KWASNIEWSKI le sait, environ 500.000 Français sont d'origine polonaise. Ce sont des hommes et des femmes qui sont venus de Pologne parfois à la quatrième génération pour des raisons historiques que nous connaissons, qui se sont investis, intégrés, tout en conservant le respect de leur culture et généralement de leur langue et qui ont beaucoup apporté à la France, à l'origine à son économie, et notamment dans le domaine des mines, et puis à sa culture, à sa vie.

Le Président KWASNIEWSKI disait son émotion de voir que le colonel qui commande l'unité qui stationnait ici, et qui nous rendait les honneurs, ce matin, était un Polonais qui s'est adressé à lui, après avoir présenté ses troupes, en polonais. Je disais au Président que le chef d'état-major de l'armée de l'air française, le général d'armée WOLSZTYNSKI, est également descendant de ces Polonais qui sont venus apporter leur travail et leur cœur, leur intelligence, leur initiative à la France, il y a une ou deux générations.

J'ai beaucoup de respect pour ces Polonais. Je les ai bien connus, notamment quand j'étais militaire. Quand j'étais jeune officier et que je commandais une unité, la moitié environ de cette unité était composée de jeunes Polonais qui, à l'époque, devaient faire leur service militaire pour pouvoir conserver définitivement leur nationalité française. Nous étions à l'époque en Algérie. Ce n'était pas toujours facile. C'était des garçons formidables de courage et de cœur, et j'avais pour eux beaucoup, beaucoup d'estime.

Toutes ces raisons font que, au-delà de l'amitié multiséculaire qui existe entre nos deux nations, entre nos deux peuples, il y a ces liens récents, des liens qui se sont encore considérablement renforcés puisque depuis le mois de mai dernier, la Pologne est membre de l'Union européenne. C'est pour nous une grande joie.

Cela a conduit le Président KWASNIEWSKI et moi à vouloir apporter notre contribution à ce renforcement des liens entre nos deux pays, en décidant que, de même que la France a avec l'Angleterre, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne, une rencontre régulière bilatérale, nous le ferions désormais également entre la Pologne et la France. D'où cette première réunion, ici, à Arras. Je souhaite une cordiale bienvenue, mais au-delà, une fraternelle bienvenue à l'ensemble de la délégation polonaise.

Nous avons adopté une déclaration à l'issue de ce sommet. Elle affirme notre ambition de travailler ensemble et de tout faire pour que chaque fois qu'un problème apparaît, nous le résolvions dans le meilleur esprit, et ceci au bénéfice d'une volonté commune de construire une Europe qui soit une Europe de progrès économique et de solidarité sociale.

Nos deux pays se sont engagés dans la ratification du Traité constitutionnel par la voie du référendum. Ce référendum aura lieu en France, je vais y revenir dans un instant, et il aura lieu en Pologne, quelque temps après, je crois. Nous avons la même foi dans l'intérêt essentiel que présente pour la paix et le développement, pour les rapports normaux entre les Européens, la ratification de ce Traité constitutionnel.

Nous avons évoqué le prochain conseil européen et nous avons dégagé une très large convergence de vues sur les problèmes qui seront traités. Qu'il s'agisse de la réforme du pacte de stabilité, de la révision de la stratégie de Lisbonne, de la volonté de mieux intégrer nos jeunes dans le développement économique et de mieux répondre à leurs problèmes par, en particulier, un pacte européen pour la jeunesse que nous défendrons ensemble au prochain conseil européen.

Nous avons également souligné l'importance de renforcer l'Europe de la Défense. Je me réjouis en particulier de la position positive prise par la Pologne en ce qui concerne la force européenne de gendarmerie. Nous sommes côte à côte déjà dans un certain nombre d'opérations de maintien de la paix. C'est vrai en Bosnie. C'est vrai au Kosovo. C'est vrai en Afghanistan. La cohérence de nos actions militaires, la solidarité entre nos militaires doivent être particulièrement soulignées.

Nous avons confirmé que nous souhaitions avoir un partenariat fort, confiant et stable entre l'Union européenne et la Russie, que c'était pour nous essentiel dans l'intérêt à la fois de la Russie et de l'Union européenne.

Nous avons également confirmé notre volonté d'une relation forte avec l'Ukraine. J'ai profité de cette occasion pour dire à nouveau au Président toute l'estime et toute la reconnaissance que nous avions pour l'action remarquable qu'il a menée personnellement pour le dénouement de la crise ukrainienne, en liaison avec les autorités européennes. Nous avons souligné qu'il était capital de mettre en œuvre la décision prise par les ministres des Affaires étrangères pour un plan d'action sur les relations de voisinage avec l'Ukraine.

J'ai assuré le Président KWASNIEWSKI du plein soutien de la France pour la préparation du sommet du conseil de l'Europe qui se tiendra au mois de mai, sous présidence polonaise, à Varsovie.

Je lui ai confirmé tout ce que nous attendions du renforcement des liens entre l'Allemagne, la Pologne et la France qui s'exprimeront notamment par la prochaine réunion, traditionnelle et ancienne, du triangle de Weimar, qui aura lieu avec le Chancelier SCHROEDER, le Président polonais et moi-même au mois de mai, à Nancy. A Nancy, parce que c'est le tour de la France. C'est chaque année l'un des trois pays qui accueille ce sommet.

Notre rencontre aujourd'hui a permis également de montrer que nous partagions les mêmes préoccupations sur les grands sujets d'actualité internationale. La situation en Iraq. Nous avons eu des divergences de vues, chacun le sait. C'est le passé. Mais nous regardons dans la même direction pour ce qui concerne le redressement de la situation de ce pays où elle n'est pas encore stabilisée. Le processus de paix au Proche-Orient, sur lequel nous avons tout à fait la même orientation. Les problèmes que connaît actuellement la région au Liban, et notamment la nécessité impérieuse de renforcer les capacités du Liban à affirmer sa souveraineté, son indépendance, son intégrité, et à s'exprimer de façon démocratique. Ce qui suppose l'application très claire de la résolution 1559, le retrait des troupes et surtout des services spéciaux syriens, retrait programmé de ces troupes et de ces services du Liban et la mise en œuvre d'une action permettant des élections réellement démocratiques. Ce qui suppose enfin une totale coopération de la communauté internationale pour la mission d'enquête décidée par l'ONU sur l'assassinat de l'ancien Premier ministre Rafic HARIRI.

Nous avons également constaté notre convergence de vues dans le domaine de l'Iran, et bien entendu de son programme nucléaire, de même que pour la réforme des Nations Unies où nous partageons les mêmes réflexions et les mêmes ambitions, ou la préparation du Sommet sur les objectifs du millénaire à New York en septembre.

S'agissant de la coopération bilatérale, elle est excellente. La France est le premier investisseur étranger en Pologne, ce qui prouve la confiance qui existe en France pour ce qui concerne la Pologne et réciproquement.

La déclaration d'Arras présente une série de domaines où les partenariats franco-polonais pourront encore s'intensifier, notamment l'agriculture. Nous sommes les deux premières puissances agricoles de l'Europe et donc nous devons marcher la main dans la main. Sur la protection des frontières, la formation des policiers, la lutte contre le crime organisé, nous avons pris un ensemble de décisions pour bien coopérer ensemble.

Nous nous sommes réjouis de l'immense succès qu'a eu la saison culturelle Nova Polska en France. L'Ambassadeur me disait tout à l'heure que 126 villes françaises ont été associées à plusieurs centaines de manifestations, qui ont connu un immense succès de prestige et d'intérêt chez les Français.

Nous avons eu une pensée respectueuse confiante et affectueuse pour le Pape. Chacun le comprendra.

Avant de terminer, et pour bien marquer à quel point notre relation est tout à fait amicale, je voudrais évoquer un problème plus franco-français, le Président polonais m'y a engagé.

Comme vous le savez, le Congrès est réuni en ce moment à Versailles. Il vient de se prononcer souverainement sur la révision de la Constitution. Il s'est prononcé à une très large majorité. Cette décision du congrès va ouvrir la voie au référendum sur la Constitution européenne. La révision prévoit qu'à l'avenir ce sont les Français eux-mêmes qui se prononceront pour tout nouvel élargissement de l'Union européenne. Entre autres choses, le nouveau traité constitutionnel renforcera sensiblement les pouvoirs du Parlement, des Parlements, et notamment du Parlement français, sur les politiques de l'Union européenne. La Constitution européenne engage tout notre avenir et l'engage fortement. C'est pourquoi j'ai voulu que les Françaises et les Français se prononcent à ce sujet de façon personnelle, directement, par référendum. Il est essentiel que le débat qui s'engage soit conduit dans un esprit de dialogue, mais aussi de responsabilité. Car il en va de l'avenir de notre pays, de la vie quotidienne des Françaises et des Français. Des jeunes, qui construisent l'avenir commun sur le plan matériel, comme sur le plan culturel, sur le plan de leurs droits, de leurs devoirs, de leurs responsabilités, sur l'exigence qui est la leur profondément, et qui doit être assurée, de paix, de démocratie et de respect des droits de l'Homme, de respect de l'état de droit.

Je prendrai part, et toute ma part, à ce débat, pour expliquer aux Françaises et aux Français pourquoi cette Constitution est une chance pour la France, une chance pour l'Europe. Je m'entretiendrai d'ailleurs, à partir de demain, avec les responsables des principales formations politiques, de l'organisation démocratique de cette consultation.

Voilà ce que je voulais vous dire en commençant. Et je passe maintenant la parole au Président Polonais.

M. Aleksander KWASNIEWSKI - Merci beaucoup Monsieur le Président, cher ami, Mesdames et Messieurs.

Nous avons participé à un événement historique, le premier sommet polono-français sous la présidence des Présidents des deux pays. Nous sommes très reconnaissants pour cette initiative française. Je me rappelle que lorsque pour la première fois nous avons parlé d'élever nos relations à ce niveau, suivant le modèle des relations franco-allemandes, franco-britanniques ou franco-espagnol ou franco-italienne, Monsieur le Président a dit qu'il s'agissait ici des retrouvailles polono-françaises. En français cela sonne très bien, retrouvailles franco-polonaises. Je pense qu'aujourd'hui nous étions les acteurs de ces retrouvailles combien belles, retrouvailles du langage commun, d'une amitié commune.

Je voudrais remercier pour cela Monsieur le Président, pour sa bienveillance. Je voudrais remercier les membres de la délégation française, ainsi que les autorités et les habitants d'Arras, car nous avons été accueillis ici d'une façon vraiment splendide, formidable, et je sais que mes compatriotes depuis des générations ont trouvé ici leur nouvelle patrie.

Je ne voudrais pas revenir à toutes les questions que Monsieur le Président a déjà traitées. Nous avons examiné toutes les questions présentées par Monsieur CHIRAC. Je peux dire que, du point de vue polonais, il est très important que nous ayons les mêmes vues sur la majorité des questions européennes, y compris celles du traité constitutionnel. En Pologne, la ratification de ce traité constitutionnel passera probablement aussi par le référendum national. La position française qui sera adoptée au cours du référendum aura pour nous une signification très importante. Elle aura une signification importante pour toutes les sociétés, tous les peuples de l'Union européenne. Je félicite Monsieur le Président de cette première étape, la décision du congrès a été adoptée d'une façon spectaculaire. C'est un grand succès, un bon espoir, je pense, pour un succès du référendum en France.

Nous avons aussi confirmé l'importance des relations transatlantiques. En tant que Président de la Pologne, j'ai dit que nous nous réjouissons beaucoup de ces rencontres réussies entre Monsieur le Président CHIRAC et Monsieur BUSH, ainsi que du dernier Sommet de l'OTAN, de la rencontre au sein de l'Union européenne avec le Président américain. Nous avons besoin de bonnes relations transatlantiques. La Pologne, partout, y compris à Washington, a été l'avocat de ces bonnes relations transatlantiques. Je disais que les bonnes relations de Washington avec Paris ou avec Berlin, c'est une garantie de sécurité pour nous-mêmes. Alors, nous sommes sûrs qu'aucune question ne sera traitée au dessus de nos têtes. Donc, le retour à un dialogue transatlantique actif, nous l'accueillons avec satisfaction.

De même, nos deux pays sont intéressés à ce que les relations s'intensifient avec la Fédération de Russie, l'Ukraine. Nous avons beaucoup parlé de cette dimension orientale de l'Union européenne qui nous concerne particulièrement.

Les contacts bilatéraux entre la Pologne et la France sont tels que Monsieur le Président l'a dit, très bons, aussi bien en ce qui concerne les investissements, le commerce, la coopération scientifique ou la culture. Nous nous réjouissons beaucoup du très bon accueil réservé aux presque 800 événements dans plus de 120 villes françaises, l'année dernière. Ils ont montré la nouvelle culture polonaise surtout ce que nous avons en commun, avec la France au sein de l'Union européenne et que nous sommes heureux d'avoir pu montrer à nos amis Français.

Ce sommet, Mesdames et Messieurs, ce n'est pas la clôture d'une étape de la coopération. Il donne un niveau élevé à cette coopération. Je tiens à vous dire qu'il y a d'autres contacts. Ils nous donnent la garantie qu'il y aura de nombreuses occasions de nous rencontrer, de nous entretenir sur toutes les questions bilatérales.

Il y aura des consultations entre les gouvernements. Il y aura des rencontres entre les ministres. Il y aura le triangle de Weimar en mai. Nous allons accueillir Monsieur CHIRAC lors du sommet du Conseil de l'Europe à Varsovie. Ce dialogue sera poursuivi, renforcera la proximité des opinions de la France et de la Pologne. Il va aussi aider à résoudre certains sujets qui ne sont pas encore résolus et qui peuvent éveiller des doutes de part et d'autre.

Pour terminer, je tiens à vous remercier une fois de plus pour cet événement historique. Je voudrais vous remercier pour votre hospitalité. Nous avons confirmé que des liens particuliers unissent la Pologne et la France. Je tiens à inviter Monsieur le Président et les représentants du gouvernement français au sommet suivant en Pologne.

Je pense qu'aujourd'hui une chose très importante a eu lieu. Nos intentions sont inscrites dans la Déclaration d'Arras. Je pense que vous voudrez certainement la présenter à l'opinion publique de nos deux pays. Je suis convaincu que ce qui a eu lieu, ici, aura des effets positifs aussi à court et à long terme. En effet, Monsieur le Président, cher ami, nous nous sommes retrouvés dans une excellente atmosphère.

Je vous remercie beaucoup de votre attention.

QUESTION - Une question pour les deux Présidents. Vous êtes-vous entretenus de l'ouverture du marché du travail. Quels sont les résultats de ces entretiens ?

LE PRESIDENT - Ce sujet a été évoqué, notamment par la partie polonaise qui souhaite améliorer sensiblement la situation dans ce domaine. Nous avons créé un groupe de travail pour examiner concrètement les choses, au cas par cas. Ce groupe de travail a déjà bien progressé et devra nous présenter ses conclusions dans les deux ou trois mois qui viennent. Nous prendrons alors, en concertation, les décisions qui nous paraîtront les meilleures : les plus conformes aux intérêts polonais que nous connaissons bien et que nous comprenons parfaitement, et la situation de la France.

M. ALEKSANDER KWASNIEWSKI - C'est exactement comme le Président CHIRAC vient de le dire. Un groupe de travail mène des travaux. Nous espérons que, dans quelques mois, ce groupe présentera des conclusions. Elles seront immédiatement mises en œuvre. C'est ceci que je voulais dire à ce sujet, aujourd'hui.

QUESTION - Est-ce que vous attendrez la réunion demain avec les dirigeants politiques pour annoncer la date du référendum ou est-ce que vous pouvez déjà, dès aujourd'hui, donner quelques indications ?

LE PRESIDENT - Il va de soi que j'attendrai d'avoir consulté les responsables des différentes formations politiques pour arrêter une décision dans ce domaine, et ses modalités d'application.

QUESTION - Est-ce qu'il y avait des demandes pour que la Pologne regarde avec bienveillance l'offre d'Airbus ? Vous êtes-vous entretenus du dernier conflit sur la question des télécommunications ?

M. ALEKSANDER KWASNIEWSKI - Nous avons parlé de toutes ces questions. S'agissant d'Airbus, ce n'est pas un sujet nouveau dans nos débats. Monsieur le Président CHIRAC a présenté la question d'Aibus dans sa dimension européenne, c'est-à-dire que c'est un grand projet européen qui devrait engager tous les pays européens, qu'il s'agisse de la production ou de l'utilisation de ces avions. Il n'y a pas de doute de la part des compagnies aériennes polonaises, des autorités polonaises. Il faut que nous prenions en considération très sérieusement ces arguments et analyser et discuter car il y a une grande détermination européenne, exprimée aussi bien par M. BLAIR, par le Chancelier SCHROEDER et aussi par le Président CHIRAC. Ce sujet apparaît dans les entretiens bilatéraux et multilatéraux. Sur l'autre question que vous venez de poser, nous avons établi que nous allons collecter des informations. Nous n'étions pas prêts à des réponses précises mais ces questions, bien sûr, apparaissent. Cela souligne l'opportunité des Sommets polono-français : nous n'évitons pas les sujets compliqués, sensibles ou difficiles. L'entretien est sincère et je considère cela comme une qualité.

LE PRESIDENT - Je partage tout à fait ce qu'a dit le Président.

QUESTION - Monsieur le Président, le Congrès s'est donc exprimé à une très large majorité mais ce référendum va se passer dans une situation un peu difficile. Le contexte économique n'est pas simple. Le chômage est important en France. Vous venez de nous dire que vous comptiez vous investir personnellement dans ce débat. Comment comptez-vous le faire ? Comment comptez-vous convaincre les Français ?

LE PRESIDENT - J'aurai l'occasion de m'adresser aux Français pour dire très simplement, en tant que responsable politique, que l'intérêt de chacune et de chacun d'entre eux, l'intérêt de la France, c'est de vivre dans une Europe organisée, avec une Constitution lui donnant la possibilité de progresser normalement. Une Europe de paix, ce qui est capital, de respect des droits de l'Homme, mais aussi une Europe mobilisant ses énergies pour répondre en particulier aux problèmes de l'emploi, du développement économique et de la solidarité sociale. Au problème des jeunes, aussi, qui est, aujourd'hui, un problème préoccupant et pour lequel nous devons ensemble nous mobiliser, parce que l'union fait la force pour régler les problèmes auxquels ils sont confrontés tant en matière d'intégration dans la vie moderne qu'en matière de travail et d'emploi.

QUESTION - Monsieur le Président, question nationale, aujourd'hui en Pologne, M. WASSERMAN a proposé un rapport en demandant de mettre devant le tribunal d'Etat, M. MILLER, le professeur ..... a demandé aussi de vous présenter devant le tribunal d'Etat.

M. ALEKSANDER KWASNIEWSKI - Ma réaction est la suivante. Je ne veux pas commenter ces faits. Je suis étonné que vous veniez à Arras pour me poser une telle question. Arras est une très belle ville et je pense que notre rencontre est trop fondamentale pour y introduire des questions sans importance sur les propos de certains hommes politiques polonais.

QUESTION - Au terme de dix jours agités, Hervé GAYMARD a démissionné, entraînant avec lui une partie de la confiance des Français envers les hommes politiques. Quelle est votre opinion sur cette affaire et que comptez-vous faire pour rétablir cette confiance entre les gouvernés et les gouvernants ?

LE PRESIDENT - C'est un problème qui concerne directement le gouvernement français, très peu ou pas du tout le gouvernement polonais. Par conséquent, je vous dirai que je fais confiance au gouvernement français pour faire en sorte que la confiance des Français dans son action soit tout à fait sans ambiguïté.

QUESTION - Une question aux deux Présidents. Vous avez parlé de l'importance des relations avec la Russie. Je voudrais vous demander s'il y avait lors de vos entretiens la crainte que, vu les éventuels changements politiques en Pologne au résultat des élections, il se peut que, sur cette partie orientale de l'Union européenne, il y ait des problèmes dans les relations avec la Russie ?

M. ALEKSANDER KWASNIEWSKI - Nous sommes convenus qu'il faut établir de bonnes relations avec la Russie. Cela concerne l'Union européenne et ses voisins. Nous espérons la même chose de la part de la Russie : qu'elle établisse les meilleurs contacts possibles avec nous. Les démocraties ont ceci de caractéristique que les gouvernements changent, mais je pense que l'objectif stratégique de chaque gouvernement polonais, de l'Union européenne dans son ensemble, devrait être la construction de bonnes relations économiques et politiques avec la Fédération de Russie. Cette stratégie est très importante.

Comment se réalisera-t-elle ? Nous ne sommes pas des prophètes mais les positions de la France et de la Pologne sont identiques. L'Union européenne, de même que l'OTAN, devrait faire des efforts afin de consolider, de construire des relations avec la Russie, en ne cachant pas les différences d'opinion, sans éviter la critique là où elle est justifiée, mais en créant la confiance et toutes formes de coopération possible avec la Fédération de Russie, aussi bien au sein de l'Union européenne que de l'OTAN.

LE PRESIDENT - Je partage tout à fait le sentiment exprimé par le Président KWASNIEWSKI. La relation entre une Russie qui se redresse, après avoir été historiquement blessée pendant longtemps par un système qui n'était pas adapté, et l'Union européenne, est un élément capital de l'équilibre du monde de demain. Par conséquent, il faut être très attentif, avoir une certaine vision de cette relation pour ne pas confondre l'essentiel et l'accessoire. Tel est bien l'esprit de la position polonaise. Tel est bien l'esprit de la position française. Je dois vous dire que c'est également le sentiment clairement exprimé par l'ensemble de l'Union européenne.

QUESTION - Vous êtes ici dans une région industrielle où le thème des délocalisations est particulièrement sensible. Récemment, la déclaration de Mme HÜBNER, commissaire polonaise, demandant que ces délocalisations soient facilitées, a suscité une certaine émotion. Je voudrais savoir si ce thème a fait partie de vos entretiens ?

LE PRESIDENT - Mme HÜBNER ne s'est pas prononcée en tant que responsable polonais, elle s'est prononcée en tant que commissaire. C'est donc avec la Commission que nous avons pu avoir à ce sujet un échange de vues, ce que j'ai fait d'ailleurs avec M. BARROSO tout récemment à Bruxelles.

Dans notre esprit, l'Europe est évidemment un projet de progrès économique et social où tous les Etats-membres partagent une même ambition et où la mise en place du marché unique s'accompagne d'une harmonisation vers le haut des législations à la fois sociales et fiscales. C'est une ambition affichée par le traité constitutionnel auquel je faisais tout à l'heure allusion. C'est bien sur ce point un accord parfait qui existe entre la Pologne et la France.

Mais je voudrais, puisqu'il n'y a pas eu de question, aborder un dernier point, car c'est une journée importante pour la France aujourd'hui, en raison des délibérations du Congrès du Parlement.

Il y a eu, nous l'avons évoqué, le vote exprimé pour la révision de la Constitution, préalable à la ratification de la Constitution européenne. Mais il y a un deuxième point, sur lequel je crois que le vote n'est pas encore terminé, par conséquent, je ne ferai pas de commentaires, mais qui est également une grande avancée. C'est la charte de l'environnement. Si le Parlement le décide, ce soir, la France sera parmi les premières nations à avoir inscrit dans sa Constitution les droits et les devoirs fondamentaux de la protection de l'environnement, parmi les premières nations dans le monde. C'est une exigence essentielle pour l'avenir de la France, de l'Europe et de l'humanité. Ce sera un pas en avant décisif, par l'affirmation des grands principes de l'environnement en France. Nous donnerons l'exemple dans ce domaine. Les grands principes de l'environnement en France seront désormais placés au même niveau que les droits de l'Homme ou les droits économiques et sociaux. C'est évidemment au Congrès de se prononcer. Je souhaite, vous le savez, qu'il se prononce à ce sujet. Si tel est le cas, ce sera je le pense un progrès décisif qui sera fait pour l'environnement et sa protection dans le monde de demain.

Je vous remercie.





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