Conférence de presse du Président de la République lors du Sommet OTAN et sommet Union européenne / Etats-Unis.

- SOMMET OTAN -
- SOMMET UNION EUROPEENNE / ETATS UNIS D'AMERIQUE -

Conférence de presse de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, lors du Sommet OTAN et sommet Union européenne / Etats-Unis.

Bruxelles (Belgique) - mardi 22 février 2005

LE PRESIDENT - Merci de votre présence. Depuis hier soir, nous avons eu un programme que vous connaissez, sur lequel je ne reviendrai pas. Nous avons eu un entretien avec le Président des Etats-Unis. Ce matin, nous avons eu le Sommet de l'Alliance atlantique et cet après-midi, nous allons avoir la réunion du Conseil européen avec le Président des Etats-Unis.

Je voudrais d'abord souligner que nous avons tous été sensibles à la présence du Président des Etats-Unis qui a fait le premier voyage de son second mandat ici, à Bruxelles, pour marquer son attachement à l'Alliance atlantique, bien entendu, mais également, c'est ce qui a été clairement exprimé, pour marquer sa volonté de travailler davantage avec l'Union européenne, de renforcer une vraie coopération entre l'Union européenne et les Etats-Unis.

Ces rencontres ont également été l'occasion, et ce sera encore confirmé tout à l'heure pour l'Union européenne, de montrer à nos amis américains que l'Union européenne progresse. Elle progresse dans le domaine de la politique étrangère et aussi dans celui de la politique de défense. Et tout ceci converge vers une situation où il y a une plus forte présence de l'ensemble transatlantique et de la défense des valeurs qu'il incarne.

C'est ce qui m'a impressionné, hier soir, à l'occasion de ces entretiens avec le Président des Etats-Unis. J'ai aussi eu la confirmation de la volonté des Etats-Unis de travailler sur les grands problèmes internationaux en coopération, en solidarité, en contact avec la France. De ce point de vue, j'attache une toute particulière importance au communiqué, à la déclaration commune que nous avons faite sur le Liban, sur la démocratie au Liban.

Nous avons réaffirmé notre condamnation sans réserve, je dirais presque horrifiée, de l'assassinat de l'ancien Premier ministre libanais, M. Rafic HARIRI, qui incarnait, je l'ai dit, à la fois la démocratie, l'état de droit, le respect des droits de l'homme, l'indépendance, la souveraineté du Liban. Nous avons, le Président BUSH et moi, souligné l'importance que nous attachions, d'une part, à la création d'une mission ou d'une commission internationale pour trouver les auteurs et les commanditaires et les punir sévèrement de ce crime, je dirais, d'un autre temps, et, également, l'importance que nous attachions à la mise en oeuvre de la résolution 1559 pour orienter le Liban vers l'indépendance, la souveraineté, la démocratie. Ce qui a toujours été notre ambition pour le Liban.

J'ai été sensible d'ailleurs, tout à l'heure, alors que ce n'est pas un problème qui concerne l'OTAN, à la solidarité exprimée, dans les mêmes termes, par le Secrétaire général de l'OTAN en ce qui concerne ce crime abominable, à l'occasion du déjeuner, dans les conclusions qu'il a tenues à la suite du déjeuner des 26 chefs d'Etat et de gouvernement de l'OTAN.

Concernant l'OTAN, j'ai rappelé ce matin le caractère exemplaire de la participation de la France, à la fois aux opérations de l'OTAN et aussi à la transformation de l'OTAN, notamment par la création de la NRF qui est un élément essentiel de modernisation de l'OTAN.

En ce moment même, vous le savez, 4 000 de nos soldats sont engagés sur le terrain, en Afghanistan et au Kosovo en particulier. Au Kosovo, nous assurons d'ailleurs actuellement le commandement des opérations. En Iraq, la France veut contribuer à la stabilité et à la poursuite du processus politique qui a été fixé par la résolution 1546. Par ses propositions d'ailleurs, la France est aujourd'hui, je le rappelle, le premier contributeur à la mission que l'Union européenne engagera dans les prochaines semaines pour aider à la consolidation de l'état de droit et à la formation de la police iraquienne.

J'évoquerai cet après-midi très rapidement ce que représente le projet européen au moment où l'Europe se dote d'une Constitution. Et je soulignerai l'importance qu'il y a à ce que l'Europe et les Etats-Unis, ensemble, soient bien associés pour relever les défis auxquels le monde est confronté dans la lutte contre le terrorisme où notre coopération est exemplaire, dans la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive où notre coopération est également exemplaire, dans la recherche d'une solution conforme à la stabilité et à la paix dans le monde pour l'Iran.

De ce point de vue, vous le savez, la France, l'Angleterre et l'Allemagne ont engagé un processus de dialogue avec l'Iran dans une totale transparence avec les Américains et avec les Russes avec pour objectif de trouver une solution au problème des recherches, actuellement conduites par l'Iran, dans le domaine nucléaire, et que nous souhaitons limiter à tout ce qui touche l'électronucléaire ou le nucléaire civil, et non pa, le nucléaire permettant la prolifération.

Concernant les défis globaux : le changement climatique, la grande pauvreté et l'aide publique au développement, la lutte contre les grandes pandémies, nous avons évoqué ces problèmes avec le Président BUSH. Il y a, sans aucun doute, de la part des Européens d'une part, dans un certain nombre de pays du monde d'autre part et aux Etats-Unis, une certaine évolution qui, je l'espère, nous permettra, sur ces grands points, sur ces grands problèmes actuels, de faire des progrès à l'occasion du G8 et d'exprimer ainsi la défense commune des valeurs qui nous sont également communes.

Vis-à-vis de la Chine qui est un partenaire stratégique de l'Union, nous entendons lever les derniers obstacles à nos relations, et ceci, dans un esprit de responsabilité. Je m'en suis entretenu avec le Président BUSH, hier soir.

Enfin, en marge de ces discussions, j'ai pu avoir un entretien avec le nouveau Président de la Roumanie, M. BASESCU, de même qu'avec le Chancelier fédéral et, tout à l'heure, j'aurai l'occasion de m'entretenir de façon bilatérale avec le Président de la Commission européenne, M. BARROSO.

Voilà, en gros, ce qui a été fait et je suis tout à fait disponible pour répondre aux questions que vous souhaiteriez me poser.

QUESTION - Monsieur le Président, lorsque le Président BUSH a répondu à une question : "est-ce que vous l'inviteriez au Texas dans son ranch", il a répondu qu'il cherchait un bon cow-boy. Comment avez-vous réagi dans votre for intérieur ? Est-ce de l'humour vache ?

LE PRESIDENT - Venant du Président BUSH, pour tout dire, j'ai trouvé que c'était plutôt une appréciation sympathique.

QUESTION - Monsieur le Président, dans son discours d'hier, M. BUSH n'a pas parlé de la Chine et de la levée probable de l'embargo sur les armes. Pouvez-vous commenter l'état du dialogue pendant ces deux jours sur cette question clé dans les relations transatlantiques ?

LE PRESIDENT - Le Président BUSH, je crois, dans la conférence de presse qu'il a faite tout à l'heure, a indiqué la position américaine, en soulignant l'importance qu'il y avait à donner au Congrès qui, semble-t-il, a majoritairement une position négative à l'égard de la levée de l'embargo sur la Chine, tous les arguments et les garanties qui permettraient de revenir sur cette position de la part du Congrès et de lever cet embargo. Celui-ci, à mon avis, ne se justifie plus, il doit être levé dans des conditions qu'il nous appartient, entre l'Europe et les Etats-Unis, de définir ensemble, mais qui ne sont pas de nature à modifier les équilibres stratégiques, bien entendu.

Je rappelle tout de même qu'à ma connaissance, le Canada n'a jamais souscrit à l'embargo et que l'Australie - je prends deux pays qui sont des alliés indiscutables des Etats-Unis - a, je crois, levé l'embargo sur la Chine, il y a au moins dix ans.

QUESTION - Je crois que vous avez donné votre soutien, aujourd'hui, à M. SCHROEDER sur la réforme de l'OTAN. Est-ce que vous croyez que maintenant on peut se passer de l'OTAN et discuter directement sur les sujets de défense avec les Etats-Unis, entre les Etats-Unis et l'Europe, en ne passant plus par l'OTAN, disons, sans faire autant de négociations à l'OTAN, mais directement entre les Etats-Unis et l'Union européenne ?

LE PRESIDENT - Le Chancelier SCHROEDER a indiqué, il en a d'ailleurs parlé, tout à l'heure, que les choses évoluent et qu'il faut en permanence s'adapter à cette évolution. Il a fait de ce point de vue des propositions qui sont tout à fait légitimes et raisonnables, et je tiens à vous dire que je soutiens tout à fait les propositions du Chancelier SCHROEDER.

QUESTION - Monsieur le Président, un grand nombre de résolutions des Nations Unies sont restées sans application. Pour la résolution 1559, est-ce que vous avez mis un moyen avec le Président américain pour la faire appliquer ? Je voudrais aussi votre réaction en ce qui concerne ce qui s'est passé, hier, au Liban, la mobilisation de centaines de milliers de personnes demandant l'indépendance du Liban. Qu'est-ce que cela vous évoque ?

LE PRESIDENT - D'abord, je dirais que cela me touche, dans la mesure où traditionnellement, historiquement, les liens entre le Liban et la France sont des liens très forts. Par conséquent, tout ce qui traumatise le Liban et le peuple libanais fait mal à la France. Notre ambition n'a jamais changé, elle consiste à apporter autant que possible notre soutien au Liban pour qu'il retrouve sa souveraineté, son indépendance, la démocratie, sa liberté. C'est ce qu'incarnait son ancien Premier ministre, M. HARIRI. Il le faisait dans un contexte de paix car c'était un homme de paix et donc, en éliminant tout ce qui pouvait être excessif ou qui pouvait être dangereux pour le Liban. Il avait une vraie vision, pour une accession tranquille du Liban à la souveraineté, l'indépendance. Hélas, nous savons ce qu'il s'est passé

Je n'ai pas besoin de vous dire l'horreur que m'inspire cet acte et ma détermination à ce qu'une autorité internationale, légitime, puisse enquêter, découvrir les auteurs et les commanditaires de ce forfait.

Ceci s'inscrit dans un contexte qui n'est pas du tout un contexte d'agressivité, qui est celui de la 1559, qui est simplement l'affirmation par la communauté internationale de sa volonté de voir respectés la liberté, les droits de l'Homme, le respect de la personne humaine, l'indépendance au Liban, la démocratie.

Alors, naturellement, il y a des résolutions qui n'ont pas été suivies d'effet, vous avez raison de le souligner, mais j'ai été très frappé par la détermination unanime, non seulement du Président des Etats-Unis, mais également de l'ensemble de l'Union européenne, une détermination sans faille pour que la 1559 soit réellement mise en oeuvre et sous le contrôle attentif de l'ONU, de son Secrétaire général et de son envoyé spécial, M. Rod LARSEN.

J'ajoute que je souscris tout à fait à l'affirmation qui a été celle de l'Union européenne et celle du Président des Etats-Unis, à savoir que la Communauté internationale ne pourrait pas vraiment considérer comme valides des élections qui n'auraient pas été préalablement précédées par une première mise en oeuvre de la 1559. Car seule cette mise en oeuvre peut créer un climat normal, démocratique, pour une expression populaire. S'il n'y a pas un début de mise en oeuvre de la 1559, indépendamment de toutes les dispositions que l'on pourra prendre pour assurer de bonnes élections, - je veux dire des élections légitimes,- il n'y aura pas le climat psychologique et politique permettant une véritable consultation populaire.

D'où la volonté clairement exprimée par le communiqué franco-américain d'une part, par l'ensemble de l'Union européenne d'autre part, d'une exigence de mise en oeuvre, d'un début de mise en oeuvre contrôlée par l'ONU de la 1559 et parallèlement d'une commission internationale pour trouver les auteurs et les commanditaires du crime.

QUESTION - Quelles sont les perspectives pour vous de la continuation, de la concertation entre les Etats-Unis et la France sur la situation au Liban et en Syrie, et dans la même ligne, quelles sont vos opinions sur la possibilité d'un retrait des forces syriennes du Liban dans un avenir rapproché ?

LE PRESIDENT - Alors, premièrement, la concertation entre la France et les Etats-Unis, et je dirais entre l'Union européenne et les Etats-Unis en ce qui concerne l'évolution du Liban vers l'indépendance et la souveraineté, cette concertation est parfaite et continuera à être parfaite. Deuxièmement, vous m'interrogez sur la possibilité de retrait des forces d'occupation. Ce n'est pas seulement les forces d'occupation militaire qui sont en cause, c'est plus encore les services spéciaux qui quadrillent le Liban, qui sont encore plus contestables que l'occupation militaire. Le retrait de ces services et de ces forces est un objectif clairement défini par la 1559, et nous souhaitons, je le répète, que cette résolution soit mise en oeuvre et nous le souhaitons tous.

QUESTION - Est-ce que la France est prête à des sanctions, toujours sur le dossier Liban et Syrie ? Donc, est-ce que la France est prête à des sanctions, si jamais la Syrie ne se retirait pas du Liban ?

LE PRESIDENT - Les sanctions ne peuvent être décidées que par le Conseil de sécurité. Et vous savez par ailleurs que la France n'a jamais été très favorable au système des sanctions sur le plan des principes, pour toutes sortes de raisons. Donc, il appartiendra au Conseil de sécurité d'en décider, cela dépendrait de la nature des sanctions et cela dépendra de la situation dans laquelle nous nous trouverons. Est-ce que nous aurons une compréhension sur la mise en oeuvre de la 1559, et à ce moment-là, il n'y a même pas lieu d'imaginer de sanctions ? Est-ce qu'il n'y aura pas de début de mise en oeuvre de la 1559, et à ce moment là le Conseil de sécurité en délibérera sur le rapport de son Secrétaire général, c'est-à-dire en réalité de son représentant, M. Roed LARSEN.

QUESTION - Quel est le bilan que vous faites de ces deux journées d'entretiens entre Français, Américains et Européens ici, à Bruxelles, dans les différents lieux où ils se sont produits, l'OTAN notamment et l'Union européenne ?

LE PRESIDENT - On pourrait prendre les différents problèmes qui ont été évoqués et qui sont ceux des différentes crises que connaît le monde. Et là, on pourrait dire qu'il y a un accord général sur la façon de traiter ces crises, mais ce n'est pas cela le vrai bilan.

Je crois que le vrai bilan tient dans la constatation, que me semble-t-il, quelque chose a changé notamment dans l'approche américaine de l'Union européenne. Voilà l'impression que j'ai eue. J'ai eu le sentiment, autrement dit, que les Etats-Unis ont pris conscience de la réalité de l'Europe plus qu'ils ne l'avaient probablement. En tous les cas, c'est l'impression que j'ai eue et le Président BUSH a, semble-t-il, clairement indiqué qu'il entendait qu'il y ait un vrai partenariat et donc une vraie discussion. C'est le sentiment que j'ai eu. L'avenir nous dira si je ne me suis pas trompé.

QUESTION - Pour prolonger la question, dans quelques minutes, un Président des Etats-Unis va participer pour la première fois aux travaux d'un Conseil européen, aux discussions du Conseil européen. Au-delà de ce geste symbolique, s'agit-il pour vous d'une véritable reconnaissance politique de l'Union européenne en tant qu'entité politique ?

LE PRESIDENT - On n'a pas à donner à une réunion un sens juridique, mais politiquement, en effet, et c'est ce que je viens de répondre à votre confrère, il me semble que l'attitude américaine devient, j'allais dire plus réaliste qu'elle ne le fut peut-être dans le passé, concernant la réalité européenne, ses progrès, sa mise en oeuvre, et par conséquent sa qualité et le poids de son avis en tant qu'interlocuteur.

QUESTION - Quand on entend les discours ces jours-ci, c'est donc un nouvel amour entre Européens et Américains. Est-ce que les Européens ont déjà fait des concessions concernant l'Iraq en participant à ramasser les débris qu'a laissé une guerre qu'ils ont condamnée auparavant ? Est-ce que c'est parce que les Européens n'évoquent pas le changement climatique dans la soirée, ce soir par exemple, ou est-ce que vous pensez que ce nouveau réalisme dont vous avez pu parler du côté des Américains va aussi faire en sorte que les idées européennes, par exemple, sur la politique environnementale vont pouvoir avancer ?

LE PRESIDENT - Je n'ai pas le sentiment que les Européens ont fait des concessions particulières sur l'Iraq. Les Européens ont voté au Conseil de sécurité pour la résolution 1546 qui a été, si je ne m'abuse, votée à l'unanimité, notamment par l'Allemagne et par la France, et tout ce qui se fait maintenant c'est la mise en oeuvre de la 1546.

C'est une résolution, je le disais à votre consoeur, qui, heureusement, est mise en oeuvre. Je souhaite qu'il en soit de même pour la 1559. Donc, les Européens appliquent le texte, l'Allemagne, comme la France en particulier, Ils respectent leurs engagements en ce qui concerne notamment l'élaboration d'un état de droit, c'est-à-dire la formation des responsables civils, à la demande du nouveau gouvernement iraquien dès qu'il sera formé et aussi la formation de la police. Donc, je peux le croire. Alors, il n'est pas exact de dire que le changement climatique n'a pas été abordé. De même, d'ailleurs, que les problèmes de l'aide publique au développement.

En ce qui concerne le changement climatique, il a été l'un de sujets qui a été abordé dans nos entretiens entre le Président BUSH et moi hier. Et ce n'était pas aujourd'hui le problème de l'OTAN. On imaginerait mal que l'OTAN se saisisse du changement climatique. Et par conséquent, cela n'a pas été l'objet

L'Union européenne, sur ce plan, vous le savez, est unanime et elle le redira sans aucun doute cet après-midi au Président des Etats-Unis, qui, par ailleurs semble envisager, lui aussi, des évolutions dans la politique qu'il entend suivre. Parce que l'évidence de plus en plus claire et confirmée par tous les scientifiques unanimes des conséquences dramatiques du changement climatique s'impose maintenant à tout le monde. Donc, il va bien falloir trouver quelque chose. C'est d'ailleurs dans cet esprit que le Premier ministre britannique en a fait l'un des deux points majeurs de l'ordre du jour du Sommet du G8 à Gleneaglet.

Nous partageons tout à fait, notamment le Chancelier et moi, cette priorité donnée à ce problème, et donc nous espérons pouvoir tout de même progresser à cette occasion sur ce sujet si grave. Il en va de même pour l'aide publique au développement sur laquelle il va bien falloir trouver des solutions, notamment à l'occasion de la réunion des Nations-Unies en septembre sur le bilan des cinq premières années de la période de quinze ans que l'on s'était fixée pour diminuer de moitié la pauvreté dans le monde. Ce dont on est très très très loin et ce qu'on a aucune chance de faire si l'on ne prend pas de nouvelles dispositions et de nouvelles décisions.

De ce point de vue, je voudrais dire que les positions prises tout récemment par le Chancelier allemand, notamment dans ses interventions à Davos, tant sur le plan de la dette que sur le plan des financement innovants, ont fortement impressionné l'ensemble de la Communauté internationale et je m'en suis, pour ma part, beaucoup réjoui. Je suis, là aussi, tout à fait sur la même ligne que le gouvernement allemand, en tous les cas, que le Chancelier allemand.

QUESTION - Le Président BUSH hier et aujourd'hui a réitéré son plaidoyer pour la liberté. Il a dit que la liberté était en marche dans le monde. Il a cité l'Ukraine, les élections en Iraq, les élections en Afghanistan. Est-ce que si on met de côté, puisque c'est apparemment la volonté française et la volonté américaine, l'affaire iraquienne, est-ce que vous êtes sensible à ce plaidoyer pour la liberté dans le monde du Président américain ?

LE PRESIDENT - Je ne vois pas très bien comment on pourrait ne pas être sensible à un plaidoyer pour la liberté, notamment quand on est Français. C'est le premier terme de notre devise nationale. Et on était historiquement parmi les premiers à nous exprimer dans ce domaine pour faire de la liberté un objectif garanti. Donc, je ne peux qu'approuver ce plaidoyer.

Alors, plus concrètement et pour être plus actuel, c'est vrai qu'il y a eu des élections en Afghanistan. Ces élections n'ont pas été contestées de façon importante sur leur tenue, c'était donc tout de même un pas positif vers une démocratie qui s'implante ou qui s'affirme. Il y a eu des élections en Palestine, pour lesquelles on peut faire la même réflexion et qui ont été des élections non contestées sur leur caractère démocratique. Je ne dis pas qu'il n'y a pas eu ici ou là des difficultés, naturellement, mais elles n'ont pas été contestées par la Communauté internationale. C'était donc des élections démocratiques.

Il y a eu des élections en Iraq, dans un contexte extrêmement difficile et qui ont été également des élections, je dirais, aussi démocratiques que la situation le permettait. Alors je ferai un voeu. C'est que le Liban ne nous donne pas un démenti à cette évolution et qu'il fasse aussi des élections qui soient réellement démocratiques et non imposées par l'extérieur. Et naturellement, je ne peux qu'approuver le plaidoyer dans ce domaine du Président des Etats-Unis. Le contraire vous étonnerait.

QUESTION - Sur le dialogue transatlantique, vous avez dit "je soutiens tout à fait le Chancelier SCHROEDER". Les jours passés, j'ai entendu la réplique du Secrétaire général de L'OTAN. Mon impression, mais je suis journaliste donc je ne suis pas dans le secret des dieux, mon interprétation était que le Secrétaire général de l'OTAN ne défendait pas les mêmes positions. Par conséquent, je conclus que Monsieur le Président CHIRAC n'est pas sur la même longueur d'ondes que le Secrétaire Général de l'OTAN.

LE PRESIDENT - Cela, c'est évidemment une appréciation dont je vous laisse la responsabilité. Premièrement, il y a une chose certaine, c'est que je suis sur la même longueur d'ondes que le Chancelier allemand. J'approuve tout à fait ce qu'il a dit et l'esprit dans lequel il l'a dit. Deuxièmement, ce n'est pas du tout ce que j'ai compris dans les propos du Secrétaire général de l'OTAN. Aujourd'hui, je ne suis pas sûr du tout qu'il y ait une contestation de la position du Chancelier fédéral par le Secrétaire général. Je suis même convaincu du contraire. Enfin, il y a peut-être des propos du Secrétaire général fondés sur des informations qu'il tenait d'un journaliste peut-être, et qui donc avaient été déformés par rapport à ce qui avait été dit. Je ne sais pas. Mais c'est une hypothèse. En tous les cas, moi, je n'ai pas ressenti de divergences entre le Secrétaire général et le Chancelier, et donc, je n'ai pas ressenti de divergences entre le Secrétaire Général et la France.

QUESTION - Est-ce que vous avez le sentiment que la nouvelle compréhension du Président BUSH de la démarche des Européens va jusqu'à leur faciliter la tâche dans leurs négociations ? Avec l'Iran, par exemple, en leur permettant d'offrir une compensation aux Iraniens, en échange des efforts qu'ils sont appelés à consentir, par exemple, en leur ouvrant les portes de l'OMC ou en permettant la vente d'avions civils ?

LE PRESIDENT - Des moteurs d'avions civils. Les Européens et les Américains sont tout à fait unanimes à affirmer leur opposition totale à la prolifération. Cela, c'est clair. J'ajoute que c'est également la position des Russes et des Chinois, et je dirais, de l'ensemble de la communauté internationale. Alors, à partir de là, il y a effectivement une stratégie à adopter. Les trois Européens, Angleterre, Allemagne, France, ont engagé une stratégie, de dialogue. Une première étape positive a été franchie sous le contrôle vigilant et nécessaire de l'Agence Internationale pour l'Energie Atomique, l'AIEA, qui est le maître à penser dans ce domaine, mais qui doit donner sa caution, forcément. Donc, un premier pas.

Alors, ce premier pas peut être considéré comme encourageant ou peut être considéré comme insuffisant. Nous, nous le considérons, nous les Européens, comme encourageant. Et d'ailleurs, je dois dire que les Etats-Unis ne contestent pas ce point de vue. Je rappelle que toute la procédure européenne dans cette affaire s'est faite de façon parfaitement transparente, comme il était nécessaire, avec les Etats-Unis et avec les Russes. Alors, maintenant, nous allons voir. Moi j'ai suggéré que, dans ce contexte de recherche d'un accord amiable -accord qui, par définition, exclut toute possibilité de prolifération de l'arme nucléaire-, il me semblerait légitime que, dans le domaine de la discussion pour l'adhésion à l'OMC ou dans le domaine de l'exportation des moteurs d'avions civils, on fasse également un geste. Je ne vois pas pourquoi on ne le ferait pas. Je l'ai d'ailleurs dit au Président des Etats-Unis.

Je vous remercie.





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