Point de presse conjoint du Président de la République et du Premier ministre d'Irlande.

Point de presse conjoint de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, et de M. Berthie AHERN, Premier ministre de la République d'Irlande.

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Palais de l'Élysée, le lundi 22 mars 2004

LE PRÉSIDENT - Je voudrais tout d’abord saluer avec la plus cordiale amitié le Premier ministre, Président de l’Union européenne, et lui dire combien j’apprécie qu’il soit venu de Dublin pour un dernier point avant le Conseil européen, sous sa présidence, qui aura lieu jeudi et vendredi.

Nous avons évoqué trois principaux problèmes. D’abord, la lutte contre le terrorisme qui a fait l’objet d’une réunion de nos ministres des Affaires intérieures et de justice vendredi et qui fait l’objet d’une réunion des ministres des Affaires étrangères aujourd’hui. Ce sera le premier point inscrit par la présidence irlandaise à l’ordre du jour de notre prochain Conseil.

J’ai indiqué au Président que nous étions tout à fait favorables à l’ensemble des propositions faites par la présidence irlandaise, notamment la nomination d’un coordinateur et l’affirmation très claire de renforcer autant qu’il est possible nos moyens de toute nature, pour lutter contre le terrorisme. D’autre part, nous voulons affirmer clairement que nous souhaitons réfléchir et amplifier une action tendant à déterminer quelles sont les racines qui créent une situation favorable au terrorisme, de façon à pouvoir également s’attaquer à ses racines.

Le deuxième point que nous avons évoqué est celui de la Constitution européenne. J’ai d’abord indiqué à la présidence irlandaise toute l’estime et la reconnaissance de la France pour la façon dont les débats étaient conduits et pour la préparation du Conseil de juin réalisée par la présidence irlandaise. J’ai indiqué au Taisoach que nos étions déterminés à tout faire pour que l’on puisse conclure la réforme des institutions, à l’occasion de la réunion des 17 et 18 juin prochains, sous présidence irlandaise, et que nous pensions aujourd’hui qu’il était possible d’arriver à cette date à cette conclusion.

Le troisième et dernier point, c’était la stratégie de Lisbonne. J’ai tout à fait approuvé les efforts engagés par la présidence irlandaise pour approfondir et relancer la stratégie de Lisbonne, c’est-à-dire les mesures de nature à permettre d’améliorer la croissance, l’emploi, la lutte contre la désindustrialisation et de donner une impulsion nouvelle à la recherche et à l’innovation sur le plan européen.

M. AHERN - A mon tour, je souhaite remercier le Président CHIRAC de son accueil, lui dire tout particulièrement combien j’apprécie cette occasion qui nous est offerte de parler de questions d’importance à la veille de ce sommet, de ce Conseil européen. D’ailleurs, je précise que nous avons eu de nombreuses conversations lui et moi sur ces questions, dans les mois précédents. Effectivement, comme le Président vous l’a très justement dit, nous avons parlé pendant ce déjeuner de terrorisme, de la Constitution et la CIG et de la stratégie de Lisbonne. J’aimerais si vous le permettez dire quelques mots au sujet de chacun de ces thèmes.

Sur la question du terrorisme, évidemment cela s’impose suite aux attaques terribles, tragiques, horribles que nous avons vues à Madrid le 11 mars. De ce fait, la lutte antiterroriste est une priorité pour nous tous. En tant que dirigeants européens, nous nous devons de répondre de façon très ferme à ce type d’attaque. Maintenant, en tant que présidence de l’Union européenne, nous nous proposons dès jeudi de mettre en priorité cette questionà de la lutte antiterroriste à l’ordre du jour. Nous pensons adopter une déclaration sur la lutte antiterroriste et mettre particulièrement l’accent sur un certain nombre de mesures concrètes et pratiques que nous pouvons mettre en oeuvre pour assurer la protection de nos citoyens.

Sur la CIG, la Constitution en particulier, comme vous le savez, le mandat qui m’a été assigné à Bruxelles a été de consulter mes collègues et de faire rapport lors de la réunion qui doit se tenir jeudi et vendredi, jeudi en particulier, à mes collègues sur la situation actuelle. C’est donc lors du dîner de travail que nous tiendrons jeudi soir que je ferai ce rapport à mes collègues. Or les paroles du Président CHIRAC me vont droit au coeur tout comme d’ailleurs les conseils très précieux qu’il m’a donnés aujourd’hui et auparavant, tout comme son soutien qui nous a énormément aidé à effectuer le travail accompli dans les semaines passées et le travail qu’il reste à accomplir dans les semaines à venir.

Je suis tout à fait d’accord et pour reprendre ce qu’il vient de dire, cela est tout à fait possible. Il est tout à fait possible de conclure sur la Constitution pour le Conseil du mois de juin, le 17 et le 18 juin. C’est donc dans ce sens que je ferai les conclusions de mon rapport. Nous avons énormément travaillé, nous devons continuer à travailler dans ce sens et je suis très encouragé, non seulement par ce qui a été dit par le Président CHIRAC mais également par mes collègues européens. Tout le monde va dans ce sens-là.

Troisième et dernier point soulevé par le Président, les questions d’ordre économique, notamment dans le cadre de la stratégie de Lisbonne. Oui, nous sommes tout à fait d’accord sur le fait qu’il faut un débat très centré sur ces questions très concrètes sur comment stimuler notamment les économies européennes et l’économie européenne sur le plan de la création d’emploi, de la compétitivité, de la recherche, du développement, de la stratégie, pour faire avancer la croissance dans nos pays, dans notre région du monde. Nous aurons ce débat lors de cette réunion du Conseil

QUESTION - Monsieur le Président, est-ce que la France est prête à se montrer souple en ce qui concerne les pourcentages requis pour une double majorité ?

Monsieur le Premier ministre, êtes-vous sûr de pouvoir recommander lors du Conseil à venir, jeudi, une reprise des négociations, une relance sur la Constitution afin d’aboutir ? Et quel est, à votre avis, l’échéancier pour cette conclusion ? Deuxièmement, à titre personnel, est-ce que vous allez intervenir dans le différend actuel, en Irlande, sur les services postaux ?

M. AHERN - Vous savez, vous nous avez entendu l’un et l’autre parler de la question de la Constitution : nous pensons effectivement l’un et l’autre qu’il y a toutes les chances que nous puissions aboutir, et même, que nous allons aboutir. C’est quelque chose que nous pouvons recommander ; je pense que nous pouvons dire fermement, clairement, que la conclusion se fera, au moins au Conseil du 17 juin, et sinon avant. La question reste ouverte. Mais, en tout cas, c’est notre ferme intention d’aboutir.

Quant à votre deuxième question, notre ministre en charge de ces affaires est, comme vous le savez, en négociation avec les syndicats.

LE PRÉSIDENT - Pour répondre à la première question, je dirais que la position que nous avons prise avec l’Allemagne et aussi avec l’Angleterre d’ailleurs, ne l’a pas été simplement pour des raisons de principe. Il nous a semblé que c’était le bon compromis entre les exigences de l’efficacité et les exigences de la démocratie. C'est ce qui a justifié notre position. Alors, nous n’avons pas changé d’avis mais la présidence irlandaise a pris le dossier, elle a pris ses responsabilités, et elle présentera ses conclusions que nous examinerons avec beaucoup d’ouverture d’esprit, car, je le répète, nous avons toute confiance en la présidence irlandaise.

Je répète que nous souhaitons qu’une conclusion intervienne au Conseil des 17 et 18 juin prochain.

QUESTION - Monsieur le Président, le premier tour des élections régionales et cantonales s’est déroulé hier. Quelle analyse faites-vous de ce scrutin et quelle conclusion pourriez-vous en tirer si le deuxième tour confirmait la tendance du premier ?

LE PRÉSIDENT - Vous comprendrez que je sois bref. La France a voté hier. Elle revotera dimanche prochain et il n’est pas dans ma vocation d’intervenir pendant la campagne électorale.

Deuxièmement, je ne veux pas prendre le Premier ministre irlandais, Président de l’Union européenne en otage, si j’ose dire d’une discussion franco-française. Néanmoins, je voudrais simplement dire que le vote est très important. D’abord parce que la décentralisation fait que les responsabilités des départements et des régions vont être de plus en plus importantes. Il est nécessaire pour tous les Français de s’exprimer par leur bulletin de vote, pour dire comment ils veulent que leur département et leur région soient gérés, ou alors ils se priveraient, en quelque sorte, du droit de critiquer ensuite.

D’autre part, le vote c’est évidemment la meilleure façon de renforcer la démocratie. J’observe qu’hier, pour la première fois depuis un certain temps, la participation au vote a augmenté, contrairement à ce que certains pouvaient croire ou craindre. Naturellement, je m’en réjouis. Je souhaite que dimanche prochain, cette tendance soit confirmée. C’est l’intérêt des Français, c’est l’intérêt de la démocratie, chacun doit prendre ses responsabilités.

QUESTION - Une question au Président CHIRAC, si vous le permettez, Monsieur le Président, êtes-vous prêt à faire quelques concessions pour permettre à la présidence irlandaise de conclure et d'aboutir sur la question de la CIG, au mois de juin de cette année, en particulier étant donné que l'Espagne et la Pologne semblent indiquer qu'ils seraient prêts à faire quelques concessions si la France et l'Allemagne en faisaient ?

La deuxième au Taisoach, est-ce que Monsieur le Premier Ministre, vous allez suivre les conseils du Président CHIRAC de façon à faire aboutir ce processus, pour le Conseil du mois de juin ? Et pensez-vous vous en tenir à un échéancier qui est celui qu'il propose ou essayer de faire rentrer le processus dans ces dates ? Est-ce que vous êtes prêt à suivre les conseils du Président CHIRAC en la matière ?

LE PRÉSIDENT - Sur le premier point avant que le Taisoach ne donne son sentiment sur le deuxième. J'ai dit tout à l'heure que nous avions pris, les Allemands et nous, un certain nombre de positions pour des raisons, vous le savez très bien, qui ne sont pas d'intérêt national mais qui correspondent à une certaine vision de l'Europe.

Naturellement, nous n'avons aucune intention d'imposer nos conditions à tout le monde, et tout l'art de la présidence est précisément de trouver les compromis, au meilleur sens du terme, permettant d'être acceptables pour tout le monde. Cela a été le processus qui a permis de construire l'Europe, il est poursuivi. La France comme l'Allemagne acceptent le principe de ce processus et la France comme l'Allemagne font confiance à la présidence irlandaise pour le conduire à son terme, comme il apparaît que c'est aujourd'hui nécessaire, à l'occasion du Conseil européen du 17 et 18 juin.

D'autre part, vous avez dit que j'ai donné des conseils au Taisoach.

Je n'ai donné aucun conseil au Taisoach bien entendu ; je me suis permis de lui faire amicalement quelques suggestions.

M. AHERN - Je pense que le Président a répondu en grande partie à la question qui m'était adressée.

J'aurais simplement une chose à ajouter pour ce qui est de l'achèvement et de la conclusion d'ici au 17-18 juin 2004 : si nous pouvons le faire avant, tant mieux mais tout état de cause, si ce n'est pas le cas, cette conclusion se fera, nous en sommes convaincus, le 17 et 18 juin de cette année.

QUESTION - Je voulais vous demander votre réaction sur le fait que le Cheikh YASSINE, ce matin, a été abattu et si vous ne craigniez pas que les déclarations faites par le Hamas et d'autres organisations, ce matin, ne confortent une vague de terrorisme, si on peut dire, dix jours après le 11 mars.

LE PRÉSIDENT - La France, et c'est le cas de toutes les nations de l'Union européenne, condamne sans réserve le terrorisme, nous en avons parlé tout à l'heure, mais également tous les actes de violence, notamment lorsqu'il s'agit d'actes contraires au droit international. Et c'est dans cet esprit que tous les pays européens, à ma connaissance, ont condamné l'action qui avait été conduite contre le Cheikh YASSINE parce qu'elle était contraire au droit international.

M. AHERN - Comme le Président vous l'a dit, nous en avons parlé ce matin. Je suis tout à fait d'accord avec ce qu'il vient de dire et effectivement, c'est une question dont nos ministres des Affaires étrangères ont débattu également. Nous avons condamné sans réserve l'assassinat du Cheikh YASSINE ainsi que des sept autres Palestiniens qui ont été tués lors de cette attaque.

Vous savez, l'Union européenne, la présidence de l'Union européenne condamne ce type d'acte commis, quelles qu'en soient les raisons, qui sont des assassinats, aussi bien que nous condamnons les atrocités, les attaques commises contre des citoyens israéliens par le Hamas et qui ont abouti à des centaines de morts de civils tués. Mais nous ne reconnaissons pas le droit d'Israël à commettre ce type d'acte tel que vous venez de mentionner. Donc nous parlons d'une seule et même voix sur ce dossier et comme l'a dit le Président.

LE PRÉSIDENT - Je vous remercie.





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