Point de presse conjoint du Président de la République et du Premier ministre du Royaume-Uni.

Point de presse conjoint de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, et de M. Tony BLAIR, Premier ministre du Royaume-Uni.

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Palais de l'Élysée, le mercredi 11 juin 2003

LE PRÉSIDENT - Mesdames, Messieurs, je veux dire tout d'abord ma joie d'accueillir, ici, le Premier ministre britannique. Nous avons de très nombreuses occasions de nous voir ou de nous entendre, et c'est pour moi chaque fois un plaisir.

Avant de dire quelques mots sur nos entretiens, je voudrais exprimer, parce que c'est la première chose que nous avons évoquée, notre horreur et notre indignation à l'égard de l'attentat terroriste qui s'est déroulé aujourd'hui à Jérusalem. Nous condamnons de la façon la plus forte ces actes inhumains, inadmissibles, inacceptables et qui ne peuvent que conduire à un résultat opposé à celui que nous souhaitons tous, c'est-à-dire le retour à la paix.

Nous avons tout d'abord évoqué la préparation du Conseil européen de Thessalonique et, notamment, la discussion sur la Convention préparatoire à la Conférence intergouvernementale. Nous avons clairement observé nos convergences de vues, c'est-à-dire que l'Angleterre et la France, sur tous ces sujets, auront, sans aucun doute, en ce qui concerne la Convention, et notamment les institutions, une position commune, ou en tous les cas très proche. Nous avons clairement affirmé aussi notre détermination, pour le cas où il y aurait des divergences de vues, à faire en sorte qu'une discussion entre nous permette de surmonter d'éventuelles différences, qui ne sont pas encore apparues. Ceci étant vrai également pour la relation entre l'Angleterre et l'Allemagne et la France et l'Allemagne.

Nous avons également évoqué, naturellement, l'Europe de la Défense. J'ai rappelé au Premier Ministre britannique que, pour moi, il n'y a pas d'Europe sans défense et qu'il n'y a pas de défense européenne sans l'Angleterre, naturellement. A partir de là, nous devons approfondir nos discussions. Je rappelle que c'est ensemble que nous avons lancé, à Saint-Malo, l'Europe de la défense, ensemble que, malgré des divergences de vues sur l'affaire iraqienne nous l'avons développée au Touquet et que c'est ensemble que nous continuerons ce chemin, dans des conditions qui méritent encore d'être discutées entre nous, car nous avons des contraintes qui ne sont pas exactement les mêmes, mais nous avons la détermination d'avoir une Europe de la défense dans laquelle bien entendu, l'Angleterre doit avoir une place prépondérante, à l'égal de l'importance de ces forces armées.

Nous avons également évoqué, cela va de soi, la situation au Proche-Orient, la situation en Iraq, la situation au Congo. J'ai remercié le Premier ministre britannique de sa coopération dans l'opération européenne conduite à la demande de l'ONU, avec la France comme Nation-cadre, en République Démocratique du Congo.

Nous sommes convenu au total que tout ce qui nous rapproche était infiniment plus fort que ce qui peut nous séparer et que, par conséquent, nous étions déterminés à privilégier, sans réserve, ce qui nous rassemble plutôt que ce qui peut, le cas échéant, nous opposer.

M. BLAIR - Tout d'abord avant tout je voudrais remercier le Président de son invitation à venir dîner avec lui ce soir et dire également combien le débat que nous avons eu était très utile, très positif et très constructif.

Je voudrais également faire échos à ce qu'à dit le Président à propos de cet atroce attentat qui a été commis aujourd'hui en Israël. En effet le but de ceux qui commettent ces attentats terroristes c'est bien entendu de perturber, d'empêcher le processus de paix et dans de telles circonstances la communauté internationale doit réagir de la façon suivante : elle doit s'unir, elle doit lutter et vaincre les terroristes et empêcher que le processus de paix ne soit perturbé. En effet, je crois que la seule solution, la seule bonne solution pour les Israéliens et pour ceux qui vivent en Palestine, c'est de leur apporter une paix stable, une paix durable.

En ce qui concerne nos échanges de vues sur la convention européenne je suis moi aussi ravi de voir que nos positions sont très proches les unes des autres et je suis sûr également que nous pourrons régler les divergences, les petites différences qui pourraient se poser. Je crois effectivement que la France et la Grande-Bretagne doivent travailler ensemble de façon très étroite évidemment, travailler avec l'Allemagne pour porter l'Europe, pour que l'Europe aille de l'avant de façon constructive.

Nous avons effectivement évoqué d'autres sujets, le Moyen-Orient, l'Iraq et encore quelques autres sujets, mais je voudrais en conclusion dire que quelles qu'aient pu être les divergences de vues à propos de l'Iraq, je suis convaincu que nos deux pays, pour l'avenir de nos deux pays, pour l'avenir de l'Europe aussi doivent continuer de travailler en collaboration très étroite et de plus en plus étroite. Nos deux pays sont des pays fiers, fiers de leurs traditions, fiers de leurs histoires mais je suis sûr et je suis convaincu de ce que dit le Président quand il dit que ce qui nous rapproche et bien plus important que ce qui peut à l'occasion nous séparer.

QUESTION - Monsieur le Président une question à vous et à M. BLAIR, qu'est-ce qui peut être fait aujourd'hui pour sauver la paix au Proche-Orient, appliquer la feuille de route et pensez-vous qu'il devrait y avoir une autre feuille de route pour le Liban et la Syrie ?

LE PRÉSIDENT - La seule chose qui non seulement peut mais doit être faite au Moyen-Orient pour retrouver la paix, c'est de renoncer à toute agression à l'égard de l'autre et notamment à toute forme de terrorisme, se mettre autour d'une table et parler.

Nous avons la feuille de route, elle est une bonne orientation, elle doit être respectée et je crois effectivement, parce que la feuille de route concerne surtout le conflit entre la Palestine et Israël, alors qu'Israël est également en situation de guerre avec la Syrie et le Liban, je crois effectivement que les réflexions conduites actuellement par M. SOLANA, et que pour ma part j'approuve, tendant à faire une feuille de route pour conduire à la paix entre Israël et la Syrie et le Liban, est une bonne idée.

M. BLAIR - En ce qui me concerne je voudrais faire deux commentaires :

Premièrement l'objectif même du terrorisme c'est de d'arrêter le processus de paix. Donc si l'on arrête le processus de paix on donne aux terroristes ce qu'ils veulent. Je me souviens qu'en Irlande du Nord nous avons subi le pire acte de terrorisme de notre histoire après avoir entamé le processus de paix. L'objectif de cet acte terroriste c'était bien de bloquer le processus de paix mais nous avons décidé de le poursuivre. C'est ce qu'il faut faire aujourd'hui encore au Moyen-Orient.

Deuxièmement, la communauté internationale dans son ensemble doit se rassembler. Cela veut donc dire que les pays comme les notres doivent soutenir le processus de paix. Mais aussi que tous les pays qui ont la moindre influence sur ces terroristes, sur leurs sources de financement ou leurs structures doivent arrêter de les soutenir. Ces gens veulent anéantir l'espoir-même d'un avenir différent, à un avenir dans lequel les Israéliens et les Palestiniens pourront vivre côte à côte. La communauté internationale unie doit avoir une réaction claire.

QUESTION - Sur la question de la monnaie unique, j'imagine que c'est un sujet qui a été évoqué. Comment M. le Premier Ministre, avez-vous réussi à rassurer le Président, à le convaincre que vous étiez bien décidé à faire rentrer la Grande-Bretagne dans la monnaie unique. Monsieur le Président avez-vous été convaincu et rassuré par ces arguments et puis deuxième question, il me semble qu'il y a peut être eu un certain nombre de divergences de point de vue légèrement divergent sur la question de défense dans la Constitution ou dans la Convention, qu'en est-il ?

M. BLAIR - Il ne s'agit pas de rassurer qui que ce soit. Nous avons bien sûr évoqué la récente décision prise par le Gouvernement britannique en ce qui concerne la monnaie unique. Permettez-moi de redire très clairement que la Grande-Bretagne est favorable à sa participation à la monnaie unique européenne. Nous devons créer les bonnes conditions économiques. Il y a aujourd'hui un certain nombre d'obstacles et nous savons comment nous allons les surmonter. Comme je vous l'ai déjà dit à de nombreuses reprises, je suis convaincu que l'avenir de la Grande-Bretagne c'est d'être un membre plein de l'Union européenne.

En ce qui concerne la défense européenne, et quelles que soient les divergences, nous sommes tous les deux convaincus qu'il faut faire avancer la défense européenne. Non pas parce qu'elle est contraire à notre alliance transatlantique mais plutôt parce qu'elle la complète. J'ai oublié tout à l'heure de vous dire que nous venons d'entamer des opérations européennes en Macédoine et au Congo. A cet égard, je voudrais féliciter et remercier la France pour le rôle qu'elle joue au Congo. Nous soutenons cet effort. C'est une entreprise très importante pour la paix en Afrique. Ce qui montre bien combien il faut faire aller de l'avant la défense européenne.

LE PRÉSIDENT - Je dirais juste que sur la monnaie unique, je n'ai pas à être rassuré. Nous souhaitons bien entendu l'entrée de la Grande-Bretagne dans la monnaie unique, mais nous considérons qu'elle doit le faire au moment qu'elle choisira, dans les conditions qui lui conviendront et cela elle est seule à pouvoir le déterminer. Donc je n'avais pas besoin d'être convaincu et nous approuvons et nous encourageons le Gouvernement britannique à poursuivre dans la voie de l'entrée dans la monnaie unique.

Sur la défense, on parle beaucoup de nos divergences, elles sont beaucoup plus apparentes que réelles. En réalité nous avons un objectif commun, qui est une défense européenne et notre problème n'est pas de fond, c'est un problème de forme. Comment exprimer cette défense commune de façon à ce qu'elle soit psychologiquement acceptable par tout le monde ? C'est beaucoup plus un problème de forme que de fond. Naturellement, je sais bien que les problèmes de forme sont importants mais nous sommes déterminés à approfondir ces problèmes pour trouver une solution commune. Cette solution commune, c'est celle que nous avons ensemble mis en avant à Saint-Malo et poursuivi ensuite.

QUESTION - J'ai deux questions, Monsieur le Président, les dirigeants du G 8 ont demandé à l'Iran de signer le Protocole additionnel tandis que l'Iran a à signer le Traité de non-prolifération des armes nucléaires. Selon ce Traité les membres ayant la technologie nucléaire doivent aider les autres pour avoir ces technologies de façon pacifique. Vous ne pensez pas que si l'Iran doit poursuivre ces obligations, les autres membres doivent respecter leurs responsabilités ?

LE PRÉSIDENT - Nous avons dit clairement au G 8 ce que nous pensions de la prolifération des armes nucléaires et les conséquences que cela comportait pour les pays qui ont la volonté de se doter d'une arme nucléaire et nous renouvelons notre demande très ferme, amicale et ferme à l'Iran de bien vouloir se plier à la règle internationale.

QUESTION - Monsieur le Premier Ministre, ne pensez-vous pas que même si l'Iran signe le protocole additionnel les Américains poursuivront malgré tout leur politique actuelle par rapport à l'Iran et qu'ils continueront de chercher de nouvelles excuses pour maintenir la pression sur l'Iran ?

M. BLAIR - Comme le G 8 l'a affirmé dans ses conclusions, il y a une vraie inquiétude quant à d'éventuels programmes d'armement nucléaire iraniens. Ce n'est pas uniquement une inquiétude américaine, c'est une inquiétude que tous les membres du G 8 partagent c'est pourquoi il me semble que l'Iran doit coopérer autant que possible avec les inspecteurs internationaux. C'est ce que nous voulons voir. Ce n'est pas une excuse c'est le reflet d'une vraie inquiétude qui peut être traitée très simplement par une coopération pleine et entière avec cette organisation internationale.

LE PRÉSIDENT - Merci beaucoup.





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