Point de presse conjoint du Président de la République et du Président du Conseil de la République italienne à l'occasion de la tournée des pays membres de l'Union européenne.

Point de presse conjoint de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, et de M. Giuliano AMATO, Président du Conseil de la République italienne à l'occasion de la tournée des pays membres de l'Union européenne.

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Rome, Italie, le vendredi 1 décembre 2000

M. AMATO - Je remercie le Président CHIRAC d'être venu nous voir à la veille de la conférence de Nice. Il est surtout venu pour que l'on puisse ensemble apprécier les perspectives de la conférence.

J'ai compris, d'après les paroles du Président CHIRAC, que l'agenda à Nice, l'ordre du jour, va être très chargé. On aura d'abord la Conférence avec les pays nouveaux candidats ; ensuite la Conférence intergouvernementale, pour ensuite aborder tous les sujets liés au Conseil : la sécurité maritime, la sécurité alimentaire et des sujets divers. On a un long travail qui nous attend. Et donc, je le dis à votre intention, pour que vous puissiez mettre assez de chaussettes et de chemises dans votre valise.

Je vais maintenant aborder les sujets qui vous intéressent le plus, à savoir les sujets liés à la Conférence intergouvernementale. Bien sûr, nous avons fait tout un panorama et nous sommes conscients que quelques différences restent concernant certains points. Nous pensons, nous sommes convaincus qu'il sera possible de les surmonter au cours de la Conférence.

Je suis reconnaissant à la présidence d'avoir attaché une grande attention à certains sujets qui tiennent à coeur à l'Italie, et notamment l'après-Nice. Il faut que je vous dise quelque chose qui est à la base de tout cela, que l'après-Nice est fonction du succès de Nice. Et nous, à Nice, nous pensons que c'est notamment le bon moment de clore avec tous les problèmes du passé. Nous voulons arracher l'Europe à la paralysie et c'est à Nice que nous souhaitons fixer de nouveaux objectifs.

Nice ne laissera pas de problèmes en suspens pour l'avenir, mais ouvre l'avenir. Les problèmes qui sont encore à résoudre, vous les connaissez bien. Je ne vais pas faire de liste, et je suis sûr que l'on trouvera un moyen de les résoudre.

Aujourd'hui, nous célébrons la Journée mondiale du Sida. Et M. le Président CHIRAC m'a, à juste titre, rappelé qu'à l'occasion du G8 d'Okinawa, les pays membres G8 avaient notamment accepté une proposition qu'il avait émise, par rapport à la tenue d'une Conférence près Okinawa, qui se fixerait comme objectif prioritaire la lutte contre le Sida, surtout en faisant en sorte que les pays les plus touchés par cette maladie puissent avoir accès aux médicaments et à des prix correspondant à leur niveau économique. Et pour ma part, j'ai confirmé au Président CHIRAC tout mon soutien à sa proposition qui est devenue une décision du G8. Donc, je lui renouvelle tout mon soutien, en ce qui concerne le travail qu'il fera lors des sommets Europe-États-Unis et Europe-Canada, lorsqu'il s'agira de mettre en oeuvre ce projet de Conférence.

LE PRÉSIDENT - Merci, cher Ami. Je voudrais d'abord exprimer toute ma reconnaissance au Premier ministre pour l'accueil qu'il nous a réservé, ainsi qu'au ministre des Affaires étrangères. C'est toujours un moment privilégié, le passage à Rome. Et nous étions heureux d'être ici et malheureux d'être obligés de repartir si vite.

L'Italie et la France sont très proches géographiquement, historiquement, culturellement et très proches, aussi, dans leur vision de l'Europe de demain et dans leur ambition pour, à la fois, l'approfondissement et l'élargissement de l'Europe de demain. Et donc je souscris tout à fait à tout ce que vient de dire le Président AMATO. Qu'il s'agisse de la CIG et des grands sujets qui intéressent directement la vie des peuples européens. Parmi ces grands sujets qui vont de la sécurité alimentaire à la sécurité maritime en passant par l'environnement, l'innovation, les nouvelles technologies, l'agenda social, l'Italie et la France ont combattu ensemble pour arriver aux solutions à Nice.

Comme l'a dit le Président, aujourd'hui 1er décembre, Journée mondiale du Sida, nous ne pouvions pas ignorer aussi cette dimension de l'action de l'Union européenne. Nous sommes très inquiets. En Europe, le Sida ne recule plus et on continue à mourir du Sida. Et on observe un inquiétant relâchement aussi bien dans le domaine de la prévention que dans le domaine de la vigilance. Nous devons réagir. Dans le monde, et tout particulièrement en Afrique qui est la région la plus touchée, nous sommes très exactement, moralement et politiquement, dans la situation de non-assistance à personnes en danger. Nous devons faire un effort collectif tant dans le domaine de la prévention que de la recherche ou du traitement dans ces régions. Ce qui suppose un effort important pour mettre à leur disposition des médicaments à des prix convenables, comme l'a précisé le Président AMATO. Alors, la France a fait adopter par l'ensemble des Quinze sa proposition adoptée déjà à Okinawa, sur ma proposition, concernant la tenue d'une réunion internationale regroupant, sous l'autorité de l'ONU, les pays, les laboratoires pharmaceutiques et la société civile. Et fort de cet accord, j'en ferai l'un des points importants de nos discussions dans le cadre du prochain sommet Europe-États-Unis, à Washington, dans la deuxième quinzaine de décembre, puisque, chacun comprend que pour être efficace, il faut un accord, aussi, avec les États-Unis, et un accord mondial.

Je terminerai en remerciant encore le Président pour sa participation très importante, très importante, à la bonne évolution de la préparation de Nice. Le Président AMATO est incontestablement un sage de l'Europe contemporaine, c'est vrai, et une référence. Et il est toujours important de connaître son avis et il est souvent utile de le suivre. Alors, je le remercie.

QUESTION - Monsieur le Président, vous êtes aux trois quarts, disons, de votre marathon européen ?

LE PRÉSIDENT - Plus que ça.

QUESTION - La dernière ligne droite, disons. Est-ce que l'on peut avoir le point sur la première partie de ce marathon ?

LE PRÉSIDENT - Je voudrais être bref. Ne pas faire d'excès d'optimisme parce que ces sujets sont délicats. Et que chaque pays avance au rythme que son opinion publique peut accepter. Nous avons de grandes ambitions mais nous sommes en démocratie. Et donc il faut que ces ambitions soient soutenues par des majorités dans chaque pays. C'est tout le problème.

Le bilan après douze pays, y compris l'Italie, me conduit à un optimisme raisonnable. La plupart des grands problèmes de société que j'évoquais tout à l'heure sont ou seront réglés sans difficulté. Et, pour les peuples européens, c'est là quelque chose d'essentiel. On a souvent accusé l'Europe d'être trop technique et de ne pas s'occuper assez des problèmes des Européens. À Nice, nous allons faire un pas supplémentaire en direction de la solution des problèmes de nos concitoyens européens, et un pas important, très important.

Ensuite, il y a la nécessité d'améliorer notre mécanisme pour gérer une Europe élargie. Là, on touche à des problèmes délicats, des problèmes de souveraineté, difficiles.

Sur les coopérations renforcées, je pense que la situation est maintenant claire. Sur la majorité qualifiée, qui est très importante, c'est un élément essentiel de l'avenir, eh bien, nous ferons des progrès même si nous n'allons pas jusque là où nous souhaiterions aller. Il y aura d'autres étapes. Et pour ce qui concerne, je dirai, le poste de commandement, c'est-à-dire la composition de la Commission et la repondération des voix, j'espère qu'à la fin de la Conférence, nous arriverons à un accord, à un accord nous permettant de répondre aux exigences nouvelles de l'Europe élargie.

QUESTION - Vous venez de dire, Monsieur le Président, qu'on abordera à Nice le sujet de la sécurité alimentaire. Eh bien ! Ces dernières semaines, la vache folle a causé quelques incompréhensions entre l'Italie et la France. Et là, c'est une question que j'adresse à tous les deux. Ces incompréhensions ont-elles été surmontées ?

M. AMATO - Moi, je ne vois pas ces incompréhensions. Il faut vous dire que quand je lis la presse, je crois voir des incompréhensions inexistantes, et ce très souvent. De toute façon, l'Italie a adopté des mesures en en informant la France et les deux pays ont adopté des mesures qui se ressemblent bien. Elles sont presque identiques. Et nous nous rendons au Conseil européen de Nice sur ces positions.

LE PRÉSIDENT - Vous savez, face au problème actuel de la vache folle, je ne crois pas qu'on puisse parler d'incompréhensions. C'est un problème majeur de santé publique. Il suppose l'application, quoi qu'il en coûte, du principe de précaution. Et c'est un problème qui touche l'ensemble de l'Europe. Et donc la solution doit être recherchée dans une harmonisation européenne de nos comportements et de nos règlements. Et c'est ce qui est en train de se faire. Cela a commencé au dernier Conseil des ministres de l'agriculture. Il y a deux jours, la Commission a fait de premières propositions très positives. Nous en reparlerons à Nice et j'espère, je pense que nous allons réussir à maîtriser cette situation très difficile avec l'objectif de la santé publique et aussi la nécessité d'aider la filière tout entière, allant des éleveurs jusqu'aux bouchers, à sortir de la crise dans laquelle cette situation les a plongés. Et nous sommes déterminés à réussir. Donc nous réussirons.

QUESTION - Monsieur le Président, vous venez de faire référence au sujet de la majorité qualifiée. Ma question est la suivante : pensez-vous qu'on sera en mesure de réunir un accord à Nice en ce qui concerne l'application de la majorité, du principe de la majorité qualifiée, aux questions portant sur la politique commerciale ? Pensez-vous que cet objectif peut être atteint à Nice ou pensez-vous qu'il puisse se faire lors des étapes qui suivront ?

LE PRÉSIDENT - Je pense que lorsque vous parlez de la politique commerciale, vous pensez surtout aux services. Il y a des sujets difficiles dans chaque pays. Les affaires sociales pour les uns, la taxation, la fiscalité pour les autres. Les services et notamment les problèmes culturels pour les troisièmes et je pourrais augmenter, naturellement, cette liste. Sur ces sujets les plus délicats, il faudra progresser par étapes. Mais, sur l'ensemble des services, je pense qu'on pourra avoir des progrès, naturellement. Mais, je le répète, il faut faire ce que l'on peut faire, qui soit par ailleurs accepté par les opinions publiques. Alors, on peut inciter les opinions publiques à comprendre, mais si on fait trop fort et trop vite, alors, on aura un rejet de l'opinion européenne. C'est une affaire délicate à gérer. La politique du "il n'y a qu'à " ne peut pas s'appliquer. Alors, c'est ce que nous disions tout à l'heure avec le Président, et nous étions sur ce point d'accord, même si nous avons des ambitions, tout particulièrement la partie italienne, à laquelle je rends hommage à cet égard.

QUESTION - C'est une question que j'adresse aussi bien au Président du Conseil AMATO qu'au Président CHIRAC. Avez-vous parlé, lors de vos entretiens d'aujourd'hui, de la question de la réouverture du tunnel du Mont-Blanc ?

LE PRÉSIDENT - Oui, nous avons évoqué, naturellement, ce problème qui est un problème plus bilatéral qu'européen, mais toutes les occasions d'échange et de contact entre nous sont saisies. Et nous ferons ce qu'il faut pour que les choses soient le mieux possible et dans les meilleures conditions possibles, en parfaite coopération.

J'ajoute que M. Lamberto DINI et M. Hubert VÉDRINE en ont parlé en détail.

M. AMATO - Je vous remercie.





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